INT J TUBERC LUNG DIS 2 (8): 635-640
©1998 IUATLD
Auteur pour correspondance : Dr Martin J Boeree, Department of Medicine, College of Medicine, Private Bag 360,
Chichiri, Blantyre, Malawi. Tel: (+265) 674744. Fax: (+265) 674700.
[Traduction de l'article “Pulmonary tuberculosis: diagnostic delay in Ghanaian adults". Int J Tuberc Lung Dis 1998;
2 (8): 635-640.]
Tuberculose pulmonaire : délai de diagnostic chez les
Ghanéens adultes
S. D. Lawn, B. Afful, J. W. Acheampong
*The Department of Medicine, School of Medical Sciences, University of Science and Technology, Kumasi,
Ghana, West Africa, and Division of Infectious Diseases, St George’s Hospital Medical School, London, UK
_______________________________________________________________________RESUME
CADRE : Département de Médecine, Hôpital d’enseignement Komfo-Anokye Kumasi, Ghana, Afrique de l’Ouest.
OBJECTIF : Détermination des facteurs qui influencent le délai entre le début des symptômes de la tuberculose
pulmonaire et la mise en route du traitement.
SCHEMA : Enquête rétrospective par questionnaire chez 100 adultes dont la tuberculose pulmonaire à
bacilloscopie positive avait été récemment diagnostiquée.
RESULTATS : Le délai médian total du diagnostic est de 4 mois (moyenne : 7,7) ; le délai total dépasse 6 mois chez
44% des patients. Le délai total est en forte corrélation avec le fait d’habiter à la campagne. Le délai-médecin
médian entre première consultation et diagnostic est le double du délai-patient avant la première consultation (8
semaines vs 4 semaines). Le délai-médecin est augmenté de manière significative chez les patients de sexe
féminin, chez ceux qui habitent à la campagne et chez ceux pour lesquels une hospitalisation s’impose. Une
augmentation du délai-médecin est en forte corrélation avec le taux de non-exécution de la bacilloscopie (r=0,99),
avec un taux faible de diagnostic. Elle s’observe particulièrement chez les médecins privés et dans les institutions
gouvernementales rurales.
CONCLUSION : Le délai dans le diagnostic de la tuberculose pulmonaire est prolongé à Kumasi, Ghana, avec
fréquemment un délai-médecin assez long. Le nouveau Programme National de la Tuberculose décentralise le
diagnostic et la prise en charge de la tuberculose et généralise l’accès à la bacilloscopie, ainsi qu’une formation
rigoureuse du personnel de santé. Ceci devrait aider à réduire le lai-médecin, et de la sorte améliorer la lutte
contre la tuberculose.
MOTS-CLE : tuberculose ; diagnostic ; délai ; Afrique
DEPUIS LAPPARITION DUN TRAITEMENT efficace
de la tuberculose, les coûts potentiels des délais du
diagnostic de la tuberculose pulmonaire sont
devenus élevés. Dans tout programme de lutte
antituberculeuse, les éléments-clé sont la précocité
du diagnostic et l’instauration rapide d’un traite-
ment efficace. Ceci est particulièrement important
pour les patients non traités, à bacilloscopie
positive, qui représentent les sources principales
d’infection dans la communauté. De ces délais du
diagnostic résulte une période allongée d’infectio-
sité dans la communauté et l’on estime qu’un
patient non traité à bacilloscopie positive peut
infecter en moyenne plus de 10 contacts par an et
plus de 20 contacts pendant l’histoire naturelle de
sa maladie jusqu’au décès.1
Le retard au diagnostic entraîne pour le patient
une aggravation de la maladie, une augmentation
des complications et une mortalité plus importante.
Ceci frappe très durement les familles dans les
pays en développement : les principales victimes
sont particulièrement les jeunes travailleurs rému-
nérés actifs qui ont typiquement de nombreuses
personnes à charge. En effet, la tuberculose
pulmonaire est la cause la plus courante de perte de
« jours-santé » dans la vie des adultes Ghanéens.2
A l’heure actuelle, le retard au diagnostic a
même des implications plus importantes pour les
millions de patients atteints de tuberculose pul-
monaire et d’une co-infection par le virus de l’im-
munodéficience humaine (VIH).3 Mycobacterium
tuberculosis provoque une puissante activation de
la transcription du VIH4 qui se traduit par une forte
augmentation de la charge virale plasmatique.5 Dès
lors, le retard dans le diagnostic de la tuberculose
chez des patients co-infectés par le VIH peut
entraîner une perte rapide de l’immunocompétence
et un raccourcissement de la durée de vie.
