Lire l'article complet

publicité
dossier
>>>
thématique
Stéatohépatite métabolique :
comment la diagnostiquer ?
How to diagnose the nonalcoholic fatty liver disease?
Maud Lemoine, Lawrence Serfaty*
P o i nt s f o rt s
»»L a
stéatose hépatique non alcoolique, ou stéatopathie
dysmétabolique, existe sous deux formes : la stéatose simple,
d’évolution bénigne, et la stéatohépatite (NASH), qui peut se
compliquer d’une fibrose, d’une cirrhose et d’un cancer.
»»Seule la biopsie hépatique permet de distinguer les patients ayant
des lésions de stéatohépatite de ceux ayant une stéatose simple. Il
n’existe pas encore de recommandations quant à ses indications. Elle
paraît justifiée en l’absence d’amélioration des anomalies biologiques
hépatiques malgré les mesures hygiénodiététiques et le contrôle
des perturbations métaboliques.
»»La place des tests non invasifs (élastométrie hépatique, NashTest®
et FibroTest®) pour le diagnostic et l’évaluation de la sévérité de la
stéatohépatite reste à définir.
Mots-clés : Stéatopathie dysmétabolique – Biopsie hépatique –
Marqueurs non invasifs de fibrose.
Keywords: Nonalcoholic fatty liver disease – Liver biopsy – Non invasive
markers .
L
* Service d’hépatologie,
hôpital Saint-Antoine, Paris.
© La Lettre de l’hépato-­
gastroentérologue 2009;3(XII).
228
a stéatose hépatique non alcoolique, ou non­
alcoholic fatty liver disease (NAFLD) dans le vocabulaire anglo-saxon, est devenue une cause très
fréquente de maladie chronique du foie compte tenu
de la prévalence croissante du surpoids et de l’obésité
dans le monde. Survenant le plus souvent chez des
malades souffrant de syndrome métabolique en dehors
de toute consommation excessive d’alcool, la stéatose non alcoolique, également appelée stéatopathie
dysmétabolique, est désormais considérée comme la
manifestation de ce syndrome. Elle existe principalement sous deux formes : la stéatose pure, souvent
bénigne, et la stéatohépatite, ou nonalcoholic steatohepatitis (NASH), qui est une cause de plus en plus
fréquente de fibrose, de cirrhose et d’hépatocarcinome.
En pratique clinique, il est important de diagnostiquer
les malades à risque de stéatose dysmétabolique, et
plus encore de distinguer les patients ayant une stéatose simple de ceux ayant une stéatohépatite avec
des lésions de fibrose qui conditionnent le pronostic.
Le diagnostic de stéatopathie dysmétabolique ainsi
que l’évaluation de sa sévérité sont histologiques et
reposent donc sur la biopsie du foie. Toutefois, cet examen est invasif et onéreux, ce qui justifie la recherche
de méthodes diagnostiques non invasives. Celles-ci
n’ont pas la précision d’une analyse histologique, mais
pourraient aider à mieux sélectionner les patients candidats à la biopsie.
Pourquoi faire le diagnostic
de stéatopathie métabolique ?
La NAFLD occupe une place de plus en plus importante dans l’activité des services d’hépatogastro­
entérologie, en raison de la forte augmentation du
nombre de sujets obèses au cours des vingt dernières
années et de la mise en évidence du rôle délétère du
syndrome d’insulinorésistance sur les tissus périphériques, dont le foie. Elle est devenue, dans certains
pays occidentalisés, la première cause de maladie
chronique du foie. Aux États-Unis, sa prévalence est
estimée entre 20 et 30 % dans la population générale,
avec une prévalence de la NASH évaluée à 5 % (1). Elle
est également en augmentation chez l’enfant et chez
l’adolescent. Chez les patients ayant une surcharge
pondérale modérée ou sévère, la prévalence de la
NASH histologiquement prouvée serait de 42 %. Dans
une série de 195 patients obèses, Abrams et al. ont
montré que la prévalence de la NASH était de 36,4 %
et que, parmi ces derniers patients, 12 % avaient des
lésions de fibrose sévère (2).
