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CNCH - CARDIO H - N°39
DURÉE DE LA BITHÉRAPIE APRÈS UN SCA QUID DES RECOMMANDATIONS DANS LA VRAIE VIE ?
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3/ Par contre, on observe une
importante discordance entre
les recommandations et les
données de vraie vie sur la pro-
longation du traitement AAP
après 12 mois. En eet plus
de 50 % des patients main-
tiennent cette bithérapie au
long cours sans qu’aucune
recommandation, à l’époque,
ne valide cette attitude (suivi
à 1 an de cette cohorte fait en
2015).
Ces données sont cohérentes
avec celles déjà observées
dans FASTMI 2005 où 75 % des
patients étaient encore sous
DAPT à 1 an et 43 % à 2 ans de
leur SCA (8).
Plus inquiétant, le statut cli-
nique du patient, déterminant
majeur dans le choix de la du-
rée de cette bithérapie, semble
totalement « oublié » dans la
vraie vie comme le montre
le taux étonnement élevé et
« hors recommandation » de
DAPT maintenue à plus de 6
mois (82,2%) et même à > 12
mois (54,6%) dans la popula-
tion d’angor stable.
En résumé, que les patients
se soient présentés pour un
SCA ou pour un angor stable,
on observe approximative-
ment le même taux anoma-
lement élévé (plus de 50 %)
de patients qui continuent
leur bithérapie AAP à plus
de 12 mois de la procédure
d’angioplastie coronaire (-
gure 3).
On peut alors espérer qu’il
s’agisse des patients pouvant
le plus bénécier de cette stra-
tégie, à savoir les hauts risques
ischémiques, comme le sug-
gèrent les études PEGASUS et
DAPT MI (2,9).
Néanmoins cet espoir ne ré-
siste malheureusement pas,
tant aux analyses faites dans
notre cohorte, qu’à celle de
FASTMI. En eet dans ces 2
registres, aucune corrélation
n’est retrouvée entre la popu-
lation continuant sa bithéra-
pie au delà de 12 mois et le
risque ischémique (évalué par
le DAPT score < ou >=2).
Inversement la sous population
de patients sous anticoagu-
lant, et donc à très haut risque
hémorragique, continuent, de
façon injustiée, dans 28 %
des cas une trithérapie après le
6éme mois, leur faisant courir,
alors, un sur-risque signicatif
d’évènements hémorragiques
et même de mortalité comme
nous l’a démontré l’étude
WOEST (10).
Il semble donc que la prolon-
gation de la bithérapie après
1 an d’une revascularisa-
tion coronaire percutanée
échappe, dans la vraie vie,
à toute logique médicale et
soit beaucoup plus large-
ment prescrite que ne l’in-
dique les recommandations.
Plusieurs explications peuvent
être évoquées :
- Un certain nombre de pa-
tients (environ 30 % dans notre
expérience) ne revoient pas de
cardiologue durant la première
année et sont uniquement sui-
vis par leur médecin traitant.
Ce dernier ne prend que très
rarement l’initiative d’arrêter
une bithérapie AAP bien tolé-
rée, par crainte, en partie jus-
tiée, de favoriser une TIS aux
conséquences parfois drama-
tiques.
- La majorité des facteurs à
prendre en considération pour
évaluer le risque de TIS tardive
d’un patient et donc l’intérêt de
maintenir cette bithérapie au
delà de 12 mois sont essentiel-
lement liés à la procédure ini-
tiale (type, longueur, diamètre
du stent, nombre de stents,
bifurcation ou tronc commun,
problème d’expansion de stent,
...) comme le rappelle la récente
mise au point de l’ACC (3).
Ces données ne sont malheu-
reusement pas toujours bien
tracées dans le dossier médi-
cal et souvent dicilement
récupérables par le médecin
ou cardiologue traitant 12
mois après la procédure. En
l’absence de l’ensemble de ces
éléments d’aide à la décision il
paraît alors souvent plus sage
de prolonger cette bithérapie
AAP.
- Il existe, par ailleurs, une
forte médiatisation des
grandes études visant de nous
convaincre de l’intérêt de pro-
longer cette bithérapie AAP, si
possible à vie, après un SCA.
Pourtant quelques études
moins commentées mais de
qualité, ayant inclus notam-
ment une proportion non
négligeable de SCA (entre 30
et 75 %), ont démontré l’inno-
cuité d’un raccourcissement
de cette bithérapie à 6 mois
voire à 3 mois (gure1). Il est,
de plus, clairement démontré
que le taux de TIS est devenu,
avec les DES de dernière géné-
ration, tout à fait négligeable
(inferieur à 0,5% / an après la
première année) et équivalent
à celui observé avec les BMS
(11). Ainsi, pour la majeure
partie de ces nouveaux stents
actifs, des durées de bithéra-
pie courtes (3 mois) voire très
courtes (1 mois) sont autori-
sées.
Quelles solutions peut-on
envisager pour améliorer le
respect des recommandations
concernant l’arrêt de la bithé-
rapie AAP après un SCA et/ou
une angioplastie coronaire ?
- Assurer une meilleure traça-
bilité de la durée de la DAPT
préconisée par le cardiologue
interventionnel au décours
de la procédure tant dans le
compte rendu de l’hospitali-
sation ou d’examen que dans
l’ordonnance de sortie.
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