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L’Encéphale (2008) 34, 360—368
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.elsevier.com/locate/encep
NEUROPHYSIOLOGIE
Prédicteurs cognitifs des différentes dimensions du
fonctionnement dans la communauté dans la
schizophrénie : revue de la littérature et
perspectives
Cognitive predictors of the community functioning
dimensions in schizophrenia: State of the art and
future directions
A. Prouteau ∗, J. Doron
Laboratoire de psychologie EA4139, université Victor-Segalen Bordeaux-2, 3 ter, place de la Victoire, 33076 Bordeaux, France
Reçu le 18 novembre 2005 ; accepté le 7 juin 2006
Disponible sur Internet le 26 décembre 2007
MOTS CLÉS
Schizophrénie ;
Fonctionnement dans
la communauté ;
Cognition
∗
Résumé Les problèmes d’insertion dans la communauté représentent un des aspects majeurs
du handicap occasionné par la schizophrénie. Le développement des programmes de réhabilitation, visant à réduire ces difficultés, constitue une priorité de recherche clinique. Parmi
les facteurs cliniques qui pourraient influencer l’apparition et le maintien de ces problèmes,
les facteurs cognitifs ont été fortement associés avec les mesures globales du fonctionnement
dans la communauté. Cependant, ce dernier englobe en réalité des dimensions très hétérogènes. Des études récentes suggèrent que les facteurs cognitifs seraient davantage associés
avec les dimensions plus instrumentales et sociales du fonctionnement dans la communauté.
En outre, les performances mnésiques sont associées de manière forte à ces différentes dimensions. Les performances exécutives apparaissent davantage importantes dans les aspects les
plus instrumentaux du fonctionnement dans la communauté. Ces résultats suggèrent que, dans
l’optique de mieux comprendre les mécanismes sous-tendant ces associations, des précisions
pourraient être obtenues en isolant des habiletés psychosociales plus particulières. Le recours
à des modèles théoriques de la chaîne de dysfonctionnements conduisant au handicap permettrait de préciser les notions utilisées et de revenir à une démarche expérimentale. Le but ultime
de ces travaux est de pouvoir proposer des prises en charge multidisciplinaires, adaptées au
profil de dysfonctionnement de chaque individu.
© L’Encéphale, Paris, 2008.
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (A. Prouteau).
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2008.
doi:10.1016/j.encep.2006.06.003
Prédicteurs cognitifs des différentes dimensions du fonctionnement dans la communauté dans la schizophrénie
KEYWORDS
Schizophrenia;
Community
functioning;
Cognition
361
Summary
Introduction. — Despite progress in antipsychotic medication, psychosocial functioning limitations remain a major source of disability in schizophrenia. For this purpose, rehabilitation
programs, aimed at enhancing community functioning, are currently developed. An important question raised by rehabilitation programs is to identify clinical predictors of psychosocial
functioning which could in turn be targets of intervention.
Literature findings. — It has been suggested that a greater part of the variance in community
functioning may be explained by cognitive functioning rather than by symptoms. Moreover,
cognitive factors predict community functioning improvement over time. However, community
functioning is a multidimensional construct and little is known about the specificity of associations between community functioning dimensions and cognitive factors. Recent studies suggest
that functions like memory and executive processes are particularly associated with instrumental and social dimensions of community functioning. Memory processes are associated with both
dimensions, whereas executive processes are more related to instrumental aspects of functioning. They could be specifically targeted in interventions aimed at enhancing functioning in
those particular dimensions. However, these associations need to be further explored.
Discussion. — A lot of methodological and theoretical difficulties limit the possibility to compare
studies and to draw clinically useful information. Theoretical models of disability could help
in better defining particular community abilities, their level of complexity and the way they
could be related to specific cognitive factors. Future results will provide relevant information
for enhancing the usefulness of cognitive evaluation, as well as improving the efficiency of
rehabilitation programs.
© L’Encéphale, Paris, 2008.
Introduction
La schizophrénie représente une charge de morbidité non
négligeable et en constante augmentation [28]. Elle est
l’une des 20 premières causes physiques ou mentales
d’incapacité dans le monde. Les problèmes de fonctionnement psychosocial (dysfonctionnement social, des activités)
font partie des critères diagnostiques de la schizophrénie
[DSM-IV—TR [2]]. Selon des chiffres européens récents, les
sujets souffrant de schizophrénie présentent de graves difficultés d’insertion dans la communauté et une qualité de
vie assez faible : en moyenne, 80 % sont sans emploi, 65 %
vivent seuls et seulement 17 % sont mariés [39].
Les problèmes de fonctionnement psychosocial (ou functional outcome en anglais) comportent plusieurs aspects
[34]. Ainsi, les difficultés d’insertion dans la communauté
et la vie professionnelle, leur retentissement sur la qualité
de vie des individus, constituent une des cibles des programmes de réhabilitation. Cependant, le développement et
l’optimisation de ces programmes sont en partie assujettis
à la compréhension des marqueurs cliniques du fonctionnement dans la communauté (FDC) (ou community functioning
en anglais) de leur rôle dans l’émergence et l’évolution
des problèmes suscités. Dans ce cadre, un nombre croissant
d’études s’est intéressé aux marqueurs cognitifs du FDC et
de son amélioration.
