RÉFORME FISCALE : LES ENJEUX POLITIQUES
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Dossier
induit des dépenses de toutes les administrations et ministères, l’éche-
nillage budgétaire, devrait apporter des ressources supplémentaires (3).
Néanmoins, 10 milliards restent à trouver selon le Gouvernement, c’est
pourquoi le troisième élément de sa stratégie consiste à s’attaquer aux
niches fi scales.
Quelles seront les niches concernées ? On pourrait estimer que, dans
un contexte de crise, il faudrait remettre à plat toutes celles qui n’ont
pas un rendement évident en termes d’emplois et de croissance. Deux
niches en particulier sont concernées. La première, celle sur les heures
supplémentaires, issue de la loi dite « Tepa » (4), n’a pas induit les résul-
tats escomptés puisqu’elle était adaptée à un contexte de tension sur
le marché de l’emploi. En effet, le recours aux heures supplémentaires
devait être facilité par leur défi scalisation, face à un surcroît d’activité
dans les secteurs connaissant une pénurie de main-d’œuvre. Mais, dans
le contexte actuel de chômage, cette niche est à l’origine d’une perte
d’effi cacité économique. Le Gouvernement n’a toutefois pas voulu
s’y attaquer car cela aurait décrédibilisé la stratégie économique du
président de la République, Nicolas Sarkozy.
La seconde est la réduction du montant de la taxe sur la valeur ajoutée
(TVA) pour la restauration et l’hôtellerie. Des études ont montré la
contre-productivité de cette mesure. En effet, son effi cacité en termes
de création d’emplois est ridicule et le coût des emplois créés ou sauve-
gardés est astronomique. Cette niche n’a pas non plus été modifi ée
car l’actuel président de la République ne voulait pas désavouer cette
mesure venant de son prédécesseur, Jacques Chirac. En fait, elle a seule-
ment servi à améliorer la rentabilité de l’activité de restauration. C’est
une incohérence économique, fi scale et de santé publique. D’ailleurs,
paradoxalement, on a aligné la taxation de la restauration sur les fast food
alors qu’il aurait fallu élever la taxation de ces dernières étant donné
leur responsabilité en matière d’obésité. Supprimer cette mesure aurait
permis d’épargner trois milliards d’euros à l’État tandis que l’exonération
fi scale des heures supplémentaires lui coûte près de 4 milliards d’euros
tous les ans. Avec ces 7 milliards, le problème aurait pu être en grande
partie résolu.
Le Gouvernement aurait pu également revenir sur le bouclier fi scal
mais l’enjeu fi nancier était moins important. En effet son coût, de l’ordre
de 680 millions d’euros par an, est loin des 3 et 4 milliards des niches
citées précédemment. D’autres niches fi scales onéreuses à l’effi cacité
économique douteuse, telles les niches fi scales « Dom Tom », auraient
également pu être concernées. Ainsi, la loi Girardin (5) qui permet
aux ménages très aisés d’investir avec de fort rendement dans du
3. Selon le projet de loi de fi nances pour 2011 annoncé le 29 septembre 2010, les dépenses de fonctionnement et d’intervention
devraient être diminuées de 5 %, 7 milliards d’euros d’économie devraient en résulter.
4. La loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat.
5. Loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l’Outre-mer.