L’Encéphale (2008) 34, 220-225 REVUE DE PRESSE Chefs de rubrique : D. Gourion Ph. Gorwood Avancées et recherches D. Gourion (1) Une épreuve pharmacologique de vulnérabilité à la dépression enfin disponible ? Neural Response to Catecholamine Depletion in Unmedicated Subjects With Major Depressive Disorder in Remission and Healthy Subjects. Gregor Hasler et al., Arch Gen Psychiatry. 2008 ; 65 (5) : 521-531. lase, enzyme limitante capitale pour la synthèse des catécholamines cérébrales. Son administration chez l’homme entraîne une réduction rapide de la synthèse et donc de la libération de la dopamine et de la noradrénaline cérébrale. CONTEXTE La recherche d’un test neurobiologique de vulnérabilité dépressive demeure un « graal » pour la psychiatrie biologique. Dans les années 80, la piste de l’exploration de l’axe cortisolique a donné lieu à de nombreuses publications, mais il n’y a jamais eu de consensus permettant de déboucher sur de quelconques applications cliniques pratiques. Peut-être du fait du caractère extrêmement variable (en intra et en interindividuel) et pulsatile de la sécrétion de cortisol qui est influencée par de très nombreux paramètres (heure de prélèvement dans la journée, niveau de stress au moment du prélèvement, prise de tabac, de café, statut immunitaire, etc.). Une équipe suisse propose une toute nouvelle approche couplant déplétion catécholergique et imagerie cérébrale fonctionnelle chez des sujets euthymiques ayant des antécédents de dépression. Il s’agit donc d’une étude clinique utilisant un modèle pharmacologique de déplétion catécholaminergique brutale et massive. Les auteurs se basent sur les très nombreuses données pré-cliniques et d’imagerie cérébrale fonctionnelle montrant l’existence d’une diminution de la transmission dopaminergique et noradrénergique durant l’épisode dépressif. Ils proposent ici d’utiliser l’AMPT, un puissant inhibiteur compétitif de la tyrosine hydroxy(1) CH Sainte-Anne, Paris. OBJECTIF Déterminer si la déplétion catécholaminergique chez les sujets vulnérables à la dépression mais non actuellement déprimés, entraîne un dysfonctionnement neurobiologique central ayant une traduction clinique et neurobiologique différente de celle observée chez le sujet contrôle. DESIGN Il s’agit d’une étude randomisée, en double aveugle, contrôlée par le placebo, incluant 15 patients non traités, non déprimés (en rémission complète), ayant des antécédents de maladie dépressive et comparés à 13 sujets contrôles sans antécédents psychiatriques. Le protocole de déplétion catécholaminergique comprenait une prise orale de capsules d’AMPT. L’exploration clinique des modifications pharmacologiquement induites de l’humeur (MADRS et échelle d’anhédonie) était complétée d’une imagerie cérébrale fonctionnelle en PET au fludeoxyglucose F 18 (reflet de la consommation locale de glucose donc du niveau d’activité cérébrale locale). Les projections dopaminergiques striatales ont un effet inhibiteur sur les projections glutamatergiques excitatrices. On peut donc faire l’hypothèse qu’une déplétion catécholaminergique devrait induire une desinhibition puissante du circuit limbo-cortico-striato-pallido-thalamique objectivable par une augmentation massive de la consommation de glucose dans l’amygdale ainsi que dans le cortex orbito-médial préfrontal (PFC) entre autre. On peut également faire l’hypothèse que comme ce circuit et ces structures sont impliqués dans la dépression, cet effet devrait s’observer de façon encore plus prononcée chez les sujets ayant une vulnérabilité à la maladie. Cet effet neurobiologique plus prononcé chez les sujets vulnérables devrait logiquement se traduire par une résurgence de symptômes dépressifs plus intenses que chez les sujets contrôles. RÉSULTATS Les symptômes dépressifs et anhédoniques sont survenus de façon bien plus intense chez les sujets aux antécédents de maladie dépressive que chez les sujets contrôles lors de l’épreuve de déplétion catécholaminergique. Sur le plan neurobiologique, on observait dans les deux groupes une augmentation de la consommation cérébrale de glucose dans le striatum et une diminution dans le gyrus orbital. Par