Le fonctionnement dans la communauté : une
notion multidimensionnelle
Parmi les nombreuses mesures du fonctionnement psychosocial (terme générique incluant les dysfonctionnements
sociaux ou des activités), celles du FDC comptent parmi
les plus courantes. Sa détérioration précède fréquemment le début de la maladie et prédit une évolution
plus sévère de cette dernière. Par la suite, il constitue toujours un prédicteur majeur du fonctionnement à long terme,
ainsi que du nombre de rechutes et de réhospitalisations
[26].
Le FDC, qui reflète les capacités d’un individu à vivre
de manière intégrée et satisfaisante dans son environnement social ou sa communauté, est en réalité une
notion multidimensionnelle dont la définition ne fait pas
consensus dans la littérature. Les échelles de mesure disponibles (citons la Multnomah community ability scale
(MCAS) [3,8] et la client’s assessment of strengths, interests and goals (CASIG) [24,45], traduites et validées en
français) diffèrent ainsi par leur contenu et leur mode
d’administration (questionnaire rempli directement par les
soignants, ou nécessitant un entretien semidirectif). Particulièrement adaptées aux personnes non hospitalisées,
ces échelles sont cotées directement par les soignants
en charge des patients et permettent une évaluation
objective de leur niveau de fonctionnement dans les différents aspects de la vie quotidienne. Les mesures ainsi
obtenues sont le reflet du fonctionnement in vivo du
sujet, au plus près de ses conditions de vie réelles. Il
faut préciser que ces mesures, que l’on pourrait qualifier d’indirectes, diffèrent des celles basées directement
sur les performances du sujet mis en situation (dites
performance-based instruments, pour revue voir [25]).
Ainsi, les échelles MCAS et CASIG sont utilisées en clinique
pour l’évaluation des besoins du patient, la définition d’un
programme thérapeutique individualisé, ainsi que le suivi
dans le temps. Les différentes dimensions du FDC prises en
compte dans ces échelles peuvent être synthétisées comme
suit.
Les compétences sociales, ou la capacité du sujet à engager et maintenir des échanges interpersonnels, constituent
une des dimensions les plus systématiquement prises en
compte [35]. On trouve également des mesures des fonctions adaptatives, définies comme les habiletés sociales,
362
professionnelles et de vie indépendante, habituellement
mesurées au travers des activités de la vie quotidienne
(AVQ : soins personnels et autonomie de base : hygiène et
propreté, habillement, nettoyage du linge, courses, préparation des repas et utilisation des transports publics)
[42]. Ces capacités sont requises pour engager des contacts
sociaux, trouver un emploi et constituent un argument
pour orienter le patient vers un soin plus ou moins
structuré et restrictif. Elles apparaissent néanmoins partiellement redondantes avec certains aspects des compétences
dites sociales. Moins fréquemment, la notion de FDC
peut englober des aspects plus strictement émotionnels et
comportementaux, tels que les comportements déviants ou
à risque (abus de substances, comportements inadaptés
socialement, observance du traitement antipsychotique. . .)
et les difficultés anxieuses susceptibles d’interférer avec la
mobilisation et l’exécution des habiletés suscitées. Enfin, il
existe une dernière dimension, qui n’est pas systématiquement incluse dans les mesures du fonctionnement dans la
communauté : la dimensions du travail (performance au travail, capacité à garder un emploi) et qui donne lieu à un
champ de recherche plus spécifique [4].
Les marqueurs cognitifs associés au
fonctionnement dans la communauté
Il est aujourd’hui communément admis que la cognition
(les fonctions et processus mentaux qui permettent le
traitement des informations) expliquerait une partie plus
importante du FDC que les symptômes [18,21]. Les marqueurs cognitifs du FDC sont obtenus à partir d’études de
corrélation ou de prédiction. Ainsi, selon plusieurs synthèses
récentes de la littérature, la mémoire verbale à long terme
et le fonctionnement exécutif —– mesuré par le Wisconsin
card sorting test (WCST) —– seraient les corrélats les plus
robustes du niveau de fonctionnement global [16,18,19].
Au vu de ces résultats, la question n’est plus de savoir si
la cognition est associée au FDC mais comment elle y est
associée [18]. Certaines pistes ont été proposées, comme
celle de l’intervention des construits intermédiaires tels
que la cognition sociale [34]. Une meilleure compréhension
de mécanismes qui sous-tendent ces associations pourrait
également bénéficier d’une exploration plus détaillée des
construits théoriques en jeu. Comme nous l’avons précédemment souligné, le FDC englobe des dimensions très
hétérogènes, chacune d’entre elles pourrait nécessiter des
ressources cognitives différentes. Peu d’études se sont
intéressées à la détermination des fonctions cognitives spécifiquement associées à telle ou telle dimension particulière
du FDC [41]. Dans ce domaine, les approches peuvent être
de deux types : transversales ou longitudinales.