2 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
Des retards dans le diagnostic de la tuberculose
ont été relevés aussi bien dans les pays à haute
prévalence que dans les pays à basse prévalence.6-8
Souvent, dans les pays à basse prévalence, le diag-
nostic n’est pas évoqué et dans de nombreuses
régions, les anciennes infrastructures de lutte
contre la tuberculose ont disparu. Les délais sont
souvent plus longs dans les pays en développement
à haute prévalence 9,10 et sont causés par les
patients et les soignants.
Au Ghana, la prévalence de la tuberculose
pulmonaire est élevée et l’incidence estimée est de
200 cas pour 100 000 habitants par an avec un
risque annuel d’infection de 1 à 2%.2 La population
de Kumasi, capitale de la Région d’Ashanti est de
10 000 habitants. L’hôpital d’enseignement Komfo
Anokye est le principal service de santé du
gouvernement à Kumasi ; jusqu’à la fin de 1995, il
a assuré le traitement de la majorité des patients
tuberculeux dans la région d’Ashanti. Les patients
à bacilloscopie positive reçoivent un traitement de
courte durée comportant streptomycine, rifampi-
cine, isoniazide et pyrazinamide pendant deux
mois, suivis de isoniazide et thiacetazone pendant
6 mois. La présente étude fut menée à Kumasi pour
documenter et analyser les facteurs en cause dans
le délai entre le début des symptômes de tuber-
culose pulmonaire du patient et le commencement
du traitement.
METHODES
Vers la fin 1995, une enquête par questionnaire fut
conduite en interviewant les patients à bacillo-
scopie positive nouvellement diagnostiqués au
Dispensaire thoracique de l’hôpital d’enseignement
Komfo Anokye à Kumasi, Ghana.
Les patients atteints d’une quelconque affection
chronique pulmonaire sous-jacente, comme l’asth-
me, furent exclus car il était difficile de déterminer
avec précision la durée des symptômes réellement
causés par la tuberculose. L’on a étudié consécu-
tivement 70 patients externes et 30 patients hospi-
talisés. Les patients admis à l’hôpital l’avaient été
plus à cause de la sévérité de la maladie que pour
superviser le traitement.
Les questionnaires furent conduits par interview
dans la langue vernaculaire, par le même agent mé-
dical, peu de temps après le diagnostic (au plus 2
semaines). La majorité des patients étaient accom-
pagnés d’un ou plusieurs membres de leur famille,
capables de les aider à donner les détails. Pour
chaque patient, le questionnaire comportait les
points suivants : âge, sexe, adresse, groupement
tribal (Akan ou non Akan) et statut d’emploi ; les
symptômes ressentis au début de la maladie ; la
durée totale de la toux ; la date de la première
consultation chez un médecin ; les détails sur les
origines consécutives d’aide médicale tradition-
nelle et conventionnelle ; si l’examen microscopi-
que des expectorations était réalisé lors de chaque
consultation ; la date et l’endroit du diagnostic
final ; ainsi que l’origine et le moment du renvoi au
dispensaire thoracique. Les patients habitant la
ville de Kumasi furent classés comme « urbains » ,
et ceux qui vivaient dans les villes avoisinantes ou
les villages de la Région Ashanti comme « ru-
raux ». Les habitants Akhans comprennent les
indigènes de la Région d’Ashanti tandis que les
non Akhans regroupent surtout des immigrants
économiques provenant du Nord du Ghana.
Les fiches et les lettres d’envoi ont été aussi
analysées afin de confirmer les détails fournis par
les patients. L’on a étudié les radiographies du
thorax pour établir l’étendue des lésions, en
divisant les champs pulmonaires par deux lignes
horizontales passant par les extrémités antérieures
de la deuxième et de la quatrième côte. On a noté
le nombre de zones atteintes par une densification
ainsi que la présence ou l’absence de cavités.
