La cardiomyopathie cirrhotique » Cirrhotic cardiomyopathy

Le Courrier de la Transplantation - Vol. XIV - n° 1 - janvier-février-mars 2014
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Mise au point
Résumé
Summary
»
La cardiomyopathie cirrhotique est une anomalie cardiaque associant
des anomalies morphologiques, fonctionnelles, électrophysiologiques
et biologiques chez les patients atteints de cirrhose mais sans autre
pathologie cardiaque connue. Elle peut être mise en évidence après
une variation aiguë des conditions hémodynamiques, provoquant
un tableau d’insuffisance cardiaque, mais cette éventualité est
rare. Différents tableaux ont été décrits : un remplissage excessif,
une diminution de l’inotropisme secondaire à l’utilisation des
bêtabloquants, la création de shunt portocave, endovasculaire ou
chirurgical, après une transplantation hépatique. La cardiomyopathie
cirrhotique a été impliquée dans la physiopathogénie du syndrome
hépatorénal. Les critères diagnostiques restent à préciser. Il n’y a pas
de traitement spécifique pour cette pathologie. Cette entité peut
être réversible après transplantation hépatique.
Mots-clés : Cardiomyopathie cirrhotique - Circulation hyperdyna-
mique - Échocardiographie doppler - Marqueurs biologiques - Shunt
portocave - Syndrome hépatorénal - Bêtabloquant - Transplantation
hépatique.
Cirrhotic cardiomyopathy is a heart defect involving
structural abnormalities, functional, electro- physiological
and biological patients with cirrhosis but without other
known cardiac disease. The cirrhotic cardiomyopathy can
be demonstrated after acute hemodynamic conditions
causing clinical heart failure, but this possibility is rare. Various
situations were associated with: aggressive fluid overload,
decreased inotropic secondary to the use of betablockers,
creating portocaval shunt, endovascular or surgical after liver
transplantation. Cirrhotic cardiomyopathy was involved in
the physiopathogenesis of hepatorenal syndrome. Diagnostic
criteria remain to be defined. There is no specific treatment
for this disease. Cirrhotic cardiomyopathy disease may be
reversible after liver transplantation.
Keywords : Cirrhotic cardiomyopathy - Hyperdynamic circu-
lation - Doppler echocardiography – Biomarkers - Portocaval
shunt - Hepatorenal syndrome – Betablocker - Liver trans-
plantation.
La cardiomyopathie cirrhotique
Cirrhotic cardiomyopathy
Mario Altieri*, Éric Saloux**, Ephrem Salame***, Yvon Calmus****
H.
Kowalski et W. Abelmann (1) ont été les
premiers à décrire, dans les années 1950,
une circulation hyperdynamique (augmen-
tation du débit cardiaque, de la fréquence cardiaque,
du débit d’éjection systolique, avec diminution de la
pression artérielle moyenne [PAM] et des résistances
artérielles systémiques) chez des patients cirrhotiques
porteurs d’une hépatopathie alcoolique avancée. Chez
ces derniers, les différentes études (2-5) mettaient en
évidence une réponse altérée de la contractilité myo-
cardique aux différents stimulus de stress. Toutes ces
études attribuaient, de façon erronée, ces résultats à
une cardiotoxicité directe de l’alcool. Depuis, de nom-
breux travaux ont confirmé que cette hypocontractilité
au stress est constatée dans toutes les formes de cir-
rhose. La circulation hyperdynamique du cirrhotique
est consécutive à des résistances artérielles systémiques
basses et à une compliance artérielle augmentée (6, 7).
S.S. Lee a proposé, en 1996, le terme de cardiomyopathie
cirrhotique (CC) pour désigner cet état (8) caractérisé
par une dysfonction cardiaque chronique comportant
une altération de la réponse contractile au stress et de la
fonction diastolique, associée à des anomalies électro-
physiologiques, chez un cirrhotique sans maladie car-
diaque primitive connue. Un atelier organisé à Montréal
en 2005 (9) en a précisé les critères diagnostiques
(tableau I). Dans la plupart des cas, cest un état latent,
infraclinique, très difficile à découvrir sans pratiquer un
examen évaluant la réponse au stress. La prévalence
reste incertaine, mais, récemment, I. Enache et al. (10)
ont observé une incidence de 23,4 % sur des critères
échocardiographiques : fraction d’éjection < 55 %, et
dysfonction diastolique avec ou sans allongement de
l’espace QT corrigé (QTc) en l’absence de cardiopathie
connue (hypertension artérielle, diabète, coronaropa-
thie, hémochromatose, fibrose péricardique, etc.).
