Médicaments et toxiques :
La capacité de certains médicaments à engendrer une hyperleucocytose
est bien connue ( lithium, ranitidine, amiodarone, héparine). Certains
toxiques génèrent aussi une polynucléose neutrophile : phencyclidine,
marijuana, oxyde de carbone, tétrachlorure de carbone, benzène,
phénylpropanolamine, huiles toxiques, histamine, plomb, mercure, alcool
(dans le cadre de l’hépatite alcoolique).
Tabagisme :
La consommation de cigarettes est significativement associée à une
augmentation des diverses lignées leucocytaires. Elle est particulièrement
notable pour les PNN. Cette augmentation est proportionnelle au nombre
de cigarettes fumées par jour, mais peu influencée par l’ancienneté du
tabagisme. Ce fait doit être pris en compte dans l’interprétation de toute
polynucléose neutrophile.
Le tabagisme est également responsable d’une hyperlymphocytose qui se
majore avec l’ancienneté du tabagisme.
Cette augmentation du nombre des leucocytes chez les grands fumeurs
peut être due à l'augmentation des catécholamines circulantes, à la
nicotine ou encore à l'existence d'une infection périodontale chronique.
Le tabagisme peut expliquer des neutrophilies allant jusqu’à 14 000 et des
leucocytoses jusqu’à 17 000 / mm
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au maximum.
D’autre part, la nicotine provoque une hémoconcentration qui élève
artificiellement le taux d’hémoglobine et l’hématocrite.
Etiologies diverses :
Les suites opératoires, l'anesthésie générale, la grossesse, la pancréatite
chronique sont des étiologies classiques des neutrophilies.
DIAGNOSTIC D'UNE NEUTROPHILIE
Polynucléose neutrophile aiguë ou chronique ?
Neutrophilies aiguës :
L'interprétation d'une neutrophilie fugace doit faire soulever l'hypothèse
d'un événement intercurrent susceptible de la provoquer. Ainsi, l'exercice
musculaire, le changement brusque de température ou encore une émotion
suffisent à induire une hyperleucocytose neutrophile dans les minutes qui
suivent le stimulus ; elle est alors de courte durée. Des circonstances
particulières comme une intervention chirurgicale, une anesthésie ou
encore un choc électrique peuvent être en cause.
Les hyperleucocytoses rencontrées dans la phase de début d'une infection
virale sont le plus souvent transitoires ; elles s'intègrent dans un contexte
clinique et biologique le plus souvent évocateur du diagnostic.
Neutrophilies chroniques :
L'interrogatoire doit rechercher une prise médicamenteuse prolongée
(lithium, ranitidine, amiodarone…), une exposition à des toxiques ou encore
des conditions environnementales particulières.
Polynucléose neutrophile fébrile infectieuse ou non ?
Dans un contexte fébrile, le diagnostic de la maladie infectieuse doit être
tout d'abord évoqué et les examens paracliniques correspondant doivent
être pratiqués (hémocultures, examens bactériologiques orientés sur les
données cliniques, premier prélèvement sérologique).
Si cette enquête est négative, l'hyperleucocytose prendra place dans le
cadre des polynucléoses fébriles non infectieuses ou encore des
proliférations myéloïdes justifiant de faire appel aux examens
complémentaires hématologiques.
Existence d’un syndrome algique ou non ?
La douleur n'est parfois pas spontanément rapportée par le malade. Elle
peut lui sembler banale dans un contexte fébrile. Qu'elle soit spontanée ou
provoquée, la douleur, de par ses caractères et ses facteurs déclenchants,
suffit parfois à évoquer un diagnostic.
*Les céphalées chez un sujet âgé, fébrile, amaigri, seront aisément
rapportées à une maladie de Horton lorsque l'interrogatoire aura précisé
leur localisation temporale, leur horaire matinal, l'association à une
claudication intermittente douloureuse de la mâchoire (lors des efforts de
mastication), ou une douleur linguale.
*La découverte de myalgies des ceintures dans ce contexte (pseudo-
polyarthrite rhizomélique) justifiera ainsi la réalisation d'une biopsie de
l'artère temporale.