L’objectif de cette revue de littérature est de synthétiser les données internationales concernant les relations
spécifiques qu’il pourrait exister entre les facteurs cognitifs et les différentes dimensions du fonctionnement dans la
communauté chez les sujets souffrant de schizophrénie.
Nous reviendrons ensuite sur les implications cliniques
de ces résultats et dégagerons quelques perspectives de
recherche en relation directe avec la réhabilitation.
A. Prouteau, J. Doron
Méthode
Un recensement systématique des études cliniques parues
depuis les 15 dernières années dans des revues internationales (Medline et Psyclit) a été effectué. Les mots clés
utilisés ont été : « community » ou « social », « cognition »
ou « cognitive » et « schizophrenia » ou « schizophrenic ». Les
études étaient sélectionnées si elles portaient uniquement
ou partiellement sur les relations entre les facteurs cognitifs et les différentes dimensions du fonctionnement dans
la communauté mesurées simultanément chez des patients
souffrant de schizophrénie selon les critères d’inclusion classiques (DSM-IV le plus fréquemment). Un nombre total de
12 articles a ainsi été retenu. Les études transversales et
longitudinales ont été analysées séparément, étant donné
qu’elles explorent différents aspects de la question posée.
Résultats
Études transversales
Du point de vue théorique, les études transversales
permettent d’explorer les fonctions cognitives qui soustendent les différents aspects du FDC à un moment donné
(Tableau 1). Deux revues de littérature ont montré que la
mémoire verbale à long terme et le fonctionnement exécutif —– mesuré par le WCST —– sont les meilleurs prédicteurs
des scores globaux de FDC [16,18].
Les résultats sont différents lorsque, au lieu de
s’intéresser uniquement au score global, on distingue les
différentes dimensions du FDC. Deux grandes tendances
peuvent alors être soulignées : les performances cognitives
obtenues à partir de matériel verbal sont associées tantôt
avec les activités sociales [10,35], tantôt avec les AVQ [10],
alors que le fonctionnement exécutif est plus systématiquement associé avec l’indépendance dans la vie quotidienne
[6,30]. Notons que la mémoire en général n’apparaît pas
systématiquement comme un prédicteur majeur des différentes dimensions du FDC.
Ces résultats contredisent donc les données déjà connues
dans la littérature internationale concernant la prédominance des capacités de mémoire dans les relations avec
le FDC et précisent l’importance des fonctions exécutives,
davantage reliées avec l’indépendance dans la vie quotidienne.
Études longitudinales
Complémentaires des approches transversales, les études
longitudinales permettent d’explorer la dynamique des
associations, notamment en identifiant les facteurs cognitifs qui prédisent l’amélioration des différentes dimensions
du FDC, en particulier suite à un programme de réhabilitation. Elles permettent également d’appréhender la
stabilité des associations et les hypothétiques relations causales [1,11]. Un nombre croissant d’études longitudinales
a montré que le niveau général de fonctionnement cognitif explique une partie importante de la variation du FDC à
long terme [5] et que le dysfonctionnement cognitif serait
un facteur limitant pour tirer avantage des opportunités de
Principales études transversales sur les relations cognition—fonctionnement dans la communauté.
Auteurs
Population Moyenne (Ecart-type)
Mesures cognitives et
symptomatologiques
Mesures psychosociales
Hypothèses & Analyses
Résultats
Dickerson et al. [10]
n = 88 (59 hommes) ;
Schizophrénie (n = 55) et trouble
schizoaffectif (n = 33) DSM-III-R ;
âge = 39,4 (9,9) ; âge début = 21,1
(6,2) ; hospitalisations = 5,5 (6,2) ;
niveau social des parents = 49 (sur
100) ; éducation = 13,5 ;
médication : 97 % ; sujets
ambulatoires stables
WAIS-R : vocabulaire,
arithmétique, mémoire des
chiffres, cubes, codes,
arrangement d’images ; WMS-R :
mémoire logique : Figure
complexe de Rey ;
WCST/TMT/HWAST ; Chicago word
fluency ; PANSS
Fonctionnement social ; SFS :
activité/engagement ; communication
interpersonnelle ; fréquence et
compétence dans les AVQ ; activités
de loisir ; activités sociales ;
emploi/occupations ; SBS : activités
d’occupation journalières
Relation entre cognition,
symptômes et chaque
sous-score de la SFS ;
analyses de régression
Les activités sociales sont prédites par
l’organisation spatiale (cubes), l’indice
visuomoteur (TMT et code) et l’aphasie. La
compétence dans les AVQ est prédite par
l’aphasie. Le score total de fonctionnement
social est prédit par les indices visuomoteur
et d’aphasie. Le pouvoir prédictif de la
cognition (de 7,5 % à 30,9 %) est plus élevé
que celui de la symptomatologie.
