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DOSSIER THÉMATIQUE
Foie métabolique
Stéatohépatite métabolique :
comment la diagnostiquer ?
How to diagnose the nonalcoholic fatty liver disease?
Maud Lemoine, Lawrence Serfaty*
L
a stéatose hépatique non alcoolique, ou
nonalcoholic fatty liver disease (NAFLD) dans
le vocabulaire anglo-saxon, est devenue une
cause très fréquente de maladie chronique du foie
compte tenu de la prévalence croissante du surpoids
et de l’obésité dans le monde. Survenant le plus
souvent chez des malades souffrant de syndrome
métabolique en dehors de toute consommation
excessive d’alcool, la stéatose non alcoolique,
également appelée stéatopathie dysmétabolique,
est désormais considérée comme la manifestation
de ce syndrome. Elle existe principalement sous
deux formes : la stéatose pure, souvent bénigne, et
la stéatohépatite, ou nonalcoholic steatohepatitis
(NASH), qui est une cause de plus en plus fréquente
de fibrose, de cirrhose et d’hépatocarcinome. En
pratique clinique, il est important de diagnostiquer
les malades à risque de stéatose dysmétabolique, et
plus encore de distinguer les patients ayant une stéatose simple de ceux ayant une stéatohépatite avec
des lésions de fibrose qui conditionnent le pronostic.
Le diagnostic de stéatopathie dysmétabolique ainsi
que l’évaluation de sa sévérité sont histologiques
et reposent donc sur la biopsie du foie. Toutefois,
cet examen est invasif et onéreux, ce qui justifie la
recherche de méthodes diagnostiques non invasives.
Celles-ci n’ont pas la précision d’une analyse histologique, mais pourraient aider à mieux sélectionner
les patients candidats à la biopsie.
Pourquoi faire le diagnostic
de stéatopathie métabolique ?
* Service d’hépatologie, hôpital SaintAntoine, Paris.
La NAFLD occupe une place de plus en plus importante dans l’activité des services d’hépatogastro-
80 | La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XII - n° 3 - mai-juin 2009
entérologie, en raison de la forte augmentation du
nombre de sujets obèses au cours des vingt dernières
années et de la mise en évidence du rôle délétère du
syndrome d’insulinorésistance sur les tissus périphériques, dont le foie. Elle est devenue, dans certains
pays occidentalisés, la première cause de maladie
chronique du foie. Aux États-Unis, sa prévalence est
estimée entre 20 et 30 % dans la population générale, avec une prévalence de la NASH évaluée à 5 %
(1). Elle est également en augmentation chez l’enfant
et chez l’adolescent. Chez les patients ayant une
surcharge pondérale modérée ou sévère, la prévalence de la NASH histologiquement prouvée serait de
42 %. Dans une série de 195 patients obèses, Abrams
et al. ont montré que la prévalence de la NASH était
de 36,4 % et que, parmi ces derniers patients, 12 %
avaient des lésions de fibrose sévère (2).
Fréquemment associée à une insulinorésistance indépendamment du surpoids, la stéatose hépatique non
alcoolique est considérée comme la manifestation
hépatique du syndrome métabolique. Celui-ci est
défini par l’association d’une obésité centrale, d’une
hypertension artérielle, d’une hypertriglycéridémie,
d’un HDL-cholestérol bas et d’une intolérance au
glucose, voire d’un diabète de type 2 (tableau). Le
syndrome métabolique touche environ 25 % de la
population aux États-Unis, avec des chiffres presque
similaires en France selon l’âge, le sexe et l’origine
géographique.
Alors que la stéatose pure est une lésion bénigne, son
association à des lésions inflammatoires, définissant
la NASH, peut évoluer vers la cirrhose dans 10 à
15 % des cas, avec un risque de complications, et
en particulier d’hépatocarcinome. Plusieurs études
épidémiologiques ont suggéré un lien entre insulinorésistance, cirrhose et carcinome hépatocellu-
Points forts
» La stéatose hépatique non alcoolique, ou stéatopathie dysmétabolique, existe sous deux formes : la stéatose simple, d’évolution bénigne, et la stéatohépatite (NASH), qui peut se compliquer d’une fibrose, d’une
cirrhose et d’un cancer.
