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L’Encéphale (2010) 36, 461—471
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP
MÉMOIRE ORIGINAL
Troubles psychotiques aigus liés au bupropion :
revue de la littérature
Acute psychotic disorders related to bupropion: Review of the literature
T. Javelot a,∗, H. Javelot b, A. Baratta c, L. Weiner c, M. Messaoudi d,
P. Lemoine e
a
Service « Les Hortensias », centre psychothérapique Nord Dauphiné, 100, avenue du Médipôle,
38307 Bourgoin-Jallieu cedex, France
b
Hôpital Brabois-Adulte, CHU de Nancy, 54500 Vandœuvre-Lès-Nancy, France
c
Établissement public de santé Alsace Nord, 67170 Brumath, France
d
Laboratoire ETAP, département de neuropsychopharmacologie, 54500 Vandœuvre-Lès-Nancy, France
e
Clinique Lyon Lumière, 69330 Meyzieu, France
Reçu le 18 juin 2009 ; accepté le 2 décembre 2009
Disponible sur Internet le 15 mars 2010
MOTS CLÉS
Épisode psychotique
induit ;
Bupropion ;
Arrêt du tabac ;
Iatrogénie
∗
Résumé Le bupropion, ou amphébutamone, est antidépresseur atypique désormais indiqué dans l’aide au sevrage tabagique, situation à haut risque de manifestations psychiques
aiguës. Structurellement proche de l’amphétamine et des monoamines endogènes, dopamine
et noradrénaline, dont il inhibe la recapture, le bupropion serait également un antagoniste noncompétitif des récepteurs nicotiniques. Nous avons récemment rapporté le cas d’une patiente
schizoaffective ayant développé deux épisodes psychotiques aigus consécutifs dans les suites
d’une mise sous bupropion. Nous avons donc conduit une recherche bibliographique visant à
recenser les autres publications établissant un lien entre ce traitement et la survenue d’épisodes
psychotiques (et/ou thymiques avec caractéristiques psychotiques) aigus. Outre les données
de la pharmacovigilance et des études randomisées, 22 cas circonstanciés du même type ont
été publiés entre décembre 1985 et novembre 2008. Les troubles surviennent généralement
après une exposition brève à une posologie de 300 mg/j environ. Dans la majorité des cas, les
patients sont indemnes d’antécédent psychotique. Au plan étiopathogénique, l’action dopaminergique du bupropion, parfois potentialisée par interaction médicamenteuse, pourrait être
incriminée. L’expression clinique et le profil évolutif des troubles les rapprochent des psychoses
« organiques » et « toxiques » traditionnellement décrites. La stratégie thérapeutique consiste
habituellement en un arrêt du bupropion et l’introduction d’un neuroleptique. L’utilisation
des benzodiazépines pourrait constituer une alternative valable, par référence au modèle des
psychoses aiguës amphétaminiques.
© L’Encéphale, Paris, 2010.
Auteur correspondant.
Adresses e-mail : [email protected], [email protected] (T. Javelot).
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2010.
doi:10.1016/j.encep.2010.01.005
462
KEYWORDS
Substance-induced
psychosis;
Bupropion;
Smoking cessation;
Adverse drug event
T. Javelot et al.
Summary
Rationale and objectives. — Bupropion, or amfebutamone, is an atypical antidepressant also
used during tobacco cessation. From a structural standpoint, it resembles amphetamine drugs
with psychostimulant effects, and endogenous monoamines. From a pharmacological standpoint, bupropion, and two of its most important active metabolites, inhibit dopamine and
norepinephrine reuptake. It has recently been discovered that bupropion may act as a noncompetitive cholinergic nicotinic receptor antagonist, and that it may inhibit the activation
of reward systems triggered by nicotine. Buproprion’s efficacy as a smoking cessation aid has
been demonstrated by numerous clinical trials that have compared its effects with those of
placebo and other nicotinic substitutes. In 2001, buproprion SR received marketing authorization in France as a smoking cessation aid, under the name ZYBAN® . Tobacco addiction
indeed remains a major public health issue. Among patients with psychiatric conditions, chronic tobacco consumption is frequent. The development of non-nicotinic drugs may therefore
enhance therapeutic possibilities. However, the psychotropic effects of these molecules should
be taken into account. We have recently reported the case of a patient with schizoaffective
disorder, who presented two acute bupropion-induced psychotic episodes. We have also undertaken an exhaustive bibliographical research on this subject. The aim of the present study is
to present the information available to us, in order to suggest aetiopathogenic hypotheses and
therapeutic proposals.
Data sources. — The following databases were consulted on a regular basis, with no date restriction: Medline, Cochrane and Elsevier. The present study identified 22 cases of psychotic
conditions associated with buproprion, as well as randomized and pharmacovigilance studies
published in English, from December 1985 to November 2008. Since 2002, there have been three
published case-reports on patients who underwent a tobacco cessation program.
Data synthesis. — Psychotic disorders associated with buproprion appear after an average of
10 days of 300 mg/d bupropion intake. In about two third of cases, the patients have no history
of psychiatric conditions. In one third of cases, they have a history of thymic disorders. In our
review, auditory, visual or cenaesthetic hallucinations frequently occur (85% of the reported
cases), and are sometimes characterized by single episodes and/or are rationalized. Some of
them occur along with delusional episodes (mystical, paranoid, etc.). The patients are restless,
confused, but seldom exhibit dissociative and thymic symptoms.
Discussion and conclusions. — From an aetiopathogenic, clinical and evolutive standpoint,
buproprion-induced psychotic episodes share many similarities with acute organic or toxic psychosis (notably induced by amphetamines). The hypothesis of a dopaminergic hyper-reactivity
should be analyzed. Moreover, most of these patients were taking other medication, and the
possibility of a dopaminergic potentialization prior to buproprion intake could be suggested.
In such cases, bupropion should be discontinued and complete remission is expected within an
average of 10 days. Even though neuroleptic drugs are still frequently used in these cases, benzodiazepines could become a valid alternative, according to the model of amphetamine-induced
acute psychosis.
© L’Encéphale, Paris, 2010.
Introduction
La consommation de tabac reste en France la première
cause de mortalité évitable et la population psychiatrique
est particulièrement touchée. La fréquence du tabagisme
chronique est significativement plus élevée chez les patients
souffrant de troubles psychotiques ou de l’humeur que dans
la population générale. Par ailleurs, ces patients ont davantage de difficultés à cesser de fumer [3,20] et le sevrage
est potentiellement pourvoyeur d’une symptomatologie psychique surajoutée [12].