Fréquemment associée à une insulinorésistance indépendamment du surpoids, la stéatose hépatique non
alcoolique est considérée comme la manifestation
hépatique du syndrome métabolique. Celui-ci est
défini par l’association d’une obésité centrale, d’une
hypertension artérielle, d’une hypertriglycéridémie,
d’un HDL-cholestérol bas et d’une intolérance au
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 6 - novembre-décembre 2009
Stéatohépatite métabolique : comment la diagnostiquer ?
glucose, voire d’un diabète de type 2 (tableau). Le
syndrome métabolique touche environ 25 % de la
population aux États-Unis, avec des chiffres presque
similaires en France selon l’âge, le sexe et l’origine
géographique.
Alors que la stéatose pure est une lésion bénigne, son
association à des lésions inflammatoires, définissant la
NASH, peut évoluer vers la cirrhose dans 10 à 15 % des
cas, avec un risque de complications, et en particulier
d’hépatocarcinome. Plusieurs études épidémiologiques
ont suggéré un lien entre insulinorésistance, cirrhose
et carcinome hépatocellulaire. La prévalence du carcinome hépatocellulaire est plus élevée chez les patients
obèses et chez les diabétiques de type 2 que dans la
population générale. Plusieurs études ont également
montré que les patients ayant une NASH avaient un
taux de survie plus faible (3). Le travail de Ong et al.
basé sur les données de la NHANES III a montré une
mortalité globale et une mortalité d’origine hépatique
plus élevées chez les patients ayant une stéatopathie
dysmétabolique que chez ceux n’ayant pas de maladie
du foie (4). Aussi, l’indication de transplantation hépatique pour cirrhose d’origine dysmétabolique est en
augmentation en France et aux États-Unis (10 % des
indications de transplantation aux États-Unis).
Au regard des données épidémiologiques et des risques
évolutifs liés à cette hépatopathie, poser le diagnostic
de NAFLD, et en particulier celui de NASH, est important en termes de santé publique. Ce diagnostic permet la mise en œuvre de règles hygiénodiététiques
et thérapeutiques pour le contrôle non seulement de
la maladie hépatique mais aussi des comorbidités qui
lui sont associées.
Quand doit être évoqué
le diagnostic ?
Le diagnostic est le plus souvent posé à l’occasion de
l’exploration d’anomalies chroniques de la biologie
hépatique, ou lors de la découverte fortuite d’une hépatomégalie hyperéchogène chez des patients ayant un
surpoids ou un authentique syndrome métabolique
sans consommation excessive d’alcool et sans autres
causes de maladie chronique du foie. En dehors de la
cirrhose, aucun symptôme n’est relevé, l’hépatomégalie est inconstante et les seules anomalies cliniques
sont en général celles du syndrome métabolique (HTA,
obésité abdominale). Bien plus que le surpoids estimé
par l’indice de masse corporelle, c’est l’épaisseur de la
graisse abdominale, métaboliquement active, qui doit
sensibiliser le clinicien.
D’un point de vue biologique, le diagnostic doit être
évoqué devant des anomalies persistantes des tests
hépatiques, après avoir éliminé toutes les autres causes
d’hépatopathie chronique, en particulier si ces anomalies sont associées à des troubles du métabolisme glucidique et/ou lipidique et/ou à une insulinorésistance. Il
s’agit le plus souvent d’une augmentation modérée des
transaminases et/ou d’une élévation isolée de la γGT.
Dans une étude prospective française incluant
272 patients ayant une élévation chronique des transaminases, des lésions de stéatose non alcoolique étaient
retrouvées dans près de 60 % des cas (26,8 % avaient
des lésions de stéatose et 32,7 % une NASH) [5]. Les
transaminases dépassent exceptionnellement cinq
fois la normale. La normalité des transaminases n’élimine pas le diagnostic, en particulier pour les patients
hypertendus et insulino­résistants, chez qui une NAFLD
est retrouvée dans un tiers des cas malgré des transaminases normales (6). D’autres études ont montré
que la normalité des transaminases ne garantissait pas
l’absence de lésions hépatiques.