» Seule la biopsie hépatique permet de distinguer les patients ayant des lésions de stéatohépatite de
ceux ayant une stéatose simple. Il n’existe pas encore de recommandations quant à ses indications. Elle
paraît justifiée en l’absence d’amélioration des anomalies biologiques hépatiques malgré les mesures
hygiénodiététiques et le contrôle des perturbations métaboliques.
» La place des tests non invasifs (élastométrie hépatique, NashTest® et FibroTest®) pour le diagnostic et
l’évaluation de la sévérité de la stéatohépatite reste à définir.
laire. La prévalence du carcinome hépatocellulaire
est plus élevée chez les patients obèses et chez
les diabétiques de type 2 que dans la population
générale. Plusieurs études ont également montré
que les patients ayant une NASH avaient un taux
de survie plus faible (3). Le travail de Ong et al.
basé sur les données de la NHANES III a montré
une mortalité globale et une mortalité d’origine
hépatique plus élevées chez les patients ayant une
stéatopathie dysmétabolique que chez ceux n’ayant
pas de maladie du foie (4). Aussi, l’indication de
transplantation hépatique pour cirrhose d’origine
dysmétabolique est en augmentation en France et
aux États-Unis (10 % des indications de transplantation aux États-Unis).
Au regard des données épidémiologiques et des
risques évolutifs liés à cette hépatopathie, poser
le diagnostic de NAFLD, et en particulier celui de
NASH, est important en termes de santé publique. Ce
diagnostic permet la mise en œuvre de règles hygiénodiététiques et thérapeutiques pour le contrôle
non seulement de la maladie hépatique mais aussi
des comorbidités qui lui sont associées.
Quand doit être évoqué
le diagnostic ?
Le diagnostic est le plus souvent posé à l’occasion de
l’exploration d’anomalies chroniques de la biologie
hépatique, ou lors de la découverte fortuite d’une
hépatomégalie hyperéchogène chez des patients
ayant un surpoids ou un authentique syndrome métabolique sans consommation excessive d’alcool et sans
autres causes de maladie chronique du foie. En dehors
de la cirrhose, aucun symptôme n’est relevé, l’hépatomégalie est inconstante et les seules anomalies
cliniques sont en général celles du syndrome métabolique (HTA, obésité abdominale). Bien plus que le
surpoids estimé par l’indice de masse corporelle, c’est
l’épaisseur de la graisse abdominale, métaboliquement active, qui doit sensibiliser le clinicien.
D’un point de vue biologique, le diagnostic doit être
évoqué devant des anomalies persistantes des tests
hépatiques, après avoir éliminé toutes les autres
causes d’hépatopathie chronique, en particulier
si ces anomalies sont associées à des troubles du
métabolisme glucidique et/ou lipidique et/ou à une
insulinorésistance. Il s’agit le plus souvent d’une
augmentation modérée des transaminases et/ou
d’une élévation isolée de la γGT.
Dans une étude prospective française incluant
272 patients ayant une élévation chronique des
transaminases, des lésions de stéatose non alcoolique étaient retrouvées dans près de 60 % des cas
(26,8 % avaient des lésions de stéatose et 32,7 %
une NASH) [5]. Les transaminases dépassent exceptionnellement cinq fois la normale. La normalité
des transaminases n’élimine pas le diagnostic, en
particulier pour les patients hypertendus et insulinorésistants, chez qui une NAFLD est retrouvée dans
un tiers des cas malgré des transaminases normales
(6). D’autres études ont montré que la normalité
des transaminases ne garantissait pas l’absence de
lésions hépatiques.
En l’absence de syndrome métabolique, les anomalies lipidiques et/ou glucidiques favorisent la stéatose. Dans une étude récente incluant 1 909 patients
hyperlipémiques et 925 donneurs de sang, il a été
montré, à partir de marqueurs non invasifs, que 30 %
des patients hyperlipémiques avaient une stéatose,
7 % une NASH et 3 % des lésions de fibrose (7).
Dans cette même étude, la prévalence de ces lésions
hépatiques était plus élevée chez les patients ayant
au moins deux critères du syndrome métabolique et,
en particulier, chez les sujets diabétiques et hyperlipémiques, pour qui la prévalence de la stéatose
était estimée à 66 %, celle de la NASH à 24 % et
celle de la fibrose avancée à 6 %.
