La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIX - no 2 - mars-avril 2014 | 67
Les formes disséminées se manifestent en général
dès la première semaine de vie par des symptômes
non spécifiques (refus de boire, apnée, léthargie,
dyspnée, ictère, fièvre, etc.). En l’absence d’éruption
vésiculaire (50 % des cas), le diagnostic est difficile,
mais les signes sont plus spécifiques en cas d’atteinte
du système nerveux central (SNC) [50 % des formes
disséminées], notamment en cas de convulsions. Le
tableau est celui d’un sepsis néonatal grave avec
éruption vésiculeuse et nécrotique diffuse, hépatite
nécrosante, hémorragie cutanéomuqueuse diffuse
avec thrombopénie, pneumopathie interstitielle
grave, myocardite, entérocolite nécrosante, œsopha-
gite, kératite, etc. Le pronostic, qu’il y ait ou non
atteinte du SNC, est catastrophique en l’absence
de traitement : 80 % de mortalité, et de lourdes
séquelles chez plus de la moitié des survivants. Sous
aciclovir, le taux de mortalité chute à 50 %, mais la
moitié des survivants souffre de lourdes séquelles.
Les formes localisées au SNC se manifestent plus
tardivement (11 jours à 4 semaines après la nais-
sance), par une méningoencéphalite. Le pronostic
est également sombre, puisque, même sous traite-
ment, le risque de décès ou de séquelles graves est
d’environ 50 %.
Les formes localisées cutanéomuqueuses sont les
plus caractéristiques mais restent rarement isolées
(seulement 10 % des cas) : la maladie de 70 % des
enfants infectés commence par ce type d’atteinte
(conjonctivite, kératite ou choriorétinite, lésions
vésiculaires, gingivostomatite) avant d’évoluer vers
une forme généralisée ou localisée au SNC. Avec un
traitement spécifique, 85 % des enfants présentant
isolément le tableau d’atteinte cutanéomuqueuse
guériront sans séquelles. Toutefois, le risque prin-
cipal de cette forme localisée est la survenue de
récurrences susceptibles de se manifester pendant
plusieurs années.
Dépistage et diagnostic biologique
L’isolement du virus constitue la méthode de réfé-
rence. Toutefois, les tests de biologie moléculaire
sont plus rapides et plus sensibles que la culture
virale. Dans la mesure où les antiviraux disponibles
limitent la progression de l’infection vers le SNC et la
dissémination, ils modifient nettement le pronostic
de l’infection herpétique néonatale. Un diagnostic
rapide permettra donc l’instauration précoce du trai-
tement. Le virus de l’herpès étant fragile, il convient
d’effectuer les prélèvements avant l’application d’un
désinfectant puis de les placer immédiatement dans
un milieu de transport adéquat avant l’achemine-
ment au laboratoire qui réalisera l’analyse.
Chez la mère, il s’agit du prélèvement des lésions
génitales. En cas d’antécédents d’herpès génital, un
prélèvement au niveau de la vulve ou du col utérin
peut également être pratiqué quelques jours avant
l’accouchement ou le jour de l’accouchement, à la
recherche d’une excrétion virale asymptomatique.
À l’entrée en travail, devant des lésions suspectes,
il faut réaliser un diagnostic virologique rapide par
PCR. Chez le nouveau-né, plusieurs sites de prélè-
vements sont possibles : lésions cutanées, urines,
pharynx, yeux, liquide céphalorachidien (LCR), etc.
Les prélèvements doivent être réalisés entre 48 et
72 heures de vie.
Il est possible de réaliser des sérologies spécifiques
de type HSV-1 ou 2, mais les performances des tests
utilisés sont variables en termes de sensibilité et de
spécificité, tandis que le délai d’apparition des anti-
corps peut varier de 3 semaines à 3 mois. De plus, la
recherche des anticorps spécifiques ne présente pas
d’intérêt pour le diagnostic des infections génitales.
Prise en charge, traitement
et prévention
Les propositions de prise en charge ont été formu-
lées au cours d’une conférence de consensus (2001).
En matière de diagnostic, l’interrogatoire de la
patiente et de son partenaire est fondamental.
Une sérologie pour le dépistage systématique des
couples sérodifférents n’est pas recommandée. En
cas d’épisode clinique évocateur pendant la gros-
sesse, un examen virologique est souhaitable afin
de confirmer le diagnostic.
Le traitement antiviral en cours de grossesse est
recommandé pour des indications restreintes,
lorsqu’un bénéfice est attendu pour le fœtus ou la
mère. En cas de primo-infection durant le dernier
mois, un traitement par aciclovir (200 mg × 5/j) ou
valaciclovir (500 mg × 2/j) sera instauré, par voie
orale ou, éventuellement, par voie veineuse (i.v.)
dans les formes les plus sévères (d’autant qu’il existe
dans cette situation un risque d’apparition d’une
forme grave disséminée de l’infection herpétique
avec hépatite chez la mère) et sera poursuivi jusqu’à
l’accouchement. En cas de primo-infection avant
le dernier mois, le même traitement sera instauré
pendant 10 jours, puis un traitement par aciclovir
(400 mg × 3/j) de la trente-sixième SA jusqu’à
l’accouchement est recommandé pour diminuer
le nombre de récurrences au moment du travail.