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La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no6 - novembre-décembre 2003
Gemcitabine versus GEMOX
La deuxième étude importante a été présentée cette année à
l’ASCO (abstract 1004). L’étude GEM-GEMOX a consisté à
comparer la gemcitabine en monothérapie (schéma hebdoma-
daire de Burris) à l’association Gemox (gemcitabine
1 000 mg/m2, 10 mg/m2/mn à J1 et oxaliplatine 100 mg/m2à J2,
tous les 15 jours). Il s’agit d’une étude internationale dans laquelle
313 patients ont été inclus (69 % de patients métastatiques). Les
données de survie globale ne sont pas encore matures, mais un
bénéfice en taux de réponse, taux de bénéfice clinique et survie
sans progression est en faveur du bras Gemox : 25,8 % versus
16,1 % (p = 0,03), 39,2 % versus 28,3 % (p = 0,05), 25 sem. ver-
sus 16 sem. (p = 0,05). Davantage de thrombopénies et de vomis-
sements de grade 3-4 ont été observés avec l’association Gemox :
12,8 % versus 3,8 % et 8,9 % versus 3,2 %. Quinze pour cent de
neuropathies de grade 3 ont été rapportées. Les données de sur-
vie globale seront attendues avec impatience.
Nouveaux médicaments
Parmi les nouveaux médicaments, le BAY 12-9566, le R115777
et le ZD9331 ont été évalués, avec une certaine déception quant
à leurs résultats. Le BAY 12-9566 est un inhibiteur de métallo-
protéinases (MMP2, MMP3, MMP9 et MMP13). Une étude ran-
domisée a inclus 138 patients dans le bras expérimental (800 mg
x 2 per os) et 139 dans un bras gemcitabine classique
(1 000 mg/m2hebdomadaire) (4). L’essai a été interrompu après
la deuxième analyse intermédiaire en raison d’un avantage signi-
ficatif en survie globale et en survie sans progression en faveur
de la gemcitabine (3,74 versus 6,59 mois et 1,68 versus
3,5 mois). La qualité de vie était également en faveur de la gem-
citabine, même s’il n’y a pas eu de différence en termes de toxi-
cité grave.
Le R115777 est un inhibiteur de farnésyltransférase, testé en
phase II chez des patients ayant un cancer du pancréas métasta-
tique non prétraité (5). L’administration est orale (300 mg x 2
pendant 3 semaines sur 4). Aucune réponse sur les 20 patients n’a
été observée, mais le taux de réponse n’est sans doute pas le
meilleur outil d’évaluation avec ce type de drogue. Le temps
jusqu’à progression est de 4,9 semaines et la survie globale de
19,7 semaines. Les principales toxicités ont été hépatiques, héma-
tologiques (anémie, thrombopénie) et digestives (nausées, vomis-
sements). Enfin, le ZD9331 est un nouvel inhibiteur spécifique
de la thymidylate synthétase qui s’administre par voie veineuse
sur 30 minutes à J1 et J8 de cycles de 21 jours. Une étude ran-
domisée a comparé l’efficacité du ZD9331 à celle de la gemci-
tabine selon le schéma hebdomadaire classique (6). Dans cette
étude de phase II-III, 55 patients avec une maladie localement
avancée ou métastatique ont été randomisés (respectivement 30
et 25 patients). Les taux de réponse sont faibles : 3 % versus 8 %.
La survie médiane a été de 152 jours versus 109 et la survie sans
progression de 70 et 58 jours. La tolérance est bonne, puisqu’il
n’a été rapporté que des diarrhées de grade 2 comme principale
toxicité. Cette étude devait aboutir à une étude de phase III de
plus grande ampleur en cas de bénéfice en faveur du ZD9331.
Cela n’a pas été le cas, et l’étude a donc été interrompue.
Tumeurs neuroendocrines
Les tumeurs neuroendocrines d’origine digestive sont habituel-
lement traitées par des analogues de la somatostatine ou de l’inter-
féron alpha à un stade métastatique. Compte tenu de la faible inci-
dence de ce type de tumeurs, l’essentiel des données à notre
disposition proviennent d’études rétrospectives. Une équipe alle-
mande a mené un essai randomisé comparant le lanréotide seul
(n = 25), l’interféron alpha seul (n = 27) et l’association des deux
(n = 28) (7). Dans plus de 90 % des cas, les patients avaient des
métastases hépatiques. Trente-six pour cent des patients avaient
un syndrome carcinoïde clinique. Les taux de réponse sont
faibles : 4 % sous lanréotide, 3,7 % sous interféron, 7,1 % sous
l’association. Il n’y a pas de différence en termes de survie sans
progression. Cette étude de faible effectif montre donc des résul-
tats équivalents entre le lanréotide, l’interféron et l’association
des deux traitements.
CANCER COLORECTAL
Traitement adjuvant
●LV5FU2 ou FUFOL ? À la suite des publications montrant
la supériorité du schéma LV5FU2 par rapport au schéma 5-FU
bolus (Mayo Clinic) en situation métastatique (augmentation du
taux de réponse, de la survie sans récidive, meilleure tolérance
du LV5FU2), l’étape suivante consistait à comparer en adjuvant
le schéma LV5FU2 au schéma FULV (5-FU 400 mg/m2bolus
5 jours de suite + LV 400 mg/m2, tous les mois). Le groupe GER-
COR a donc mené une étude randomisée selon un plan factoriel
2 x 2 comparant ces deux schémas et deux durées de traitement
(24 versus 36 semaines) (8). Au total, 905 patients de stade II ou
III ont été inclus en 3 ans. Les résultats ont été publiés avec un
recul de 41 mois. La survie sans récidive n’est pas significative-
ment différente entre LV5FU2 et FULV (à 3 ans, respectivement
73 % versus 72 %). La survie globale n’est pas statistiquement
différente entre les deux schémas. Concernant la durée de traite-
ment, la survie sans récidive est similaire entre 24 et 36 semaines.
La tolérance, quant à elle, est en faveur du LV5FU2, avec signi-
ficativement moins de toxicités de grade 3-4 : moins de neutro-
pénies, de diarrhées et de mucites. Globalement, 11 % des patients
ont eu une toxicité de grade 3-4 sous LV5FU2, contre 26 % avec
le schéma FU bolus (p < 0,001). Globalement, on peut retenir que
la meilleure tolérance du LV5FU2 est une fois de plus confirmée,
mais que l’essai n’a pas retrouvé de différence significative
de survie sans récidive ou de survie globale. Pour permettre
d’aller plus loin dans les conclusions, il sera important, d’une part,
d’analyser les données de l’essai avec un recul supplémentaire,
et, d’autre part, d’attendre les résultats d’une méta-analyse
prévue entre cet essai et l’essai PETACC2 (comparaison
LV5FU2/FULV).
●LV5FU2 ou FOLFOX4 ? Les premiers résultats de l’étude
MOSAIC communiqués à l’ASCO 2003 ont déjà été largement
commentés (abstract 1015). En bref, il s’agit d’une étude ran-
domisée internationale sur 2 246 patients ayant un cancer du
côlon opéré, de stade II ou III. Les traitements adjuvants reçus
étaient soit un schéma LV5FU2, soit un schéma FOLFOX4