contre, on observait seulement chez les sujets vulnérables à la dépression une augmentation de la consommation de glucose dans le circuit méso-limbique-cortical impliqué dans la dépression (cortex ventro-médial, cortex cingulaire subgénual entre autre). Il existait une corrélation significative entre ces modifications neurobiologiques (activation corticale frontale ventromédiale) et le niveau d’activation symptômatologique dépressif. Revue de presse 221 CONCLUSIONS Cette étude montre que l’épreuve de déplétion catécholaminergique fournit un bon marqueur de vulnérabilité trait à la dépression. Elle relie la résurgence de symptômes dépressifs et anhédoniques au niveau d’activation du circuit mésolimbique-cortical impliqué dans la régulation émotionnelle. COMMENTAIRE efficience cognitive plus faible que la moyenne chez les sujets du même âge, avant même l’entrée dans la maladie. MÉTHODOLOGIE 69 études ont été screenées : parmi elles, seules 18 atteignaient les standards méthodologiques fixés par les auteurs (« validité » de l’outil de mesure du QI, de l’outil de diagnostic de la schizophrénie, design général, etc.). Cette étude pourrait avoir une portée considérable si elle s’avérait « vraie » (c’est-à-dire répliquable de façon robuste et surtout avec un bon rendement en termes de sensibilité et de spécificité). En effet, il s’agirait d’isoler un marqueur biologique solide de vulnérabilité à la dépression, véritable endophénotype facilement objectivable par une épreuve pharmacologique simple. Les débouchés potentiels sont nombreux, que se soit dans le domaine de la physiopathologie du trouble (mise en relation avec des paramètres génétiques), de la thérapeutique (modèle potentiel de « proof of concept » pour la mise en évidence des effets de nouvelles molécules en amont de phases III lourdes et coûteuses) voire du dépistage dans des populations « cibles ». RÉSULTATS Le QI prémorbide des patients schizophrènes : une méta-analyse Kristen A et al., Premorbid IQ in Schizophrenia : A Meta-Analytic Review. Am J Psychiatry 2008 ; 165 : 579-587. Le QI prémorbide moyen des sujets devenus schizophrènes était de 95 (dans la population contrôle il est par définition de 100), avec un écart type de 15. La taille de l’effet moyenne était importante (0.5) et finalement relativement homogène entre les différentes études et groupes d’études. COMMENTAIRE Mentally Low Average inadequate intelligence 34.1% 2.3% 13.6% Above High Superior Exceptionally average intelligence intelligence gifted 34.1% 13.6% 2.1% 0.13% INTRODUCTION Le modèle neurodéveloppemental de la schizophrénie fait l’hypothèse qu’il existe une vulnérabilité neuro-cognitive prémorbide précédent largement l’entrée dans la maladie. Cette vulnérabilité neuro-cognitive prémorbide – qui pourrait du reste ne concerner qu’un sous-groupe particulier de patients – devrait se traduire par une La problématique ici est double : 1) la schizophrénie est un trouble extrêmement hétérogène tant dans son expression clinique et son évolution diachronique, que dans le déficit cognitif des patients qui varie au cours du temps et des traitements (certains patients schizophrènes ont présenté des troubles envahissants du développement durant l’enfance associés à un QI limite, tandis que d’autres ont une « intelligence » tout à fait préservée : souvenons-nous d’un certain prix Nobel d’économie atteint d’une forme sévère de schizophrénie…). 2) la méthodologie est complexe (comment mesurer « l’intelligence » ? quand la mesurer ? s’agit-il d’une mesure réellement antérieure à l’entrée dans la maladie schizophrénique ou bien opérée lors d’une phase prodromique subsyndromique ? La revue de la littérature montre 222 surtout l’extrême hétérogénéité des méthodologies… Ce qui représente bien entendu une limite énorme pour une approche de type méta-analytique. Néanmoins, les auteurs ont soigneusement séléctionné les études qui leurs semblaient les plus « propres » et surtout, ils ont réanalysé les résultats en sous-groupes d’études (level 1, 2, 3) plus comparables afin d’éviter de comparer ce qui n’est pas comparable… L’une des plus vastes études génétiques dans la schizophrénie est… négative : vers la fin annoncée des études d’association ? P. Gorwood Alan R. Sanders, et al., No Significant Association of 14 Candidate Genes With Schizophrenia in a Large European Ancestry Sample : Implications for Psychiatric Genetics. Am J Psychiatry 2008 ; 165 : 497-506. INTRODUCTION Les études de jumeaux montrent qu’il existe un support génétique fort dans la schizophrénie. Différents gènes candidats ont été depuis 20 ans explorés de façon extensive pour ne pas dire compulsive. Parmi les « usual suspects » à la mode aujourd’hui, les auteurs ont séléctionné 14 candidats codant notamment des protéines de la synapse, des récepteurs monoaminergiques ou des enzymes du métabolisme catécholaminergique (voici leurs petits noms : RGS4, DISC1, DTNBP1, STX7, TAAR6, PPP3CC, NRG1, DRD2, HTR2A, DAOA, AKT1, CHRNA7, COMT, ARVCF). MATÉRIEL ET MÉTHODE Il s’agit d’une très vaste étude d’association (c’est-à-dire une comparaison statistique de la proportion de variants génétiques dans une population de patients schizophrènes à celle d’une population de sujets sains). Au total, plus de 4 000 sujets (2 000 schizophrènes, 2 000 contrôles) ont accepté de se prêter à un génotypage dans le cadre d’un programme du NIMH. Ces sujets ont rempli un questionnaire permettant de s’assurer que leurs ancêtres étaient européens (l’objectif étant de réduire la variabilité génétique). Près de 800 variants génétiques bi-alléliques (SNPs) ont été génotypés au sein des 14 gènes candidats et 300 autres SNPs ont été génotypés au titre de marqueurs ancestraux chez chaque sujet, grâce à des techniques automatisées. Des contrôles de qualité des données très fins ont été réalisés et l’homogénéité génétique de la population était jugée satisfaisante. RÉSULTAT Aucun marqueur génétique dans aucun des 14 gènes candidats n’a atteint le seuil de significativité statistique requis dans l’étude. Il s’agit donc d’une étude strictement négative. COMMENTAIRE Quant on compare le très haut niveau de qualité de cette étude (nombre impressionnant de sujet permettant de détecter des effets très faibles, techniques de génotypage à la pointe du progrès permettant le decryptage de plus d’un millier de marqueurs par sujet, homogénéité relative de la population, etc.) aux très nombreuses autres études de psychiatrie génétique, et que l’on se confronte à la négativité des résultats, on ne peut que se demander dans quelle mesure cette stratégie n’est pas tout simplement… inadaptée à la maladie schizophrénique, dans toute son hétérogénéité syndromique. Clinique et thérapeutique Ph. Gorwood (1) Dîtes moi où vous en êtes de votre dernier épisode, je dirais ce qu’il en sera du prochain… Residual symptom recovery from major affective episodes in bipolar disorders and rapid episode relapse/recurrence. Arch Gen Psychiatry. 2008 Apr ; 65 (4) : 386-94. Judd LL, Schettler PJ, Akiskal HS, Coryell W, Leon AC, Maser JD, Solomon DA. (1) Hôpital Louis Mourier, Colombes. CONTEXTE Le groupe de San Diego exploite régulièrement, et habilement, leur cohorte de sujets uni- et bipolaires, avec un recul maintenant considérable puisqu’il est en moyenne de 17 ans pour les 220 sujets bipolaires. Se basant sur leurs résultats dans les troubles dépressifs chez les unipolaires, les auteurs ont cette fois testé la même hypothèse chez les bipolaires, c’està-dire la qualité de la rémission (complète, partielle ou absente) qui permet de prédire le risque non seulement de rechute (bien sûr), mais aussi à terme de récurrence. Revue de presse MÉTHODE 220 sujets bipolaires suivis jusqu’à 30 ans, dont 140 bipolaires de type I, et 80 sujets bipolaires de type II. Les sujets sont âgés en moyenne de 37 ans lorsqu’ils intègrent cette cohorte, l’épisode index étant relativement sévère puisque requérant l’hospitalisation dans prêt de 80 % des cas. Les sujets ont en moyenne déjà eu trois épisodes thymiques (âge de début 23 ans). La méthode se base simplement sur le premier épisode pour lequel le sujet consulte pour la première fois ce groupe d’experts, et de regarder le devenir de cet épisode… au court, moyen et long terme. RÉSULTATS 223 élevé, et son délai d’apparition, pour ceux qui vont avoir une telle