Comorbidités psychiatriques dans l’alcoolodépendance Psychiatric comorbidity of alcohol dependence

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Alcool
Dossier thématique
Comorbidités psychiatriques
dans l’alcoolodépendance
Psychiatric comorbidity of alcohol dependence
M. Cognat-Brageot*, P. Louville*, F. Limosin*
»»La dépendance à l’alcool est une pathologie fréquente
Alcohol dependence is a common disorder, associated with
psychiatric comorbidity in half of the cases.
»»Jusqu’à 40 % des patients dépendants qui consomment de
Résumé
l’alcool présentent des symptômes dépressifs, mais seuls 4 % d’entre
eux présentent les critères de dépression majeure après 1 mois
d’abstinence.
»»La dépendance à l’alcool augmente le risque de passage à l’acte
suicidaire, surtout en cas de troubles psychiatriques associés.
»»Les comorbidités psychiatriques et la dépendance à l’alcool
Summary
qui s’associe dans la moitié des cas à une autre comorbidité
psychiatrique.
Up to 40% of alcohol addict patients are depressed. After a
month of abstinence, only 4% of them remain depressed.
Alcohol dependence increases suicidal risk, particularly in
case of psychiatric comorbidity.
Psychiatric comorbidity and alcohol dependence should be
managed by a single medical team to increase coherence
(integrated programs).
doivent idéalement être pris en charge par une même équipe, de
manière à améliorer la cohérence (programmes intégrés).
Mots-clés : Alcoolodépendance – Dépression – Troubles anxieux –
Schizophrénie – Comorbidités.
L
e syndrome de dépendance à l’alcool consiste
en un mode de consommation pathologique qui
se caractérise notamment par un craving (envie
irrésistible de consommer) et une perte de contrôle.
L’alcoolodépendance a des conséquences somatiques
et sociales dont la sévérité conditionne le pronostic à
long terme. En outre, 50 à 70 % des patients alcoolodépendants présentent, sur la vie entière, au moins
1 autre trouble psychiatrique comorbide (1).
Les troubles psychiatriques associés à l’alcoolo­
dépendance peuvent être schématiquement séparés
en 2 groupes : ceux qui sont directement induits par
l’intoxication alcoolique ou par les phases de sevrage,
et ceux qui préexistent et constituent souvent des facteurs de vulnérabilité. Dans les 2 cas, leur repérage est
essentiel afin de permettre une prise en charge précoce,
adaptée et intégrée.
L’OMS a proposé des seuils de consommation “à risque”
(encadré 1, page 56) [2].
Le Courrier de la Transplantation - Vol. XIII - n° 2 - avril-mai-juin 2013
Keywords: Alcohol dependence – Depression – Anxiety disorders – Schizophrenia – Dual diagnosis.
Épidémiologie
Dans la population générale, environ 10 % des adultes
(15 % des hommes et 5 % des femmes), principalement
entre 25 et 64 ans, présentent un abus ou une dépendance à l’alcool sur la vie entière (3). Cette proportion
est restée stable depuis le début des années 1990. On
évalue à 6 % le taux de patients hospitalisés pour une
pathologie en rapport avec l’alcool, et à 18 % la proportion de sujets alcoolodépendants parmi les patients
admis en services médecine-chirurgie-obstétrique
(MCO) [4]. Cette proportion est encore plus élevée au
sein des unités d’hospitalisation psychiatriques, puisque
plus d’un quart des patients qui y sont admis ont présenté ou présenteront un abus ou une dépendance à
l’alcool (5). Ainsi, la dépendance à l’alcool augmenterait
le risque de dépression ou d’anxiété d’un facteur 1,8 à
4,7, en fonction de l’âge et du milieu socioculturel (6).
De même, des troubles anxieux sont retrouvés chez
* Service universitaire
de psychiatrie de l’adulte
et du sujet âgé, hôpital
Corentin-Celton, groupe
hospitalier Hôpitaux universitaires Paris Ouest (APHP), Issy-les-Moulineaux.
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Encadré 1. Mésusage d’alcool : définitions.