On a utilisé le test 2 pour les comparaisons
statistiques, en fixant la signification statistique à P
0,05.
RESULTATS
Le questionnaire a été rempli avec succès par 100
nouveaux patients adultes avec bacilloscopie posi-
tive et répondant aux critères d’inclusion, 70
patients externes et 30 patients hospitalisés. On a
exclu trois patients pour diagnostic secondaire soit
d’asthme soit de maladie pulmonaire obstructive. Il
y avait 60 hommes et 40 femmes. Leur âge moyen
était de 36,8 ans (DS = 14,7 ; hommes 36,4 et
femmes 37,4 ans). Cinquante-deux patients habi-
taient à Kumasi les urbains ») et 48 (« les
ruraux ») résidaient à l’extérieur de Kumasi, dans
des villes et des villages situés à 80 km ou moins.
Aspect
Les symptômes précoces de leur maladie compor-
taient la toux (94%), la production de crachats
(70%), l’hémoptysie (26%), la fièvre (78%), des
douleurs thoraciques (74%), la perte de poids
(54%) et l’anorexie (21%). A la radiographie du
thorax, le nombre moyen de zones entreprises par
la densification au moment du diagnostic était de
4,7 sur 6. Au total, ce nombre était semblable que
ce soit après un délai total > 3 mois ou 3 mois
(respectivement 4,8 et 4,7 zones). Toutefois, 25
(93%) patients hospitalisés présentaient cinq ou
plus de 5 zones touchées contre 38 (54%) chez les
patients externes (P<0.05).
Délai de diagnostic chez les Ghanéens adultes 3
b c d
a
Début des Première Diagnostic Mise en route
symptômes consultation du traitement
Figure Les trois composantes du délai total pour le diagnostic
a) le « délai total » : la période entre le début des symptômes et
la mise en route du traitement ; b) le « délai-patient : période
entre le début des symptômes et le premier recours à un
praticien de la médecine conventionnelle ; c) le « délai-
médecin » : période entre la première visite chez le médecin et
son diagnostic ; d) le « délai-traitement : délai qui sépare le
diagnostic et la mise en route du traitement.
Délai total
La Figure montre les trois composantes du délai
total qui ont été analysés, à savoir le « délai-
patient », le délai-médecin » et le délai-traitement.
Le délai total médian depuis le début des symp-
mes jusqu’au diagnostic était de 4 mois (moyen-
ne 7,7 mois ; extrêmes 2 semaines à 6 ans). Le
délai total était > 1 mois chez 83% des patients, >
3 mois chez 56%, > 6 mois chez 44% et > 1 an
chez 8% des patients. Le Tableau 1 montre les
caractéristiques des 100 patients de l’étude et la
proportion de chaque sous-groupe pour lequel le
délai total dépassait 3 mois. Les patients hospitali-
sés, les femmes, les sujets âgés de moins de 40 ans
et ceux qui n’avaient pas d’emploi étaient plus sus-
ceptibles d’avoir un délai supérieur à 3 mois, quoi
que les chiffres n’atteignent pas la signification
statistique. C’est la résidence rurale qui représente
le facteur le plus fortement associé au délai total
prolongé (P = 0,001).
Délai-médecin et délai-patient
Le Tableau 2 montre la décomposition du délai
total en délai-patient et délai-médecin. Concernant
Tableau 1 Caractéristiques des patients (n = 100) et analyse
des sous-groupes montrant le délai total médian et les
proportions de patients avec un délai total > 3 mois
Charactéris- nDélai mé- % des patients Valeur
tiques des dian total avec délai de P *
patients (mois) >3/12
Hommes 60 4 50.8
Femmes 40 6 63.4 >0.1
Age >40 38 3 47.4
Age 40 62 5 61.3 >0.1
A charge 16 6 62.5
Travailleur 84 4 54.8 >0.1
Tribu Akan 86 5 57.0
Tribu non-Akan 14 4 50.0 >0.1
Résidence urbaine 52 3 40.4
Résidence rurale 48 6 72.9 0.001
Patient hospitalisé 30 6 63.3
Patient externe 70 4 52.9 0.07
* La valeur P se rapporte à la comparaison statistique des
proportions de patients avec un délai > 3 mois
la population totale de l’étude, le délai-médecin
médian était le double du délai-patient médian (8
semaines vs 4 semaines) et le délai-médecin égalait
ou dépassait le délai-patient chez 55% des patients.