L’introduction du bupropion sur le marché français
s’inscrit dans une dynamique récente de développement de
traitements non nicotiniques facilitant l’arrêt du tabac. Les
effets psychotropes de ces molécules ne peuvent être négligés : le bupropion, ou amfébutamone, est ainsi utilisé depuis
une vingtaine d’années outre-atlantique comme antidépresseur, avec une efficacité et une tolérance bien documentées
[21]. Ses propriétés dopaminergiques ne doivent cependant
pas être méconnues [28].
Nous avons récemment rapporté le cas d’une patiente de
31 ans ayant présenté consécutivement deux épisodes psychotiques aigus induits par le bupropion [40]. Si l’existence
de tels troubles a été antérieurement signalée, aucune
revue de la littérature n’y a été à notre connaissance spécifiquement consacrée. L’objectif du présent travail est de faire
le point sur la question. Nous tenterons d’en tirer les éléments de compréhension étiopathogénique et de formuler
des propositions thérapeutiques.
Le bupropion, antidépresseur atypique utilisé pour
le sevrage tabagique
Synthétisé en 1966, le bupropion est structurellement
proche des monoamines endogènes (noradrénaline et
Troubles psychotiques aigus liés au bupropion : revue de la littérature
dopamine), comme des composés psychoactifs amphétaminiques. Son utilisation clinique aux États-Unis remonte aux
années 1980. Un temps retiré du marché suite à la survenue
de crises comitiales doses-dépendantes, il est réintroduit en
1989 à dosage adapté et accompagné de strictes restrictions
d’emploi (antécédents comitiaux, troubles des conduites
alimentaires, sevrage éthylique ou benzodiazépinique) [28].
Outre la forme à libération immédiate (WELLBUTRIN IR® ,
immediate-release), deux formes à libération lente ont été
mises au point (WELLBUTRIN SR® et WELLBUTRIN XR® pour
sustained-release et extended-release) [25].
Au plan pharmacologique, le bupropion ainsi que deux de
ses métabolites actifs inhiberaient la recapture de la dopamine et de la noradrénaline [28]. Bien que son potentiel
inhibiteur de la recapture de la dopamine soit deux fois plus
important que celui de la noradrénaline, c’est ce second
processus qui serait majoritairement responsable de l’action
antidépressive observée dans les modèles expérimentaux
[49].
L’indication principale du bupropion reste, outreatlantique, l’épisode dépressif majeur. La fenêtre thérapeutique est comprise entre 100 et 450 mg/j [21]. Le bupropion
est intégré parmi les traitements de première ligne de
la dépression bipolaire dans les recommandations nordaméricaines [61,67]. Il a pu être considéré comme plus
faiblement inducteur d’épisodes maniaques que d’autres
molécules [27,44,52], bien que ce profil de tolérance soit
contesté [27].
Ses propriétés facilitatrices de l’arrêt du tabac ont
été découvertes dans les années 1990 : certains patients
fumeurs, traités par bupropion pour dépression, cessaient
spontanément leur tabagisme [11]. Le bénéfice du bupropion a été ensuite établi chez les fumeurs non-déprimés
versus placebo et versus patchs nicotiniques [36]. Le bupropion SR a reçu en 2001 une autorisation de mise sur le marché
français dans cette indication, sous le nom commercial
de ZYBAN® . Il est prescrit à posologie progressive jusqu’à
300 mg/j, l’arrêt du tabac étant programmé au cours la
deuxième semaine de traitement [11].
Les mécanismes par lesquels le bupropion facilite le
sevrage tabagique ne sont pas totalement éclaircis. L’action
dopaminergique pourrait atténuer les signes de sevrage [54].
On a découvert plus récemment qu’il était un antagoniste
non-compétitif des récepteurs cholinergiques nicotiniques
et pourrait donc inhiber l’activation du système de récompense induit par la nicotine [28,49].
Le bupropion bénéficie désormais d’un recul international de plus de dix ans dans le sevrage tabagique
[36], y compris dans certaines populations et sous-groupes
spécifiques [1,35,62]. Ainsi, en dépit de ses propriétés dopaminergiques, il a été utilisé chez des patients schizophrènes,
où il a fait preuve d’une efficacité modeste mais significative
[19]. Les essais randomisés disponibles n’ont pas mis en évidence d’exacerbation de la symptomatologie psychotique
[19,23,30].
Le sevrage tabagique, situation à haut risque de
manifestations psychiques aiguës
L’arrêt du tabac est associé dans plus de la moitié des
cas à des plaintes psychiques et/ou somatiques variées
463
[12]. Le sevrage nicotinique en est la forme la plus connue
(Tableau 1) ; le bupropion aurait un effet favorable sur certains items (humeur dépressive, difficulté de concentration,
irritabilité) [58].
La probabilité de survenue d’un épisode dépressif est
augmentée dans l’année qui suit un sevrage tabagique, en
particulier en cas d’antécédent dépressif, qu’il soit unique
ou plus encore récurrent [16,64]. Quelques cas de manies
imputables au sevrage nicotinique ont également été signalés [6,7,43].
L’apparition d’une symptomatologie confusionnelle aiguë
de type delirium, imputable au sevrage nicotinique, a également été décrite dans des contextes somatiques lourds
[29,47,63].
Bupropion et épisodes psychotiques aigus :
revue de la littérature
Matériel et méthode
Notre méthode est bibliographique descriptive et critique.
Elle a consisté dans un premier temps à passer en revue,
à partir des bases de données Medline, Cochrane et Elsevier, l’ensemble des publications de tous types (i.e. lettres à
l’éditeur, articles originaux, revues de la littérature) susceptibles d’établir l’imputabilité d’un traitement par bupropion
dans la survenue d’épisodes psychotiques (et/ou thymiques
avec caractéristiques psychotiques) aigus. Nous avons sélectionné tous les articles disponibles en langue anglaise et
parus jusqu’en novembre 2008, auquel il convient d’ajouter
un cas personnel récemment publié. Outre « bupropion »,
les mots-clés suivants ont été utilisés : psychosis, schizophrenia, hallucination, delirium, mania/depression with
psychotic/mélancholic feature, catatonia, delusion, confusion, restlessness.
