l’essentiel
7ème Forum Patients Pfizer
Moments forts et synthèse des débats • 19 novembre 2014 • Paris
L’observance
concerne tous les
acteurs
En tant qu’acteur de santé
activement impliqué aux
côtés des associations de
patients, notre première voca-
tion est de comprendre la maladie et le vécu de
ceux-ci ainsi que celui de leurs proches pour leur
apporter des réponses adaptées.
Ce 7ème Forum Patients est la manifestation
emblématique de cette volonté.
Il est l’occasion de traiter d’un enjeu de santé
publique essentiel et transverse à toutes les
pathologies chroniques : l’observance thérapeu-
tique. Une non-observance représente, en effet,
un réel danger pour le patient : elle peut entr-
ner des aggravations de sa maladie et impacter
signicativement l’efcacité de son traitement,
sa qualité de vie et in ne sa santé.
Comme le met en évidence l’analyse des résul-
tats de l’enquête inédite « Vos traitements et
vous », cet enjeu est complexe car la non-obser-
vance est multifactorielle. Il convient d’appré-
hender les divers facteurs du mésusage et de la
non-observance pour adapter les solutions mises
à disposition des patients.
Cet enjeu concerne une multitude d’acteurs
que ce soit les patients, les médecins, les
pharmaciens mais également les entreprises du
médicament.
Tout au long de l’après-midi, les intervenants et
participants ont appréhendé la thématique de
l’observance sous différents angles tous centrés
autour du patient. Ils ont également échangé
sur les résultats de l’enquête (déterminants,
leviers et freins à l’observance), sur le rôle des
différentes parties-prenantes et sur les initiatives
dédiées à l’amélioration de l’observance.
Avec ce Forum, nous espérons avoir contribué à
la réexion et à la sensibilisation sur cet enjeu.
Michel Ginestet
Président de Pfizer France
Enquête
Pour introduire la réflexion et les
échanges, le Professeur Catherine
Tourette-Turgis, Université Pierre
et Marie Curie Paris, Fondatrice de
l’Université des patients, a présen-
té les résultats de l’enquête “Vos
traitements et vous”. Ce sondage sur
l’observance thérapeutique, réalisé
avec le Professeur Christian Pradier,
en partenariat avec Pfizer a été relayé par différentes associations de
patients. Les résultats sont riches d’enseignements et feront l’objet
de publications.
Méthodologie
Développement sur SurveyMonkey, 96 questions pour la version la plus longue.
Sondage auto-administré sur le web du 1er au 17 octobre 2014.
Promotion en ligne (e-mail, site Internet, réseaux sociaux…) via les associations
de patients.
Profil des répondants (sur 1 339 sondés)
70% de femmes
70% de 40 ans et plus
1 sur 2 est actif
42% des personnes sont touchées par une spondylarthrite, une polyarthrite rhumatoïde,
un psoriasis ou une sclérodermie.
48% ont une deuxième maladie
et 19 % une troisième maladie
75,4% ont des maladies diagnostiquées majoritairement depuis plus de trois ans
Près de 80% sont pris en charge par un spécialiste
L’hôpital est le lieu de consultation dans plus d’1 cas sur 3
Enseignements-clés de l’enquête
Le principal enseignement tiré de l’analyse des résultats de cette enquête
inédite est que la non-observance est un comportement qui dépend de
nombreux facteurs.
44 %
oublient quelques fois de prendre leur traitement.
29 % des participants n’ont pas pris leur médicament
de façon intentionnelle lors des 15 derniers jours.
Observance thérapeutique : où en sommes-nous ?
enquête nationale
sur l’observance
Vos traitements
&Vous
7ème Forum Patients Pfizer• 2 •
29 %
des participants ont déjà modifié
leur traitement eux-mêmes.
Pour 33 % des participants,
la prise du/ des traitement(s) constitue
une gêne dans le déroulement
de leur activité quotidienne.