récurrence, est de 24 semaines, pour 123 semaines pour ceux qui n’ont pas de symptômes résiduels. COMMENTAIRE Donc tout comme dans le trouble unipolaire, la chasse aux symptômes résiduels est ouverte. Ne pas se contenter d’une amélioration syndromique (le patient est bien répondeur, mais pas asymptômatique) pourrait changer le pronostic du trouble thymique. L’hypothèse que les symptômes résiduels ne soient pas un facteur de risque mais la signature d’une telle vulnérabilité à la récurrence, alors non accessible, est difficile à écarter. Néanmoins, les données ici riches et bien évaluées sur une longue période donnent des indices convergents en faveur d’une intervention thérapeutique volontaires envers les symptômes résiduels, quelle que soit la manière de les traiter. 73 % des patients ont eu une évolution vers une période de 2 mois sans symptôme thymique, les 27 % restant ont eu une réponse thérapeutique (plus ou moins précoce), mais ont conservé des symptômes résiduels, surtout dépressifs (60 %), parfois hypomanes (10 %) et sinon mixte (30 %). Parmi les nombreux paramètres analysés, les facteurs de sévérité anciens sont bien sûrs impliqués (plus d’anciens épisodes), plus d’épisodes mixtes, plus de troubles cyclothymiques associés. En prospectif cette fois, cette qualité de rémission semble avoir exactement le même impact que dans les troubles unipolaires, c’est-à-dire que la qualité de la rémission est un facteur puissant (OR = 3.4) et relativement unique de récurrence à terme (voir schéma adjacent). Seuls le nombre d’épisodes passés est aussi significativement prédictif, mais pas aussi puissamment (OR = 1.7). Un gène prédisant l’efficacité de la Naltrexone dans le maintien de l’abstinence chez le sujet alcoolo-dépendant CONCLUSIONS CONTEXTE La présence de symptômes résiduels au sortir d’un épisode thymique chez un sujet qui souffre de trouble bipolaire a un double prix. Non seulement, elle vient indiquer une souffrance actuelle plus grande pour le patient, qui n’est pourtant plus syndromique, mais elle vient aussi signaler un risque, cette fois future, bien plus important de récurrence à terme. En effet, le risque est trois fois plus Les études de pharmacogénétiques sont nombreuses, mais en général plutôt de type pilote, c’est-à-dire testant un grand nombre de gènes et de marqueurs sur une petite population de sujet, vu le coût de ce type d’étude. Le NIAAA a décidé de gérer le problème dans l’autre sens, en s’attachant à n’évaluer qu’un seul marqueur sur un seul gène, et dans une (très) grande An Evaluation of μ-Opioid Receptor (OPRM1) as a Predictor of Naltrexone Response in the Treatment of Alcohol Dependence. Arch Gen Psychiatry. 2008 ; 65 (2) : 135-144. Raymond F. Anton, Gabor Oroszi, Stephanie O’Malley, David Couper, Robert Swift, Helen Pettinati, David Goldman. population. Il s’agit de la cohorte COMBINE, gérée par Anton, avec plus de 1 000 sujets inclus au départ. Il s’agissait de savoir quel traitement convenait à quel type de patient (un protocole MATCH amélioré) intégrant les aides pharmaceutiques comme psychothérapeutiques. MÉTHODE À partir de la cohorte initiale, 600 sujets ont été traités dans le bras Naltrexone versus placebo, plus ou moins associé à un suivi « tout venant » versus une aide psychothérapeutique de type comportementaliste. Ces sujets ont été restratifiés selon la présence d’un allèle spécifique du gène qui code pour la cible de ce traitement, c’est-à-dire le gène OPRM1 (opioïd mu receptor 1). Le traitement est suivi sur 4 mois, et les mesures d’efficacité se basent sur plusieurs paramètres dont l’abstinence totale, le pourcentage de jours d’abstinence, le nombre de jours avec pertes de contrôles, et le devenir clinique global. 224 RÉSULTATS Les patients porteurs de l’allèle de vulnérabilité (Asp40) recevant une simple aide médicale non spécifique et sous Naltrexone avaient plus de jour d’abstinence et moins de jours de perte de contrôle que les sujets sous placebo, mais cette différence n’était plus significative chez les sujets non porteurs de cet allèle. 