En l’absence de syndrome métabolique, les anomalies
lipidiques et/ou glucidiques favorisent la stéatose. Dans
une étude récente incluant 1 909 patients hyperlipémiques et 925 donneurs de sang, il a été montré, à partir
de marqueurs non invasifs, que 30 % des patients hyperlipémiques avaient une stéatose, 7 % une NASH et 3 %
des lésions de fibrose (7). Dans cette même étude, la
prévalence de ces lésions hépatiques était plus élevée
chez les patients ayant au moins deux critères du syndrome métabolique et, en particulier, chez les sujets
diabétiques et hyperlipémiques, pour qui la prévalence
de la stéatose était estimée à 66 %, celle de la NASH à
24 % et celle de la fibrose avancée à 6 %.
Tableau. Définition du syndrome métabolique selon la Fédération internationale du diabète (2005).
Il existe un syndrome métabolique en cas de présence
d’au moins trois des cinq critères suivants
Obésité abdominale évaluée par le tour de taille
Hommes
Femmes
≥ 94 cm
≥ 80 cm
Pression artérielle
ou HTA traitée
≥ 130 / ≥ 85 mmHg
Glycémie à jeun
ou diabète de type 2 traité
≥ 5,6 mmol/l
Triglycérides
≥ 1,7 mmol/l
HDL-cholestérol
Hommes
Femmes
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 6 - novembre-décembre 2009
≤ 1 mmol/l
≤ 1,3 mmol/l
229
dossier
thématique
La résistance à l’insuline est considérée comme l’élément central dans le développement de la stéatose.
Indépendamment du surpoids ou du syndrome métabolique, l’insulinorésistance peut être à l’origine d’une
stéatose. Ainsi, l’insulinorésistance représente un élément important pour le diagnostic de stéatose dysmétabolique. Elle peut se mesurer simplement par l’index de
HOMA (Homeostasis Model Assessment), obtenu à partir
d’un relevé à jeun de l’insulinémie et de la glycémie
(insulinémie x glycémie/22,5). Un index supérieur à 3
signe l’existence d’une insulinorésistance.
La découverte d’un foie hyperéchogène sur des examens d’imagerie doit également faire évoquer le
diagnostic. La stéatose pouvant être observée dans
beaucoup de maladies chroniques du foie, et en particulier celles liées à une consommation abusive d’alcool. Il est essentiel d’éliminer toutes les autres causes
d’hépatopathie chronique et d’évaluer avec précision la
consommation quotidienne d’alcool. On rappelle que,
selon l’Organisation mondiale de la santé, une consommation d’alcool est à faible risque si elle reste inférieure
à 10 g/j chez les femmes et à 20 g/j chez les hommes.
Le diagnostic de stéatose hépatique non alcoolique
sera donc évoqué en cas d’anomalies persistantes
des tests hépatiques chez des patients ayant un ou
Stéatose hépatique non alcoolique
ou stéatopathie métabolique
(nonalcoholic fatty liver disease)
Stéatose pure
Stéatohépatite non alcoolique
(nonalcoholic steatohepatitis)
NASH
La fibrose est une complication
de la stéatose hépatique non alcoolique, mais elle
n’est pas un critère diagnostique.
Stéatose
+ lésions inflammatoires
+ souffrance hépatocytaire :
– ballonisation hépatocytaire
– infiltrat inflammatoire
– nécrose hépatocytaire
Figure 1. La stéatose est le critère histologique essentiel au diagnostic. La stéatose hépatique non alcoolique, ou
NAFLD, regroupe deux entités : la stéatose pure et la stéato­hépatite, définie par l’association d’une stéatose et de
lésions inflammatoires.
230
plusieurs critères du syndrome métabolique ou chez
des patients ayant une insulinorésistance. Une fois le
diagnostic de NAFLD évoqué, il est difficile en pratique
clinique de distinguer les patients ayant une stéatose
isolée de ceux ayant des lésions de stéatofibrose.
Seule la biopsie peut formellement différencier ces
deux sous-groupes pathologiques.