Nous avons dans un second temps isolé les publications décrivant précisément les cas cliniques rapportés et
mentionnant : l’âge et le sexe du patient concerné, ses antécédents significatifs, la forme et la posologie de bupropion
utilisées (en excluant les cas de surdosage manifeste), le
cadre nosographique et le contexte pharmacologique de son
administration, enfin la présentation clinique circonstanciée
de l’épisode induit.
Résultats
Publications des données des systèmes de
pharmacovigilance
La base de données de la pharmacovigilance française
concernant les effets indésirables du bupropion a fait l’objet
d’une publication pour les années 2001 à 2004 [8]. Le système dédié des centres anti-poisons américains a recueilli
plus de 7300 incidents d’exposition au bupropion seul, de
1998 à 1999 [5]. L’étude des surdosages intentionnels survenus au Texas durant la même période est également
disponible [56], ainsi que celle des surdosages accidentels
enregistrés aux États-Unis durant les années 2000 à 2003
[57].
Des manifestations psychotiques (hallucination, délire
paranoïde) sont rapportées au travers de ces quatre
464
Tableau 1
T. Javelot et al.
Sevrage à la nicotine (critères DSM IV).
A. Utilisation quotidienne de nicotine pendant au moins plusieurs semaines
B. Arrêt brutal de l’utilisation, ou réduction de la quantité de nicotine utilisée, suivie, dans les 24 heures, d’au moins
quatre des signes suivants :
Humeur dysphorique ou dépressive
Insomnie
Irritabilité, frustration, colère
Anxiété
Difficultés de concentration
Fébrilité
Diminution du rythme cardiaque
Augmentation de l’appétit ou prise de poids
C. Les symptômes du critère B causent une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement
social, professionnel, ou dans d’autres domaines importants
D. Les symptômes ne sont pas dus à une affection médicale générale et ne sont pas mieux expliqués par un autre trouble
mental
publications, selon une logique statistique transversale :
les contingences symptomatiques ne sont détaillées que
ponctuellement (e.g. hallucinations précédant une crise
comitiale lors d’un surdosage [56]).
Revues de la littérature, rapports non-circonstanciés de
cas
Aucune revue de la littérature consacrée aux troubles psychotiques induits par le bupropion n’a été repérée.
Holm et Spencer, dans une revue de l’utilisation du
bupropion comme aide au sevrage tabagique, retiennent
l’existence d’hallucinations visuelles dans le cadre de
surdosages massifs [36]. Une autre revue sur le même
thème signale la présence de confusion et d’hallucinations,
sans précision [54]. La synthèse réalisée par Hughes et
al. pour la Cochrane Collaboration et ayant pour objet
l’utilisation des antidépresseurs dans le sevrage tabagique
ne permet pas d’identifier spécifiquement de manifestations
psychotiques imputables au bupropion, dans le cadre des
31 essais cliniques randomisés inclus [38]. Les essais évaluant l’efficacité du bupropion SR pour le sevrage tabagique
des patients schizophrènes (ou schizoaffectifs) présentent
l’intérêt d’apprécier l’impact de la molécule sur la symptomatologie psychotique de ces patients, généralement par le
biais de la Positive and Negative Symptoms Scale for Schizophrenia (PANSS) : aucune dégradation significative des scores
n’est retrouvée dans ces études de faible puissance, pour
des suivis de trois à six mois [23,30,31].
Les données sont plus explicites en ce qui concerne
l’état dépressif majeur, contexte où le recul d’utilisation du
bupropion est le plus important : des troubles psychotiques
(délire, paranoïa, hallucination) sont mentionnés avec les
formes IR et SR [21]. Dans une étude randomisée portant
sur l’efficacité du bupropion IR dans le cadre des troubles
schizoaffectifs unipolaire, la symptomatologie psychotique
(trouble du cours de la pensée, vécu paranoïde) a été précisément évaluée ; un tiers des patients (trois sur neuf)
recevant le bupropion IR seul (750 mg/j) ont quitté l’étude
suite à l’exacerbation franche des manifestations de ce type
[33].
Dans le cadre du trouble bipolaire, Stoll et al. ont évalué
la sévérité des caractéristiques psychotiques associées à un
virage de l’humeur dans une étude rétrospective incluant
49 patients traités par antidépresseur [60]. Bond et al. ont
réalisé une revue systématique portant sur les virages de
l’humeur pharmaco-induits dans le trouble bipolaire I ou II,
ou dans l’épisode dépressif majeur [10] ; cinq essais prospectifs impliquant le bupropion ont été retenus, aucun ne
permettant toutefois de spécifier les caractéristiques psychotiques éventuellement observées (par exemple, mention
d’hospitalisations psychiatriques « non reliées à des événements thymiques ou à des idées suicidaires », au sein
d’un essai incluant 179 patients [55]). Enfin, Post et al. ne
signalent dans leur propre étude aucun cas de survenue de
caractéristiques psychotiques chez les patients bipolaires
ayant reçu du bupropion et présentant une élévation significative de l’humeur [52].
Rapports circonstanciés de cas
Nous avons réuni 22 cas cliniques, issus de 16 publications,
répondant aux critères mentionnés plus haut (Tableau 2 ;
certains articles rapportent plusieurs cas, identifiés ci-après
par une lettre suivant la référence : [32a], [32b], etc.). Un
seul cas circonstancié retrouvé dans la littérature et correspondant à ces critères répondait également au critère
d’exclusion fixé (surdosage volontaire rapporté par Wang et
al. [66]).
Le sex-ratio est de 1/1 (11 femmes, 11 hommes). L’âge
moyen est de 44,6 ans (écart-type = 16,95), avec des
extrêmes de 19 et de 79 ans. Dans 14 cas, il n’existe pas
d’antériorité psychotique au sens strict. Aucun des patients
n’est reconnu comme schizophrène. Huit patients sont
clairement identifiés comme bipolaires, deux patients présentant des antécédents thymiques avec caractéristiques
psychotiques [2,45]. Un seul patient souffre de troubles schizoaffectifs [40]. Trois patients reçoivent le bupropion dans le
cadre d’un sevrage tabagique [4,40,48], deux n’ayant aucun
d’antécédent psychotique [4,48].
