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Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. V - n° 2 - avril-mai-juin 2007
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Fiche à détacher et à archiver
L
’
arrêt brutal de l’apport de nicotine chez un
fumeur dépendant peut entraîner l’appa-
rition d’un syndrome de manque caractérisé par
les signes suivants : humeur dépressive ; insomnie ;
irritabilité, frustration ; colère, anxiété ; difficulté
de concentration ; agitation ; ralentissement du
pouls ; augmentation de l’appétit et/ou prise de
poids rapide.
CoMMent MesuReR L’intensitÉ
De LA DÉPenDAnCe niCotiniQue ?
Le test de Fagerström (voir fiche patient), en
6 questions, permet de donner un score sur
10 points. Il mesure l’intensité de la dépendance
nicotinique (1 à 3 : faible, 4 à 6 : moyenne, > 7 :
forte).
En pratique et de manière plus simple, on peut
utiliser le test de Fagerström simplifié, en deux
questions :
– Combien de temps après votre réveil fumez-vous
votre première cigarette ?
– Combien de cigarettes fumez-vous par jour ?
QueL tRAiteMent PRÉConiseR ?
L’évaluation de l’intensité de la dépendance taba-
gique indique quel sera le traitement pharmaco-
logique à instaurer : substituts nicotiniques,
bupropion ou varénicline.
✓ Les substituts nicotiniques existent sous quatre
formes galéniques, et peuvent être délivrés sans
prescription médicale.
– Les timbres ou “patchs” : avec trois dosages
différents (21, 14, 7 mg/24 h, ou 15, 10, 5 mg/16 h),
ils délivrent par voie transdermique une quantité
contrôlée de nicotine à travers la peau. L’absorp-
tion de la nicotine se fait lentement et le plateau
de nicotinémie recherché est obtenu deux heures
après la pose du premier timbre.
Celui-ci doit être laissé en place pendant 16 ou
24 heures et changé quotidiennement (l’applica-
tion du timbre de 24 heures étant préconisée pour
les fumeurs qui prennent leur première cigarette
dans l’heure suivant le réveil).
– Les formes orales : les gommes à mâcher
(2 ou 4 mg), les comprimés sublinguaux ou à
sucer (1,5, 2 ou 4 mg), l’inhaleur. L’absorption
de la nicotine délivrée à travers la muqueuse
buccale permet de soulager le manque au bout
de quelques minutes. La posologie initiale dépend
de l’intensité de la dépendance : par exemple,
un timbre 21 mg/24 heures auquel on associe
une forme orale pour répondre à un besoin plus
important à certains moments de la journée
(après les repas, lors d’un stress ou lors d’une
situation conviviale).
Il est recommandé que le fumeur choisisse lui-
même la date de début de son traitement, certains
préférant un week-end calme, de repos, à une
période de stress professionnel, ou inversement.
Le suivi est ensuite programmé à un rythme
adapté à chaque fumeur. Certains demandent
un soutien très rapproché, d’autres pas. Le
suivi permet d’adapter les doses de substitu-
tion, la décroissance étant la plus progressive
possible (1).
Rappelons que les substituts nicotiniques n’in-
duisent pas d’accidents cardio-vasculaires, même
chez les patients atteints de maladies coronaires,
d’hypertension artérielle, d’artérite ou d’AVC.
Toutes les contre-indications dans ce domaine
ont été levées (2).
✓ Le bupropion : inhibiteur de la recapture de la
dopamine et de la noradrénaline, il a été mis sur
le marché en 2001 et s’obtient uniquement sur
prescription médicale. Les contre- indications
doivent être scrupuleusement respectées :
trouble convulsif, tumeur du système nerveux
central, sevrage alcoolique ou benzodiazépine
en cours, anorexie, boulimie, trouble bipolaire,
insuffisance hépatique sévère.
Les situations cliniques abaissant le seuil épilep-
togène et la prise concomitante de certains
médicaments doivent conduire à la prudence,
et amener parfois à diminuer la posologie à
un seul comprimé par jour. Comme pour toute
prescription médicamenteuse, il faut mesurer
le rapport bénéfice/risque et adopter l’attitude
la plus prudente (3).
Le traitement commence par un comprimé de
Zyban
®
LP (bupropion) 150 mg pendant 6 jours,
puis un comprimé matin et soir de Zyban
®
150 mg
LP. La durée du traitement est de 7 à 9 semaines.
L’arrêt total du tabac doit être décidé entre le
7e et le 14e jour du traitement.
✓ La varénicline, commercialisée depuis février
2007, est un agoniste partiel des récepteurs nico-
tiniques. Les résultats intéressants des études
ont permis sa mise sur le marché et montrent
une supériorité d’efficacité par rapport au
bupropion (4). Après une semaine d’adaptation
posologique (0,5 mg le matin pendant trois jours,
puis 0,5 mg matin et soir pendant 4 jours), la dose
de 1 mg matin et soir est atteinte au 8
e
jour et
doit être poursuivie pendant trois mois. L’arrêt du
tabac se fait au cours de cette deuxième semaine
de traitement. Pour les patients abstinents en
fin de traitement, la poursuite du traitement
pendant encore trois mois a révélé une absti-
nence supérieure qui se maintient à un an.
Les effets indésirables fréquemment signalés
sont principalement des nausées, qui restent
la plupart du temps modérées, des céphalées et
des troubles du sommeil. En l’absence d’étude,
ce médicament est contre-indiqué durant la
grossesse.
La prescription d’un traitement pharmacolo-
gique de la dépendance tabagique ne se conçoit
que dans le contexte d’une prise en charge
globale des dépendances psycho-comporte-
mentales, de soutien à la motivation et de suivi
individualisé.
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RéféRences bibliogRaphiques
1. L’arrêt de la consommation du tabac, Conférence de consensus,
8 et 9 octobre 1998, Paris :Éd. EDK, 1998.
2. Recommandations de bonne pratique : les stratégies thérapeu-
tiques médicamenteuses et non médicamenteuses de l’aide à l’arrêt
du tabac : Afssaps, mai 2003. Rev Mal Respir 2003;20:791-4.
3. Borgne A, Aubin HJ, Berlin I. Current therapeutic strategies in
smoking cessation. Rev Prat 2004;54(17):1883-93.
4. Gonzales D. Varenicline, an alpha-4 beta-2 nicotinic acetylcho-
line receptor partial agonist, vs sustained-release bupropion and
placebo for smoking cessation: a randomized controlled trial. JAMA
2006;296(1):47-55.
L’arrêt du tabac chez un fumeur dépendant
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Dr Anne Borgne*
* Hôpital Jean-Verdier, Bondy.