* Service
d’hépatogastroentérologie,
nutrition
et oncologie digestive,
hôpital Côte-de-Nacre,
Caen.
** Service de cardiologie,
hôpital Côte-de-Nacre,
Caen.
*** Service de chirurgie
digestive et transplantation
hépatique, CHU de Tours.
**** Centre
detransplantation
hépatique,
hôpital Saint-Antoine,
Paris.
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La cardiomyopathie cirrhotique
Dysfonction systolique
Elle est habituellement latente, mais elle peut être mise
en évidence par un test d’effort pharmacologique,
après la mise en place d’un Transjugular Intrahepatic
Portosystemic Shunt (TIPS) ou après une transplan-
tation hépatique (TH). Il s’agit d’une incompétence
chronotrope et inotrope, car le cœur est incapable de
soutenir la demande en assurant un débit cardiaque
et une PAM adéquats. On observe une élévation des
pressions télédiastoliques du ventricule gauche (VG)
sans l’augmentation attendue de l’index cardiaque ni de
la fraction d’éjection du ventricule gauche (FEVG). Le VG
reste incapable de surmonter une élévation brutale de
la postcharge. Cette hyporéactivité du VG est corrélée à
la sévérité de la cirrhose (11). F. Wong et al., en étudiant
l’effet de l’exercice physique chez les cirrhotiques, ont
constaté une élévation de la FEVG à 14 %, versus 66 %
chez des témoins sains, alors que les valeurs au repos
des 2 groupes étaient similaires (12). La dysfonction sys-
tolique peut être mise en évidence après une perfusion
de terlipressine (13), d’angiotensine II (9) ou après une
TH (14). K. Kanzankov et al. rapportent des arguments
physiologiques suggérant que la dysfonction systolique
peut être observée même au repos (15). Des anomalies
morphologiques des cavités cardiaques ont été mises
en évidence, à savoir : hypertrophie ventriculaire gauche
et épaississement du septum intraventriculaire.
La dysfonction systolique a été impliquée dans la
physio pathogénie de la rétention hydrosodée, la for-
mation d’ascites et le syndrome hépatorénal (9, 16, 17).
Elle est donc un élément pronostique de la cirrhose.
Dysfonction diastolique
C’est le phénomène le plus fréquent. Son diagnostic est
échocardiographique. Sa prévalence oscille entre 45 et
66 % et est plus importante chez les patients en phase
de décompensation (18). Les critères diagnostiques
sont les suivants :
rapport E/A < 1 ;
temps de relaxation isovolumétrique > 80 ms ;
temps de décélération > 200 ms.
F. Wong et al. (18) ont retrouvé une association entre
la dysfonction diastolique et la présence d’une ascite,
d’un syndrome hépatorénal et la survie. E.W. Holt
et al. (19) ont mis en évidence qu’un rapport E/A < 1
était prédictif d’une TH ou d’un décès dans les 5 ans.
V. Raizada et al. ont montré que l’angiotensine II inhibe
la dégradation du collagène et que ses dépôts sont
associés à une hypertrophie du VG, ce qui est un facteur
de risque d’insuffisance cardiaque tant systolique que
diastolique (20).
Cette dysfonction diastolique est souvent associée à des
anomalies cardiaques morphologiques : épaississement
du septum interventriculaire et/ou de la paroi posté-
rieure du VG, dilatation de l’oreillette gauche. Sur le plan
histologique, on retrouve un œdème et une fibrose,
responsables de la rigidité pariétale myocardique et
d’une hypertrophie ventriculaire gauche.
Lexamen de référence reste l’échocardiographie. La
dysfonction diastolique est rarement isolée. Elle est
souvent associée à des anomalies subtiles de la fonc-
tion systolique qui contribuent à la physiopathologie
de l’insuffisance cardiaque avec FEVG normale (21).
Le TDI (Tissue Doppler Imaging) est un outil échocar-
diographique très utile pour quantifier la fonction
systolique et diastolique, mais il est limité, car il est
angle-dépendant (22). Le speckle tracking est une nou-
velle technique échocardiographique qui rend pos-
sible l’étude du tissu myocardique dans différentes
Tableau I. Critères diagnostiques et support de la cardiomyopathie cirrhotique selon l’atelier de
Montréal
(9)
.