La posologie journalière moyenne reçue par les patients
lors de l’éclosion psychotique est comprise entre 250 mg
pour la forme SR (désormais utilisée pour le sevrage
tabagique) contre 293,75 mg pour la forme IR. La durée
d’exposition moyenne avant l’éclosion psychotique est de
dix jours environ, un cas extrême d’exposition de 11 mois
Troubles psychotiques aigus liés au bupropion : rapport des cas circonstanciés publiés dans la littérature internationale entre décembre 1985 et novembre 2008.
Auteur, publication
Golden et al., 1985 [32a]
Golden et al., 1985 [32b]
Patient : sexe/âge,
antériorité psychotique
éventuelle, antécédents
neuropsychiatriques
F/35 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Indication,
contexte clinique
Forme reçue,
coprescriptions
Posologies et durée de l’exposition
avant l’éclosion psychotique
Clinique de l’épisode psychotique
Résolution de l’épisode : durée et
traitement
Dépression
Bupropion IR,
introduit après
3 semaines de
« washout »
Initié à 100 mg/j, majoré à
500 mg/j
Exposition de 3 semaines
HA
Agitation
Désorientation temporelle
Diazépam le soir
Neuroleptique (non spécifié)
Résolution en 9 j
F/75 ans
Épisode psychotique
antérieur unique, sous
imipramine
Dépression (TB)
Bupropion IR
Lithium
L-thyroxine
Initié à 75 mg/j, majoré à 300 mg/j
Exposition de 4 j avant un 1er
épisode psychotique
1er épisode
Plaintes somatiques (nausées), puis
HA/V critiquée
1er épisode
Baisse à 225 mg/j
Résolution en 3 j
Ré-introduction à 75 mg/j, puis
majoré à 300 mg/j
Exposition d’une semaine avant un
2e épisode
2e épisode : HV
2e épisode
Baisse à 200 mg/j
Résolution complète et rémission
de l’épisode dépressif
Golden et al., 1985 [32c]
F/54 ans
Trouble psychotique bref
unique antérieur, avec HA
Dépression (TB)
Bupropion IR
Initié à 150 mg/j, majoré à
425 mg/j
Ajusté à 300 mg/j en raison d’EI
somatiques
Exposition < 1 semaine
Agitation marquée
Délire paranoïde
Barrages, persévérations
HA
Arrêt du bupropion
Thioridazine 200 mg
Régression rapide de l’agitation des
HA, résolution à 5 j
Golden et al., 1985 [32d]
F/50 ans
Antériorité d’HV, lors
d’une polymédication par
psychotropes
Dépression (TB)
Bupropion IR
Initié à 100 mg/j
Survenue d’HV après 24 h
Majoration à 450 mg/j sur 10 j avec
persistance des HV
HV zoopsiques critiquées
Plaintes somatiques associées
(crampes, nausées, anorexie)
Arrêt du bupropion
3 semaines de wash-out
Reprise progressive de 75 à
500 mg/j, sans récidive
Van Putten et Shaffer, 1990 [65]
H/41 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Dépression
(résistance à
60 mg/j de
fluoxétine)
Bupropion IR
Initié à 225 mg/j, majoré à
300 mg/j
Exposition de 10 j
Nervosité et anxiété
Puis agitation
Puis délire avec HV zoopsiques non
critiquées
Arrêt du bupropion
Neuroleptiques fortes posologies
Résolution à 6 j
Dager et Heritch, 1990 [18]
H/48 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Dépression
chronique (TB),
résistante aux
tricycliques
Bupropion IR
Lithium
Initié à 225 mg/j, majoré à
450 mg/j
Exposition d’une semaine
Amélioration rapide de l’humeur,
préoccupations religieuses, puis
désorganisation sévère de la
pensée, angoisse, agitation
Arrêt du bupropion
Benzodiazépines
Halopéridol 15 mg/j sur 8 j
Reprise du bupropion à 3 mois,
posologies progressives sur 2 mois,
pas de rechute à 2 ans
Liberzon et al., 1990 [45]
H/75 ans
Maladie de Parkinson
Mélancolie délirante
évoluant depuis 18 mois
Mélancolie
délirante
Bupropion IR
Halopéridol
Amantadine
Initié à 75 mg/j suite à une série de
7 séances d’ECT
Exposition de 3 j
HA/V
Agitation
Désorientation
Arrêt du bupropion
Poursuite du traitement habituel
Résolution à 4 j
Jackson et al., 1992 [39]
H/19 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Dépression
résistante aux
tricycliques
Bupropion IR,
introduit dès
l’arrêt du
traitement
antérieur
(Désipramine
potentialisée par
Lithium et
L-thyroxine)
Initié à 75 mg/j, majoré à 225 mg/j
Exposition de « quelques jours »,
non spécifiée
Bizarrerie comportementale
Propos nihilistes puis
Catatonie
Arrêt du bupropion
Réponse transitoire de la catatonie
sous lorazépam, puis
14 ECT bilatérales
Résolution des symptômes,
amélioration de l’humeur
Ames et al., 1992 [2a]
H/63 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Épisode maniaque unique
sous fluoxétine
Dépression (TB)
Bupropion IR
Lithium
Clonazépam
Initié à 225 mg/j, majoré à
300 mg/j
Exposition de 6 semaines
HV zoopsiques
Pas d’exaltation thymique
Baisse à 225 mg/j
Régression partielle des HV
Résolution à l’arrêt complet
Troubles psychotiques aigus liés au bupropion : revue de la littérature
Tableau 2
465
466
Tableau 2 (Suite )
Indication,
contexte clinique
Forme reçue,
coprescriptions
Posologies et durée de l’exposition
avant l’éclosion psychotique
Clinique de l’épisode psychotique
Résolution de l’épisode : durée et
traitement
Dépression (TB)
Bupropion IR
Lithium
Posologie progressive jusqu’à
300 puis 400 mg/j
Exposition d’un mois
Délire d’empoisonnement, puis à
1 semaine, apparition d’HA/V, vécu
subjectif de confusion
Arrêt du bupropion
Halopéridol 1 mg/j
Résolution à une semaine
Ames et al., 1992 [2c]
F/23 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Dépression (TB)
Bupropion IR,
introduit après
5 semaines de
« washout »
Posologie progressive jusqu’à
150 mg/j
Exposition de 3 j
HV zoopsiques nocturnes critiquées
Pas de changement thymique