Seuils de consommation
- pas plus de 4 verres par occasion ;
- pas plus de 21 verres par semaine chez l’homme (3 verres/
jour en moyenne), et pas plus de 14 chez la femme (2 verres/
jour en moyenne).
Le terme de “verre” désigne le “verre standard” ou unité internationale d’alcool (UIA) qui est la quantité “normalisée” délivrée
pour chaque catégorie de boisson alcoolique dans les lieux de
consommation publics. Un verre correspond à 10 grammes
d’alcool pur.
L’OMS recommande également de s’abstenir au moins 1 jour
par semaine de toute consommation d’alcool.
Usage à risque : toute conduite d’alcoolisation où la consommation est supérieure aux seuils définis par l’OMS, mais qui n’a
pas encore entraîné de dommage d’ordre médical, psychique
ou social (y compris la dépendance). Cette catégorie inclut également les consommations égales voire inférieures aux seuils
de l’OMS quand elles sont associées à une situation à risque et/
ou à un risque individuel particulier.
Usage nocif : toute conduite d’alcoolisation caractérisée par
l’existence d’au moins 1 dommage d’ordre médical, psychique ou
social induit par l’alcool, quels que soient la fréquence et le niveau
de consommation, et par l’absence de dépendance à l’alcool.
Usage avec dépendance : toute conduite d’alcoolisation
caractérisée par la perte de la maîtrise de la consommation.
L’usage avec dépendance ne se définit donc ni par rapport à
un seuil ou une fréquence de consommation, ni par l’existence
de dommages induits qui, néanmoins, sont souvent associés.
environ 1 patient alcoolodépendant sur 10 sur la vie
entière. Parmi ces troubles, le trouble panique et la
phobie sociale sont ceux le plus souvent associés au
diagnostic de dépendance à l’alcool, puisqu’ils sont
retrouvés respectivement 4,2 et 2,6 fois plus fréquemment chez ces patients que dans la population générale
(3). L’état de stress post-traumatique est lui aussi associé
de façon fréquente à l’alcoolodépendance, en particulier chez l’homme. Enfin, les troubles bipolaires ont
une prévalence 4 fois plus importante chez les sujets
alcoolodépendants (7).
Personnalité prémorbide
Selon les études, il a été estimé que 11 à 78 % des
patients alcoolodépendants présentent un trouble
de la personnalité associé (8). Parmi les personnalités
pathologiques retrouvées, on constate une forte représentation de personnalités anxieuses (personnalité
évitante, dépendante ou obsessionnelle) et de person-
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nalités du groupe B (personnalité borderline, antisociale,
histrionique ou narcissique). Ainsi, 15 % des patients
alcoolodépendants ont une personnalité antisociale ou
psychopathique, alors que cette personnalité est rare
dans la population générale (2 à 3 %) [8]. Les traits de
personnalité antisociale sont plus fréquemment associés à une alcoolodépendance primaire, commençant
précocement (avant 25 ans).
Mais plus qu’une catégorie diagnostique spécifique
de personnalité pathologique, ce sont plutôt certains
traits de personnalité qui constituent des facteurs de
vulnérabilité à l’addiction. Il s’agit principalement des
dimensions de dépendance, de sentiment de vide et
de recherche de sensations.
La dépendance est à envisager ici comme un mode
global de fonctionnement. Il existe certes une dépendance à certaines substances ou comportements, mais
également une dépendance relationnelle, interpersonnelle, se traduisant par une difficulté à faire face à la solitude. Lorsque le cadre de vie rassurant (environnement
professionnel et personnel) de ces individus disparaît ou
se fragilise, leurs faibles capacités d’autonomie rendent
alors moins opérantes leurs stratégies adaptatives, une
consommation d’alcool pouvant s’y substituer comme
une réponse compensatoire.
Le sentiment de vide et d’abandon que les patients
dépendants peuvent avoir se retrouve aussi chez les
patients borderline. Chez ces derniers, la dépendance
à l’alcool s’instaure par des consommations régulières
dont l’objectif est généralement double : la lutte contre
l’anxiété et la recherche de sensations (3).