Définition : dysfonction cardiaque chez des patients cirrhotiques, caractérisée par une réponse
contractile altérée au stress ou une altération de la relaxation diastolique associées à des anomalies
électrophysiologiques en l’absence d’autre cardiopathie connue
Critères diagnostiques
Réponse systolique contractile anormale au stress
Dysfonction diastolique au repos
Absence d’anomalie cardiopulmonaire significative
Dysfonction systolique : au moins 1 des 2 critères suivants
Augmentation du débit cardiaque atténuée à l’effort, ou en cas de stress volémique ou
pharmacologique
Fraction d’éjection au repos < 50 %. Absence de signes d’insuffisance cardiaque au repos
Dysfonction diastolique
E/A < 1 (corrigé selon l’âge). Sur le profil diastolique en échocardiographie, la vitesse maximale
de remplissage du VG, appréciée par le pic de vélocité de l’onde E (early : précoce), et la
contraction auriculaire, qui produit une deuxième accélération du flux entrant dans le VG,
appelée onde A (atrial : auriculaire) peuvent être mesurées. Une altération de la relaxation
se manifeste par une inversion (< 1) du rapport E/A
Temps de décélération de l’onde E prolongé (> 200 ms)
Temps de relaxation isovolumique prolongé (> 80 ms)
Critères supplémentaires
Anomalies électrophysiologiques
Réponse chronotrope anormale
Allongement de l’intervalle QTc
Dysfonction autonome
Oreillette gauche élargie
Augmentation de la masse myocardique et de l’épaisseur de la paroi du VG
Augmentation du pro-BNP, du BNP, de l’ANP et de la troponine
Allongement de l’intervalle QT
Augmentation de la masse myocardique et de l’épaisseur de la paroi du VG
Augmentation du pro-BNP, du BNP, de l’ANP et de la troponine
ANP :
Atrial Natriuretic Peptide
(peptide auriculaire natriurétique) ; BNP :
Brain Natriuretic Peptide
(peptide cérébral natriu-
rétique) ; VG : ventricule gauche.
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Mise au point
directions (longitudinale, radiale et circonférentielle)
et permet une analyse plus détaillée de la fonction
du VG incluant son twist ainsi que ses déformations
globales et segmentaires. Le Global Longitudinal Strain
(GLS) donne une mesure globale de chaque segment
du VG dans la direction longitudinale, et apparaît plus
sensible et plus spécifique que la FEVG pour détecter
des altérations subtiles de la fonction systolique dans
différentes maladies cardiaques (23, 24).
Altérations électrophysiologiques
Les altérations électrophysiologiques observées le plus
fréquemment chez les cirrhotiques sont un allongement
de l’intervalle QT, une incompétence chronotrope et
une dissociation électromécanique.
Allongement de l’intervalle QT
C’est une des anomalies les plus courantes en cas de
cirrhose évoluée, sa prévalence excédant 60 % (25).
La prévalence dépend de la formule utilisée pour la
correction. La physiopathogénie de l’allongement
du QT n’est pas encore connue. La présence d’une
hypertension portale et de shunts portosystémiques
semble nécessaire. Il est sans rapport avec l’étiologie
de la maladie hépatique (25-27). Le QT allongé est un
facteur de mauvais pronostic après une transplan-
tation hépatique (28). L’allongement du QT résulte
d’une repolarisation anormale du myocarde, avec un
risque de torsades de pointes, d’arythmie ventriculaire
et de mort subite, qui restent cependant des événe-
ments rares chez le cirrhotique. Le QT allongé dans
un contexte d’hémorragie digestive est associé à une
diminution de la survie (29). M. Bernardi et al. (25) ont
démontré une corrélation étroite entre l’allongement
du QT et la sévérité de l’insuffisance hépatocellulaire,
l’excès de norépinéphrine plasmatique circulante et
la diminution de la survie.
J. Henriksen et al. ont postulé que l’effet des bêta-
bloquants sur l’intervalle QT pourrait être dû à un
mécanisme de type vagal (30). A. Zambruni et al. ont
observé que les bêtabloquants pouvaient diminuer le
QT, mais seulement chez les patients qui avaient un
QT prolongé avant le traitement (31). En revanche, les
effets cardio dépresseurs des bêtabloquants peuvent
être responsables d’une surmortalité chez les cirrho-
tiques présentant une ascite réfractaire (32), et majorer
le risque de dysfonction circulatoire (33, 34). Les molé-
cules responsables d’un allongement du QT, comme les
quinolones, les macrolides et celles ayant une action sur
la motilité intestinale, doivent être utilisées avec pru-
dence. Une surveillance est souhaitable dans ce cas (35).