Brekke et al. [6]
n = 40 (25 hommes) ;
schizophrénie (n = 23) et trouble
schizoaffectif (n = 17) SADS ;
âge = 33,2 (7,4) ; éducation = 12,5
(2,9) ; âge début = 21,4 (5,6) ;
hospitalisations = 10,5 (16,3)
mois ; médication (n = 36) ; sujets
ambulatoires
Stroop ; CoWAT ; WAIS-R : cubes,
code, mémoire des chiffres,
arithmétique
Symptômes : BPRS—score total ;
indépendance : RFS ; ravail et
fonctionnement social : SCOS
Un meilleur
fonctionnement
psychosocial est associé à
de meilleures
performances cognitives ;
corrélations
Il n’existe pas d’association entre
fonctionnement social et cognition. Une
faible indépendance est associée avec un bas
niveau de visuoconstruction, de
fonctionnement exécutif et de fluence
verbale. Un plus bas niveau de
fonctionnement au travail est associé à un
plus bas niveau en visuoconstruction.
Smith et al. [35]
n = 46 (29 hommes) ; schizophrénie
(n = 26) et trouble schizoaffectif
(n = 20) DSM-IV SCID ; âge = 39
(12) ; âge début = 18 (7,9) ;
hospitalisations = 7,7 (3,5) ;
QI > 70 ; sujets ambulatoires
SPAN ; DSDT ; Benton facial
recognition test ; CVLT ; WCST ;
SUMD ; SAPS/SANS
Ajustement social : SBS : habiletés de
communication, qualité de vie
objective : QOLI, relations sociales,
variables subjectives, observance du
traitement : échelle visuelle
analogique
Identifier les meilleurs
prédicteurs d’ajustement
social, régression linéaire
pas à pas
L’ajustement social (SBS) est prédit (45 % de
variance expliquée) par la désorganisation, la
mémoire de travail verbale et la
reconnaissance des visages. L’observance du
traitement est prédite par l’insight. Enfin, la
qualité de vie est influencée par les
symptômes négatifs et la dépression.
363
La plupart des variables cognitives et des
Identifier les meilleurs
Fonctionnement ; AVQ : UPSA
Echelle de Mattis : habiletés
n = 111 (58 hommes) ;
composantes de la Mattis sont corrélées avec
prédicteurs du score de
(communication, travaux ménagers,
verbales, attention/mémoire de
schizophrénie (n = 67), trouble
les catégories AVQ. Le meilleur prédicteur du
fonctionnement UPSA :
travail, habiletés psychomotrices, finance, transports, préparation de
schizoaffectif (n = 29), autre
score AVQ est la composante mémoire de la
habiletés motrices, apprentissage, loisirs, total). Indépendance : de 1 à 5 analyse de régression pas
trouble psychotique (n = 15)
Mattis (41 % de la variance expliquée) puis les
à pas
mémoire, abstraction/flexibilité ; selon la structure de résidence
DSM-IV SCID ; âge = 54,6 (9,6) ;
symptômes négatifs (10,1 %)
SAPS/SANS
Education = 1,5 (2,5) ; Durée = 27
(12,2) ; Médication (91 %) ; Sujets
non hospitalisés
Prouteau et al. [30] n = 88 (64 hommes) ;
La performance en attention soutenue et
Fonctionnement dans la communauté Associations entre
CANTAB : coordination
schizophrénie (n = 54), trouble
facteurs cognitifs et FDC ; mémoire de travail est associée avec le score
(FDC) ; MCAS : Obstacles au
visuomotrice, mémoire visuelle,
schizoaffectif (n = 25), trouble
total de FDC, l’indépendance dans les AVQ et
régression linéaire
fonctionnement ; Indépendance dans
temps de réaction, attention
schizophréniforme (n = 7), autre
les problèmes de comportement,
multiple avec ajustement
les AVQ ; compétences sociales ;
soutenue et mémoire de travail,
trouble psychotique (n = 2) DSM-IV planification
indépendamment de l’âge, du sexe, du
sur les facteurs
problèmes de comportement
niveau d’éducation et de la durée de la
confondants
SCID ; âge = 33,4 (11,8) ;
maladie. Les associations sont faibles à
éducation = 11,7 (2,3) ; durée = 7,4
modérées.
(8,8) ; médication (99 %) ; sujets
ambulatoires ou hospitalisés
Les moyennes d’âges, âge de la première hospitalisation, durée de maladie, niveau d’éducation sont en années.
Liste des abréviations : AVQ : activités de la vie quotidienne ; CANTAB : Cambridge neuropsychological test automated battery ; CVLT : California verbal learning task (test d’apprentissage de liste de mots) ;
RL = Rappel libre ; CoWAT : controlled word association test ; DSDT : digit span distractibility test ; HWAST : Halstead-Wepman Aphasia screening test ; MCAS : Multnomah community ability ; PANSS : positive and
negative syndrome scale ; QOLI : quality of life interview ; RFS : role functioning scale ; SADS : schedule for affective disorders and schizophrenia ; SAPS/SANS : scale for the assessment of positive/negative
symptoms ; SBS : social behavior scale ; SCID : structured clinical interview for DSM-III-R, DSM-IV ; SCOS : Strauss and Carpenter outcome scale ; SFS : social functioning scale ; SPAN : span of apprehension test ;
SUMD : scale to assess unawareness of mental disorder ; TMT : trail making test ; UPSA : university of California, San Diego performance-based skills assesment ; WAIS-R : Wechsler adult intelligence scale (Échelle
d’intelligence de Wechsler pour adultes), forme révisée ; WMS-R : Wechsler memory scale, forme révisée ; WCST : Wisconsin card sorting test.
