ASTHME Camille Taillé Service de Pneumologie A, Centre de Compétence pour les Maladies Pulmonaires Rares, Hôpital Bichat, Paris. objectifs • • • • • • Connaître la prévalence de la maladie Connaître le rôle de l’inflammation Savoir évaluer le contrôle d’un asthme Connaître le principe du traitement de fond Savoir évaluer la gravité d’une exacerbation Savoir traiter une exacerbation Une maladie fréquente… IRDES Enquête Santé Protection Sociale 2006 Prévalence de l’asthme et de la rhinite, dans deux générations successives % Ecosse (45‐54 ans) % rhinite allergique 20 15 % asthme 10 5 0 1972‐6 1996 (pères) (fils) 1972‐6 1996 (mères) (filles) 1972‐6 1996 (pères) (fils) 1972‐6 1996 (mères) (filles) Upton, BMJ 2000 encore mortelle… 2 000 décès 1 586 décès Tual, Rev Mal Resp 2008 1 129 décès …encore morbide…. Taux/10 000 Taux d’hospitalisations Delmas, Rev Mal Resp 2010 Adulte (≥ 15 ans) …encore des progrès à faire ! 61% des patients Insuffisamment contrôlés Des coûts non négligeables 2 920 € 1 605€ 1 371€ 1 322 € 1 100 € Dépenses non liées à l’asthme Dépenses liées à l’asthme IRDES QES Mai 2010 Asthme : définition « Inflammation des voies aériennes, secondaire à un infiltrat inflammatoire polymorphe comprenant des mastocytes, des lymphocytes T et des éosinophiles. Sur un terrain particulier, cette inflammation entraîne chez des sujets prédisposés des symptômes en rapport avec une obstruction bronchique diffuse et variable, réversible spontanément ou sous traitement. Elle est aussi responsable d’une hyperréactivité bronchique à de nombreux stimuli. » Formes cliniques de l'asthme (SPLF 2000) Seuil perception symptômes ‐ DEP optimal Dyspnée Toux Instabilité Attaque AAG a Crise heures b Exacerbations jours a : progression très rapide, en quelques heures b : en quelques jours Symptômes et/ou fonction respiratoire Symptômes de longue durée Symptômes de brève durée Quels mécanismes ? ↑Th2 ? ↓Th1? Déficit des Treg ? Initiation du processus ? Entretien ? Holgate ST, Clin Exp Allergy, 2008 Galli, Nature, 2008 Asthme de l’adulte : orientation diagnostique • épisodes récurrents de dyspnée paroxystique sifflante • variabilité dans le temps • réversibilité • circonstances favorisantes (exercice, froid, pollens, poussière, émotion…) • mise en évidence d’une obstruction bronchique aux EFR ou sur les tests de provocation : baisse du VEMS et du rapport de Tiffeneau • antécédents familiaux • rechercher une rhinite ou un eczéma, tests allergo Crise d’asthme simple • toux sèche suivie de • dyspnée sifflante, souvent nocturne ou au petit matin • cède sous bronchodilatateurs ou spontanément • crachats perlés à la fin de la crise • durée quelques minutes à quelques heures • Souvent la nuit ou au petit matin • peut se résumer à une toux Asthme de l’adulte : diagnostic différentiel • BPCO post tabagique • Insuffisance cardiaque congestive • Embolie pulmonaire • Dysfonction des cordes vocales (fermeture paradoxale des codes vocales au cours de la respiration) • Obstruction mécanique des voies aériennes (tumeur maligne ou bénigne laryngée, trachéale ou bronchique, • corps étranger ) • Toux médicamenteuse (IEC +++) • Inhalation récente de vapeurs toxiques • Sarcoïdose • Bronchiolite Mettre en évidence l’obstruction bronchique Contrôle et sévérité • Gravité : – État clinique à un moment donné – Apprécie souvent l’intensité d’un événement aigu • Contrôle : – Apprécie le degré de réduction des symptômes sous traitement • Sévérité : – Basé sur la lourdeur du traitement nécessaire pour obtenir un bon contrôle (ie estimée sous traitement) Comment