82 %
ont confiance dans leur
médicament.
Plus le médecin est coopératif, plus le
patient ose avouer ses changements.
Des caractéristiques des patients (âge,
niveau d’études, habitat, connaissance
et croyances sur la maladie) à celles de
la maladie et du traitement en passant
par celles du système de santé (relations
patient/médecin, existence ou non d’un
programme d’éducation thérapeutique),
de nombreuses variables entrent en
considération ce qui permet de plaider
pour un renouvellement de l’approche de
l’observance.
Catherine Tourette-Turgis conclut sa pré-
sentation en insistant sur le fait qu’une
approche pluridisciplinaire articulée autour
des besoins du patient (rationnel, acteur et
non coupable) tout au long du parcours de
soin est indispensable pour appréhender
l’observance sous tous ses aspects (sani-
taires, économiques…).
“De nouveaux discours sur l’observan-
ce sont à inventer : il faut démédicaliser
l’observance thérapeutique et s’inté-
resser à ce que pensent les usagers de
médicaments en les intégrant dans les
groupes de réflexion”.
Les déterminants de l’observance
Focus
Comprendre la non-observance nécessite
d’évaluer l’ampleur du phénomène de
non-observance et de s’intéresser aux
déterminants de l’observance afin d’en
mesurer la complexité et les enjeux : tel
était l’objectif de la 1ère table-ronde qui
a réuni le Docteur Sylvie Fainzang, an-
thropologue et directrice de recherche
à l’Inserm (Paris) ; le Professeur Robert
Launois, économiste de la santé et direc-
teur du Réseau d’Evaluation en Econo-
mie de la Santé et le Professeur Christian
Pradier du Service de Santé Publique du
CHU de Nice, autour de Catherine Tou-
rette-Turgis.
Pour appréhender un phénomène
et trouver des solutions adaptées, il
convient d’abord d’évaluer son impor-
tance. C’est la tâche à laquelle s’est
attelée l’économiste de la santé, le
Pr Robert Launois en ouverture de cette
première table-ronde.
19 novembre 2014 • 3 •
Il a d’abord rappelé l’importance de
la sémantique : les termes tradition-
nels «observance» et «compliance» ont,
selon lui, un côté “astreignant qui n’est
pas propice à un dialogue entre les
parties prenantes”, contrairement au mot
«adhésion» qui est apparu à l’initiative des
associations de patients atteints du VIH, et
que l’on devrait généraliser selon lui.
De quoi parle-t-on ?
Il a ensuite entrepris de dresser un tableau
de la non-observance à l’aide de données
chiffrées. Il a, pour cela, effectué un travail
de dénition préalable. Tâche qui s’est -
vélée ardue.
En effet, l’observance est, contre toute
attente, un sujet complexe et difficile à
maîtriser car les définitions sont très va-
riables selon les travaux commente le Pr
Robert Launois qui a recensé pas moins de
29 dénitions différentes. Il a choisi d’uti-
liser la dénition la plus courante, celle du
Medication Possession Ratio, à savoir le ra-
tio dispensation (nombre de journées de
traitement délivrées par le pharmacien)
divisé par la prescription (nombre de jour-
nées de traitement prescrites par le mé-
decin). Ou plus simplement dit le rapport
boîtes achetées / boîtes prescrites.
“On considère que l’observance est bonne
lorsque ce taux avoisine les 80%. Or, ce
chiffre n’est presque jamais atteint. Il y
a donc un hiatus entre l’efficacité expéri-
mentale et l’efficacité clinique constatée
sur le terrain”. Cet écart peut s’expliquer
en partie par un défaut d’adhésion au trai-
tement, ce qui est préoccupant.
L’observance devrait être un sujet de poli-
tique de santé, selon le Pr Robert Launois.