De la stéatose pure
à la stéatohépatite :
un diagnostic histologique
La stéatose hépatique non alcoolique désigne un
spectre d’entités histologiques allant de la stéatose
simple à la stéatohépatite avec ou sans fibrose. Les
lésions histologiques sont très proches de celles
observées au cours de la maladie alcoolique du foie.
Cependant, au cours de la stéatose métabolique, l’activité nécrotico-inflammatoire et la fibrose sont moins
intenses, les corps de Mallory plus rares et les noyaux
glycogéniques plus fréquents. La stéatose hépatique
est habituellement macrovacuolaire, sous forme de
larges gouttelettes lipidiques de triglycérides refoulant
le noyau en périphérie (figure 1). Elle est quantifiée
en pourcentage. Une stéatose pure touchant entre
1 et 5 % des hépatocytes est en général considérée
comme physiologique. La NASH se définit par l’association d’une stéatose et de lésions nécrotico-inflammatoires associées à une ballonisation hépatocytaire
(8). L’inflammation est souvent mixte, faite d’un infiltrat
lymphocytaire ou neutrophile. Les corps de Mallory,
agrégats de cytokératine dans le cytoplasme, ne sont
pas constamment observés.
La biopsie est donc le gold-standard pour le diagnostic
de NAFLD. Elle est cependant associée à des risques
de complications et à des erreurs d’échantillonnage.
La valeur prédictive négative de la biopsie pour le
diagnostic de NASH est estimée à 74 % (9).
Quand doit être envisagée
la biopsie ?
L’intérêt de la biopsie hépatique reste débattu, car il
s’agit d’un examen invasif et cher pour le diagnostic
d’une maladie vis-à-vis de laquelle les moyens thérapeutiques restent encore limités et peu efficaces aux
yeux de beaucoup de praticiens. Bien que rares, les
complications attribuées à la biopsie limitent sa réalisation et son acceptation aussi bien par le malade que
par le médecin. La littérature rapporte en effet une
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 6 - novembre-décembre 2009
Stéatohépatite métabolique : comment la diagnostiquer ?
morbidité de 1/1 000 et une mortalité de 1/10 000.
Dans tous les cas, il semble légitime de proposer
une biopsie hépatique aux patients dont les tests
hépatiques révèlent des anomalies inexpliquées. La
biopsie est sujette à discussion lorsque le diagnostic
de stéatopathie dysmétabolique apparaît évident
chez un patient présentant les anomalies métaboliques décrites précédemment et une perturbation
des tests hépatiques. Dans ce cas, l’indication de la
biopsie peut être rediscutée en l’absence d’amélioration de la biologie hépatique ou de correction des
anomalies métaboliques après initiation de règles
hygiénodiététiques. Aucune recommandation n’est
définie en matière de diagnostic non invasif au cours
de la stéatose métabolique.
Place des examens non invasifs
pour le diagnostic
et l’évaluation de la sévérité
de la stéatose hépatique
non alcoolique
Imagerie : échographie, scanner
Dans une petite série de malades ayant subi simultanément une biopsie hépatique, une échographie, un
scanner et une imagerie par résonance magnétique
(IRM), Saadeh et al. ont évalué les performances de ces
examens radiologiques pour le diagnostic de stéatose
hépatique, et plus particulièrement leur capacité à discriminer stéatose pure et NASH (10). Dans cette étude,
l’échographie et le scanner avaient une excellente
sensibilité pour le diagnostic de stéatose supérieure à
33 % (respectivement 100 % et 93 %), avec des valeurs
prédictives positives respectivement de 62 % et 72 %.
Cependant, aucun de ces examens n’était capable de
distinguer la NASH de la stéatose pure. Ainsi, on retiendra qu’une imagerie hépatique normale n’élimine pas
le diagnostic de stéatose métabolique dans la mesure
où ces examens sont performants pour des lésions
de stéatose de plus de 33 %. À ce jour, l’imagerie permet seulement une orientation diagnostique. D’autres
techniques non validées, comme l’IRM de diffusion,
pourraient être prometteuses pour l’évaluation radiologique de la fibrose.