Arrêt du bupropion
Résolution à 2 j
Howard et Warnock, 1999 [37]
H/79 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Dépression
Bupropion IR
Initié à 75 mg/j, majoré à 300 mg/j
Apparition d’un vécu de
persécution au 4e jour
Paranoïa, puis HA
Baisse à 25 mg/j
Halopéridol 5 mg/j
Résolution à une semaine, arrêt de
l’halopéridol
Reprise progressive du bupropion
jusqu’à 75 mg/j, pas de récidive à
3 mois
Filteau et al., 2000 [26]
H/45 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Dépression (TB)
Bupropion*
Lithium arrêté
(EI),
Mise sous
valproate
Efficacité antidépressive à 300 mg/j
Début des HA dès l’introduction du
valproate
HA critiquées
Anxiété, sentiment de « devenir
fou »
Apparition d’HV à une semaine
Baisse à 150 mg/j puis arrêt
complet
Disparition des hallucinations dès
l’arrêt
Neumann et al., 2002 [48]
H/29 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Consommation chronique
d’alcool et de cannabis
Sevrage
tabagique
Bupropion SR
Initié à 300 mg/j
Exposition de 5 j
HA/V
Délire de référence
Idées suicidaires
Amisulpride 800 mg/j
Résolution à 2 semaines, pas de
récidive à 6 mois
Pittenger et al., 2006 [50]
F/43 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Consommation ponctuelle
de cannabis
Dépression
résistante
Bupropion*
Lithium
Memantine
Traitement de fond par Bupropion
450 mg/j + lithium + mémantine
Adjonction de riluzole à visée de
potentialisation (essai
thérapeutique)
HV, élémentaires (visions colorées)
puis scènes complexes
Régression transitoire à l’arrêt de
la mémantine,
Résolution à 3 j après l’arrêt du
bupropion
Charuvastra et Yaeger, 2006 [15a]
F/39 ans
Pas d’antériorité
psychotique
Cocaïnomanie sevrée
depuis 10 mois
Dépression (ESPT)
Bupropion SR
Buspirone
Fluoxétine
Initié et maintenu à 400 mg/j
Exposition de 3 semaines
HC
Vécu délirant d’infestation
(insectes courant sous la peau)
Résolution dès la baisse à 300 mg/j
Charuvastra et Yaeger, 2006 [15b]
F/40ans
Pas d’antériorité
psychotique
Dépression
unipolaire
Bupropion SR
L-thyroxine
Gabapentine
Exposition de 11 mois (aucune
autre médication introduite)
HC
Vécu d’infestation critiqué
(insectes courant sous la peau)
Résolution dès la baisse à 300 mg/j
Chan et al., 2006 [14]
H/51ans
Pas d’antériorité
psychotique
Dépression
Bupropion SR
Fluoxétine
Bromazépam
Alprazolam
Initié et maintenu à 150mg/j
DTS
Aprosexie, difficultés mnésiques
HA
Arrêt du bupropion
Halopéridol 5 mg + lorazépam 2 mg
Résolution à 2 j
Hahn et al., 2007 [34]
H/41ans
Épisodes psychotiques
antérieurs sous cocaïne
Addiction (sevrée) à la
cocaïne
Addiction aux opiacés
depuis 4 ans, substituée
Dépression
chronique
Bupropion SR
Méthadone
Initié à 150 mg/j depuis 1 an
,
mais défaut d’observance (prise
irrégulière)
HA survenues à 5 semaines
d’exposition continue
HA (absentes si le patient saute
une prise)
Délire paranoïde
Transitivisme
Arrêt du bupropion
Quétiapine 25 mg/j
Résolution rapide, pas de récidive
à 3 mois/j
Ames et al., 1992 [2b]
½
T. Javelot et al.
Patient : sexe/âge,
antériorité psychotique
éventuelle, antécédents
neuropsychiatriques
H/50 ans
Épisodes de manies
délirantes avec HA
Auteur, publication
F : femme ; H : homme ; Bupropion IR : immediate-release (libération immédiate) ; Bupropion SR : sustained-release (libération prolongée) ; Bupropion* : forme non précisée ; EI : effets
indésirables ; TB : trouble bipolaire ; ECT : électroconvulsivothérapie ; ESPT : état de stress post-traumatique ; HA/V/C : hallucinations auditives/visuelles/cénesthésiques ou tactiles
(haptiques) ; DTS : désorientation temporo-spatiale.
1er épisode
Arrêt du bupropion
Majoration de l’olanzapine et de
l’alprazolam
Ajout d’un neuroleptique sédatif
Résolution à 12 j
2e épisode
Arrêt du bupropion
Majoration de l’olanzapine
Clonazépam et divalproate
Résolution à 15 j
1er épisode
Délire de persécution et
d’empoisonnement
Discordance
Hétéro-agressivité
2e épisode
Délire de persécution
Crise clastique
État maniaque (tachypsychie, insomnie
complète)
Initié à 150 mg/j
Exposition de 2 j avant un 1er
épisode psychotique
1 mois plus tard, ré-introduction à
150 mg/j
Exposition de 4 j avant un 2e
épisode psychotique
F/31 ans
Troubles schizoaffectifs
évoluant depuis 4 ans
Javelot et al., 2008 [40]
Sevrage
tabagique
F/28ans
Pas d’antériorité
psychotique
Bailey et Waters, 2008 [4]
Pas d’antériorité
psychotique
Sevrage
tabagique
Bupropion SR
Olanzapine
Alprazolam
Arrêt du bupropion
Résolution à 1 semaine, pas de
récidive à 2 mois
Délire paranoïaque
Attaques de panique et idéation
suicidaire
HA
Initié à 100 mg/j, majoré à
300 mg/j
Exposition de 7 j
Bupropion SR
Arrêt du bupropion après
5 semaines
Résolution rapide
Initié à 150 mg/j
Exposition de 2 semaines
Liu et Chien, 2007 [46]
F/23 ans
Dépression
Bupropion SR
HA hypnagogiques, occasionnellement
diurnes (entend son nom)
Troubles psychotiques aigus liés au bupropion : revue de la littérature
467
[15] avant la survenue de l’épisode ayant été exclu du
calcul.
Dans quatre cas, la résolution complète de l’épisode a
été obtenue par la seule baisse de la posologie de bupropion. La plupart des auteurs optent néanmoins pour un arrêt
complet de la molécule, parfois après une baisse de la posologie. Dans la moitié des cas, un traitement neuroleptique
a été introduit, certains cas se prêtant à un ajustement
posologique du traitement antérieur co-prescrit [40,45].