Le délai patient était > 1 mois chez 46% des pa-
tients et > 3 mois chez 23%, tandis que le délai-
médecin était > 1 mois chez 58% et > 3 mois chez
36% d’entre eux.
Le Tableau 2 donne une sous-analyse de ces
délais en comparant hommes et femmes, patients
hospitalisés et externes et habitants ruraux et
urbains. Il faut noter que le délai-médecin médian
était trois fois plus important pour les femmes que
pour les hommes : chez 77,5 % des femmes, le
délai excédait 4 semaines comparé à 43,1 % des
hommes (P < 0,001). Indépendamment du sexe, le
délai-médecin médian était 3,9 fois plus élevé chez
les patients ruraux que chez les patients urbains : le
délai-médecin dépassait 4 semaines chez 72,9%
des habitants de zones rurales versus 41,2% chez
les habitants de zones urbaines (P = 0,001) . De
Tableau 2 Analyse du délai total, du délai-médecin et du délai-patient
Moyenne Médiane
Tous les patients (n=100)
Délai total (mois) 7.7 4
Délai médicin (semaines) 18.1 8
Délai patient (semaines) 12.8 4
Hommes / femmes Hommes Femmes Hommes Femmes
Délai total (mois) 8.1 7 4 6
Délai médecin (semaines) 19.2 16.7 4 12
Délai patient (semaines) 14.0 11.2 4 4
Patients hospitalisés/externes Hospitalisés Externes Hospitalisés Externes
Délai total (mois) 10.2 6.6 6 4
Délai médecin (semaines) 31.4 12.4 11.5 5
Délai patient (semaines) 10.8 13.7 3 4
Habitants urbains/ruraux Urbains Ruraux Urbains Ruraux
Délai total (mois) 6.1 9.5 3 6
Délai médecin (semaines) 9.6 27.3 4 15.5
Délai patient (semaines) 13.8 12.0 3.5 4
4 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
Tableau 3 Moyens de recours consultés en premier lieu par
les patients et proportion de patients avec diagnostic final,
adressés au Dispensaire thoracique par chacun d’eux
Sources de soins Patients en Proportion de
de santé quête d’aide tous les patients
(%) diagnostiqués
(%)
Hôpitaux / Dispensaires
Hôpital du gouvernement 23 58
central
Privés 28 17
Hôpital / Dispensaire du 31 4
gouvernement
Mission chrétienne 3 2
Homéopathie musulmane 4 0
Individus
Médecine par les herbes 3 0
Eglise spirituelle 1 0
Médecin sorcier 1 0
Autres 6*19
* comprenant trois amies infirmières, deux membres de la
famille non médecins, et un dans un hôpital à l’étranger
comprenant 16 malades adressés par des membres de la
famille ou des amis et deux venus par eux mêmes.
même, le délai-médecin médian était 3,8 fois plus
élevé chez les patients hospitalisés que chez les
patients externes : chez 70% des patients internes,
le délai était supérieur à 4 semaines, comparé à
45,7% des patients externes (P<0,005). L’on n’a
pas noté de différences significatives dans la com-
paraison hommes/femmes, patients hospitalisés/
externes ou habitants de zones rurales/urbaines.
Consultations médicales
Le nombre moyen de consultations médicales
avant le diagnostic fut de 4,2 pour l’ensemble des
patients. Toutefois, cette moyenne était supérieure
pour les femmes (5,3), les patients hospitalisés
(4,9) et les habitants dorigine rurale (5,1), paral-
lèlement à la prolongation du délai-médecin dans
ces trois groupes.
Délai diagnostic-traitement
La médiane du délai pour la mise en route du
traitement après le diagnostic était de 0 jours
(moyenne 1,34 jours ; extrêmes 0-14 jours).
