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REVUE
Hypothèse neuro-
développementale
Même si différents facteurs bioenvi-
ronnementaux (carence vitaminique,
complications obstétricales) ont été
impliqués, l’hypothèse d’une infection
maternelle durant la grossesse reste
l’une des plus prometteuses. Cette
approche, sur laquelle nous nous
attarderons, tire son origine d’études
épidémiologiques et a conduit à l’élabo-
ration de nouveaux modèles animaux
de la schizophrénie.
Dosage sérologique d’une infection
grippale et schizophrénie
Dès 1988, Mednick et al. (1) ont
démontré qu’une infection grippale
au cours du deuxième trimestre de la
grossesse est associée à une augmenta-
tion significative (de l’ordre de 50 %) du
nombre de naissances d’individus qui
deviendront schizophrènes. Depuis,
26 études ont tenté de répliquer ces
données. Malheureusement, si la
moitié de ces recherches a confirmé
ce résultat, l’autre moitié n’a révélé
aucun lien entre une infection virale
durant la grossesse et l’incidence de la
maladie. Cette divergence de résultats
s’explique en grande partie par l’uti-
lisation de cohortes de sujets pour
lesquels l’infection grippale était incer-
taine et le suivi de la grossesse relati-
vement imprécis. De la même façon,
les outils utilisés pour diagnostiquer
avec certitude l’état de schizophrénie
n’étaient pas toujours identiques. Afin
de trancher ce débat, Brown et al. (2)
ont étudié une population de femmes
particulièrement suivies au moment
de la grossesse. En analysant le sérum
maternel, ils se sont assurés de l’atteinte
grippale des mères. Enfin, ils ont utilisé
des tests permettant de diagnostiquer
avec précision si les adolescents nés de
ces mères présentaient les symptômes
de la schizophrénie. Ce travail révèle
que l’infection grippale multiplie par
trois l’incidence de la maladie. Par
ailleurs, les auteurs constatent que
cet effet n’est observé que si l’infec-
tion est contractée durant la première
partie de la grossesse. Cette équipe a
également montré qu’une infection
respiratoire lors du second trimestre
de la grossesse double l’incidence de
la schizophrénie chez les descendants.
Notons que d’autres études ont établi
une relation entre la rubéole (3) ou la
varicelle (4) contractée durant la gros-
sesse et le nombre de schizophrènes.
Ces données suggèrent ainsi qu’une
stimulation du système immunitaire
maternel pourrait induire des anoma-
lies neuro-développementales.
Dosage de l’interleukine 8 du sérum
maternel et schizophrénie
Les études épidémiologiques ci-dessus
révèlent que des agents infectieux
qui diffèrent quant à leur mode de
transmission, leur potentiel térato-
génique ou encore leur antigénicité,
augmentent l’incidence de la schi-
zophrénie. Dans cette nouvelle étude
(5), les auteurs se sont intéressés aux
cytokines, éléments communs à tous
ces agents infectieux. En effet, cette
famille de molécules intervient à la fois
dans la réponse immunitaire et dans
le développement cellulaire (différen-
ciation et prolifération). Les auteurs
constatent que la quantité d’interleu-
kine (type 8) présente dans le sérum
maternel (prélevé lors de la grossesse)
est deux fois plus importante chez les
mères de schizophrènes.
Un modèle animal neuro-
développemental de la schizophrénie
Des approches lésionnelles et/ou phar-
macologiques ont permis d’aboutir à
des modèles animaux de schizophrénie.
Même si ces modèles miment des défi-
cits comportementaux observés chez
les schizophrènes (déficit d’inhibition
latente, d’effet induit par une préex-
position à un stimulus inconditionnel
PSI, du réflexe de sursaut, déficits en
mémoire de travail, de réaction à un
traitement aux amphétamines), ils ne
permettent pas d’appréhender l’as-
pect neuro-développemental de la
maladie. Dans ce but, un ensemble
d’études (6, 7) dirigées par l’équipe du
Pr J. Feldon a conduit à l’élaboration
d’un modèle neuro-développemental
de la schizophrénie particulièrement
élégant. Ces travaux montrent que l’in-
jection périphérique de poly-IC (un
ARN double brin de synthèse stimulant
le système immunitaire) à des souris
gestantes, induit une élévation du taux
sérique maternel de cytokines (e.g. IL-
6). Ce traitement provoque également
une augmentation du taux d’interleu-
kines (e.g. IL-1b) mesuré au sein du
tissus fœtal. Enfin, les études compor-
tementales menées sur des animaux
adultes nés de mères traitées révèlent
de nombreux déficits caractéristiques
de l’état de schizophrénie.
>Proceedings of the Royal Society
of London (Biological Sciences)
>J Neurosciences
>Proceedings of the National Academy
of Sciences USA
>News Cornell
>Physical Reviews
>Biological psychiatry
>Science
>Nature
>Current Opinion in Neurobiology
>Nature Neuroscience
>Journal of Clinical Investigations
La Lettre du Psychiatre - Vol. II - n° 6 -7 - novembre-décembre 2006
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