Mots-clés
Stéatopathie
dysmétabolique
Biopsie hépatique
Marqueurs non
invasifs de fibrose
Keywords
Nonalcoholic fatty liver
disease
Liver biopsy
Non invasive markers
Tableau. Définition du syndrome métabolique selon la Fédération internationale du diabète
(2005).
Il existe un syndrome métabolique en cas de présence d’au moins trois des cinq critères suivants
Obésité abdominale évaluée par le tour de taille
Hommes
Femmes
≥ 94 cm
≥ 80 cm
Pression artérielle
ou HTA traitée
≥ 130 / ≥ 85 mmHg
Glycémie à jeun
ou diabète de type 2 traité
≥ 5,6 mmol/l
Triglycérides
≥ 1,7 mmol/l
HDL-cholestérol
Hommes
Femmes
≤ 1 mmol/l
≤ 1,3 mmol/l
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Stéatohépatite métabolique : comment la diagnostiquer ?
La résistance à l’insuline est considérée comme
l’élément central dans le développement de la
stéatose. Indépendamment du surpoids ou du
syndrome métabolique, l’insulinorésistance peut
être à l’origine d’une stéatose. Ainsi, l’insulinorésistance représente un élément important pour le
diagnostic de stéatose dysmétabolique. Elle peut se
mesurer simplement par l’index de HOMA (Homeostasis Model Assessment), obtenu à partir d’un relevé
à jeun de l’insulinémie et de la glycémie (insulinémie
x glycémie/22,5). Un index supérieur à 3 signe l’existence d’une insulinorésistance.
La découverte d’un foie hyperéchogène sur des
examens d’imagerie doit également faire évoquer
le diagnostic. La stéatose pouvant être observée
dans beaucoup de maladies chroniques du foie, et en
particulier celles liées à une consommation abusive
d’alcool. Il est essentiel d’éliminer toutes les autres
causes d’hépatopathie chronique et d’évaluer avec
précision la consommation quotidienne d’alcool. On
rappelle que, selon l’Organisation mondiale de la
santé, une consommation d’alcool est à faible risque
si elle reste inférieure à 10 g/j chez les femmes et à
20 g/j chez les hommes.
Le diagnostic de stéatose hépatique non alcoolique
sera donc évoqué en cas d’anomalies persistantes
des tests hépatiques chez des patients ayant un
Stéatose hépatique non alcoolique
ou stéatopathie métabolique
(nonalcoholic fatty liver disease)
Stéatose pure
Stéatohépatite non alcoolique
(nonalcoholic steatohepatitis)
NASH
La fibrose est une complication
de la stéatose hépatique non alcoolique,
mais elle n’est pas un critère diagnostique.
Stéatose
+ lésions inflammatoires
+ souffrance hépatocytaire :
– ballonisation hépatocytaire
– infiltrat inflammatoire
– nécrose hépatocytaire
Figure 1. La stéatose est le critère histologique essentiel au diagnostic. La stéatose
hépatique non alcoolique, ou NAFLD, regroupe deux entités : la stéatose pure et la stéatohépatite, définie par l’association d’une stéatose et de lésions inflammatoires.
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ou plusieurs critères du syndrome métabolique
ou chez des patients ayant une insulinorésistance. Une fois le diagnostic de NAFLD évoqué, il
est difficile en pratique clinique de distinguer les
patients ayant une stéatose isolée de ceux ayant
des lésions de stéatofibrose. Seule la biopsie peut
formellement différencier ces deux sous-groupes
pathologiques.
De la stéatose pure
à la stéatohépatite :
un diagnostic histologique
La stéatose hépatique non alcoolique désigne un
spectre d’entités histologiques allant de la stéatose
simple à la stéatohépatite avec ou sans fibrose. Les
lésions histologiques sont très proches de celles
observées au cours de la maladie alcoolique du foie.
Cependant, au cours de la stéatose métabolique,
l’activité nécrotico-inflammatoire et la fibrose sont
moins intenses, les corps de Mallory plus rares et les
noyaux glycogéniques plus fréquents. La stéatose
hépatique est habituellement macrovacuolaire, sous
forme de larges gouttelettes lipidiques de triglycérides refoulant le noyau en périphérie (figure 1).