Twamley et al. [40]
Prédicteurs cognitifs des différentes dimensions du fonctionnement dans la communauté dans la schizophrénie
Tableau 1
364
Tableau 2
Études longitudinales sur les relations cognition et fonctionnement dans la communauté.
Auteurs
Population Moyenne (écart-type)
Mesures psychosociales
Hypothèses & analyses
Résultats
n = 72 (50 hommes) ; Schizophrénie (n = 46)
et trouble schizoaffectif (n = 26) DSM-IV ;
Âge = 42,1 (9,6) ; éducation = 13,6 (2) Âge
début = 20,9 (6,1) Hospitalisations = 5,7
(4,7) ; médication (tous) ; traitement
ambulatoire classique ; suivi : 2 ans
Mesures cognitives et
symptomatologiques
WAIS-R : vocabulaire, arithmétique,
mémoire des chiffres, cubes, code,
arrangement d’images ; WMS-R :
mémoire logique figure de Rey,
WCST/TMT ; HWAST, Chicago word
fluency ; PANSS : 1 fois en prétest
Dickerson et al. [11]
Fonctionnement social ; SFS :
engagement social, communication
interpersonnelle, AVQ : fréquence
et compétence, loisirs, activités
professionnelles ; 2 fois en 2
ans ;MCAS : 1 fois en post-test
Identification des prédicteurs
du changement
pré-/post-test : régressions
multiples
Les changements dans le fonctionnement social sont
associés à l’âge (activités sociales), la durée de la
maladie, la copie de la Figure de Rey et les erreurs
persévératives au WCST (AVQ : compétence), le
vocabulaire, la visuoconstruction, le TMT et le rappel de
la Figure de Rey (activité professionnelle). La
communication et les facultés langagières prédisent le
FDC (MCAS).
Velligan et al. [41]
n = 40 (85 % hommes) ; schizophrénie DSM-IV ;
âge = 35,7 (9,7) ; éducation = 11,4 (2,47) ;
âge début = 21,3 (5,8) ; hospitalisations = 7,4
(6,9) ; médication (tous) ; après
hospitalization ; suivi : 1 à 3,5 ans
CPT ; mémoire des chiffres ; Hopkins
verbal learning test ; WCST ; reverse
reaction time, NeuroCog (temps de
réaction complexe) ; figure complexe
de Rey ; BPRS ; 1 fois en prétest
Identification des
prédicteurs, pourcentage de
variance expliquée :
régressions multiples
Aucune association avec les symptômes. La cognition
prédit 16 à 30 % de la variance fonctionnelle. La mémoire
verbale (20 %) et la vigilance (5 %) prédisent le
fonctionnement global. La mémoire verbale prédit 24 %
du travail et 13 % de la compétence sociale. Les AVQ sont
prédites par la Figure de Rey (15 %) et le fonctionnement
exécutif (6 %).
Addington & Addington [1]
n = 65 (48 hommes) ; schizophrénie DSM-III-R
SCID ; âge = 39 (8,9) ; éducation = 12 (1,7) ;
hospitalisations = 4,5 (3,7) ; âge 1er
hospitalisation = 24,8 (7,3) ; médication
(tous) ; sujets ambulatoires ; suivi : 2,5 ans
WAIS-R : vocabulaire, cubes ; WMS-R
(mémoire verbale) ; Figure de Rey ;
WCST ; Chicago word fluency ;
Jones-Gotman design fluency test ;
CPT/SPAN ; PANSS : 2 fois :
pré-/post-test
Fonctionnement
socioprofessionnel : SOFAS ;
compétence sociale : MCAS ; niveau
de structuration de
l’environnement et besoin
d’assistance pour les AVQ :
supervision, MCAS ; Travail et
productivité : LFS, LWPAS ; 1 fois en
post-test
Fonctionnement dans la
communauté ; fonctionnement
social : SFS ; qualité de vie : QLS ;
résolution de problèmes sociaux
(RPS) : AIPSS ; 2 fois : pré-/post-test
Corrélations entre cognition
à l’inclusion et
fonctionnement psychosocial
à long terme
Les relations entre cognition (compétences verbales,
mémoire verbale) et RPS restent stables sur 2,5 ans. La
vigilance (CPT) prédit plus fortement la RPS à 2,5 ans,
alors que la flexibilité cognitive (WCST) la prédit moins
fortement qu’au début. Pas d’association entre
fonctionnement dans la communauté et cognition.
