Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. III - n° 2 - avril-mai-juin 2014
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Bactéries et cancer
dossier thématique
dysplasies et de cancers. Cette classifi cation OLGA a
été testée dans une étude transversale chez 439 sujets
dont 4 développaient des lésions dysplasiques et 1, un
cancer invasif. Il y avait une bonne corrélation entre
la sévérité de la gastrite (scores 3 et 4) et la présence
de lésions dysplasiques. Une étude menée chez 99
sujets suivis pendant 12 ans a montré que le cancer
apparaissait chez ceux ayant une atrophie sévère et
diff use selon cette classifi cation (15). Cette nouvelle
classifi cation, complétée par la prise en compte de
la métaplasie intestinale, pourrait être utile pour
sélectionner les malades devant être surveillés par
endoscopie. La métaplasie intestinale est plus faci-
lement identifi ée par les anatomopathologistes que
l’atrophie et permet une évaluation plus reproductible
de l’extension des lésions.
La détection des lésions prénéoplasiques
repose sur la pratique systématique
debiopsies gastriques au moment
de l’endoscopie
La localisation et le nombre des prélèvements ont fait
l’objet de beaucoup d’études qui concluent que le dépis-
tage de l’atrophie et de la métaplasie nécessite la prise de
3 biopsies antrales (dont l’une sur l’angle) et de 2 biopsies
du corps gastrique (15). La présence d’une métaplasie
intestinale sur les prélèvements de la petite courbure
antrale et fundique est un facteur de risque majeur de
cancer avec un odds-ratio de 12,2 (IC95 : 2,0-72,9) [16]. Ce
risque, établi par une étude cas-témoins comportant de
petits eff ectifs, doit être confi rmé par une étude pros-
pective de cohorte.
La surveillance des patients ayant une métaplasie
intestinale est mal établie. Les études disponibles ne
sont ni prospectives ni réalisées à partir d’une cohorte
homogène. Les incidences annuelles varient de 0 % à
73 % selon les études (17). Un avis d’expert européen a
suggéré une surveillance par endoscopie avec biopsies
gastriques tous les 3 ans (18). En cas de dysplasie de bas
grade, une surveillance annuelle était recommandée.
L’évolution de la dysplasie a été évaluée par le registre
national néerlandais PALGA. En cas de dysplasie de
bas grade sur des prélèvements gastriques initiaux, le
risque de cancer était évalué à près de 4 % à 10 ans (17).
Les antécédents de cancer gastrique chez un apparenté
du premier degré accroissent le risque de cancer en cas
d’infection à H. pylori. Une réunion d’experts avait d’ail-
leurs conclu en 2005 à la nécessité de la rechercher et de
la traiter chez les patients ayant un antécédent familial
de cancer gastrique au premier degré. Une méta-ana-
lyse récente confi rme une augmentation des lésions
prénéoplasiques en cas d’infection à H. pylori chez les
patients avec antécédent familial comparativement aux
témoins (19). Le dépistage est également recommandé
par la récente révision du consensus européen sur H.
pylori (20).
Bien que les auteurs s’entendent sur la nécessité de
surveiller les patients ayant une atrophie diff use de la
muqueuse gastrique et de la métaplasie intestinale, ni
le risque de progression vers le cancer ni la fréquence
de la surveillance ne sont bien défi nis.
Des facteurs environnementaux tels que l’exposition aux
nitrates, aux nitrites, à une forte consommation de sel et/ ou
de viande, et un faible statut socio-économique sont
également liés à un accroissement du risque de cancer.
Les lésions précancéreuses sont associées à la consomma-
tion de tabac chez les patients infectés par H. pylori (21).
Les fumeurs actifs ont un risque augmenté de dysplasie
(OR = 2,14 ; IC95 : 1,48-3,08) et de métaplasie intestinale
(OR = 1,33 ; IC95 : 1,06-1,68), mais pas d’atrophie gastrique.
Il existe par ailleurs une relation linéaire entre le nombre
de cigarettes fumées par jour et, à la fois, la dysplasie
et la métaplasie intestinales. Une étude de cohorte de
2 436 patients chinois, suivis durant 4,5 ans, est parvenue
aux mêmes conclusions : une consommation de tabac
depuis plus de 25 ans était associée de façon signifi cative
à une évolution vers la dysplasie ou le cancer gastrique
(OR = 1,6 ; IC95 : 1,0-2,1) [22]. Les traitements antisécrétoires
prolongés pourraient accélérer l’extension de l’atrophie
muqueuse chez les patients infectés (23). L’inhibition
de la sécrétion acide par les inhibiteurs de la pompe à
protons (IPP) favorise la prolifération de bactéries dans
l’estomac. Aucune donnée récente sur l’évolution du
microbiote n’est connue sous traitement par IPP (10, 24).
L’achlorhydrie associée à l’infl ammation prédominante
dans le corps gastrique pourrait favoriser la carcino-
genèse par eff et de certaines interleukines sur la survie
et la migration des cellules tumorales (25).
Conclusion
La métaplasie intestinale et la dysplasie gastrique sont
des états précancéreux qui ne régressent pas malgré
l’éradication de H. pylori. Bien qu’aucune des études
publiées n’adopte un réel schéma prospectif, une sur-
veillance tous les 3 ans par endoscopie gastrique avec
biopsies étagées a été recommandée pour la méta-
plasie intestinale et une surveillance annuelle en cas
de dysplasie de bas grade. Le microbiote gastrique se
modifi e avec l’évolution vers l’atrophie, mais son rôle
dans l’évolution vers le cancer est encore inconnu. ■
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Références
L’auteur n’a pas précisé ses éventuels liens d’intérêts.