Origines des soins de santé
Le Tableau 3 montre les origines des soins de santé
que les patients ont consultés en premier lieu : 85%
des patients ont eu recours d’abord à un praticien
médical conventionnel dans des institutions soit
gouvernementales, privées ou confessionnelles, et
9% ont consulté d’abord des guérisseurs tradition-
nels. Toutefois, 62,5% des patients ruraux avaient
consulté des guérisseurs traditionnels à un moment
donné, au cours de leur maladie versus 5,7% pour
les patients urbains (P< 0,0001).
Pour la majorité des patients (58%), le diagnos-
tic final a été porté au niveau de l’hôpital central
d’enseignement en ville. Peu de diagnostics ont été
faits dans les autres cliniques et hôpitaux du
gouvernement, la plupart des patients ayant été
adressés à l’hôpital central pour des investigations
complémentaires ; 47% des patients ont consulté
plus d’une catégorie de praticien médical avant
d’arriver à leur diagnostic. Il faut noter que seule-
ment 18% des patients ruraux ont été diagnostiqués
au niveau de leurs services de santé locaux.
Dix huit patients ont été amenés par un membre
de la famille ou se sont présentés d’eux mêmes au
Dispensaire thoracique avant même que le diag-
nostic définitif ne soit porté, bien que 17 d’entre
eux aient consulté précédemment un praticien
dical conventionnel.
Délai-médecin et origines des soins de santé
A l’hôpital rural gouvernemental ou dans les clini-
ques et les institutions privées, le délai-médecin
médian était significativement plus long qu’à
l’hôpital central (respectivement 12, 10 et 2 semai-
nes, P< 0.05). De même, dans ces institutions, le
taux de défaut de réalisation de l’examen micro-
scopique des crachats était beaucoup plus élevé
qu’à l’hôpital central (respectivement, 79%, 76%,
et 25%, P< 0,05). Il y avait une corrélation quasi
parfaite entre le délai-médecin médian et les taux
de défaut de l’examen microscopique (r = 0,99).
DISCUSSION
Cette étude met en évidence le délai prolongé entre
le début des symptômes des patients, le diagnostic
de tuberculose pulmonaire à bacilloscopie positive
et le début du traitement, dans cette région du
Ghana. Le délai médian total est similaire à celui
trouvée au Malawi en 1988 ;10 56% des patients
avaient un délai total supérieur à 3 mois : ceci a
d’importantes implications en matière de santé
publique en raison d’une période prolongée de
contagiosité élevée. En moyenne de 2 à 5
personnes (extrêmes 0-6) dorment dans la même
chambre que ces patients et beaucoup d’autres sont
en contact étroit avec eux chaque jour.
La maladie atteint un stade radiologique avancé
dans une majorité de patients, probablement par
suite du délai prolongé du diagnostic, particulière-
ment chez ceux nécessitant une hospitalisation.
Nous avons trouvé que l’étendue radiologique de
la maladie est en corrélation avec la mortalité et
que même si les patients guérissent de leur
maladie, les patients atteints de formes aussi
Délai de diagnostic chez les Ghanéens adultes 5
avancées développent fréquemment une fibrose
pulmonaire chronique, des cavités résiduelles et
des bronchectasies, conduisant à une morbidité
chronique et à une mortalité tardive.
Nous avons émis l’hypothèse que le besoin
d’une hospitalisation pourrait être en corrélation
avec un délai total prolongé du diagnostic. Le délai
médian, en effet, était plus prolongé pour les
patients hospitalisés, mais la différence (P = 0,7)
n’est pas tout à fait arrivée au seuil de signification
statistique. Un facteur confondant possible pour ce
résultat attendu est que les patients hospitalisés
étaient plus susceptibles de souffrir d’une infection
par le VIH. Ailleurs, ce type de patients ont en
général un délai total de diagnostic plus court.11 Le
statut VIH des patients de notre étude n’était pas
connu et de la sorte, l’effet de cette variable sur les
délais totaux , celui du médecin et celui du patient
n’a pas pu être déterminé. Toutefois, nous avons
trouvé précédemment que les patients avec une co-
infection par le VIH se présentent en moyenne 0,6
mois plus t que ceux atteints d’une tuberculose
pulmonaire isolée (données non publiées).
Le fait de résider à la campagne est le facteur
principal associé à une prolongation du délai total.