82 % des porteurs d’Asp40 ont un bon pronostic médical, contre 54 % des sujets qui n’en sont pas porteurs. De manière intéressante, ces différences sont écrasées lorsqu’une psychothérapie comportementaliste est proposée de manière parallèle, les différences d’effet de la Naltrexone étant apparemment diluées dans l’impact important de cette prise en charge psychothérapeutique. P. Gorwood La TCC peut lever la résistance aux IRS dans les TOC A randomized, controlled trial of cognitivebehavioral therapy for augmenting pharmacotherapy in obsessive-compulsive disorder. Am J Psychiatry. 2008 May ; 165 (5) : 621-30. Simpson HB, Foa EB, Liebowitz MR, Ledley DR, Huppert JD, Cahill S, Vermes D, Schmidt AB, Hembree E, Franklin M, Campeas R, Hahn CG, Petkova E. stress » ayant démontré une aide aspécifique dans les troubles anxieux, mais apparemment minime dans le TOC (c’est-à-dire formant un assez bon bras placebo !). La notion de résistance aux IRS se base sur les traitements passés, en remarquant que les doses sont en moyenne très élevées (trois fois la dose préconisée dans la dépression), et donc peu de risque que l’absence d’efficacité ne soit due à un sousdosage. RÉSULTATS L’exposition rajoutée à un traitement IRS qui pourtant n’a pas la preuve de son effet seul réduit fortement l’intensité des symptômes de TOC, ce que ne fait pas la psychothérapie aspécifique de l’aide globale à la gestion du stress. Le taux de répondeur est ainsi deux fois plus élevé dans le bras TCC, les taux de rémission étant bien plus important à terme (33 % versus 4 %). CONCLUSIONS L’allèle analysé permet une assez bonne prédiction de l’efficacité de la Naltrexone, quels que soient les (nombreux) critères retenus. COMMENTAIRE La taille de l’échantillon, la qualité de l’étude, et la cohérence du gène étudié rendent cette étude totalement prioritaire. Il est difficile de ne pas imaginer, qu’à plus ou moins long terme, on n’utilise pas cette donnée (en fait deuxième travail allant vers la même direction après le travail d’Oslin) dans la pratique clinique. Les test génétiques étant de plus en plus rapide, sûrs, et de moins en moins coûteux, comme ne pas en tenir compte si l’on sait que les sujets n’étant pas porteurs de l’allèle analysé n’ont pas de bénéfice supérieur au placebo pour la prescription de Naltrexone ? De plus, l’existence d’autre stratégie alternative tout aussi efficace préserve le côté éthique de cette prise en considération (il ne s’agit pas de mettre des possibilités thérapeutiques de côté pour certains, mais d’affiner le choix thérapeutique optimal pour tous). CONTEXTE Les IRS sont venus prendre un relais efficace et bien utile aux tricycliques dans le traitement du trouble obsessionnel compulsif. Néanmoins, leur impact se résume à une baisse moyenne de 20 % à 40 % de réduction des symptômes dans la majeure partie des cas. Lorsque le trouble ne répond pas à ce traitement, ou partiellement, plusieurs études ont montré les bénéfices de l’ajout d’un antipsychotique. Néanmoins, là aussi, seule une partie des patients va avoir une réponse satisfaisante (moins de la moitié aura une baisse de plus de 25 % de leurs symptômes). La TCC avec exposition pourrait être intégrée dans l’arsenal thérapeutique de lever de résistance, avec un effet qu’on imagine facilement synergique, puisque l’exposition moins anxiogène car sous traitement favoriserait l’extinction des rituels et des biais cognitifs associés. MÉTHODE 100 TOC résistants, tous sous IRS sont pris en charge par TCC avec exposition (17 séances sur 4 mois), versus par autant de séances de type « aide à la gestion du CONCLUSIONS La TCC ici pratiquée est très axée sur l’exposition. On y lit donc que non seulement les sujets sont exposés sur le lieu de soin, mais aussi que les thérapeutes doivent passer au moins deux fois sur le lieu de vie des patients pour les aider à s’exposer (réellement) sur le lieu d’habitation. On demande ainsi au patient de passer au minimum une heure par jour d’exposition, sans aucun rituel, la ritualisation étant présentée au patient comme étant le frein à la désensibilisation lors de l’exposition répété. COMMENTAIRE La TCC comme « add-on » dans les TCC résistant est une approche intéressante, car on avait pour le moment plus l’habitude d’un cheminement