Incompétence chronotrope
C’est l’incapacité du cœur à répondre à un stimulus
physiologique ou pharmacologique de stress par une
augmentation appropriée de la fréquence cardiaque (36).
Des altérations au niveau du récepteur β-adrénergique,
ou postrécepteur, ont été suggérées, car il y a un besoin
plus important de β-agonistes pour obtenir une majo-
ration de la fréquence cardiaque (31, 37, 38).
Asynchronisation électromécanique
Définie comme le délai existant entre la phase d’exci-
tation et celle de contraction, elle est évaluée par le
temps d’intervalle systolique (39) ou par la mesure
simultanée de la courbe de pression aortique et un
tracé ECG (39, 40). Ce délai s’allonge avec le QT. Son
importance clinique n’a pas été précisée. Elle serait liée
à un défaut au niveau du récepteur β-adrénergique, ou
postrécepteur (30).
Dysfonction autonome
La sensibilité du baroréflexe est réduite, en rapport,
selon les observations de S. Moller et al. (41), avec la
sévérité de la maladie hépatique. Cette diminution
est impliquée dans l’altération de l’excrétion rénale
de sodium et d’eau.
Physiopathologie de la cardiomyopathie
cirrhotique
Elle est multifactorielle :
diminution du signal de transduction des
β-récepteurs avec dysfonction de la commande sym-
pathique (désensibilisation des réponses chronotropes
et inotropes cardiaques) ;
anomalies du système rénine-angiotensine-aldos-
térone-A : hyperréactivité qui favoriserait l’apparition
d’une fibrose interstitielle intramyocardique ;
augmentation des voies inotropes négatives
consécutive au passage de substances de la circu-
lation splanchnique vers la circulation systémique :
monoxyde d’azote (NO), oxyde carbonique (CO), endo-
cannabinoïdes, TNF (Tumor Necrosis Factor), etc. Le
NO et le CO sont des gaz inertes produits au niveau
cardiaque par la NOS (NO synthase) et l’HO1 (hème
oxygénase). Ils sont responsables d’une augmenta-
tion des concentrations en GMPc (guanidyl mono-
phosphate cyclique) inhibant le flux intracellulaire
de calcium et, par voie de conséquence, la contrac-
tilité. Les endocannabinoïdes sont des substances
inotropes négatives : augmentées lors d’une cirrhose,
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La cardiomyopathie cirrhotique
elles sont responsables d’une réponse contractile
β-adrénergique altérée ;
circulation hyperdynamique avec dysfonction des
canaux ioniques potassium et calcium ;
altération de la membrane plasmatique.
Implications cliniques
de la cardiopathie cirrhotique
Impact de la transplantation hépatique
sur la cardiomyopathie cirrhotique
La circulation hyperdynamique peut compliquer la
prise en charge postopératoire immédiate. Une aug-
mentation de la postcharge, associée au remplissage
peropératoire, peut favoriser la survenue d’un œdème
aigu pulmonaire par inadaptation au stress. C. Donovan
et al. (42) ont rapporté 56 % d’œdèmes aigus pulmo-
naires radiologiques, dont seuls 6 % présentaient des
signes cliniques. Lœdème régresse en cas de traite-
ment médical. Plus rares sont les cardiomyopathies
dilatées (43) [7 à 15 %], parfois responsables de décès
par insuffisance cardiaque aiguë.
M.J. Eimer et al. ont rapporté, dans une cohorte de
86 patients ayant subi une TH, un taux d’insuffisance
cardiaque de 7 % ; les facteurs de risque dans ce groupe
étaient un âge avancé et des pressions droites aug-
mentées (44). S.A. Nasraway et al. (45) ont signalé, dans
une série de 113 cas de TH, que les patients qui nont
pas survécu à l’intervention avaient une réserve myo-
cardique diminuée avant la TH (diminution de l’index
cardiaque et du transport d’oxygène). La défaillance
multiviscérale avec issue fatale a été plus fréquente
dans ce groupe.
G. Therapondos et al. ont remarqué, chez 40 greffés, une
détérioration de la fonction cardiaque lors du troisième
mois après la TH (46). Les auteurs suggèrent que les
complications cardiovasculaires sont attribuables à une
cardiopathie cirrhotique préopératoire et préconisent
la mesure du BNP (peptide cérébral natriurétique) pour
prédire de telles complications.