La résolution symptomatique a été généralement très
rapide (parfois « dès l’arrêt »), avec, lorsque l’information
est rapportée, une durée moyenne de l’épisode inférieure à une semaine (5,4 jours). Dans trois cas rapportés
[18,32d,37], la reprise progressive du bupropion n’a pas
induit de récidive symptomatique. À l’inverse, dans deux
cas, la ré-introduction de la molécule induira une réactivation psychotique, sans phénomène de sensibilisation
toutefois ; on notera au contraire, dans ces deux cas, un
allongement de la période d’exposition au produit avant la
survenue du second épisode [32b,40].
Dix-neuf
patients
(plus
de
85 %)
souffrent
d’hallucinations. Douze patients présentent des hallucinations auditives, dix des hallucinations visuelles (dont cinq
selon ces deux modalités sensorielles : [2b,26,32a,45,48]).
Charuvastra et Yaeger décrivent deux cas d’hallucinations
cénesthésiques ou haptiques, dont un est clairement rattaché à un vécu délirant d’infestation [15]. On note quatre
cas d’hallucinations visuelles zoopsiques [2a,2c,32c,65].
Une désorientation temporelle et/ou spatiale, une confusion subjective ou constatée est rapportée dans quatre cas
[2b,14,32a,45]. L’agitation psychomotrice est explicite dans
six cas au moins. L’organisation et les thèmes délirants rapportés sont variés : délire mystique [18], d’empoisonnement
[2b,40], de référence [48]. Les troubles francs du cours
de la pensée sont rares [18,32c]. La composante thymique
n’est que rarement mentionnée. On relève un cas d’idéation
suicidaire survenu au décours d’un sevrage tabagique [48]
et un épisode d’exaltation chez la patiente schizoaffective
que rapportons [40].
Discussion
Aspects épidémiologiques
La fréquence des troubles psychotiques induits par le
bupropion a été précocement discutée [32,41]. Johnston
et al., répondant à quatre cas publiés par Golden et
al., avancent une incidence moyenne des pharmacopsychoses de l’ordre de 0,5 % chez les patients inclus dans
les premiers essais contrôlés du bupropion IR, et signalent
l’inclusion de patients schizophrènes ou schizoaffectifs [41].
Golden et al. [32], dans leur propre réponse, pointent
toutefois l’ambiguïté des chiffres annoncés. Aussi doit-on
en réalité souligner, au sein des essais cités par Johnson et al., une fréquence plus élevée du délire (0,4 à
1,4 %), et plus encore des hallucinations (0,9 à 3,3 %). L’une
des principales difficultés du repérage nosographique à
des fins épidémiologiques pourrait résider dans le statut
accordé aux phénomènes élémentaires en fonction de leur
étiologie supposée (notion de psychose organique [2] ou
toxique [53] plutôt « qu’endogène ») et de leur critique
éventuelle par le patient (degré d’adhésion au délire,
468
notion d’hallucinose plutôt que d’hallucination psychotique
vraie).
Néanmoins, une donnée constante, confirmée par notre
propre revue des cas circonstanciés, semble être la grande
fréquence des processus hallucinatoires de tout type. Aussi
Johnston et al. reconnaissent-ils une incidence moyenne de
2,8 % des hallucinations lors des premiers essais contrôlés
du bupropion IR. Ce chiffre doit être mis en perspective
avec la fréquence des hallucinations visuelles complexes
sous IRS, réputée faible (< 0,1 %) et celle sous tricyclique,
élevée (> 1 %, jusqu’à 3 % dans certains essais [41]), avec
prédominance nette pour certains sous-groupes (femmes de
plus de 60 ans [13]). La fréquence des hallucinations après
surdosage accidentel du bupropion paraît plus faible, de
0,4 % dans une série nord-américaine récente [57]. La diffusion des formes à libération prolongée et la précision des
contre-indications au bupropion ont pu contribuer à corriger
les résultats obtenus entre ces différentes études, produites
à 20 ans d’intervalle.
La revue de la pharmacovigilance effectuée par Beyens
et al. témoignent de l’expérience française de l’utilisation
du bupropion dans le cadre du seul sevrage tabagique.
Parmi 475 cas d’effets indésirables graves recensés, 82 sont
de nature psychiatrique, dont quatre cas d’hallucinations
(4,9 % du total des effets indésirables psychiatriques) et
cinq cas de délire paranoïde (6 % des effets indésirables
psychiatriques). Ces cas ne concernent qu’une faible fraction du nombre total de patients traités, bien que les
biais de déclaration doivent évidemment, en matière de
pharmacovigilance psychiatrique, inciter à la prudence
[8].
Dans sa réponse à Golden et al. [32], Johnston et al.
insistent en outre sur le fait que trois des quatre patients
cités présentaient des antécédents psychotiques [41]. Là
encore, cette proportion s’est largement modifiée, et la
présente revue montre que seul un tiers des cas rapportés
concerne désormais des patients porteurs d’antécédents de
ce type (encore faut-il souligner qu’il s’agit d’antécédents
d’épisodes psychotiques aigus, parfois d’origine toxique
[32,34], et non de psychoses chroniques).
La fréquence des patients présentant pour antécédent un trouble bipolaire de l’humeur mérite également
d’être remarquée. Plus d’un tiers des patients (huit sur
22) de notre revue sont concernés : il s’agit majoritairement d’épisode psychotique « sans composante thymique »
chez des patients bipolaires. Toutefois, Post et al., dans
un essai incluant 174 patients, ne retrouvent aucun épisode psychotique parmi les 51 sujets bipolaires ayant reçu
du bupropion, contre un dans les groupes sertraline et
venlafaxine [52]. De même, la fréquence des caractéristiques psychotiques « au décours d’épisodes d’exaltation
thymique » ne paraît pas plus élevée avec le bupropion
qu’avec les autres classes d’antidépresseurs dans une
étude rétrospective portant sur 49 patients traités, comparés à 49 patients présentant des épisodes maniaques
spontanés [60].
Aspects pharmacologiques
Dans la limite des conditions normales d’utilisation, notre
revue indique que la posologie moyenne de bupropion utilisée lors de l’éclosion d’un épisode psychotique est comprise
T. Javelot et al.
entre 250 et 300 mg/j. Toutefois, il a été suggéré que les
patients développant un tel épisode puissent présenter, aux
posologies habituelles, des taux plasmatiques d’acide homovanillique significativement plus élevés que la moyenne,
reflet du catabolisme de la dopamine, et en hydroxybupropion, métabolite actif du bupropion [2].