inverse, avec la prescription de psychotrope chez les sujets non répondeurs à une TCC. Il est vraisemblable, et c’est Revue de presse l’avis des auteurs, que la dimension très comportementaliste (exposition idéique, puis réelle, puis sur le lieu de vie du sujet) soit ici particulièrement à la base de ce bon résultat, le traitement (même incomplètement efficace) permettant un niveau d’exposition de meilleure qualité, une réduction des rituels qui empêcherai le processus d’habituation, le tout amenant le patient à des taux de réponde bien meilleur. Les soins intra-hospitaliers des personnalités borderline est longue et chère… mais quelle efficacité ! 8-year follow-up of patients treated for borderline personality disorder : mentalizationbased treatment versus treatment as usual. Am J Psychiatry. 2008 May ; 165 (5) : 631-8. Bateman A, Fonagy P. CONTEXTE La personnalité borderline fait récemment l’objet de travaux considérables, étant donné la sévérité de son pronostic, et le grand nombre de possibilités thérapeutiques possibles à envisager. Les effets thérapeutiques ont été démontrées pour les thymorégulateurs, les antidépresseurs, les antipsychotiques… tous le plus souvent associés à un effet modeste et une compliance catastrophique. MÉTHODE Une équipe anglaise propose des soins à la hauteur de la gravité de ce trouble de la personnalité. L’admission du patient amène effectivement à accepter un programme de 18 mois (!) de prise en charge 225 intra-hospitalière représentant une dizaine d’heures par semaine. Le programme proposé est un peu chaotique, incorporant artthérapie et réunion de groupes de malades, et est décrit par les auteurs comme étant basés sur un référentiel psychanalytique facilitant la gestion des émotions dans l’immédiateté… Le patient apprend ainsi à générer d’autres stratégies, pour l’analyse des faits extérieurs comme sur les ressentis possibles. De fait, les « perspectives du patient » maintenant développées dans un encadré spécial de tous les articles de l’American Journal of Psychiatry permet d’avoir une idée bien plus concrète du type de prise en charge. RÉSULTATS Les auteurs ont comparés leur longue prise en charge de type hospitalisation à mitemps pendant 18 mois, à la prise en charge naturelle de ces patients par des psychiatres n’utilisant pas de prise en charge spécifique. Les patients étant randomisés, le protocole est relativement convaincant. À ce niveau de différence, c’est presque trop beau pour être honnête. Les tentatives de suicide disparaissent pratiquement, le nombre de patients hospitalisés au décours de cette longue prise en charge tendent vers le 0, et le nombre de sujets capables de reprendre travail ou études est totalement incomparable entre les deux types de prise en charge. CONCLUSIONS Sur une évaluation à 5 ans de leur programme, les 40 sujets ayant été traités par cette longue et lourde prise en charge ont un pronostic extraordinairement meilleur que celui des sujets qui ont été assigné au hasard à une prise en charge par un psychiatre sans formation spécifique pour le trouble borderline. On pourrait d’ailleurs dire que c’est plus cette prise en charge en consultation qui est inefficace plutôt que l’hospitalisation qui l’est beaucoup, mais le devenir de ces patients borderlines est assez cohérent avec ce que l’on sait de la gravité du trouble. Il est aussi difficile d’imaginer qu’il s’agisse d’un biais de sélection puisque les sujets sont tirés au hasard, et que la qualité du suivi est excellente. On aurait tout de même aimé savoir comment des patients aussi impulsifs arrivent tous à rester aussi longtemps dans une telle structure. COMMENTAIRE Approche donc extrêmement lourde (hospitalisation à mi-temps pour 18 mois), mais pour une pathologie qui l’est tout autant. Ce programme à l’avantage de montrer que s’occuper longtemps et intensément d’une pathologie au pronostic grave donne des résultats… à la hauteur de l’investissement. Il manque un peu de clarté dans le type de soins proposés et les modalités pour maintenir ces patients dans un tel programme de soins, mais avec des résultats aussi éclatants, on ne peut négliger ce type de prise en charge.