Cardiomyopathie cirrhotique
et syndrome hépatorénal
L. Ruiz Del Arbol et al. ont étudié 23 patients cirrhotiques
qui présentaient une péritonite bactérienne au moment
du diagnostic, qui sest résolue spontanément. Ils ont
constaté que 8 d’entre eux ont, malgré la résolution de
l’infection, développé un syndrome hépatorénal et ont
vu leurs paramètres circulatoires et leur fonction hépa-
tique se détériorer. Le groupe souffrant d’insuffisance
rénale avait une très haute mortalité (47). A. Krag et al.,
dans une population de 24 patients cirrhotiques, ont
mis en évidence une relation étroite entre le degré de
dysfonction systolique, un index cardiaque inférieur à
1,5 l/ mn/m2, le degré d’insuffisance rénale et la survie
chez les patients ayant une cirrhose décompensée (48).
Le rapport entre dysfonction cardiaque et fonction
rénale fera l’objet d’études à venir et de traitements
visant à l’amélioration de la fonction cardiaque.
Impact de l’insertion
du transjugular intrahepatic portosystemic shunt
sur la cardiomyopathie cirrhotique
Linsertion du TIPS peut être à l’origine d’une insuffisance
cardiaque congestive. P. Gines et al. ont retrouvé, dans
une étude comparant TIPS et paracentèse + albumine,
une incidence de l’insuffisance cardiaque congestive
de 12 % dans le groupe TIPS versus 0 % dans le groupe
paracentèse + albumine (5). M. Cazzaniga et al. (49) ont
évalué, chez 32 patients, la fonction diastolique avant
et après l’insertion du TIPS à J28. Ils ont montré que la
dysfonction diastolique (E/A < 1) à J28 était corrélée
à la survie, et quelle était un facteur indépendant de
mortalité. Pendant le suivi de la première année, ils ont
constaté que 6 des 10 patients ayant une dysfonction
diastolique sont décédés, contre aucun des 22 autres
patients. R.N. Rabie et al. ont confirmé que, dans une
cohorte de 101 cirrhotiques ayant bénéficié de l’inser-
tion d’un TIPS, la dysfonction diastolique (E/A < 1) était
associée à une clairance de l’ascite diminuée ainsi qu’à
une augmentation de la mortalité après la pose du TIPS,
probablement liée à l’aggravation de la dysfonction
hémodynamique (50).
Biomarqueurs
Plusieurs biomarqueurs ont été proposés pour détecter
la CC. D. Pateron et al. ont montré qu’une élévation
de la troponine chez des cirrhotiques, associée à
une diminution du volume systolique et de l’index
de masse ventriculaire, indiquait une lésion myocar-
dique infraclinique (51). LANP (peptide auriculaire
natriurétique), considéré comme un marqueur de
surcharge volémique, est fréquemment élevé chez les
cirrhotiques (52). BNP et pro-BNP, marqueurs sensibles
de surcharge de volume et de dysfonction myocar-
dique, sont souvent élevés en cas de cirrhose, même
compensée (53). Le niveau de ces peptides est corrélé
à la sévérité de la cirrhose et au degré de dysfonction
et d’hypertrophie myocardique (54) et est associé à
une augmentation de la mortalité à 6 mois (55). Ces
peptides peuvent être utiles dans détection de la
CC (52-56). La galectine 3 est un marqueur exprimé
dans les hépatocytes de patients cirrhotiques, et peu
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36
Mise au point
24-25 avril 2014
IMIRT – 2nd International Meeting on Ischemia
Reperfusion Injury in Transplantation
Futuroscope, Poitiers
Organisateur : Benoît Barrou
22 mai 2014
13
es
Journées du GTI – Groupe Transplantation et Infection
Maison de l’Amérique latine, Paris
5-6 juin 2014
Séminaire de Beaune de recherche en transplantation
Bastion des hospices, Beaune
Organisateur : Gérard Rifl e
6 juin 2014
Réunion du GTP – Groupe de transplantation pédiatrique
Hôpital Necker, Paris
Organisateur :
Dominique Debray
23-25 juin 2014
EFPMO – École francophone de prélèvement
multi-organe
Novotel, Marne-la-Vallée
Organisateur :
Benoît Barrou
25-26 septembre 2014
Congrès international de transplantation pulmonaire
UIC-P Espaces congrès, Paris
Organisateur : Marc Stern
3-6 décembre 2014
Congrès annuel de la SFT – Société francophone de
transplantation
Palais des Congrès, Caen
AGENDA 2014
SFT
exprimé dans les hépatocytes en cas d’hépatite ou de
stéatose (57). J. Wanninger et al. (58) ont démontré que
le foie défaillant ne peut pas éliminer les substances
cardiotoxiques ou pouvant être responsables de la
libération de la galectine 3.
