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ENTREVUE AVEC YVES LAVOIE
Le développement énergétique
nécessite l’interdisciplinarité
À l’automne 2010, le Réseau des ingénieurs du Québec publiait une impor-
tante étude sur la mobilité durable1. Nous avons rencontré Yves Lavoie, le nou-
veau président. Nous le remercions. « Sans nous être consultés, dit-il, l’IRÉC et
le RIQ en arrivent aux mêmes constats. Il faut se sortir de notre dépendance
au pétrole et miser sur la mobilité durable grâce en particulier à l’électri-
cité. Nous sommes conscients qu’il faut s’associer avec d’autres voix pour le
développement durable. Le développement énergétique nécessite l’interdisci-
plinarité. Nous maîtrisons les dimensions technologiques. Avec l’IRÉC, nous
pouvons intégrer la dimension économique dans notre réflexion ».
Il a poursuivi en expliquant que cette impli-
cation du RéseauIQ fait partie de l’effort
pour responsabiliser et soutenir les ingénieurs
face aux défis énergétiques, au développement
durable et aux grands enjeux de société.
C’est pourquoi le Réseau insiste tant sur la
nécessité de s’affranchir de la dépendance du
Québec au pétrole. « Cela coûte chaque année
environ 15 milliards de dollars à l’économie
du Québec. Un peu plus de la moitié de cette
somme est absorbée par le transport des
personnes et des marchandises. Le pétrole est
le premier produit d’importation et le premier
responsable de notre déficit commercial »,
explique Yves Lavoie.
Tout milite en faveur de cette reconversion:
les sources d’approvisionnement seront de plus
en plus coûteuses à exploiter, elles le seront
dans des zones géopolitiques instables alors
que les économies émergentes verront leurs
propres demandes augmenter. C’est aussi une
source d’énergie très polluante.
S’appuyer sur l’électricité
« Des choix judicieux doivent être faits si on
veut diminuer notre consommation de pétrole
de 60% d’ici 20 ans dans les transports rou-
tiers, soutient l’ingénieur. Le Québec dispose
d’électricité en abondance pour effectuer le
virage de l’électrification des transports et sans
avoir à construire de nouveaux barrages ».
Le RéseauIQ est en faveur de la mise en
œuvre d’une stratégie québécoise de la mobilité
durable selon deux axes stratégiques.
Réduire l’empreinte de carbone
Le premier axe est centré sur la réduction
de l’empreinte de carbone et de la dépendance
au pétrole du transport. Pour cela, il suggère
de maximiser la pénétration des véhicules
à motorisation électrique (VME) légers et la
diminution de la consommation de carburant.
Selon Yves Lavoie, « un million de voitures
électriques consommerait moins de 2% de
l’électricité utilisée par les Québécois et les
Québécoises ».
Le RIQ suggère également de favoriser les
transports collectifs, alternatifs et actifs. Pour
les transports collectifs urbains, il préconise
les autobus électriques biberonnés, car ils
rendent possible l’électrification complète d’un
parc d’autobus urbains, sans fil au-dessus des
rues et l’utilisation de batteries québécoises au
titanate de lithium nanométrique qui per-
mettent de les charger très rapidement. Pour
les transports collectifs interurbains, comme
l’IRÉC, le RéseauIQ préconise le monorail
rapide suspendu à moteur roue. Enfin, il faut
augmenter l’usage des carburants alterna-
tifs avec, notamment, les biocarburants de
deuxième génération.
Soutenir l’industrie québécoise
Le deuxième axe est centré sur le soutien de
l’industrie québécoise des VME. « Nous suggé-
rons entre autres d’accroître la part de marché
du contenu québécois dans la chaîne d’approvi-
sionnement des VME, d’accroitre la visibilité de
l’industrie québécoise du VME dans le monde »,
souligne le président du RIQ.
Un Fonds national en efficacité
énergétique
Le RIQ s’est aussi penché sur le finance-
ment. « Avec du financement avantageux, la
consommation énergétique des bâtiments, des
procédés de production ou des parcs automobiles
à la grandeur du Québec pourrait être attaquée
de front. C’est pourquoi nous proposons un
Fonds national en efficacité énergétique (FNEE)
bâti sur le modèle d’un fonds qui consentirait
des prêts aux grands consommateurs d’énergie
et s’autofinancerait dans le temps, à même les
économies d’énergies réalisées ».
Le président du RéseauIQ conclut en affir-
mant que l’avenir du Québec réside dans sa
capacité à utiliser l’énergie à bon escient, que
ce soit pour ses procédés industriels ou pour la
mobilité des hommes et des biens. « Le Québec,
dit-il, a tout ce qu’il faut pour relever les défis
de la conjoncture énergétique mondiale. C’est
en matière de transport et de mobilité durable
que se posent les premiers défis ».
Yves Lavoie est président du RéseauIQ depuis
2010. Il est membre du Ccomité spécial pour l’inté-
gration, du comité de gouvernance et du comité de
soutien des intérêts socioéconomiques des ingé-
nieurs. Il a été administrateur de l’Ordre des ingé-
nieurs du Québec et de la Chambre de commerce et
d’industrie de Sorel-Tracy. Depuis 2006, il est admi-
nistrateur du Technocentre en écologie industrielle.
1. Voir sur le site www.reseauiq.qc.ca, le document Pro-
positions du RéseauIQ pour engager le Québec sur
la voie de la mobilité durable. Un autre document
fort intéressant peut aussi être consulté : Propositions
concernant la création d’un Fonds national en
efficacité énergétique.
Le RéseauIQ, c’est
quoi?
Le RéseauIQ est un organisme sans but
lucratif qui représente plus de 59 000
membres répartis dans tout le Québec. Sa
mission est de valoriser, promouvoir et servir
les ingénieurs au Québec.
Pour cela, l’organisme :
- prend des positions publiques afin de
promouvoir les intérêts socio-économiques des
ingénieurs;
- conçoit et négocie des programmes et des
services avec des partenaires commerciaux
reconnus;
- répond aux besoins des différents acteurs
du monde du génie en matière d’emplois et de
formation.