*L'existence d'arthralgies et de myalgies chez un sujet plus jeune avec une
hyperleucocytose à PNN évoquera une maladie de Still si des macules
rosées à la racine des membres et sur le tronc sont notées, ainsi qu'une
polyadénopathie ou d'autres manifestations viscérales. Le diagnostic d'une
polyarthrite rhumatoïde ou d'une dermatomyosite est plus aisé.
*La recherche d'un syndrome algique n'oubliera pas l'œil. En effet, une
inflammation de l'uvée pourra s'exprimer par une douleur qui imposera un
examen ophtalmologique. De nombreuses maladies inflammatoires
systémiques s'accompagnent d'une atteinte oculaire, que se soit la maladie
de Behçet, la polychondrite chronique atrophiante ou la périartérite
noueuse.
*Les douleurs abdominales survenant par accès aigus pseudochirurgicaux
suggéreront, chez un sujet originaire de l'Est méditerranéen, une maladie
périodique. Dans d'autres contextes, l'hyperleucocytose pourra être
rattachée à une nécrose tumorale ou encore à une hépatite alcoolique.
*L'existence de frissons : De véritables frissons pseudo-septiques peuvent
être observés au cours de maladies systémiques inflammatoires.
Existence de signes cutanés ou non ?
Le tégument, aisément accessible à l'inspection et à la palpation, est un
organe cible de choix de nombreuses affections neutrophiliques.
Les dermatoses neutrophiliques telles que le syndrome de Sweet et le
psoriasis pustuleux de Zumbusch sont de diagnostic facile.
La plupart des maladies inflammatoires systématiques comportent des
signes cutanés spécifiques ou non. Ils témoignent, la plupart du temps, de
l'existence d'une vascularite qui sera démontrée par l'examen histologique
de la lésion cutanée.
Le purpura infiltré palpable est le maître symptôme des vascularites.
Prédominant sur les membres inférieurs, évoluant par poussées, souvent
déclenchées par orthostatisme, tantôt bulleux, tantôt nécrotique, il présente
des caractères polymorphes. Associé à des nodules dermiques, à des
macules érythémateuses ou à des maculopapules, il conduira à rechercher
des manifestations tissulaires et viscérales associées dont certaines
représentent un élément de pronostique (atteinte rénale, atteinte
neurologique…).
Le livedo peut résulter lui aussi d'une vascularite : il n'est pas spécifique
d'une seule angéite.
Les aphtes buccaux et génitaux de la maladie de Behçet sont plus
spécifiques, comme le sont les nodules inflammatoires ou les pustules
stériles au point de ponction.
En présence d'une périchondrite des cartilages superficiels du pavillon
de l'oreille, le diagnostic de polychondrite chronique atrophiante sera
évoqué. Ces signes peuvent manquer lors de l'examen du patient et ils
doivent être recherchés par l'interrogatoire.
Examen neurologique normal ou non ?
Devant une multinévrite, dans un contexte fébrile avec hyperleucocytose , il
faudra penser au diagnostic de périartérite noueuse. L'amyotrophie est
rapide, elle s'accompagne de myalgies spontanées et provoquées.
Examen pulmonaire normal ou non ?
L'angéite granulomateuse de Churg et Strauss, de même que la maladie
de Wegener réalisent une angéite systémique à tropisme pulmonaire.
Cependant, de nombreuses collagénoses, ou d'autres angéites,
s'accompagnent d'une symptomatologie pulmonaire clinique et
radiologique.
Existe-t-il des signes biologiques ?
Le diagnostic biologique d’une polynucléose neutrophile requiert un certain
nombre d’examens dans le but de distinguer une polynucléose
réactionnelle (infection, processus inflammatoire….) d’une hémopathie
maligne. Pour cela, la démarche diagnostique consiste à rechercher dans
un premier temps une pathologie responsable de la polynucléose et, en
cas de résultat négatif, à effectuer des investigations hématologiques pour
identifier une hémopathie, notamment un syndrome myéloprolifératif.