La comparaison de nos propres données avec les séries
de surdosages trouvées dans la littérature ne permet pas de
dégager d’argument en faveur d’un lien direct et linéaire
entre la dose journalière ou la dose totale absorbée et le
développement de troubles psychotiques induits, ni d’une
prédominance plus nette du processus hallucinatoire [57].
En marge de notre synthèse, Wang et al. rapportent le cas
d’un patient de 23 ans sans antécédent psychotique présentant un vécu délirant de persécution après intoxication
volontaire avec 28 comprimés de bupropion SR 150 mg : ce
jeune homme n’a pas présenté d’hallucination [66].
Dans notre revue, la forme SR est impliquée dans huit cas
sur 22, contre 12 recensés depuis 1985 pour la forme IR. On
notera que la forme XL n’a été impliquée dans aucun des
épisodes psychotiques aigus publiés à ce jour.
Toujours d’après nos propres données, 41 % des patients
(neuf sur 22) reçoivent le bupropion en monothérapie psychotrope ou après une période de wash-out significative.
Dans les autres cas, le rôle potentiel des molécules coadministrées mérite d’être souligné et mis en perspective
avec l’effet dopaminergique du bupropion. Ainsi :
• une synergie d’action pourrait être directement impliquée dans le cas rapporté par Liberzon et al. : le
patient reçoit de l’amantadine, agoniste dopaminergique,
et bénéficie d’une potentialisation dopaminergique par
électroconvulsivothérapie avant introduction du bupropion [45] ;
• le bupropion et l’hydroxybupropion inhibent le cytochrome CYP2D6, lequel métabolise des psychotropes
co-prescrits dans trois cas : désipramine [39] et fluoxétine [14,15] ; l’élévation des taux plasmatiques de
ces molécules est donc probable, ce qui pourrait, là
encore, participer à une potentialisation dopaminergique ; l’augmentation de la sensibilité des récepteurs
et/ou une libération accrue de dopamine ayant été
retrouvée avec ces deux antidépresseurs [17] ;
• dans un cas, l’association du bupropion à des inhibiteurs glutamatergiques (riluzole et mémantine) rejoint
l’hypothèse des manifestations psychotiques positives
comme résultantes d’un déficit fonctionnel glutamatergique et d’une hyperréactivité dopaminergique
mésolimbique [50] ;
• enfin, la sensibilisation du système dopaminergique par
une prise de toxique stimulant antérieure à la mise sous
bupropion a pu être évoquée ; dans notre revue, deux
patients sont d’anciens cocaïnomanes sevrés [15,34].
Le bupropion connaît des interactions complexes avec
les thymorégulateurs anti-épileptiques [42,51]. Ketter et al.
ont montré que la coadministration de valproate de sodium
entraînait une augmentation significative des taux plasmatiques d’hydroxybupropion, métabolite actif du bupropion
[42]. Filteau et al. ont décrit, chez un patient recevant du
bupropion, la survenue d’hallucinations à l’introduction de
Troubles psychotiques aigus liés au bupropion : revue de la littérature
valproate et leur disparition à l’arrêt du bupropion : c’est
l’interaction entre ces molécules qui semble devoir être
incriminée, chez un patient n’ayant pas connu d’épisode
psychotique antérieur [26].
Enfin, Elko et al. mentionnent la survenue
d’hallucinations visuelles brèves dans les suites immédiates d’un surdosage modéré et ponctuel de zolpidem,
chez un patient de 17 ans recevant depuis un mois 450 mg/j
de bupropion [22]. L’imputabilité du bupropion ne peut être
affirmée au regard des éléments rapportés ; néanmoins, ce
cas mérite d’être pris en considération dans la mesure où le
zolpidem a pu être recommandé pour combattre l’insomnie
liée au bupropion [28].
Aspects cliniques
D’une part, la clinique des troubles psychotiques induits par
le bupropion rapproche ces épisodes des troubles mentaux
organiques traditionnellement décrits [2]. On note en particulier une fréquence élevée des hallucinations visuelles et
de la désorientation temporelle et/ou spatiale ; l’épisode
prend parfois un aspect confuso-onirique [45] plutôt que
psychotique aigu au sens strict. La désorganisation psychotique, entendu au sens de dissociation bleulérienne, n’est
pas mentionnée dans ces cas.
D’autre part, les cas recensés peuvent être en règle
appréciés, tant d’un point étiopathogénique que clinique,
selon le modèle des psychoses toxiques, et plus spécialement amphétaminiques. Ces dernières sont habituellement
marquées par la survenue d’hallucinations, auditives mais
également visuelles, cénesthésiques ou tactiles (haptiques),
par l’importance de l’agitation et du vécu paranoïde, enfin
par l’absence de dissociation et par la discrétion des
troubles du cours de la pensée [53] ; la rémission naturelle de
la symptomatologie peut être rapide au sevrage du produit,
d’une dizaine de jours environ [9]. Ces tableaux sont donc
proches de ceux reportés dans le Tableau 2. En revanche,
la composante hyperthymique, classique dans les psychoses
amphétaminiques, n’est pas retrouvée, à l’exception du cas
que nous rapportons [40].
Le degré d’adhésion au processus hallucinatoire est
variable, allant de l’hallucination psychotique vraie intégrée
à un vécu délirant polymorphe, e.g. [32c], à l’hallucinose,
isolée ou associée à des distorsions perceptives, e.g. [46,50].
Dans notre revue, au moins cinq auteurs rapportent une
critique des hallucinations, parfois vécues comme fortement égodystoniques [26]. Nous rappelons en outre que
dès les premières publications consacrées aux effets indésirables du bupropion, les taux d’hallucinations rapportés
(0,9 à 3,3 %) sont apparus comme nettement supérieurs aux
taux d’épisodes psychotiques explicitement authentifiés (0 à
0,5 %), laissant à penser qu’un nombre non négligeable
d’hallucinations étaient isolées et/ou critiquées [41].