définir le contrôle de l’asthme ? CONTRÔLE (tous les critères suivants) Symptômes diurnes CONTRÔLE PARTIELLEMENT (au moins 1 des éléments lors d’une même semaine) Aucun (<2/Sem) > 2/sem Aucune Au moins 1, quelle qu’elle soit Réveils nocturnes Aucun Au moins 1, quel qu’il soit Recours au trt de secours Aucun (<2/Sem) > 2/semaine DEP ou VEMS Normal < 80% théo Exacerbations Aucune ≥ 1/an Limitation de l’activité NON CONTROLE ≥3 éléments caractérisant l’asthme partiellement contrôlé au cours d’une même semaine 1/semaine GINA, Global strategy for asthma management and prevention, Révision Nov 2006 Comment évaluer le contrôle ? • Gêné la journée? • Réveillé la nuit ? • Vous toussez ? • Difficile de courir? • Besoin de prendre sa «ventoline®»? • Vous avez eu recours aux corticoïdes oraux ? Le débit mètre de pointe (peak flow) Les corticoïdes inhalés réduisent la mortalité par asthme Suissa, NEJM, 2000 Asthme : principes du traitement Traitement de fond • Corticothérapie inhalée (Pulmicort, Bécotide, Prolair….) Effet anti inflammatoire majeur 2 prises quotidiennes Voix rauque, mycoses buccales Pas d’effets systémiques • Bronchodilatateurs de longue durée d’action (Foradil, Sérévent…) 2 prises quotidiennes Souvent en association avec le corticoïde inhalé Une seule prise = meilleure observance Sérétide, Symbicort … Le choix du type d’inhalateur est fondamental •Autres molécules Théophylline Antileucotriènes (Singulair) Antihistaminiques Traitement de fond de l’asthme Paliers thérapeutiques Palier 1 Palier 2 Palier 3 Palier 4 Palier 5 Contrôle de l’environnement, éducation β2 agoniste de courte durée d’action à la demande Traitement de fond Choisir une option Aucun Choisir une option Ajouter 1 ou plus Ajouter 1 ou les 2 CSI faible dose CSI faible dose + β2 LDA CSI dose moyenne ou élevée + β2 LDA Corticoïdes oraux à la dose la plus faible Antileucotriènes CSI dose moyenne ou élevée Antileucotriènes Anti-IgE CSI faible dose + Antileucotriène s Théophylline longue durée d’action CSI faible dose + Théophylline GINA, Global strategy for asthma management and prevention, Révision Nov 2006 Principes de la prise en charge d’un asthme • Evaluer le contrôle • Rechercher une allergie et faire l’éviction des allergènes • Rechercher un rôle de l’environnement • Rechercher des comorbidités aggravant l’asthme • Evaluer l’observance du traitement Allergies • Interrogatoire déterminant +++ ¾ Circonstance de déclenchement des symptômes respiratoires. ¾ phanères, pollens, acariens les + fréquents • Confirmation par prick tests • Mesures d’éviction • Désensibilisation Rôle de l’environnement ? • • • • Quelles questions ? Tabagisme Allergènes Irritants, polluants Moisissures • Domicile • Environnement professionnel • Environnement de loisirs Quels outils ? • Enquête allergologique • Prick tests • Conseiller en environnement d’intérieur • Médecin du travail Asthme et tabagisme • le tabagisme augmente le risque de développer un asthme • • • • • • Tabagisme associé à : Moins bon contrôle de l’asthme Déclin accéléré du VEMS Consommation médicamenteuse Métabolisme accéléré de la théophylline Moindre effet des CSI Pietinalho, Allergy, 2009 Comorbidités associées à l’asthme • • • • • • • Reflux gastroesophagien Rhinite, sinusite, polypose nasosinusienne Apnées du sommeil Obésité Grossesse, contraception, ménopause Syndrome d’hyperventilation Anxiété, dépression Quelle est l’observance du traitement ? Gamble J, AJRCCM, 2009 Asthme : objectifs de l’éducation • Education +++ • prise correcte du traitement • adaptation du traitement à l’évolution de