Celle-ci est un des traits principaux chez les patients
ayant un trouble de personnalité antisociale. Outre la
satisfaction de ce besoin, l’alcoolisation est responsable
d’une désinhibition qui renforce les aspects de dépassement des limites et d’intolérance à la frustration qui
caractérisent ces patients.
Bien que ces traits précèdent la dépendance et soient
donc largement fixés, une prise en charge adaptée peut
permettre aux patients, par le biais de l’apprentissage de
la gestion des émotions et des impulsions, de modifier
leur consommation.
Comorbidités psychiatriques et alcool
Bien que la pertinence de la distinction classique
entre alcoolisme primaire et alcoolisme secondaire ait
été mise en cause, il s’agit néanmoins d’une question
pratique que le psychiatre est souvent amené à se
poser lorsqu’il est confronté à un patient dépendant à
l’alcool et présentant d’autres troubles psychiatriques.
En effet, la consommation d’alcool peut s’inscrire
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Comorbidités psychiatriques dans l’alcoolodépendance
comme une réponse à des symptômes préexistants
(alcoolisme “secondaire”), qu’elle aggrave et dont une
prise en charge adaptée constituera une étape-clé
dans la perspective de l’abstinence. Chez d’autres
patients, les troubles psychiatriques prennent leur
source dans la consommation chronique d’alcool
(alcoolisme “primaire”), le sevrage permettant alors
leur amélioration, voire leur disparition, sans prise
en charge spécifique.
Dans un grand nombre de cas, toutefois, les
2 dimensions sont intriquées et il est alors très
difficile de faire la part entre alcoolisme primaire
et alcoolisme secondaire. L’obtention d’une abstinence pendant au moins 1 mois doit alors constituer
l’objectif premier, son maintien passant ensuite par
le traitement des autres pathologies psychiatriques
si elles perdurent.
Schizophrénie
On estime que 20 à 50 % des patients souffrant de
schizophrénie présentent un abus ou une dépendance
à l’alcool. Or la consommation d’alcool est susceptible
d’induire plusieurs complications chez le patient schizophrène (9) :
✓✓ elle est susceptible d’accentuer les phénomènes hallucinatoires et d’augmenter le risque d’inobservance du
traitement, elle favorise l’échappement thérapeutique ;
✓✓ elle augmente l’adhésion au délire ;
✓✓ elle peut aggraver une composante dépressive ou
anxieuse et augmente le risque de tentative de suicide, avec pour conséquence des hospitalisations plus
fréquentes ;
✓✓ elle majorerait, de même que les autres comorbidités
addictives, les comportements hétéro-agressifs.
Certains auteurs ont suggéré que l’utilisation de l’alcool
par les patients souffrant de schizophrénie pourrait
être une tentative d’automédication : la consommation
d’alcool permettrait, en diminuant certains symptômes
négatifs, une meilleure socialisation, et réduirait certains effets indésirables des antipsychotiques (effets
moteurs, déficit émotionnel). Cette hypothèse reste
néanmoins contestée.
Trouble bipolaire
La dépendance à l’alcool est également fréquente
chez les patients bipolaires. Dans 1 cas sur 4, le
trouble bipolaire est d’ailleurs diagnostiqué après
l’apparition de la dépendance, l’alcool ayant un
effet aggravant sur l’évolution du trouble, en favorisant notamment la survenue d’états mixtes (10).
La consommation d’alcool est plus importante au
cours des phases maniaques, hypomaniaques et lors
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des épisodes mixtes. À l’inverse, seuls 20 à 30 % des
patients bipolaires en phase dépressive augmentent
leur consommation d’alcool.
Dépression
On évalue à 80 % la proportion de patients dépendants
à l’alcool non abstinents présentant des symptômes
dépressifs, parmi lesquels 30 % répondent aux critères
d’état dépressif majeur caractérisé (10).
De nombreux auteurs ont tenté de préciser les relations
qui unissent ces 2 pathologies :
✓✓ L’alcool est un facteur dépressogène avéré. L’alcool
module les concentrations cérébrales de plusieurs neuromédiateurs, dont la sérotonine et la noradrénaline
(régulation négative) [11]. De plus, la dépendance à
l’alcool est émaillée de complications sociales, professionnelles et familiales (isolement, perte d’emploi, perte
de logement, etc.) qui peuvent aggraver une dépression
ou en favoriser l’apparition.