Elle est quantifiée en pourcentage. Une stéatose
pure touchant entre 1 et 5 % des hépatocytes est
en général considérée comme physiologique. La
NASH se définit par l’association d’une stéatose
et de lésions nécrotico-inflammatoires associées à
une ballonisation hépatocytaire (8). L’inflammation
est souvent mixte, faite d’un infiltrat lymphocytaire ou neutrophile. Les corps de Mallory, agrégats
de cytokératine dans le cytoplasme, ne sont pas
constamment observés.
La biopsie est donc le gold-standard pour le
diagnostic de NAFLD. Elle est cependant associée
à des risques de complications et à des erreurs
d’échantillonnage. La valeur prédictive négative
de la biopsie pour le diagnostic de NASH est estimée
à 74 % (9).
Quand doit être envisagée
la biopsie ?
L’intérêt de la biopsie hépatique reste débattu,
car il s’agit d’un examen invasif et cher pour le
diagnostic d’une maladie vis-à-vis de laquelle les
moyens thérapeutiques restent encore limités et
peu efficaces aux yeux de beaucoup de praticiens.
Bien que rares, les complications attribuées à la
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biopsie limitent sa réalisation et son acceptation
aussi bien par le malade que par le médecin. La littérature rapporte en effet une morbidité de 1/1 000
et une mortalité de 1/10 000. Dans tous les cas, il
semble légitime de proposer une biopsie hépatique
aux patients dont les tests hépatiques révèlent des
anomalies inexpliquées. La biopsie est sujette à
discussion lorsque le diagnostic de stéatopathie
dysmétabolique apparaît évident chez un patient
présentant les anomalies métaboliques décrites
précédemment et une perturbation des tests hépatiques. Dans ce cas, l’indication de la biopsie peut
être rediscutée en l’absence d’amélioration de la
biologie hépatique ou de correction des anomalies
métaboliques après initiation de règles hygiénodiététiques. Aucune recommandation n’est définie
en matière de diagnostic non invasif au cours de la
stéatose métabolique.
Place des examens non invasifs
pour le diagnostic
et l’évaluation de la sévérité
de la stéatose hépatique
non alcoolique
Imagerie : échographie, scanner
Dans une petite série de malades ayant subi simultanément une biopsie hépatique, une échographie, un scanner et une imagerie par résonance
magnétique (IRM), Saadeh et al. ont évalué les
performances de ces examens radiologiques pour
le diagnostic de stéatose hépatique, et plus particulièrement leur capacité à discriminer stéatose
pure et NASH (10). Dans cette étude, l’échographie et le scanner avaient une excellente sensibilité pour le diagnostic de stéatose supérieure à
33 % (respectivement 100 % et 93 %), avec des
valeurs prédictives positives respectivement de
62 % et 72 %. Cependant, aucun de ces examens
n’était capable de distinguer la NASH de la stéatose
pure. Ainsi, on retiendra qu’une imagerie hépatique
normale n’élimine pas le diagnostic de stéatose
métabolique dans la mesure où ces examens sont
performants pour des lésions de stéatose de plus
de 33 %. À ce jour, l’imagerie permet seulement
une orientation diagnostique. D’autres techniques
non validées, comme l’IRM de diffusion, pourraient
être prometteuses pour l’évaluation radiologique
de la fibrose.
Facteurs cliniques et biologiques
prédictifs de NASH et de fibrose
Plusieurs études ont tenté d’identifier des facteurs
prédictifs de stéatohépatite et de fibrose. Ces études
ont montré qu’un âge ≥ 50 ans, un indice de masse
corporelle ≥ 30 kg/m2, l’existence d’un diabète, un
rapport ASAT/ALAT ≥ 1, une hypertriglycéridémie
≥ 1,7 mmol/l et une HTA étaient prédictifs de fibrose.
