Introduction
La dimension spatiale est au cœur de l’analyse géographique et peut, à bien
des égards, être considérée comme la raison d’être de la discipline. D’abord considérée
comme purement objectif, l’espace géographique est aujourd’hui davantage envisagé comme
subjectif.
Allant dans ce sens, cet espace n’était plus, depuis les années 50, un simple plan, mais bien
une forme complexe, comme a pu l’introduire « la time geography » de T.Hagerstrand (1952).
De nombreux progrès ont ainsi été réalisés en envisageant notamment de substituer l’espace
par les temps de déplacement (Chapelon 1997, L’Hostis 2003, Thevenin, Chardonnel et
Cochey 2007). Sur un autre terrain, d’autres tentatives tout aussi récentes ont procédé à
l’introduction d’une nouvelle géométrie au cœur même de la métrique géographique (la
géométrie fractal, Batty, Longley 1986, Frankhauser 1994, 1997). Les résultats, tout à fait
probants, laissent à penser que l’espace géographique pourrait receler en lui-même une
nouvelle dimension. La cognition pourrait expliquer pour partie cette bonne opérabilité de la
géométrie fractale.
Bien avant ces études, C.Cauvin (1984) avait pu proposer des travaux tout à fait intéressants
sur cette question et a jeté les bases à la fois conceptuelles mais également techniques d’une
nouvelle dimension de l’espace géographique allant même jusqu'à procéder à des
déformations cartographiques.
Aussi, la question de l’espace cognitif parait tout à fait centrale dans l’analyse géographique.
Mais alors, comment envisager ce type d’espace ? Nous émettons l’idée que le processus de
construction urbaine et le fonctionnement des villes, tant sur le temps long que court, obéit à
des lois dont la géométrie n’est pas celle de l’espace physique. Ainsi, on observera que les
déplacements domicile-travail se fondent largement sur des effets cognitifs de type « tunnel.
En ce qui concerne le temps long, l’installation des urbains semble, comme l’observe
classiquement A.Moles (1972) et d’autres phénoménologues, répondre à des logiques la
encore non euclidiennes (un monde construit à l’image de nos perceptions).
En cela, la géométrie fractale employée pour décrire la forme urbaine pourrait être
l’expression de ces homothéties successives de l’espace-temps. Dans ces conditions, comment
appréhender correctement la dynamique spatiale dès lors que l’on reste sur des
fonctionnements basés sur la géométrie euclidienne ?
Mais concrètement, quel apport peut on espérer d’une définition mathématique des espaces
cognitifs ? La question se pose alors en termes de limite ou de frontière. Toute la nuance
entre l’approche physique classique et cet espace cognitif réside en une solution continue pour
des problèmes de rupture d’espaces intermédiaires. Quand on définit une rupture entre
l’urbain et le périurbain au niveau des densités de population, ne pourrait-on pas y voir une
expression d’un changement graduel des métriques de type cognitives qui serait sous-jacent
dans la fonction de densité. La justification théorique d’une telle affirmation proviendrait de
notre propension à ne pas percevoir de la même manière à la ville et la campagne. La densité
serait une des clés de cette différenciation.
Il semble, dès lors, que la transformation cognitive de l’espace physique se présente comme
un révélateur purement géographique des territoires, en quelque sorte une spécificité
disciplinaire.
La question est, de fait, de définir l’espace cognitif tant d’un point de vue conceptuel que plus
formel, en quoi est-il spécifique ? Un premier élément de réponse pourrait être l’asymétrie de
la mesure géographique, s’opposant par conséquent à une approche par coordonnées