Devenir fonctionnel et thérapeutiques psycho-sociales dans le trouble bipolaire S155
s’agit à la fois de prévention secondaire, par un meilleur
dépistage de la maladie et la mise en place d’actions de
Formation Médicale Continue des praticiens, et de préven-
tion tertiaire, qui vise à développer l’alliance thérapeuti-
que par les thérapeutiques psychosociales, et à améliorer
la prise en charge thérapeutique pour éviter les récidives
et la chronicisation [6], on retrouve chez ces patients 37 %
de récidive la première année, 60 % la deuxième, et 73 %
de récidive après 5 ans ; de plus, 33 % des patients ont des
symptômes résiduels entre les épisodes.
Les thérapeutiques psychosociales travaillent l’alliance
thérapeutique et renforcent l’observance médicamen-
teuse, par une approche comportementale et cognitive,
par des traitements psycho-éducatifs, et par un travail
avec les familles.
Les thérapies comportementales
et cognitives
Les TCC ont été développées dans les troubles bipolaires
depuis plusieurs décennies. En 1960 est apparue la TCC de
la dépression ; dans les années1980-90 ont été développés
des programmes et des manuels de TCC pour les épisodes
dépressifs [10]. En 1996 paraît le Manuel de TCC pour
patients bipolaires de Basco et Rush [1]. Le programme de
Lam et al., référence internationale dans ce domaine, est
diffusé à partir de 1999 [7], et en 2002 paraît le guide de
Newman.
Constituées en moyenne de 15 séances individuelles ou
de groupe interactifs, ces TCC s’appuient sur la psycho-
éducation, des techniques comportementales et cogniti-
ves, et des séances de consolidation.
Objectifs de la TCC des troubles bipolaires
Les principaux objectifs de la TCC des troubles bipolaires
sont de réguler le comportement quotidien (sommeil, acti-
vités…), de faciliter l’identifi cation des prodromes, et de
mettre en place un apprentissage des stratégies de coping
cognitives et comportementales.
Les buts communs de tous ces programmes sont de
diminuer la probabilité de rechutes et de récidives.
Tous les programmes de TCC des troubles bipolaires
s’appuient sur des stratégies éducatives, des techniques
comportementales et cognitives, des stratégies de résolu-
tion de problème, et le développement de stratégies de
coping pour faire face aux conséquences psychosociales de
la maladie.
Le modèle de Basco et Rush (1996) [1]
L’un des programmes les plus connus de TCC appliqué au
trouble bipolaire est le modèle de Basco et Rush. Il consiste
en 20 séances individuelles sur un an, et comporte 4 pério-
des :
1. une phase éducative, avec un entretien interactif
portant sur la maladie et les traitements ;
2. une phase visant à l’augmentation de l’observance
médicamenteuse, par une démarche cognitive analysant
les pensées qui remettent en cause le traitement médica-
menteux, et par un repérage des perturbations cognitives
engendrées par la dépression ou la manie ;
3. un abord des problèmes psychosociaux, avec une
évaluation des conséquences psychosociales du trouble et
une gestion des diffi cultés, conduisant à la mise en place
de techniques de résolution de ces diffi cultés ;
4. enfi n, un apprentissage de stratégies de résolution
de problèmes, avec identifi cation du problème, liste des
solutions possibles et hiérarchisation en fonction des avan-
tages et des inconvénients de chacune, mise en place de la
solution et constatation des résultats, et enfi n évaluation
de l’effi cacité de la solution choisie.
La référence internationale :
le programme de groupe de Lam
et al.
[7]
Ce programme se compose de 20 séances de 2 heures sur
3 mois, au sein de groupes de 10 patients.
La première phase est une phase éducative, de 6 séan-
ces en trois semaines (S1 à S6). Elle porte sur le trouble
bipolaire et ses traitements ; la construction de l’alliance
thérapeutique ; l’établissement du modèle cognitif ; la
structuration de l’entretien avec défi nition de l’agenda ;
l’établissement de tâches à domicile avec mise en place
d’une auto-évaluation ; la construction progressive de la
« life-shart » ; et enfi n la défi nition individuelle des problè-
mes et des objectifs.
La seconde phase est une phase cognitive, de 10 séan-
ces en 10 semaines (S7 à S16), comprenant l’auto-enregis-
trement quotidien de l’humeur ; l’identifi cation des
fl uctuations de l’humeur normale, des aspects de la per-
sonnalité et de l’humeur pathologique ; la mise en relation
de la modifi cation de l’humeur avec les cognitions et avec
le taux d’activité ; la relaxation ou au contraire la prescrip-
tion de tâches, en fonction du taux d’activité ; enfi n,
l’identifi cation des schémas cognitifs et la reformulation.
La troisième phase est une phase de consolidation, de
4 séances en 2 semaines (S17 à 20), axées sur la vérifi cation
de la compréhension des techniques TCC, la régularité du
rythme de vie, l’identifi cation des facteurs précédant les
rechutes et la gestion du stress.
Évaluation des techniques de TCC
Les études contrôlées évaluant l’effet d’une TCC dans les
troubles bipolaires concluent toutes à une augmentation de
l’observance médicamenteuse, une diminution du nombre
d’hospitalisations, une amélioration du fonctionnement
social, une augmentation de la confi ance en soi et de ses
limites, et une augmentation de l’estime de soi. L’approche
TCC apparaît ainsi curative et préventive, et augmente
l’engagement du patient dans la prise en charge de sa
maladie.
Néanmoins, une étude récente de Lam et al. [8] por-
tant sur 103 patients montre que l’effet bénéfi que de la
TCC sur la prévention des rechutes s’estompe après 18 mois,
soulevant la question de la nécessité de réaliser plusieurs
sessions à des temps différents, ou tous les ans.