la maladie • connaissance et éviction des facteurs favorisants • arrêt du tabac • auto surveillance (peak flow, carnet…) • reconnaissance des signes de gravité de la maladie • conduite à tenir en cas de crise • soutien psychologique, association de malades… • contrôle du souffle, exercices respiratoires = importance de « l’Ecole de l’Asthme » Asthme : objectifs du traitement • pas de symptômes nocturnes • pas de gêne à l’effort • pas de crise • consommation minimale de médicaments • Pas d’hospitalisations, de visite aux urgences = vivre « normalement » ? Exacerbations Exacerbation : modification des symptômes respiratoires nécessitant une modification thérapeutique Instabilité Attaque AAG a b Exacerbations jours Symptômes et/ou fonction respiratoire Symptômes de longue durée Le bronchospasme n’est pas le seul déterminant de l’obstruction bronchique au cours de l’ exacerbation d’asthme Facteurs déclenchants • Infections virales, bactériennes • Tabagisme, cocaïne • Pollution, solvants, irritants • Exposition allergénique • Traitement insuffisant • Beta bloquant, AINS • Stress Apprécier la gravité y Gravité extrême ◦ ◦ ◦ ◦ Pause respiratoire Silence auscultatoire Troubles de conscience Collapsus y Caractères de la crise ◦ Inhabituelle ◦ Difficulté à parler, à tousser ◦ Orthopnée, agitation, sueurs, cyanose ◦ Contraction SCM ◦ FR > 30 /min ◦ Fc > 120 /min y DEP < 150 L/min ◦ Ou < 30% y Syndrome de Menace ◦ ↑ Fréquence et sévérité des crises ◦ ↓ efficacité du traitement ◦ ↓ épisodes intercritiques y Terrain ◦ Asthme ancien, instable, sous‐ traité, déjà hospitalisé; intolérance aspirine; corticodépendance ◦ Adolescents y Gaz du Sang ◦ Hypercapnie toujours grave ◦ Normocapnie doit alerter ( Réanimation; 2002;11:1‐9) Le meilleur outil d’évaluation ! •la mesure objective de l'obstruction bronchique est plus précise que les symptômes et l'examen physique des patients (Nguyen BP, Ann Allergy Asthma Immunol 1996.) • les patients et les médecins sous estiment la gravité d’une exacerbation (Kendrick AH, Bmj, 1993; Atta JA Braz J Med Biol Res 2004) •le pronostic immédiat de l'asthme aigu est déterminé par la réponse de VEMS/DEP au traitement (Rodrigo G ,Chest 1993) • La mesure évolutive du DEP avec le temps est la meilleure manière de prévoir le recours à l’hospitalisation (Rodrigo G. Chest 1998) K risque de bronchospasme Les examens complémentaires ne retardent pas le traitement ! • Radio de thorax : facteur déclenchant; complication • ECG • iono sang, NFS (si hospitalisation) • GDS • Lactate (AAG) Agonistes β2‐adrénergiques bronchodilatateurs • En nébulisation++++ – Salbutamol (ventoline) 5mg ou terbutaline (Bricanyl) 5mg – Sans dilution (unidoses) – Propulsion par O2 6‐8 l/min – Embout buccal > masque – 3 nébulisations en 1h – Puis 1/3h ou 2,5 mg/h • Aérosols doseurs avec chambre d’inhalation: possible – 2‐4 doses / 5‐10 min Agonistes β2‐adrénergiques • En injectable – Sous‐cutanée en urgence dans les formes très sévères ou au domicile (éducation +++) – IV en cas d’échec de la voie inhalée • Salbutamol : 0,5 mg/h, ↑ progressive Æ 5 mg/h Effets secondaires : Tachycardie (b1 et 2) tremblements (b2) Hypokaliémie, hypomagnésémie hyperlactatémie Hypoxémie /levée de la v/c hypoxique Les agonistes β2‐ adrénergiques sont toujours associés aux corticoïdes! Corticoïdes • Mécanisme d’action : – ↓ Inflammation, Restaure la sensibilité des récepteurs aux β2+ – Réduit le nombre d’hospitalisations – Délai d’action clinique : 6‐8 heures • Posologie : – 1 mg/kg d’équivalent methylprednisolone, pas de bénéfice à une dose supérieure (Bowler SD, Thorax, 1992) – Per os = IV (Harrison BDW, Lancet, 1986) – Pas de corticoïdes nébulisés (coût+++, pas évalués) – À poursuivre 7 jours, sans décroissance progressive – Début immédiat des CT inhalés à la sortie des urgences diminue le nombre de rechutes.