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Les questions du MINI (2) sont simples et claires,
par exemple : « Au cours des deux dernières semaines,
vous êtes-vous sentie particulièrement triste, cafardeuse,
déprimée ? -la plupart du temps, -au cours de la jour-
née, -presque tous les jours. » Les autres items (anxiété
panique, anxiété phobique, anxiété généralisée, risque
suicidaire) sont explorées de la même manière, deman-
dant simplement au patient de répondre par « oui » ou
par « non ». La stratégie diagnostique repose ainsi sur la
sémiologie, l’algorithme aidant à la prise de décision et
à l’évaluation.
Au terme de cette démarche, il est possible de répon-
dre à deux questions : la patiente présente-t-elle réelle-
ment un épisode dépressif majeur actuel ? Et quelle en est
la sévérité ? Une troisième question peut se poser alors :
que faire face à cet état de mal-être persistant qu’elle
décrit comme évoluant depuis une trentaine d’années ?
Après que l’évaluation ait permis de montrer qu’elle pré-
sente actuellement un épisode dépressif majeur associé
à un risque suicidaire léger, la prise en charge pourra être
orientée plus particulièrement sur cette préoccupation
anxieuse, cette tension, cet épuisement, cette fatigabilité
qu’elle décrit, ses diffi cultés à se concentrer, son irritabi-
lité, et son trouble chronique du sommeil.
Cet outil permet de ne pas s’arrêter simplement au dia-
gnostic de dépression actuelle, légère, mais d’approfon-
dir la sémiologie pour adapter ensuite la prise en charge
médicamenteuse. À l’issue d’une évaluation clinique « glo-
bale », on voit que cette patiente a bien un épisode dé-
pressif majeur actuel, avec un risque suicidaire léger, mais
qu’elle présente de plus un trouble anxieux généralisé, qui
est certainement à la base des épisodes dépressifs qu’elle
a présentés. Il est alors possible d’adapter le traitement
à cette comorbidité mise en évidence (3), et en particu-
lier d’expliquer à la patiente que le but est également de
la sevrer de ses benzodiazépines : la psycho-éducation
comprend une présentation des données disponibles
et faisant références (3), et l’entrée dans un programme
d’évaluations régulières.
SIX MOIS PLUS TARD
La patiente, qui a adhéré à cette démarche, est se-
vrée de ses hypnotiques et de ses benzodiazépines. Elle
dit elle-même qu’elle revit après trente années, et qu’elle
est peu ou n’est pas gênée dans son quotidien. Elle est
encore anxieuse par moments, mais ce n’est plus une
préoccupation constante. Moins irritable, elle prend du
recul, elle est moins fatiguée et son sommeil est quasi
normal. Elle ne dort pas très bien certains jours, mais fi -
nalement, la vie est plus légère.
Pendant six mois, cette patiente a eu une nouvelle
prise en charge, elle a repris confi ance en elle, elle pro-
fi te de sa vie de tous les jours, simplement parce qu’on
a su identifi er une comorbidité, trouble anxieux généra-
lisé/épisode dépressif majeur, comorbidité relativement
fréquente (3). Parallèlement au diagnostic de dépression,
la clinique et l’évaluation des troubles anxieux souvent
associés sont très importantes pour une prise en charge
adaptée.
Il est important de rappeler que, d’après les recom-
mandations de l’Afssaps, le traitement médicamenteux ne
constitue qu’un aspect de la prise en charge des sujets
présentant des troubles dépressifs ou anxieux. Les autres
types de traitement qui peuvent être proposés sont es-
sentiellement les prises en charge psychothérapiques et
éventuellement d’autres traitements comme par exemple
l’électroconvulsivothérapie pour les troubles dépressifs (3).
Références
1. DSM-IV-TRI, Manuel diagnostique et statistique des troubles men-
taux : texte révisé - Americam psychiatric association ; 2000.
2. Mini International Neuropsychiatric Interview (MINI). Lecrubier Y,
Sheehan D, Hergueta T, Weiller E. 1998.
3. AFSSAPS octobre 2006, Bon usage des médicaments antidé-
presseurs dans le traitement des troubles dépressifs et des trou-
bles anxieux de l’adulte -
http://agmed.sante.gouv.fr/htm/5/rbp/indrbp.htm
P. Pinilo L’Encéphale, 2007 ; 33 : pages, cahier 2