Facteurs cliniques et biologiques
prédictifs de NASH et de fibrose
Plusieurs études ont tenté d’identifier des facteurs prédictifs de stéatohépatite et de fibrose. Ces études ont
montré qu’un âge ≥ 50 ans, un indice de masse corporelle ≥ 30 kg/m2, l’existence d’un diabète, un rapport
ASAT/ALAT ≥ 1, une hypertriglycéridémie ≥ 1,7 mmol/l
et une HTA étaient prédictifs de fibrose. Dans l’étude
de Abrams et al., l’hypertriglycéridémie et l’existence
d’un diabète étaient étroitement associées à la présence
et à la sévérité des lésions de fibrose. Cependant, la
valeur prédictive médiocre de ces paramètres incite
à rechercher d’autres marqueurs. Certaines cytokines
pro-inflammatoires (TNFα, IL-8) ou certaines adipokines,
cytokines produites par le tissu adipeux (adiponectine,
leptine, IL-6), ont été proposées comme marqueurs de
sévérité hépatique, compte tenu de leurs effets sur l’insulinosensibilité, l’inflammation et peut-être la fibrose.
Au cours de l’obésité, du diabète ou de l’insulinorésistance, les taux sanguins d’adiponectine sont diminués,
alors que ceux de leptine et de TNFα sont augmentés.
Une étude australienne a suggéré que la baisse des
taux circulants d’adiponectine était prédictive de NASH
chez les patients ayant une stéatose dysmétabolique.
Selon un travail réalisé par notre équipe, le HOMA > 3
associé à un rapport adiponectine/leptine < 1,4 permettrait de discriminer les patients ayant une NASH
de ceux ayant une stéatose pure (11). Cependant, ces
molécules ne peuvent pas être dosées en routine, ce qui
limite leur utilisation comme marqueur diagnostique
ou pronostique. Le dosage de l’acide hyaluronique et
celui du collagène IV restent des outils biochimiques
intéressants en tant que marqueurs indirects de fibrose.
Place de l’élastométrie (FibroScan®)
pour le diagnostic de fibrose
au cours de la NAFLD
Mesure non invasive de la fibrose hépatique, le
FibroScan® (figure 2) a été évalué pour le diagnostic
de fibrose au cours de la NASH. Peu de travaux sont
disponibles (5, 12), et un seul est actuellement publié
(12). Ce travail a été réalisé par une équipe japonaise
chez 97 patients ayant une stéatose hépatique non
alcoolique histologiquement prouvée. Les valeurs
d’élastométrie étaient associées au stade de fibrose
selon la classification de Brunt. Pour le diagnostic
de fibrose significative, la valeur seuil était de 8 kPa
(figure 3). L’étude prospective espagnole de Marin et al.,
incluant 110 malades avec NAFLD, montre de bonnes
performances du FibroScan® pour le diagnostic de
fibrose, avec une AUROC à 0,97 pour le diagnostic de
cirrhose. D’autres études non encore publiées retrouvent des résultats analogues (de Lédinghen et al., AGA,
2006). L’étude de Mahmoudi et al. menée à l’hôpital
Jean-Verdier (Bondy) sur une série de 92 patients a
retrouvé également de bonnes performances du
FibroScan® pour le diagnostic de fibrose au cours de
la NASH. L’inconvénient principal du FibroScan® est son
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 6 - novembre-décembre 2009
231
dossier
thématique
taux d’échec plus élevé chez les malades obèses (entre
5 et 30 % selon les séries). Une sonde spéciale pour les
patients obèses est à l’étude.
FibroTest®, ActiTest®, NashTest®
L’étude de Poynard et al. a évalué la valeur diagnostique de marqueurs biochimiques (NashTest®) pour
le diagnostic de NASH au cours de la stéatose non
alcoolique (13). Il s’agit d’une combinaison de dix
marqueurs (α2-macroglobuline, haptoglobine, apolipoprotéine A1, bilirubine totale, γGT, ASAT, ALAT,
glycémie à jeun, triglycérides, cholestérol) ajustés
sur l’âge, le sexe, le poids et la taille du patient (www.
biopredictive.com/services/tests/nashtest). Le diagnostic est exprimé en trois classes : N0, pas de NASH ;
N1, NASH possible ; N2, NASH certaine (figure 5). Ce
test n’est pas réalisable en cas d’hémolyse, d’hépatite aiguë, d’inflammation aiguë ou de cholestase,
et il n’est pas validé chez les patients transplantés.