✓✓ La dépendance à l’alcool est secondaire à une
dépression préexistante. Les états dépressifs majeurs
précédant la dépendance à l’alcool sont assez rares chez
l’homme (1 cas sur 10 environ), mais sont en revanche
plus fréquents chez les femmes (12).
Dans une large étude réalisée sur plus de 2 700 patients
dépendants à l’alcool pris en charge pour un sevrage,
40 % d’entre eux présentaient des symptômes
dépressifs à l’admission alors que seuls 4 % restaient
déprimés après 1 mois d’abstinence, en l’absence
de tout traitement antidépresseur (10). Un sevrage
préalable est donc souhaitable avant d’envisager
un traitement spécifique des troubles dépressifs
chez le patient dépendant à l’alcool, la majorité des
dépressions régressant à l’arrêt de l’intoxication. Il
faut toutefois garder à l’esprit que cet arrêt peut luimême favoriser la survenue d’un épisode dépressif,
qui apparaît généralement durant le mois qui suit
l’interruption de la consommation.
Anxiété
L’anxiété est une comorbidité fréquente chez les
patients dépendants à l’alcool, qu’il s’agisse d’attaques
de panique, d’une phobie sociale ou d’une anxiété
généralisée (13).
Dans une large étude en population générale ayant
porté sur plus de 43 000 personnes, le diagnostic actuel
d’alcoolodépendance augmentait d’un facteur 3,5 le
risque de présenter un trouble panique, d’un facteur 3
le risque d’anxiété généralisée, et de 2,3 celui de phobie
spécifique ou de phobie sociale (14). R.C. Kessler et al.
ont également retrouvé une association significative
avec l’état de stress post-traumatique (15).
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Plusieurs modèles théoriques ont tenté d’expliquer
l’association entre les troubles anxieux et l’usage
d’alcool (16). Le modèle du facteur commun propose
qu’un même facteur facilite l’apparition de l’un et l’autre
trouble, qui peuvent aussi être associés. Dans le modèle
de l’usage secondaire de substance, le trouble anxieux
préexistant va faciliter l’usage de l’alcool, consommé
dans un premier temps comme une automédication
pour tenter de soulager les symptômes anxieux. Le
modèle de l’automédication semble fréquemment correspondre à l’association entre l’alcoolodépendance et
la phobie sociale ou l’état de stress post-traumatique.
Dans le modèle de la psychopathologie secondaire,
l’usage initial de l’alcool entraîne des modifications
neurobio­logiques qui aboutissent à l’apparition d’un
trouble anxieux. L’association entre l’alcoolodépendance et le trouble panique semble correspondre à ce
modèle. Enfin, le modèle bidirectionnel postule que
chacun des 2 troubles joue un rôle dans l’apparition
et le maintien de l’autre.
L’anxiété est également l’un des symptômes prépondérants du syndrome de sevrage. Elle se caractérise
dans ce cas par son caractère matinal et la présence
des signes physiques classiques qui lui sont associés
(sueurs, tremblements, troubles digestifs). Elle disparaît dès l’ingestion d’alcool ou grâce au traitement du
syndrome de sevrage (benzodiazépines).
Conséquences des comorbidités
La cooccurrence d’un trouble psychiatrique et d’une
dépendance à l’alcool est considérée comme un facteur
d’évolution péjorative pour les 2 troubles. Le mésusage
de substance et le trouble psychiatrique peuvent interagir de plusieurs façons, la consommation d’alcool
étant susceptible :
✓✓ d’accentuer certains troubles psychiatriques ;
✓✓ de simuler ou, à l’inverse, de masquer des symptômes psychiatriques ;
✓✓ d’entraîner une atténuation des symptômes psychiatriques, qui seront dans ce cas sous-estimés ;
✓✓ de diminuer l’efficacité des traitements médicamenteux, voire d’amener le patient à utiliser la substance
pour remplacer son traitement.
