Espaces de Hilbert
1 Espaces de Hilbert
1.1 Formes bilinéaires continues
Définition 1.1. (Forme bilinéaire)
Soient Vet Wdeux R-ev normés. Une forme bilinéaire sur V×West une application a:V×WR
telle que
Pour tout vV, l’application a(v, ·) : WRest linéaire;
Pour tout wW, l’application a(·, w) : VRest linéaire.
Définition 1.2. (Forme bilinéaire continue)
Soient Vet Wdeux R-ev. Une forme bilinéaire a:V×WRest continue sur V×Ws’il existe une
constante c < telle que
(v, w)V×W, |a(v, w)| ckvkVkwkW.
On note kak(V×W)= sup(v,w)V×W, v6=0, w6=0
|a(v,w)|
kvkVkwkW.
1.2 Produit scalaire
Soit Vun R-ev.
Définition 1.3. (Produit scalaire)
Un produit scalaire sur Vest une forme bilinéaire sur V, notée (·,·)V:V×VR, et vérifiant les trois
propriétés suivantes:
(i) symétrie: v, w V, (v, w)V= (w, v)V,
(ii) positivité: vV, (v, v)V0,
(iii) (v, v)V= 0 v= 0.
Proposition 1.1. (Cauchy-Schwartz) Soit (·,·)Vun produit scalaire sur V. L’application vV7→ kvkV=
p(v, v)Vdéfinit une norme sur Vappelée norme induite. Elle vérifie l’inégalité de Cauchy-Schwartz:
v, w V, |(v, w)V| ≤ kvkVkwkV.
Remarque: Cette inégalité montre que la forme bilinéaire (v, w)V×V7→ (v, w)Vest continue,
autrement dit que le produit scalaire est une forme bilinéaire continue.
Preuve:
Montrons d’abord l’inégalité de Cauchy-Schwartz. Soient v, w V. Pour tout λR,(v+λw, v +
λw)V0. Or si on développe ce produit scalaire on obtient
(v+λw, v +λw)V=kvk2+ 2λ(v, w)V+λ2kwk2.
Il s’agit d’un polynôme du second degré en λ. Comme il est toujours positif ou nul, son discriminant
est forcément négatif ou nul ce qui implique:
4|(v, w)V|24kvk2kwk2,
ce qui entraine Cauchy-Schwartz en prenant la racine carrée de cette expression.
Montrer que c’est une norme: la “linéarité” et la positivité sont évidentes; L’inégalité triangulaire
découle de Cauchy-Schwartz. En effet, soient v, w V.
kv+wk2=kvk2+ 2(v, w)V+kwk2,
≤ kvk2+ 2kvkkwk+kwk2,
= (kvk+kwk)2.
1
1.3 Espaces de Hilbert
Définition 1.4. (Espace de Hilbert)
Un espace de Hilbert est un espace vectoriel muni d’un produit scalaire (donc normé), et complet pour la
norme induite.
Un espace de Hilbert est donc un cas particulier d’un espace de Banach (la norme est définie à partir
d’un produit scalaire).
Exemple: Soit l2={{un}nNR;P+
n=1 u2
n<∞}.
On considère l’application qui à u, v l2associe (u, v) = PnNunvn. Ce nombre est bien défini (en effet,
|unvn| ≤ u2
n/2 + v2
n/2donc la série est absolument convergente donc convergente).
L’application (·,·)est donc bien définie, symétrique, définie et positive: c’est un produit scalaire sur l2.
La norme induite est kukl2=pPnNu2
n.
l2muni de cette norme est un espace complet, donc un espace de Hilbert.
2 Théorème de projection orthogonale
2.1 Le théorème
Faire un dessin pour comprendre ce que c’est en dimension finie. Insister sur le fait qu’on ne fait que
généraliser en dimension infinie une notion triviale en dimension finie.
Théorème 2.1. (Projection orthogonale)
Soit Hun espace de Hilbert, et Kun sous-espace vectoriel fermé non vide de H. Pour tout uH, il
existe un unique uK, appelé projection orthogonale de usur K, et noté PKu, tel que
kPKuukH= inf
wKkwukH.(1)
De plus, PKuest caractérisé par
PKuKet wK, (PKuu, w) = 0.(2)
Remarque: Si uK,PKu=u. Faire le dessin.