Pour évaluer l’existence et l’intensité des lésions de
stéatose, le SteatoTest® (Biopredictive) a également
été validé au cours de la stéatose non alcoolique.
La sévérité de la stéatose est exprimée en quatre
classes (S0-S4), les classes S3 et S4 correspondant à
une stéatose de plus de 33 %, c’est-à-dire un seuil à
partir duquel l’échographie dépiste aussi la stéatose
avec une excellente sensibilité. Le FibroTest® a également été validé pour le diagnostic de fibrose au
cours de la stéatose hépatique non alcoolique avec
de bonnes performances diagnostiques, en particulier
pour le diagnostic de fibrose en pont ou de cirrhose
(figure 4) [14].
Figure 2. Mesure non invasive de la fibrose hépatique par élastométrie : FibroScan® (Echosens, Paris).
F0
Élasticité (kPa)
IC95
4,850 ± 0,893
4,406-5,294
F1
7,382 ± 2,432
6,439-8,325
F2
9,283 ± 3,492
7,809-10,758
F3
13,333 ± 4,712
10,990-15,677
F4
25,344 ± 6,058
20,687-30,001
Élasticité (kPa)
40
30
20
10
0
Quand surseoir à la biopsie ?
F0
F1
F2
F3
Stade de fibrose
F4
Figure 3. Valeurs d’élastométrie en fonction de la sévérité de la fibrose chez 97 patients ayant une NAFLD histolo­
giquement prouvée (d’après Yoneda et al. Gut 2007).
A
B
1,00
0,75
Sensibilité
Sensibilité
0,75
0,50
0,25
0,00
0,00
1,00
0,50
0,25
0,25 0,50 0,75
Spécificité
1,00
0,00
0,00
0,25 0,50 0,75
Spécificité
1,00
Figure 4. Performances diagnostiques du FibroTest® pour le diagnostic de fibrose avancée (AUROC : 0,81) [A] ou de
fibrose en pont ou cirrhose (AUROC : 0,88) [B] (d’après Ratziu et al.).
Beaucoup de raisons conduisent à éviter la biopsie. Outre son caractère invasif et ses complications
potentielles, c’est un examen cher, limité par le risque
d’erreurs d’échantillonnage (9). Au cours de l’hépatite C, Poynard et al. ont suggéré que les marqueurs
biochimiques seraient moins souvent source d’erreurs qu’une biopsie de petite taille ou fragmentée
pour l’évaluation de la fibrose. Pour ces différentes
raisons, beaucoup de marqueurs indirects ont été
proposés pour le diagnostic de NASH afin de discriminer les patients ayant une stéatose pure des autres
ayant une NASH, candidats à la biopsie. Les tests non
invasifs, précédemment cités, sont intéressants mais
ne suffisent pas à remplacer l’analyse histologique.
À ce jour, la biopsie hépatique reste le gold-standard
pour le diagnostic de stéatopathie dysmétabolique.
Stéatohépatite métabolique : comment la diagnostiquer ?
Cependant, les performances de certains marqueurs
non invasifs, notamment celles du FibroScan® ou du
FibroTest®, pourraient, en cas de normalité, permettre
de surseoir à la biopsie. La figure 5 est une proposition non validée de critères pour la réalisation ou
non d’une biopsie du foie.