De fait, le coût des complications entr-
nées par une faible adhésion à un trai-
tement (celui-ci s’élevant à 4,4 milliards
d’euros pour les AVC ; 1,46 milliard pour
le diabète de type 2 ou 1,38 milliard pour
le cholestérol1) est supérieur à l’augmen-
tation des dépenses de santé entraînées
par un nombre de boîtes vendues plus
important. Au total 9.3 milliards d’euro
d’économie pourrait être obtenu en France
en cas d’amélioration de l’observance
selon l’étude d’IMS qui vient d’être pu-
bliée2. L’Organisation Mondiale de la San-
déclare qu’améliorer l’observance peut
avoir un impact sur l’état de santé de la
population plus important que n’importe
quelle amélioration marginale des traite-
ments existants.
Dans cette optique, l’économiste présente
des chiffres tirés d’une revue de la litté-
rature sur le sujet an de déterminer le
terrain le plus propice à “l’engagement
d’une bataille pour une meilleure obser-
vance”.
Il relève ainsi qu’il y a une forte disparité
entre les pathologies concernant le taux
d’observance: dans l’asthme par exemple,
aux Etats-Unis,le taux d’adhésion se situe
à 13% alors qu’on dépasse les 50% pour
les patients atteints d’ostéoporose.
Comme on le voit, une amélioration de
l’adhésion des personnes malades à leurs
médicaments serait bénéfique à tous et
devrait être une des priorités en santé.
Le Pr Robert Launois conclut : L’amélio-
ration de l’adhésion au traitement des
personnes malades est une stratégie ga-
gnante-gagnante pour toutes les parties
prenantes”.
L’observance : des déterminants
et des modèles d’intervention variés
Poursuivant les propos du Pr Robert Lau-
nois, le Pr Christian Pradier revient sur le
sens du mot santé, à savoir une «ressource
de la vie quotidienne et non un but en soi»,
dénition la plus récente inscrite dans la
Charte d’Ottawa.
La santé est un capital, une richesse
qui sert à l’épanouissement personnel :
“Quelqu’un qui est épanoui dans sa vie
est en bonne santé” explique le Pr Pradier.
• Les déterminants de l’observance •
7ème Forum Patients Pfizer• 4 •
En favorisant cette approche, le Pr Pradier
se distingue de la dénition médicale tra-
ditionnelle qui veut que la bonne santé soit
l’absence de maladie diagnostiquée.
L’observance est donc intimement liée
à l’empowerment, à savoir «la capacité
d’être partie prenant.
Il répertorie 5 grands déterminants liés à
l’observance :
Les 1ers sont les facteurs
socio-économiques (âge, sexe,
niveau de revenu, d’éducation,
emploi, habitat, soutien social,
situation familiale...).
Le système de santé est le second
déterminant : il recouvre le coût des
soins et traitements, la relation
médecin-patient, le programme
d’éducation thérapeutique et la
qualité du système de soin.
Viennent ensuite les caractéristiques
de la maladie (sa sévérité, son
ancienneté, ses conséquences, son
évolution...).
Le traitement (sa complexité, sa
durée, les échecs thérapeutiques,
les changements fréquents,
les bénéces immédiats et la
disponibilité du médecin) est le 4ème.
Enn, le patient lui-mêmes inue sur
l’observance en fonction de ses
connaissances et croyances sur sa
maladie, son espoir vis-à-vis des
traitements, son anxiété, sa capacité
à faire face et son estime de lui-même.
Plusieurs modèles d’intervention existent
pour inuer sur l’observance, (répertoriés
par l’INPES) dont celui écosystémique mis
en avant par le Pr Pradier.
Ce dernier se construit sur le postulat sui-
vant : les individus font partie d’un en-
semble, d’un environnement dont on ne
peut les détacher. De fait, il permet d’en-
visager le milieu de vie comme un véri-
table réseau potentiel de soutien” avec
une analyse globale de la situation des per-
sonnes et de leurs proches dans leur milieu
de vie immédiat. Il est important de cerner
toutes les dimensions qui entourent le pa-
tient, par strates plus ou moins importantes
(la famille, l’entreprise jusqu’à la ville et la
société dans lesquelles il évolue).