Smith et al. [36]
n = 46 (27 hommes) ; schizophrénie (n = 28)
et trouble schizoaffectif (n = 18) DSM-IV SCID
QI > 70 ;âge = 37 (9) ; âge 1er
hospitalisation = 18 (7,1) ; hospitalisations = 7
(3,8) ; médication (tous) ; sujets
ambulatoires ; suivi : 1 an
DSDT, CVLT ; SAPS/SANS ; tous les 3 mois
pendant 1 an
Comportement social ; SBS ; tous
les 3 mois pendant 1 an
Identification des prédicteurs
cognitifs, symptomatiques ;
modèles de régression
aléatoire
Les meilleurs prédicteurs de l’amélioration du
comportement social sont les symptômes de
désorganisation, la mémoire de travail verbale et
l’apprentissage verbal. Seuls les sujets possédant au
départ une meilleure mémoire de travail améliorent leurs
compétences sociales.
Fujii & Wylie [13]
n = 26 (25 hommes) ; schizophrénie (n = 18)
et schizoaffectif (n = 8) DSM-IV ; âge = 23,6
(5,4) ; hospitalisations : n = 2,9 (3,6) et durée
totale = 41,5 mois (58,4) ; sujets
hospitalisés ; suivi : 19,7 ans (3,6)
WAIS et WAIS-R (QI) ; halstead
categories, TMT B ; WMS-R : mémoire
des chiffres ; mémoire logique ; finger
Tapping : 1 fois en prétest
Niveau de fonctionnement (dans la
communauté) en relation avec le
besoin de service : RAFLS ; nombre
et durée totale des hospitalisations
(mois) ; 1 fois en post-test
Prédicteurs cognitifs du
fonctionnement :régressions
multiples pas à pas
Chez des sujets hospitalisés, la mémoire logique est le
seul prédicteur du niveau de fonctionnement en relation
avec le besoin de service à long terme. De même, le TMT
B est le seul prédicteur de la durée totale des
hospitalisations.
Penades et al. [29]
n = 24 (18 hommes) ; âge = 31 (9,8) ;
éducation = 12 (4,8) ; durée = 10,2 (5,9) ;
médication (tous) ; sujets ambulatoires
(IPT) ; suivi : 3 mois
WAIS (QI) ; WMS-R (encodage,
récupération) ; TMT/WCST ; PANSS ; 2
fois : pré-/post-test
Fonctionnement psychosocial :
LSP ; 2 fois : pré-/post-test
Corrélations entre les
changements cognitifs et
psychosociaux
L’amélioration de l’encodage est associée à
l’amélioration de l’autonomie personnelle ;
l’amélioration du fonctionnement exécutif est associée à
celle du comportement social et du score total de
fonctionnement psychosocial.
L’amélioration des AVQ est prédite par de meilleures
Prédicteurs cognitifs de
Fonctionnement dans la
CANTAB : coordination visuomotrice,
n = 55 (36 hommes) ; schizophrénie DSM-IV ;
performances en planification au départ. L’amélioration
l’amélioration des
communauté : MCAS : obstacles au
mémoire visuelle, temps de réaction,
schizophrénie (n = 39), schizoaffectif
des compétences sociales est prédite par de meilleures
dimensions du FDC :
fonctionnement, indépendance
attention soutenue et mémoire de
(n = 13), schizophréniforme (n = 2), autre
performances en mémoire visuelle au départ.
régressions multiniveaux pas
dans les AVQ, compétences
travail, planification ; 1 fois en prétest
(n = 1) trouble psychotique DSM-IV SCID ;
à pas
sociales, problèmes de
âge = 34,3 (12) ; éducation = 11,6 (2,2) ;
comportement ; 2 fois :
durée = 7,4 (8) ; médication (tous) ; sujets
pré/post-test
ambulatoires ou hospitalisés (IPT) ; suivi : 15
à 16 mois
Les moyennes d’âges, âge de la première hospitalisation, durée de maladie, niveau d’éducation sont en années, sauf mention contraire.
Liste de abréviations : AIPSS : assessment of interpersonal problem solving skills ; BQOLI : brief quality of life inventory ; CANTAB : Cambridge neuropsychological test automated battery ; CASIG : client’s assessment of strengths, interests and goals ;
CPT : continuous performance task (NB : il existe plusieurs versions) ; CVLT : California verbal learning task ; DSDT : digit span distractibility test ; IPT : integrated psychological treatment ; LFS : levels of functioning scale ; LSP : life skills profile ;
LWPAS : Lehman work productive activity scale ; MCAS : Multnomah community ability scale ; NeuroCog : neuropsychological test battery ; QI : Quotient intellectuel ; QLS : quality of life scale ; RAFLS : resource associated functional level scale ; RAVLT :
Rey’s auditory verbal learning test ; REHAB : rehabilitation evaluation hall and Baker ; SAPS/SANS : scale for the assessment of positive/negative symptoms ; SBS : social behavior scale ; SFS : social functioning scale ; SOFAS : social and occupational
functioning scale ; SPAN : span of apprehension test ; TMT : trail making test ; TMT B : partie b du trail making test ; WAIS : Wechsler adult intelligence scale (Échelle d’intelligence de Wechsler pour adultes) ; WAIS-R : Wechsler adult intelligence scale
(Échelle d’intelligence de Wechsler pour adultes), forme révisée ; WCST : Wisconsin card sorting test ; WMS : Wechsler memory scale ; WMS-R : Wechsler memory scale, forme révisée.