Dans l’étude de Abrams et al., l’hypertriglycéridémie
et l’existence d’un diabète étaient étroitement associées à la présence et à la sévérité des lésions de
fibrose. Cependant, la valeur prédictive médiocre
de ces paramètres incite à rechercher d’autres
marqueurs. Certaines cytokines pro-inflammatoires (TNFα, IL-8) ou certaines adipokines, cytokines produites par le tissu adipeux (adiponectine,
leptine, IL-6), ont été proposées comme marqueurs
de sévérité hépatique, compte tenu de leurs effets
sur l’insulinosensibilité, l’inflammation et peut-être
la fibrose. Au cours de l’obésité, du diabète ou de
l’insulinorésistance, les taux sanguins d’adiponectine
sont diminués, alors que ceux de leptine et de TNFα
sont augmentés. Une étude australienne a suggéré
que la baisse des taux circulants d’adiponectine
était prédictive de NASH chez les patients ayant
une stéatose dysmétabolique. Selon un travail réalisé
par notre équipe, le HOMA > 3 associé à un rapport
adiponectine/leptine < 1,4 permettrait de discriminer les patients ayant une NASH de ceux ayant
une stéatose pure (11). Cependant, ces molécules
ne peuvent pas être dosées en routine, ce qui limite
leur utilisation comme marqueur diagnostique ou
pronostique. Le dosage de l’acide hyaluronique et
celui du collagène IV restent des outils biochimiques intéressants en tant que marqueurs indirects
de fibrose.
Place de l’élastométrie (FibroScan®)
pour le diagnostic de fibrose
au cours de la NAFLD
Mesure non invasive de la fibrose hépatique, le
FibroScan® (figure 2) a été évalué pour le diagnostic
de fibrose au cours de la NASH. Peu de travaux sont
disponibles (5, 12), et un seul est actuellement publié
(12). Ce travail a été réalisé par une équipe japonaise
chez 97 patients ayant une stéatose hépatique non
alcoolique histologiquement prouvée. Les valeurs
d’élastométrie étaient associées au stade de fibrose
selon la classification de Brunt. Pour le diagnostic
de fibrose significative, la valeur seuil était de 8 kPa
La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XII - n° 3 - mai-juin 2009 |
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Foie métabolique
Stéatohépatite métabolique : comment la diagnostiquer ?
fibrose au cours de la NASH. L’inconvénient principal du FibroScan® est son taux d’échec plus élevé
chez les malades obèses (entre 5 et 30 % selon les
séries). Une sonde spéciale pour les patients obèses
est à l’étude.
FibroTest®, ActiTest®, NashTest®
Figure 2. Mesure non invasive de la fibrose hépatique par élastométrie : FibroScan®
(Echosens, Paris).
Élasticité (kPa)
IC95
F0
4,850 ± 0,893
4,406-5,294
F1
7,382 ± 2,432
6,439-8,325
F2
9,283 ± 3,492
7,809-10,758
F3
13,333 ± 4,712
10,990-15,677
F4
25,344 ± 6,058
20,687-30,001
Élasticité (kPa)
40
30
20
10
0
F0
F1
F2
F3
Stade de fibrose
F4
Figure 3. Valeurs d’élastométrie en fonction de la sévérité de la fibrose chez 97 patients
ayant une NAFLD histologiquement prouvée (d’après Yoneda et al. Gut 2007).
(figure 3). L’étude prospective espagnole de Marin
et al., incluant 110 malades avec NAFLD, montre
de bonnes performances du FibroScan ® pour le
diagnostic de fibrose, avec une AUROC à 0,97 pour
le diagnostic de cirrhose. D’autres études non encore
publiées retrouvent des résultats analogues (de
Lédinghen et al., AGA, 2006). L’étude de Mahmoudi
et al. menée à l’hôpital Jean-Verdier (Bondy) sur une
série de 92 patients a retrouvé également de bonnes
performances du FibroScan® pour le diagnostic de
84 | La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XII - n° 3 - mai-juin 2009
L’étude de Poynard et al. a évalué la valeur diagnostique de marqueurs biochimiques (NashTest®) pour
le diagnostic de NASH au cours de la stéatose non
alcoolique (13). Il s’agit d’une combinaison de dix
marqueurs (α2-macroglobuline, haptoglobine,
apolipoprotéine A1, bilirubine totale, γGT, ASAT,
ALAT, glycémie à jeun, triglycérides, cholestérol)
ajustés sur l’âge, le sexe, le poids et la taille du
patient (www.biopredictive.com/services/tests/
nashtest). Le diagnostic est exprimé en trois classes :
N0, pas de NASH ; N1, NASH possible ; N2, NASH
certaine (figure 5). Ce test n’est pas réalisable en
cas d’hémolyse, d’hépatite aiguë, d’inflammation
aiguë ou de cholestase, et il n’est pas validé chez
les patients transplantés. Pour évaluer l’existence
et l’intensité des lésions de stéatose, le SteatoTest®
(Biopredictive) a également été validé au cours de
la stéatose non alcoolique. La sévérité de la stéatose est exprimée en quatre classes (S0-S4), les
classes S3 et S4 correspondant à une stéatose de
plus de 33 %, c’est-à-dire un seuil à partir duquel
l’échographie dépiste aussi la stéatose avec une
excellente sensibilité. Le FibroTest® a également
été validé pour le diagnostic de fibrose au cours
de la stéatose hépatique non alcoolique avec de
bonnes performances diagnostiques, en particulier
pour le diagnostic de fibrose en pont ou de cirrhose
(figure 4) [14].