Pour conclure, l’éducation thérapeutique
est un facteur de succès ou d’échec du
traitement, c’est indéniable”.
En effet, elle vise à donner des compétences
aux gens pour faire face à leur situation.
Outre cette notion essentielle, il est impor-
tant pour le Pr Pradier de prendre davan-
tage en compte les conditions d’existence
des patients et ainsi de ne pas travailler
uniquement avec des soignants sur ces pro-
blématiques.
Observance, au-delà du médical
Pour terminer cette table-ronde, un regard
différent, non-médical, a été porté sur
l’observance par Sylvie Fainzang. Contrai-
rement au médecin, l’anthropologue se
refuse à “juger les pratiques mais [veut]
comprendre le rapport qu’ont les gens
avec le médicament et les usages qu’ils
en font”.
19 novembre 2014 • 5 •
L’anthropologue a d’abord évoqué briè-
vement la difculté d’étudier ce compor-
tement : l’oubli ou le refus de prendre des
médicaments ne sufsent pas à eux seuls à
expliquer la non-observance.
D’autres variables sont à considérer telles
que :
la place des symptômes (une
absence de ceux-ci peut laisser
présupposer une absence de
maladie),
le contexte de vie du malade,
l’éducation à la santé dont a pu
bénécier le patient,
les raisons cognitives, c’est-à-dire la
manière dont les gens interprètent la
maladie (explication de celle-ci
suivant une autre logique, parfois non
compatible avec celle du médecin),
les variables culturelles ou
religieuses qui inuent sur la
perception des médicaments,
la représentation de l’efficacité du
médicament.
Compte tenu de ces éléments nouveaux,
Sylvie Fainzang appelle à une responsabili-
sation accrue des médecins qui sont, pour
elle, un des leviers à activer pour aborder
cette problématique (en plus de la santé
connectée ou des associations de patients).
Elle estime que le rôle des professionnels
de santé est crucial, à la fois au niveau de
l’écoute du malade, et au niveau de l’infor-
mation qu’ils peuvent lui fournir.
En clôture de cette table-ronde, Catherine
Tourette-Turgis est revenue sur la stigmati-
sation et la moralisation des patients qui,
pour elles ont à bannir :
“On attribue souvent la non-observance
au patient alors que les paradigmes de
calcul estiment que 80% des détermi-
nants sont extérieurs à lui”.
• Les initiatives des acteurs •
Les initiatives des acteurs
Perspective
Agir contre l’inobservance est donc un enjeu
partagé par l’ensemble des acteurs. La deu-
xième table –ronde avait pour objectif de pré-
senter des initiatives, des solutions mises en
place par les différents acteurs. Mina Daban,
Présidente de l’association LMC France; le
Docteur Pascal Louis, pharmacien à Fon-
taine Lès Dijon et Président du CNGPO ;
Catherine Raynaud, Directeur des Affaires
Institutionnelles chez Pzer ; le Docteur Eric
Couhet, médecin généraliste, spécialiste en
e-santé à Nueil-les-Aubiers (par intervention
vidéo) et le Professeur Michel Doly, phar-
macien hospitalier à Clermont-Ferrand se
sont exprimés sur le sujet.
L’association de patients,
la pharmacie, la santé connectée,
l’implication accrue des laboratoires
pharmaceutiques : des réponses
aux attentes des patients
Les associations de patients :
un relais indispensable
En ouverture de cette seconde table ronde,
Mina Daban a mis en avant son propre
parcours an de souligner l’importance de
l’observance thérapeutique et la solitude
que peuvent ressentir parfois les malades
chroniques face à leur pathologie. “Il n’y a
pas de mode d’emploi, nous sommes en
perpétuelle attente” précise-t-elle. Elle a
également insisté sur le fait qu’il n’y a pas
de corrélation entre la gravité des consé-
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