Preuve:
Formule de la médiane: (vraie ici car la norme dérive d’un produit scalaire)
1
2ks+tk2
H+1
2kstk2
H=ksk2
H+ktk2
H.
Existence: Soit wnKune suite minimisante: I= infwKkwukH= limnkwnukH.
On applique l’égalité de la médiane à s=wnuet t=wn+pu:
1
2kwn+p+wn2uk2
H+1
2kwn+pwnk2
H=kwn+puk2
H+kwnuk2
H,
donc 1
2kwn+pwnk2
H=kwn+puk2
H+kwnuk2
H1
2kwn+p+wn2uk2
H,
d’où
kwn+pwnk2
H= 2 kwn+puk2
H+kwnuk2
H2
1
2(wn+p+wn)u
2
H!
2kwn+puk2
H+kwnuk2
H2( inf
wKkwukH)2.
Soit ε > 0. Il existe Ntel que
n > N, kwnuk2
Hε+ ( inf
wKkwukH)2.
2
Donc, n > N, p > 0,
kwn+pwnk2
Hε,
et la suite (wn)nNest de Cauchy.
L’espace Hétant complet, limn→∞ wn=uet comme Kest fermé, uK. De plus, kuukH=
infwKkwukHpar continui de la norme sur H. Ceci montre l’existence d’une solution pour (1).
Unicité: Soit w1et w2deux solutions. On prend s=w1uet t=w2u. On a
1
2kw1w2k2
H=I2+I21
2kw1+w22uk2
H,
=I2+I22
w1+w2
2u
2
H
,
I2+I22I2= 0.
Caractérisation: On veut montrer l’équivalence entre (1) et (2). Soit wK.PKu+tw Kpour
tout tR, donc φ(t) = kPKu+tw uk2
Hest minimale en t= 0. On développe φ:
φ(t) = kPKu+tw uk2
H=kPKuuk2
H+ 2t(PKuu, w)H+t2kwk2
H.
C’est un trinôme, donc la minimalité en 0implique que φ(0) = 0, soit (2).
Réciproquement,
kuwk2
H=kuPKu+PKuwk2
H
=kuPKuk2
H+kPKuwk2
H+ 2(uPKu, PKuw)
=kuPKuk2
H+kPKuwk2
H
≥ kuPKuk2
H.
2.2 Conséquence
Théorème 2.2. PKest une application linéaire de Hdans Ket kPKkL(H,K)= 1 (si K6={0}).
Preuve:
La linéarité vient de la caractérisation (2). En effet; PKu+PKvest dans Ket vérifie, pour tout wK,
(PKuu, w) = 0 et (PKvv, w) = 0.
Donc (PKu+PKv(u+v), w) = 0 donc PK(u+v) = PKu+PKv.
Soit uH. Comme PKuK, on a
kuk2
H=k(uPKu) + PKuk2
H=kuPKuk2
H+kPKuk2
H≥ kPKuk2
H.
Donc PKest continue, et
kPKkL(H,K)= sup
uH, u6=0
kPKukH
kukH
1.
Si K6={0}, soit wK\ {0}. On a PKw=w, donc kwkH=kPKwkH. Donc
kPKkL(H,K)= sup
uH, u6=0
kPKukH
kukH
kPKwkH
kwkH
= 1.
3
3 Théorème de Riesz
A tout uH, on peut associer l’application φ:wH7→ (u, w)R, qui est une application linéaire
continue de Hdans R, et donc un élément de H. Est-ce qu’on atteint ainsi tous les éléments de H? Le
théorème de Riesz dit que oui.
Théorème 3.1. (Riesz)
Soit Hun espace de Hilbert. Etant donné φH=L(H, R), il existe uHunique tel que
wH, φ(w) = (u, w)H.
De plus, on a kukH=kφkH. En d’autres termes, l’application de Hdans Hqui à φassocie upermet
d’identifier l’espace de Hilbert Havec son dual.
Rappel: kφkH= supwH, w6=0
|φ(w)|
kwkH.
Preuve:
Existence: Soit φHet posons K=Ker(φ) = {wH, φ(w) = 0}.Kest par construction un
sous-espace vectoriel fermé de H. Si K=H, on en déduit que φ= 0 si bien que φ= 0 peut être
trivialement représentée par u= 0.
Si K6=H, on peut trouver v0Havec v0/K, donc φ(v0)6= 0. Posons
v1=PKv0et v=v1v0
kv1v0kH
.
