C.-F. Roques10
Une étude observationnelle récente a attiré l’attention
sur l’intérêt de la médecine thermale pour améliorer le burn
out lié au travail. On a, en effet, pu constater que des
curistes pour motif rhumatologique et présentant des symp-
tômes de burn out liés au travail voyaient ces symptômes
améliorés de façon signifi cative [2]. Cela a été objectivé en
comparant les évaluations effectuées en début et en fi n de
cure. On a vu ainsi s’améliorer les quatre symptômes carac-
téristiques : fatigue, stress, motivation réduite, sommeil
altéré. Cette amélioration a été également observée chez
les sujets porteurs d’un burn out modéré (épuisement émo-
tionnel) comme d’un burn out sévère (épuisement émotion-
nel avec insatisfaction et/ou détachement social).
Hypothèses
La balnéation notamment chaude rend le corps plus mobile
par les effets de relâchement musculaire liés à l’apesanteur
et à la chaleur qui se combinent pour agir sur le système de
la proprioception (fuseau neuro-musculaire, organe tendi-
neux de Golgi…) ; l’activation du contrôle de porte (gate
control), la sécrétion de neuro-médiateurs endorphiniques
peuvent également intervenir dans les sensations d’apaise-
ment ressenties par les patients. Mais la balnéothérapie agit
également sur les divers systèmes de défense de l’orga-
nisme : anti-oxydatif, anti-infl ammatoire, neuro-endocri-
nien… globalement le système anti-stress est renforcé. Ainsi,
on a pu observer une action favorable sur le système du
transport de la sérotonine [8] ; une modifi cation du taux des
β-endorphines [1] des marqueurs salivaires du stress [9], des
stéroïdes glucocorticoïdes salivaires [9], sériques [5], de la
DHEA [5, 10], des hormones masculines [5].
Conclusions et perspectives
Ainsi observations cliniques et données biologiques se com-
binent pour souligner l’intérêt de la médecine thermale
dans la prise en charge d’affections invalidantes pour le
patient : anxiété, état dépressif, douleurs diffuses chro-
niques, burn out.
L’impact de ce traitement pourrait s’avérer tout à fait
adapté face à la consommation médicamenteuse. Son effi -
cacité pourrait justifi er la construction de programmes de
sevrage thérapeutiques de médications psychotropes, en
particulier benzodiazépiniques.
Plus largement le milieu thermal apparait sur le plan
médical et humain comme un endroit privilégié pour l’éva-
luation et la prise en charge du stress de manière structu-
rée, dans le cadre de véritables cliniques du stress.
Confl its d’intérêt
C.-F. Roques : aucun.
Preuves
Elles concernent essentiellement la maladie dépressive, le
trouble anxieux généralisé, la fi bromyalgie, le burn out.
La dépression a fait l’objet d’une étude qui montrait que
les dépressifs étaient améliorés par la prise en charge en
médecine thermale [3]. Elle a montré que dans le groupe
thermal de 78 patients on observait une amélioration globale
du score MADRS à 6 mois de 58 % alors que l’amélioration
n’était que de 11 % dans le groupe des 31 patients témoins.
Les patients du groupe thermal réduisaient leur consomma-
tion d’antidépresseurs de 14 % alors que la consommation
dans le groupe témoin était augmentée de 25 %.
Le trouble d’anxiété généralisé a fait l’objet d’une éva-
luation clinique rigoureuse dans le cadre d’un essai contrôlé
avec tirage au sort et dans lequel on a pu enrôler des popu-
lations de patients dont l’effectif avait été préalablement
calculé sur la base du critère de jugement principal [4]. On
a pu observer ainsi une diminution signifi cative du trouble
anxieux mesuré par l’échelle de Hamilton à la 8e semaine
dans le groupe thermal qui était comparé à un groupe de
patients prenant de la paroxétine. Le taux de patients
améliorés d’au moins 50 % était le double dans la popula-
tion thermale et dans cette même population on observait
3 fois plus de guéris (Tableau 1).
L’amélioration chez les patients répondeurs (i.e. pré-
sentant une diminution d’au moins 30 % du score de
Hamilton) se maintenait au sixième mois. La réponse théra-
peutique à la cure thermale était d’autant plus nette que
le niveau d’anxiété était élevé et/ou qu’il existait une note
dépressive concomitante.
La prise en charge balnéothérapique de la fi bromyalgie
a fait l’objet de nombreux essais thérapeutiques contrôlés
randomisés, réalisés essentiellement en médecine ther-
male. L’intensité de la douleur, le seuil douloureux, le
nombre de sites douloureux à la pression, les capacités
fonctionnelles sont ainsi améliorés de manière signifi ca-
tive. Deux revues ou méta-analyses récentes permettent
de retenir l’intérêt de cette approche thérapeutique ;
selon les études, l’évidence est classée de modérée [6] à
forte [7] et la balnéothérapie est proposée avec un niveau
de recommandation de grade B par l’EULAR (European
League Against Rheumatism).
Tableau 2 Trouble anxieux mesuré par l’échelle
de Hamilton à la 8e semaine
Score d’anxiété
p < 0,05 Groupe cure Groupe
paroxétine
Amélioré de 30 %
au moins 83 % 57 %
Améliorés de 50 %
au moins 56 % 28 %
Guéris (score < 7) 22 % 7 %