Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. I - n° 3 - juillet-août-septembre 2012
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dossier thématique
ALK
extracellulaire sont observées dans plusieurs types
de cancer et confèrent un pouvoir transformant aux
récepteurs variants. Dans le cas du récepteur ALK, la
récurrence de ce type de délétion du domaine extra-
cellulaire semble néanmoins très faible. De façon plus
significative, l’étude de Schulte et al. montre que le
profil transcriptomique des tumeurs présentant une
forte expression du récepteur ALK ressemble à celui
des tumeurs avec amplification ou mutation du gène
ALK et que les patients correspondants présentent
un pronostic défavorable (10). La méta-analyse de De
Brouwer et al. a également mis en évidence un mauvais
pronostic des patients dont les tumeurs présentent un
niveau élevé d’expression du transcrit ALK (6).
Inhibition du récepteur ALK
Données précliniques
Plusieurs études ont démontré que l’inhibition du
récepteur ALK par ARN interférence ou molécules
pharmacologiques induit une forte diminution de la
prolifération cellulaire dans des lignées cellulaires de
neuroblastome ou des modèles hétérologues dans
lesquels le récepteur ALK est surexprimé. Dans des
lignées de neuroblastome, une telle inhibition a été
rapportée non seulement dans les cas avec ampli-
fication ou mutation du gène ALK mais également
dans certaines lignées présentant un récepteur ALK
non altéré. Le travail de Passoni et al. suggère que le
récepteur ALK sauvage exprimé au-dessus d’un seuil
critique aboutissant à son activation oncogénique
pourrait être ciblé par des inhibiteurs spécifiques (11).
Par conséquent, le récepteur ALK constitue une cible
thérapeutique dans le neuroblastome, dans un pour-
centage de cas probablement supérieur à celui des
seuls cas avec mutations activatrices et/ou amplifica-
tion. L’identification de biomarqueurs spécifiques et
fiables permettant de repérer l’ensemble des patients
qui pourraient bénéficier d’une thérapie ciblée anti-
ALK reste néanmoins un challenge.
Plusieurs inhibiteurs pharmacologiques du récepteur
ALK ont montré une activité dans des modèles précli-
niques de neuroblastome. Nous citerons entre autres le
TAE684, spécifique du récepteur ALK, le GSK1838705A,
ciblant les récepteurs ALK et IGF-1R, et le crizotinib,
ciblant les oncogènes ALK et c-Met (12). Néanmoins,
il est apparu rapidement que la sensibilité à ces inhi-
biteurs était variable selon la mutation modifiant le
récepteur. En particulier, la forme ALK mutée F1174L
est moins sensible au crizotinib que la forme mutée
R1275Q (13). Ces données suggèrent donc que le
développement de plusieurs inhibiteurs anti-ALK sera
nécessaire pour traiter de façon efficace les patients
atteints de neuroblastome avec mutations du gène
ALK. Cela est d’autant plus vrai que des résistances au
crizotinib ont d’ores et déjà été rapportées chez des
adultes présentant des cancers avec des protéines de
fusion ALK et traités avec cette molécule. Ainsi, 1 cas
de tumeur myofibroblastique inflammatoire présentant
une mutation F1174L du gène ALK après traitement
avec l’inhibiteur anti-ALK a récemment été décrit (14).
L’utilisation d’anticorps dirigés contre le récepteur ALK
représente une approche alternative et potentiellement
complémentaire d’inhibition de ce récepteur. En effet,
il a été récemment montré, in vitro, qu’un anticorps
monoclonal antagoniste induisait une inhibition de
la prolifération et une cytotoxicité cellulaire de lignées
de neuroblastome présentant ou non une mutation du
récepteur ALK (15, 16).
Efficacité du crizotinib chez des patients
atteints de neuroblastome
De façon remarquable, un essai clinique de phase I a
commencé aux États-Unis avec le crizotinib en 2009,
soit 18 mois après la publication des travaux identifiant
le récepteur ALK comme une cible thérapeutique dans
le neuroblastome, chez des enfants atteints de tumeurs
solides ou de lymphomes anaplasiques à grandes
cellules en rechute. Lors du dernier congrès annuel de
l’American Society of Clinical Oncology (ASCO®), qui s’est
tenu début juin 2012 à Chicago, le Dr Y.P. Mosse a rap-
porté les résultats suivants : la toxicité du crizotinib s’est
avérée minime chez les patients traités ; 2 rémissions
complètes et 1 maladie stable prolongée ont été obser-
vées à la suite d’un traitement par le crizotinib dans un
groupe de 8 patients atteints de “NB-ALK positif”, dont
2 présentant une mutation germinale ; une rémission
complète et 6 maladies stables prolongées ont été
observées dans un groupe de 19 patients atteints de “NB
non-ALK positif” (17). Ces premiers résultats indiquent
que certains patients atteints de neuroblastome en
rechute pourraient bénéficier d’un traitement par cri-
zotinib. À noter que, dans le cas des lymphomes ana-
plasiques, la réponse au crizotinib semblait meilleure,
avec 7 patients en rémission complète sur 8 traités.
Conclusion
Des progrès majeurs ont été obtenus ces dernières
années dans la compréhension de la biologie du
neuro blastome. Ainsi, la mise en évidence de l’acti-
vation du récepteur ALK chez certains patients atteints