Prouteau et al. [31]
A. Prouteau, J. Doron
Prédicteurs cognitifs des différentes dimensions du fonctionnement dans la communauté dans la schizophrénie
réhabilitation [46,47]. Là encore, seul un petit nombre de
travaux (recensés dans le Tableau 2) a cherché à identifier
les prédicteurs cognitifs spécifiques des différentes dimensions du FDC [11,14,30,36,41]. La synthèse de ces études
montre que les compétences sociales sont essentiellement
prédites par les performances cognitives obtenues à partir
de matériel verbal, (en particulier la mémoire verbale) et la
mémoire en général [31,36,41]. Cependant, l’efficience des
processus mnésiques est également associée à l’autonomie
dans le temps [13,29]. Au travers des études longitudinales, la mémoire n’apparaît donc pas comme un prédicteur
spécifique d’une dimension en particulier. À l’inverse, le
fonctionnement exécutif est associé de manière plus systématique aux dimensions les plus instrumentales du FDC,
comme les activités de la vie quotidienne, dans lesquelles le
niveau de compétences est le garant d’une certaine autonomie [11,31,41]. En accord avec cette idée, il faut souligner
que les fonctions exécutives ont en outre été associées aux
compétences professionnelles et à leur amélioration dans le
temps [4,15,38].
Discussion
En résumé, la synthèse des résultats apporte des arguments
en faveur d’une certaine spécificité dans les associations
entre fonctions cognitives et dimensions du FDC. En effet,
les fonctions exécutives sont plus particulièrement associées
aux AVQ, dans les études transversales comme longitudinales. En revanche, c’est dans les études longitudinales
que la mémoire apparaît comme un bon prédicteur du
FDC. Ainsi, la mémoire verbale est davantage reliée aux
compétences sociales à long terme, alors que les processus
mnésiques en général (verbaux et visuels) peuvent également être associés à l’indépendance dans le temps. Au vu
de ces résultats, on peut faire l’hypothèse qu’un certain
niveau de base en mémoire soit requis pour que le sujet
puisse acquérir et maintenir les habiletés psychosociales
qu’il pourra ensuite appliquer. Néanmoins, la synthèse des
résultats révèle encore une certaine hétérogénéité et souligne la nécessité d’études complémentaires pour préciser la
spécificité des associations. Notamment, l’association quasisystématique des compétences verbales avec les différentes
dimensions du FDC pose la question de l’implication des
problèmes langagiers dans les tâches cognitives utilisant du
matériel verbal. Elle souligne également l’importance de
ces problèmes dans le FDC et son évolution.
Ces études possèdent également plusieurs limites importantes. Les relations entre cognition et handicap demeurent
relativement inexplorées chez le sujet sain, ce qui limite
l’interprétation des résultats en termes de spécificité quant
à la schizophrénie. En effet, les fonctions cognitives les
plus associées au handicap dans la schizophrénie pourraient également être celles qui sont les plus déficitaires,
indépendamment d’une liaison entre les deux domaines de
fonctionnement [23]. De plus, l’influence des problèmes langagiers, fréquemment rapportés dans la schizophrénie [9],
sur les performances cognitives n’a que rarement été prise
en compte et le matériel visuospatial, exempt de ce biais,
rarement utilisé. Il faut également souligner que la plupart
des tests cognitifs sont multidéterminés et ne mesurent donc
pas un seul construit cognitif à la fois. Plus généralement,
365
l’hétérogénéité des méthodologies (échantillons, outils de
mesure, durée du suivi, analyses statistiques) constitue une
limite évidente. L’absence de résultats clairs peut également être due à l’approche choisie : les tests cognitifs
constituent des outils très différents des échelles cliniques
de FDC avec qui ils sont mis en relation. Enfin, comme nous
l’avons évoqué, la synthèse des résultats se heurte aux difficultés de définition et de conceptualisation de ce que
nous entendons par ‘handicap’ en clinique et de la façon
dont il survient et se maintient. Cette question est cruciale pour l’exploration des mécanismes qui sous-tendent les
associations entre cognition et handicap. Un retour vers des
modèles plus détaillés et heuristiques permettrait d’affiner
les hypothèses actuelles et de compléter la démarche exploratoire.
Vers une modélisation des mécanismes du
handicap dans la schizophrénie
Il apparaît nécessaire d’étudier les corrélats cognitifs de
chaque habileté psychosociale de manière plus isolée [33].