Les études ont montré que, comparativement à un
trouble mental isolé, dans les troubles concomitants :
✓✓ les symptômes psychiatriques sont plus sévères ;
✓✓ la compliance au traitement est moindre ;
✓✓ la chronicisation des troubles est plus fréquente, et
le risque de rechutes, plus élevé ;
✓✓ le risque de conduites suicidaires ou autoagressives
est majoré (encadré 2).
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Encadré 2. Alcool et risque suicidaire.
Il a été montré que 17 à 32 % des tentatives de suicide prises en
charge aux urgences sont associées à une prise d’alcool : jusqu’à
32 % des suicidants présentent un abus ou une dépendance à
l’alcool (17). Quelle que soit la pathologie psychiatrique sousjacente (18), l’intoxication alcoolique favorise le passage à l’acte
autoagressif par un effet de levée d’inhibition qui augmente par
ailleurs la létalité du geste. La réalisation d’une alcoolémie doit
donc être systématique chez tout patient pris en charge pour
une tentative de suicide.
Ces patients, qui bénéficient d’un moindre soutien social,
recourent de façon plus fréquente et plus coûteuse aux
soins médicaux et aux ressources de santé mentale (utilisation des services d’urgence, hospitalisations). Les
troubles concomitants sont aussi associés à des risques
accrus de commettre des crimes ou des délits ou d’avoir
des comportements violents (19). On a pu montrer que
la qualité de vie des patients alcoolodépendants était
plus altérée quand ils présentaient un trouble psychiatrique comorbide (20). La comorbidité entre un trouble
mental et l’alcoolodépendance entraîne une inflation
des problèmes de santé et des difficultés sociales qui
constitue un véritable enjeu de santé publique.
Modalités de traitement des comorbidités
Face aux troubles concomitants, plusieurs stratégies
thérapeutiques ont été proposées. Classiquement, les
patients peuvent être pris en charge de façon séquentielle, l’un des 2 troubles étant traité en premier par une
équipe, puis le second trouble par une autre équipe, le
plus souvent sans contact entre les intervenants successifs. Plus récemment, on a proposé un abord parallèle des
2 troubles, 2 équipes, là encore distinctes, abordant en
même temps le trouble psychiatrique et la dépendance.
Le modèle le plus récent vise une approche intégrée des
stratégies thérapeutiques, le traitement étant dispensé
par une seule équipe dans le cadre d’un programme
unique, avec comme objectif que les troubles psychiatriques et la dépendance soient traités simultanément et
de manière cohérente, y compris dans la communication
avec les patients. Cette dernière approche a fait l’objet
de nombreuses études contrôlées, qui ont permis de
démontrer sa supériorité sur les modèles séquentiel ou
parallèle. Notamment, on a mis en évidence, chez les
patients comorbides traités selon le modèle intégré, une
meilleure compliance au traitement et une meilleure
récupération du fonctionnement social (19). Une revue
de 45 études contrôlées évaluant les différents types
d’interventions utilisées pour les traitements intégrés
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Comorbidités psychiatriques dans l’alcoolodépendance
des troubles concomitants graves et persistants a permis
d’identifier plusieurs techniques intéressantes (21) :
✓✓ les thérapies de groupe ;
✓✓ la réduction des dommages ;
✓✓ les programmes intensifs de longue durée en milieu
résidentiel protégé lors de l’échec de l’approche ambulatoire.
Conclusion
La prise en charge de la cooccurrence d’un trouble
psychiatrique et d’une dépendance nécessite le repérage le plus précoce possible de l’association de ces
2 troubles. Les psychiatres doivent ainsi rechercher
systématiquement une addiction susceptible de compliquer l’évolution des troubles psychiatriques de leurs
patients, et, de même, les addictologues doivent évaluer
l’ensemble de la psychopathologie du patient afin de
repérer d’éventuels troubles relevant d’une prise en
charge adaptée. La prévalence importante des troubles
concomitants souligne la nécessité d’une collaboration
clinique et thérapeutique entre les 2 disciplines, de
façon à ce que soient proposées à ces patients fragiles,
peu compliants et résistants aux stratégies thérapeutiques centrées sur un seul trouble, des interventions
adaptées, cohérentes et efficaces.
■
Les auteurs déclarent ne
pas avoir de liens d’intérêts.
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