Malgré le fait que les habitants de la campagne
sont susceptibles d’avoir un accès plus difficile aux
services de santé et qu’ils recourent plus fréquem-
ment aux guérisseurs traditionnels, on n’a pas noté
d’augmentation du délai-patient parmi ces derniers
par comparaison avec les habitants des villes.
L’augmentation du délai total était en fait
attribuable à une augmentation du délai lié au
médecin : le délai médian du médecin à la
campagne est 3,9 fois supérieur à celui observé
pour les habitants des villes. Ceci suggère que les
médecins en zone rurale diagnostiquent piètrement
la tuberculose, ce qui se reflète dans un nombre
accru de consultations médicales précédant le
diagnostic ou le transfert, dans les taux beaucoup
plus bas de demande de bacilloscopie directe de
l’expectoration, dans les faibles taux de diagnostic
et dans un recours excessif à l’hôpital central pour
le diagnostic final. L’organisation du traitement de
la tuberculose dans la Région d’Ashanti, y compris
l’attribution des ressources pour le diagnostic, a été
sur-centralisée, ce qui a fait que les habitants des
campagnes ont été défavorisés.
Cette étude a démontré que les soins de santé
dont bénéficient les femmes sont de moindre
qualité. Il faut noter qu’une proportion significa-
tivement plus élevée des patients transférés aux
Dispensaires de la tuberculose ou diagnostiqués à
ces Dispensaires sont de sexe masculin (hommes :
femmes = 1,7 :1). Ceci peut refléter une authen-
tique différence de la prévalence de la maladie.
Toutefois, cette étude soulève le problème d’une
qualité différente de l’administration des soins aux
femmes dont le comportement de recours aux soins
est similaire à celui des hommes. Ceci pourrait
entraîner une déficience du diagnostic de la
tuberculose chez les femmes. S’il en est ainsi, un
impact secondaire sérieux pourrait en résulter sur
l’incidence de la tuberculose chez les enfants à
domicile.
La mise en évidence d’un délai-médecin
dian médical 2,3 fois supérieur chez les
hospitalisés par comparaison aux malades externes
(P<0,05) contraste avec le délai-patient identique
dans les deux groupes. Ceci montre qu’une mau-
vaise condition clinique au moment du diagnostic
est corrélée avec une augmentation du délai-
médecin, mais non du délai-patient.
La présente étude dissipe l’idée défendue
localement par les médecins praticiens que la
consultation tardive de beaucoup de nos patients
est largement «la faute du patient ». Au contraire,
chez plus de la moitié des patients, le délai-
médecin dépasse le délai-patient, ce qui reflète une
inefficience des services médicaux dans le diag-
nostic de la tuberculose pulmonaire, tout comme
on l’a mis en évidence en Afrique du Sud pour le
diagnostic de la tuberculose infantile.9 Le délai-
médecin est le plus important chez les praticiens
privés et dans les institutions périphériques du
gouvernement. Le délai-médecin médian est en
corrélation très étroite avec les taux de défaut de
demande d’une bacilloscopie de l’expectoration,
test-clé le plus spécifique qui soit disponible pour
le diagnostic de la tuberculose pulmonaire à
bacilloscopie positive dans ce contexte.
Le délai entre le diagnostic et le début du traite-
ment est considérablement plus court que celui
trouvé en Australie,7 et est le reflet d’une accessibi-
lité aisée et ouverte au Dispensaire thoracique.
D’autre part, le fait que 18% des patients consul-
taient spontanément ou étaient amenés par leur
famille montre que les patients avaient confiance
dans ses services.
On peut conclure que le délai dans le diagnostic
de la tuberculose pulmonaire dans la Région
d’Ashanti au Ghana, était inacceptablement trop
élevé en 1995, et que ceci était dû à un délai-
patient significatif, et surtout à un délai-médecin
prolongé. Depuis le moment de cette étude, le
Programme National de la Tuberculose du
Ministère de la Santé a été appliqué dans la Région
d’Ashanti . Le programme a décentralisé la prise
en charge de la tuberculose vers les niveaux du
district et du sous-district, avec une formation
intensive du personnel de santé et insisté surtout
sur le diagnostic, recourant à une bacilloscopie de
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