Les récentes avancées dans le domaine des évaluations
directement basées sur les performances du sujet dans telle
ou telle activité (gestion du budget, utilisation des transports etc.) constituent une piste prometteuse [25]. Les
modèles du handicap psychosocial [7,19,27] offrent un cadre
théorique riche à ce champ de recherche. Ils permettent
notamment de différencier les niveaux de complexité des
difficultés actuellement encore regroupées dans de vastes
construits multidimensionnels, de manière à les étudier
isolément et à en préciser les déterminants cliniques spécifiques. La Fig. 1 propose un modèle intégratif des différents
niveaux de dysfonctionnement conduisant au handicap dans
la schizophrénie. Ce modèle s’inspire des travaux de Verbrugge et Jette en gérontologie [44]. Le postulat principal
de ce modèle est que la cognition serait en relation avec
le handicap (autonomie, étendue du réseau social etc.) par
l’intermédiaire des compétences dans les activités de la vie
quotidienne et des compétences sociales. Selon le modèle
de Green et al. [19], des relations plus directes existeraient
entre les performances aux tâches cognitives et des aptitudes plus isolées (savoir-faire isolés), ces dernières étant
intégrées à un niveau supérieur dans des construits tels
que les activités de la vie quotidienne ou les compétences
sociales. Ce niveau des savoir-faire isolés, qui pourrait se
situer entre limitations fonctionnelles et incapacités, n’est
pas inclus dans notre modèle pour des raisons de clarté.
Notons enfin que selon Verbrugge et Jette [44], il existerait
des boucles de rétroaction entre les différents niveaux de
dysfonctionnement.
Quelles informations peut-on attendre du bilan
neuropsychologique ?
Ces résultats ont également des implications sur le plan
clinique. Actuellement, les dysfonctionnements cognitifs
tendent à être considérés comme un élément majeur dans la
prise en charge de la schizophrénie [17]. Le bilan neuropsychologique peut fournir des informations sur les capacités
d’autonomie dans la vie quotidienne, le niveau de structuration nécessaire, les possibilités et la dynamique de
366
A. Prouteau, J. Doron
Figure 1
Modèle des différents niveaux de dysfonctionnement conduisant au handicap dans la schizophrénie.
réhabilitation. Par exemple, la simultanéité de difficultés
au niveau des fonctions exécutives et de l’indépendance
dans les AVQ permet de poser l’hypothèse de la participation des troubles cognitifs aux problèmes rencontrés par
le patient dans sa vie de tous les jours. Il en va de même
pour les compétences langagières et la dimension sociale
du FDC. En outre, des troubles importants de la mémoire ne
sont pas de bon pronostic pour la dynamique d’amélioration
du FDC, quelle que soit la dimension visée. Ces différents
troubles cognitifs peuvent ensuite faire l’objet d’une intervention spécifique, notamment au travers de la remédiation
cognitive. Des résultats récents, montrant une association
entre l’amélioration du FDC et l’amélioration du fonctionnement cognitif [29], étayent le potentiel thérapeutique de
la remédiation cognitive dans une perspective de réhabilitation. Cependant, les profils de dysfonctionnement cognitif
varient grandement d’un individu à l’autre, ce qui souligne
l’importance du bilan individualisé et de l’adaptation de la
prise en charge à chaque patient.
Le rôle prépondérant de la subjectivité
L’optimisation de la prise en charge clinique passe donc
par l’adaptation des moyens thérapeutiques aux difficultés propres à chaque individu. Une des limites des études
actuelles concerne l’intégration des aspects subjectifs du
fonctionnement dans les études sur le handicap. Cette question apparaît d’autant plus importante que la subjectivité
joue un rôle majeur dans la survenue et le maintien du
handicap [12,43], au même titre que la symptomatologie clinique et le traitement neuroleptique [20,22]. Outre
l’implication du sujet dans son processus thérapeutique, il
existe des intérêts plus théoriques à une meilleure connaissance de la façon dont le sujet perçoit ses difficultés au
quotidien. En effet, il peut exister un décalage entre ce
que rapporte le sujet dans un cadre clinique et ce qu’il
vit réellement dans sa vie quotidienne [32,37]. Ces derniers points posent également la question de la fiabilité des
autoquestionnaires et de la validité écologique des échelles
remplies par les soignants sur la base du comportement en
institution.
Conclusion
Les études récentes portant sur les relations entre facteurs cognitifs et dimensions du FDC suggèrent que ces deux
niveaux de fonctionnement sont associés dans la schizophrénie. Les fonctions exécutives sont plus spécifiquement
associées aux activités de la vie quotidienne, alors que
la mémoire verbale apparaît davantage reliée aux compétences sociales à long terme. Les processus mnésiques en
général peuvent également être associés à l’indépendance
dans le temps. La remédiation cognitive, ciblée sur ces
fonctions, pourrait être incluse dans l’arsenal thérapeutique
actuel. Dans cette perspective, des études supplémentaires
restent nécessaires pour mieux connaître les déterminants
cliniques d’habiletés plus particulières au sein du handicap.
À long terme, le but de ces études est de pouvoir proposer des prises en charge plus complètes, intégrant des outils
thérapeutiques récents tels que la remédiation cognitive,
mais également plus individualisées et adaptées au profil de
dysfonctionnement de chacun.
Prédicteurs cognitifs des différentes dimensions du fonctionnement dans la communauté dans la schizophrénie
Remerciements
Les auteurs tiennent à remercier le Professeur Hélène Verdoux et le Professeur Nicolas Franck pour les remarques
précieuses formulées sur ce travail.
[21]
[22]
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