Quand surseoir à la biopsie ?
Beaucoup de raisons conduisent à éviter la biopsie.
Outre son caractère invasif et ses complications
potentielles, c’est un examen cher, limité par le
risque d’erreurs d’échantillonnage (9). Au cours
de l’hépatite C, Poynard et al. ont suggéré que les
marqueurs biochimiques seraient moins souvent
source d’erreurs qu’une biopsie de petite taille ou
fragmentée pour l’évaluation de la fibrose. Pour
ces différentes raisons, beaucoup de marqueurs
indirects ont été proposés pour le diagnostic de
NASH afin de discriminer les patients ayant une
stéatose pure des autres ayant une NASH, candi-
DOSSIER THÉMATIQUE
A
B
1,00
0,50
0,25
0,00
0,00
1,00
0,75
Sensibilité
0,75
Sensibilité
dats à la biopsie. Les tests non invasifs, précédemment cités, sont intéressants mais ne suffisent
pas à remplacer l’analyse histologique. À ce jour,
la biopsie hépatique reste le gold-standard pour
le diagnostic de stéatopathie dysmétabolique.
Cependant, les performances de certains marqueurs
non invasifs, notamment celles du FibroScan® ou
du FibroTest ®, pourraient, en cas de normalité,
permettre de surseoir à la biopsie. La figure 5 est
une proposition non validée de critères pour la
réalisation ou non d’une biopsie du foie.
0,50
0,25
0,25
0,50 0,75
Spécificité
0,00
0,00
1,00
0,25
0,50 0,75
Spécificité
1,00
Figure 4. Performances diagnostiques du FibroTest® pour le diagnostic de fibrose avancée
(AUROC : 0,81) [A] ou de fibrose en pont ou cirrhose (AUROC : 0,88) [B] (d’après Ratziu et al.).
Conclusion
La stéatose hépatique non alcoolique mérite une
attention particulière, compte tenu de sa prévalence
croissante et de ses risques évolutifs, dominés par
la cirrhose et l’hépatocarcinome. Son diagnostic
doit faire partie de celui du syndrome métabolique,
auquel elle est étroitement associée. La biopsie du
foie reste l’examen de référence pour un diagnostic
précis permettant de classer la sévérité de la maladie.
Cependant, dans le cadre d’une prise en charge pluridisciplinaire, l’émergence de nouveaux outils non
invasifs, parmi lesquels le FibroScan®, le FibroTest®
et le NashTest®, peut aider à un diagnostic simple et
rapide. Ces nouveaux examens pourraient permettre
de sélectionner les “vrais” candidats à la biopsie, qui
reste un examen cher et source de complications
potentiellement graves.
■
Exclusion
de toutes les
autres causes
d’hépatopathie
Anomalies des tests hépatiques + au moins un critère
du syndrome métabolique et/ou insulinorésistance
= probable NAFLD
FibroScan® ou FibroTest®
normal
FibroScan® ou FibroTest®
anormal
Correction des anomalies métaboliques
Règles hygiénodiététiques
Bilan hépatique à 6 mois
PBH
Amélioration
Identique ou aggravation
Figure 5. Proposition de schéma pour le diagnostic histologique de stéatose non alcoolique.
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La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XII - n° 3 - mai-juin 2009 |
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