Enfin, le profil évolutif des troubles préexistants et
induits mérite également l’attention, du fait de sa relative homogénéité. Dans notre revue, les antécédents de
troubles de l’humeur sont logiquement nombreux, pour une
molécule originellement indiquée dans l’épisode dépressif
caractérisé [21]. Nous avons rapporté le cas d’un patient
souffrant de troubles schizoaffectifs et prenant le bupropion
dans le cadre d’un sevrage tabagique [40]. Les schizophrénies chroniques sont absentes des cas que nous avons
469
recensés (Tableau 2), et les épisodes induits, d’évolution
clinique rapidement favorable, ne constituent pas un mode
d’entrée dans la maladie. Ces données doivent êtres comparées à celles issues de la littérature. Dans une étude ouverte
incluant 20 patients souffrant d’un trouble schizoaffectif de
type unipolaire dépressif et recevant du bupropion IR, en
monothérapie versus bupropion IR et halopéridol, Goode et
Manning ont constaté dans le groupe bupropion seul une
exacerbation franche, statistiquement significative, de la
symptomatologie schizophrénique (troubles du cours de la
pensée, vécu paranoïde), mesurée aux sous-échelles de la
Brief Psychiatric Rating Scale (BPRS) [33]. À l’inverse, les
essais de sevrage tabagique par bupropion SR menés chez
des patients schizophrènes stabilisés n’ont pas généré de
surcroît de décompensation [19,23,30]. Evins et al. n’ont
pas retrouvé de majoration des scores de la PANSS chez
25 patients schizophrènes recevant du bupropion et de la
nicotine dans le cadre d’un sevrage tabagique ; en revanche,
une diminution significative (versus placebo + nicotine) de
l’akathisie et des symptômes extrapyramidaux a été observée [23]. Les mêmes auteurs avaient auparavant mis en
évidence, chez les 19 patients schizophrènes engagés dans
un sevrage tabagique et recevant du bupropion, une amélioration significative (versus placebo) des performances
cognitives aux tests neuropsychologiques [24].
Aspects thérapeutiques
Dans leur revue de la littérature consacrée au bupropion
comme traitement de la dépression, Dhillon et al. signalent
que les épisodes psychotiques recensés au titre des effets
indésirables ont pu être résolus dans un certain nombre de
cas par diminution de la dose journalière ou arrêt du traitement [21]. Cela est compatible avec les résultats de notre
propre revue : dans neuf cas rapportés, l’attitude thérapeutique a consisté en un ajustement posologique ou une
interruption du traitement.
La plupart des cas décrits sont toutefois résolutifs sous
neuroleptiques, conformément aux mécanismes supposés
des manifestations psychotiques. Les posologies utilisées
sont très variables (ainsi les doses d’halopéridol sont-elles
respectivement, pour des cas signalés par Ames et al. [2],
Howard et Warnock [37], Dager et Heritch [18], de 1 mg/j,
5 mg/j et 15 mg/j). La durée du traitement neuroleptique,
lorsqu’elle est spécifiée et en l’absence d’antériorité psychotique, peut être minimale (par exemple une semaine
d’halopéridol pour les cas rapportés par Howard et Warnock
ou Dager et Heritch).
Bien que la reprise précoce du bupropion puisse se
traduire par une rechute psychotique légèrement différée [32b,40], la ré-introduction lentement progressive de
la molécule paraît possible dans certains cas, à posologie
moindre (75 mg/j au lieu de 300 mg/j dans le cas rapporté
par Howard et Warnock) ou à distance de l’épisode initial
(trois mois dans le cas rapporté par Dager et Heritch).
Enfin, la parenté structurale du bupropion avec
l’amphétamine et la proximité clinique des manifestations
psychotiques induites par ces deux molécules pourraient
guider les alternatives thérapeutiques. Ainsi, les guidelines australiennes consacrées à la prise en charge des
troubles psychotiques aigus induits par les amphétamines
recommandent-elles l’utilisation de benzodiazépines seules
470
en première intention, par exemple diazépam (5 à 10 mg)
ou lorazépam (1 à 2,5 mg) ; en cas d’échec, l’olanzapine (5 à
10 mg) ou l’halopéridol (2,5 à 5 mg) doivent être essayés
[9]. Une seule étude randomisée répondant aux critères
de la Cochrane Collaboration tend à montrer l’efficacité
de l’halopéridol et de l’olanzapine après quatre semaines
sur les psychoses amphétaminiques, à des posologies journalières moyennes de 7,8 et 7,5 mg [59].
Conclusion
Le bupropion, connu depuis plus de 20 ans pour ses propriétés antidépressives, est commercialisé en France depuis
2001 comme aide à l’arrêt du tabac. La présente revue de
la littérature a permis d’identifier 22 cas circonstanciés de
troubles psychotiques aigus induits par le bupropion, publiés
entre décembre 1985 et novembre 2008. Depuis 2002, trois
cas publiés concernent des patients engagés dans un sevrage
tabagique, situation clinique à laquelle les praticiens seront
vraisemblablement de plus en plus confrontés.
Sur la base des cas publiés, les troubles psychotiques
liés au bupropion surviennent en règle chez des patients
exempts d’antériorité psychotique, après une exposition
d’une dizaine de jours à une posologie proche de celle
désormais utilisée pour le sevrage tabagique. Au plan
étiopathogénique, un mécanisme dopaminergique semble
probable. Le rôle des coprescriptions doit être également
souligné, en raison de l’impact potentiel du bupropion sur
le métabolisme des autres traitements, et inversement.
Les tableaux cliniques induits sont marqués par la grande
fréquence des hallucinations, isolées ou intégrées dans un
vécu délirant polymorphe, accompagnées d’éléments confusionnels et/ou d’agitation, et par la relative rareté de la
dissociation et des perturbations thymiques associées.
Dans un tiers des cas, les patients concernés présentaient un antécédent de bipolarité, considérée en France
comme une contre-indication au bupropion. Les patients
schizophrènes traités et stabilisés semblent épargnés par
d’éventuelles décompensations, et pourraient à l’inverse
tirer un certain bénéfice du produit dans le cadre du sevrage
tabagique.
La stratégie thérapeutique consiste habituellement en un
arrêt, parfois progressif, du bupropion. Si l’utilisation des
neuroleptiques reste la règle, l’utilisation des benzodiazépines pourrait constituer une alternative valable, par référence au modèle des psychoses aiguës amphétaminiques.
Remerciements
Les auteurs remercient le département d’information et
d’accueil médical de GlaxoSmithKline pour sa collaboration
à la collecte documentaire.
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