Faire un dessin de ce qu’est v. En particulier, on a kvkH= 1 et (v, z)H= 0 pour tout zK.
Posons
u=φ(v)v.
Montrons que uest un représentant de φ. Pour tout wH, on peut écrire w=λv +zavec
λ=φ(w)(v), ce qui définit z. On calcule φ(z) = φ(w)λφ(v) = 0, donc zKer(φ) = K. On
obtient donc
(u, w)H=λ(u, v)H+ (u, z)H=φ(w)
φ(v)φ(v)(v, v)H+φ(v)(v, z)H=φ(w).
Donc uest un représentant de φ.
Unicité: L’unicité du représentant est immédiate: si u1et u2Hsont deux représentants de φ, on a
(u1u2, w)H= 0 pour tout wHsi bien que u=u2.
Egalité des normes: Par construction de u, on a φ(w) = (u, w)H. On a
kφkH= sup
wH, w6=0
|φ(w)|
kwk= sup
wH, w6=0
|(u, w)H|
kwkH
.
Par Cauchy-Schwartz, |(u, w)H| ≤ kukHkwkH, donc kφkH≤ kuk.
Par ailleurs, en prenant w=u,
kφkH= sup
wH, w6=0
|(u, w)H|
kuk|(u, u)H|
kuk=kuk.
D’où l’égalité.
4 Bases hilbertiennes
Définition 4.1. (Ensemble dense)
Un sous-ensemble Ade Vest dit dense dans Vsi tout élément vVest la limite d’une suite (an)de
points de A.
4
Définition 4.2. (Bases hilbertiennes)
Soit Hun Hilbert. On appelle base hilbertienne de Hune suite (en)d’éléments de Htels que
(i) Pour tout n,kenk= 1 et (en, em) = 0 si n6=m;
(ii) L’espace vectoriel engendré par la famille (en)est dense dans H.
Remarque: En dimension finie, on généralise la notion de base orthonormée. En dimension infinie,
un espace de Hilbert peut ne pas avoir de base hilbertienne. Cependant, tous les espaces de Hilbert qu’on
rencontrera dans ce cours auront une base hilbertienne.
Proposition 4.1. Soit Hun espace de Hilbert admettant une base hilbertienne (en)et soit uH. On pose
un= (u, en). Alors les séries Pnunenet Pnu2
nsont convergentes dans Het Rrespectivement, et
u=X
n
unen,kuk2
H=X
n
u2
n.
Preuve: Soit Hnengendré par (e0,··· , en)et Pnla projection orthogonale de Hsur Hn. Soit Pnu=
Pn
m=0 umem. On voit que PnuHnet
0kn, (Pnuu, ek) = 0,
donc Pnun’est autre que la projection de usur Hn. Donc
Pnu=Pnu=
n
X
m=0
umem.
On a kPnuk2=Pn
m=0 u2
m. On sait aussi que kPnuk ≤ kuk, donc Pn
m=0 u2
mest convergente. On a kPn+pu
Pnuk2
H=Pn+p
m=n+1 u2
m. Comme la série Pu2
mconverge, la suite Pnuest de Cauchy, donc converge vers
uH:u=Pumem. Comme Pnuconverge vers uH, on a (Pnuu, em)n0. Or (Pnu, em) = um
donc (u, em) = um= (u, em)donc (uu, em) = 0. La famille engendrée par la base est dense: u=u. Par
définition, uest la limite de Pnudonc u= limnPnu. On avait kPnuk2=Pn
m=0 u2
m, ce qui donne à la limite
kuk2=Pu2
m.
5 Espace L2(Ω)
Théorème 5.1. Soit un ouvert de Rd. L’application
fL2(Ω), g L2(Ω) 7→ (f, g)L2=Z
f(x)g(x)dx
est un produit scalaire. Muni de ce produit scalaire, L2(Ω) est un espace de Hilbert. La norme induite est
kfkL2(Ω) =p(f, f )L2=sZ
|f(x)|2dx.
Remarque: La fonction x7→ f(x)g(x)est intégrable. En effet,
|f(x)g(x)| ≤ 1
2(|f(x)|2+|g(x)|2).
Donc le nombre (f, g)L2est bien défini. L’application f, g 7→ (f, g)L2est bien symétrique, positive, définie:
Z
|f(x)|2dx = 0 f= 0 pp.
C’est donc un produit scalaire. On admet que L2(Ω) est complet pour la norme induite.
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