Histologie
Les lésions de CC associent notamment une hyper-
trophie myocardique et un œdème cardiomyocytaire
et sous-endothélial. Dans une étude récente, N.X. Ortiz-
Olvera et al. ont constaté, sur 1 176 autopsies effectuées
sur une période de 12 ans, des anomalies cardiaques
macroscopiques chez 135 cirrhotiques, en particulier
une hypertrophie ventriculaire gauche dans 47 % des
cas de cirrhoses alcooliques et 41 % des cas de cirrhoses
d’autres étiologies (59). Les anomalies étaient plus fré-
quentes en cas de cirrhose décompensée (62 %).
Critères diagnostiques
delacardiomyopathie cirrhotique
Les critères de la CC restent à préciser. Elle doit être
évoquée devant des arguments d’ECG, échocardio-
graphiques et biologiques. Les examens de stress sont
souvent insuffisants, car la diminution de la capacité
d’exercice du cirrhotique associée à la désensibilisa-
tion des récepteurs β-adrénergiques et l’insuffisance
chronotrope rendent difficile la réalisation des tests
pharmacologiques adéquats (tableau II). De plus, plu-
sieurs pathologies responsables d’une insuffisance car-
diaque légère ou modérée peuvent passer pour une
CC. Les patients atteints d’une hépatopathie évoluée
peuvent aussi présenter une cardiopathie ischémique
hypertensive ou une cardiomyopathie alcoolique.
Une évaluation cardiaque classique permet souvent
d’écarter les autres étiologies.
Traitement
La plupart des patients sont asymptomatiques, et ne
nécessitent pas de traitement. La vasodilatation péri-
phérique, chez eux, exerce un rôle autoprotecteur sur le
développement d’une insuffisance cardiaque conges-
tive. Les mesures à prendre en cas de cardio pathie
symptomatique sont similaires à celles à prendre en
cas d’insuffisance ventriculaire gauche chez un patient
non cirrhotique, à savoir : repos, oxygénothérapie avec
ventilation si nécessaire, régime hyposodé, diurétiques
et inhibiteurs de l’enzyme de conversion.
Compte tenu des anomalies de la mise en jeu de la voie
sympathique, les β-agonistes, dont la dobutamine (36)
et l’isoprotérénole (38), pourraient être inefficaces, de
même que les glycosides cardiaques (60). Le taux élevé
Tableau II. Présentation clinique de la cardiomyopathie cirrhotique.
Méthodes diagnostiques Signes cliniques Critères diagnostiques
Échocardiographie Insuffisance cardiaque
Haut débit au repos
Réponse cardiaque au stress atténuée
E/A < 1
Temps prolongé de relaxation
isovolumétrique > 80 ms
IRM dynamique
Médecine nucléaire
Dysfonction systolique et diastolique Temps de décélération prolongé > 200 ms
Oreillette gauche élargie
Diminution de la mobilité de la paroi
etaugmentation de l’épaisseur
FEVG < 55 %
Électrocardiographie
après certains ajustements
Intervalle QT allongé
Altération du couplage E/C
0,44 corrigé selon la fréquence cardiaque
Marqueurs cardiaques sériques Pro-BNP
BNP
Troponine
Corrélation avec : cirrhose, dysfonction
cardiaque et allongement du QT
Corrélation-dysfonction VS du VG
etaugmentation de l’index de masse VG
Marqueurs vasodilatateurs sériques Niveau sérique : NO, CO, EC endothéline 3,
PGI 2 et adrénomédulline
Déséquilibre
Cirrhose en phase décompensée
Marqueurs vasoconstricteurs sériques Niveau sérique : angiotensine,
endothéline 1, vasopressine
Déséquilibre
Cirrhose en phase décompensée
BNP :
Brain Natriuretic Peptide
(peptide cérébral natriurétique) ; FE : fraction d’éjection ; VG : ventricule gauche.
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