(Rowe BH, JAMA, 1999) Les autres bronchodilatateurs • Anticholinergiques : – Possible effet bénéfique dans la 1ere heure – Couplés aux β2+ – Atrovent® : 0,5 mg unidose x 3 dans la 1ere heure • Sulfate de magnésium – 5 ml à 15% en nébulisation – Ou 2 g IV en 15 min – Crise grave (DEP<50%) ou ne répondant pas au traitement usuel • Adrénaline : – En cas d’échec du salbutamol; utilisé mais non validé; Autres traitements • O2 pour SaO2> 90% • Position 1/2 assise • Antibiothérapie NON systématique – Seulement si infection patente • Hydratation non systématique • Pas d’efficacité spécifique de la kiné • Mucolytiques non recommandés 30% < DEP < 70% nébulisation b2+ répétée corticoïdes O2 nasal évaluation à 2h DEP > 70% patient coopérant et entouré consultation diurne DEP < 70% Nouveau traitement Réévaluation à 4h = retour à domicile (L’Her, Réanimation 2002) DEP 50 à 70% À discuter DEP < 50% Admission Et ensuite ? • Sortie : – – – – avec RV pneumologique Ordonnance de corticoïdes oraux Et Corticoïdes inhalés (Rowe BH, JAMA, 1999) Et bronchodilatateurs de courte durée d’action – Education « minimale » y y La seule délivrance de l’information ne suffit pas à entraîner des changements suffisant pour améliorer le contrôle de la maladie. (Gibson, Cochrane, 2000) L’apprentissage de « l’auto‐gestion » permet de réduire le recours aux urgences et améliorer le contrôle de la maladie. (Gibson, Cochrane, 2000) Asthme aigu grave : prise en charge en réa • salbutamol en IVSE • adrénaline IV • ventilation non invasive • intubation trachéale = à très haut risque Ventilation difficile , risque de pneumothorax Mortalité élevée • + sédation, curarisation Séquelles neuro musculaires importantes Liés à la maladie Asthme ancien > 10 ans hospitalisations pour asthme intubation pour AAG corticodépendance, intolérance à l ’aspirine mauvaise perception de l’obstruction Facteurs de risques Facteurs psychologiques troubles psy. Non compliance, alcoolisme déni de la maladie, corticophobie capacité intellectuelle limitée Facteurs socio‐culturels et environnementaux Conditions socio‐économiques défavorables accessibilité aux soins, langage pollution atmosphérique, tabagisme adolescent Effort à faire car 9% des patients décèdent avant l’arrivée du SAMU donc éducation des patients la voie sous‐cutanée autogestion de l’asthme éducation des médecins 30% des hospitalisations pour AAG vu au domicile par MT n’avaient pas reçu de traitement Asthme aigu : résumé • apprécier la gravité • pose de voie veineuse • oxygène nasal pour avoir une SpO > 92% • mise en route rapide du traitement après avis médical : aérosols répétés +++ corticoïdes IV • rassurer le patient • surveiller l’efficacité du traitement : diminution de la FR, de la dyspnée, amélioration du PF • en l’absence d’amélioration après 3 aérosols : avis réa Crise d’asthme : évaluation par l’infirmière 1. Critères de gravité Constantes Peak flow +++ Gaz du sang 2. Efficacité du traitement Mesure répétée du Peak flow Diminution de la FR Amélioration subjective de la dyspnée 3. Chercher les effets secondaires du traitement Glycémie FC lors des aérosols • maladie fréquente, touche souvent le sujet jeune • parfois mortelle • nécessite (à vie ?) un traitement de fond à base de corticoïdes inhalés • l’éducation est l’élément clé de la prise en charge