Exclusion
de toutes les autres
causes
d’hépatopathie
Anomalies des tests hépatiques + au moins un critère
du syndrome métabolique et/ou insulinorésistance
= probable NAFLD
Conclusion
FibroScan® ou FibroTest®
normal
La stéatose hépatique non alcoolique mérite une
attention particulière, compte tenu de sa prévalence
croissante et de ses risques évolutifs, dominés par la
cirrhose et l’hépatocarcinome. Son diagnostic doit faire
partie de celui du syndrome métabolique, auquel elle
est étroitement associée. La biopsie du foie reste l’examen de référence pour un diagnostic précis permettant
de classer la sévérité de la maladie. Cependant, dans le
cadre d’une prise en charge pluridisciplinaire, l’émergence de nouveaux outils non invasifs, parmi lesquels
le FibroScan®, le FibroTest® et le NashTest®, peut aider à
un diagnostic simple et rapide. Ces nouveaux examens
pourraient permettre de sélectionner les “vrais” candidats à la biopsie, qui reste un examen cher et source
de complications potentiellement graves.
■
FibroScan® ou FibroTest®
anormal
Correction des anomalies métaboliques
Règles hygiénodiététiques
Bilan hépatique à 6 mois
PBH
Amélioration
Identique ou aggravation
Figure 5. Proposition de schéma pour le diagnostic histologique de stéatose non alcoolique.
Références
1. Browning JD, Szczepaniak LS, Dobbins R et al. Prevalence of
hepatic steatosis in an urban population in the United States:
impact of ethnicity. Hepatology 2004;40(6):1387-95.
in patients with persistent unexplained elevated transaminases.
A prospective multicenter study. J Hepatol 2006;45(4):592-9.
2. Abrams GA, Kunde SS, Lazenby AJ, Clements RH. Portal
of fatty liver in arterial hypertensive patients with normal liver
enzymes: role of insulin resistance. Gut 2004;53(7):1020-3.
fibrosis and hepatic steatosis in morbidly obese subjects: a
spectrum of nonalcoholic fatty liver disease. Hepatology
2004;40(2):475-83.
3. Ekstedt M, Franzen LE, Mathiesen UL et al. Long-term follow-up of patients with NAFLD and elevated liver enzymes.
Hepatology 2006;44(4):865-73.
4. Ong J, Pitts A, Younossi ZM. The impact of nonalcoholic
fatty liver disease on mortality. A population-based cohort
study. Hepatology 2006;(Suppl.1):1233.
5. De Lédinghen V, Ratziu V, Causse X et al. Diagnostic and
predictive factors of significant liver fibrosis and minimal lesions
6. Donati G, Stagni B, Piscaglia F et al. Increased prevalence
7. Ratziu V, Giral P, Munteanu M et al. Screening for liver
disease using non-invasive biomarkers (FibroTest, SteatoTest
and NashTest) in patients with hyperlipidaemia. Aliment
Pharmacol Ther 2007;25(2):207-18.
8. Kleiner DE, Brunt EM, Van Natta M et al. Design and validation of a histological scoring system for nonalcoholic fatty
liver disease. Hepatology 2005;41(6):1313-21.
9. Ratziu V, Charlotte F, Heurtier A et al. Sampling variability of
liver biopsy in nonalcoholic fatty liver disease. Gastroenterology
2005;128(7):1898-906.
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 6 - novembre-décembre 2009
10. Saadeh S, Younossi ZM, Remer EM et al. The utility of
radiological imaging in nonalcoholic fatty liver disease.
Gastroenterology 2002;123(3):745-50.
11. Lemoine M, Ratziu V, Kim M et al. Serum adipokines levels
predictive of liver injury in patients with nonalcoholic-fatty liver
disease. Liver Int 2009;24. [Epub ahead of print].
12. Yoneda M, Fujita K, Inamori M, Nakajima A, Tamano M,
Hiraishi H. Transient elastography in patients with nonalcoholic
fatty liver disease (NAFLD). Gut 2007;56(9):1330-1.
13. Poynard T, Ratziu V, Naveau S et al. The diagnostic value
of biomarkers (SteatoTest) for the prediction of liver steatosis.
Comp Hepatol 2005;4:10.
14. Ratziu V, Massard J, Charlotte F et al. Diagnostic value of
biochemical markers (FibroTest-FibroSURE) for the prediction
of liver fibrosis in patients with non-alcoholic fatty liver disease.
BMC Gastroenterol 2006;6:6.
233
Téléchargement