Espaces Topologiques et la Classification des Surfaces

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Espaces Topologiques
et
la Classification des Surfaces
Joel Fine
Université Libre de Bruxelles
Cours donné pendant la deuxième année du bachelier en mathématiques,
à l’Université Libre de Bruxelles, 2009.
Table des matières
1 Introduction
4
I
5
Espaces Topologiques
2 Espaces métriques
2.1 Définition d’un espace métrique . .
2.2 Fonctions et applications continues
2.3 Sous-ensembles ouverts . . . . . . .
2.4 Un exemple instructif . . . . . . .
2.5 Continuité et ouverts . . . . . . . .
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3 Espaces topologiques
3.1 Définition d’un espace topologique
3.2 Applications continues . . . . . . .
3.3 Homéomorphisms . . . . . . . . . .
3.4 Espaces connectés . . . . . . . . .
3.5 Bases . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.6 Espaces produits . . . . . . . . . .
3.7 Espaces quotients . . . . . . . . . .
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4 Espaces Hausdorff
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5 Espaces compacts
5.1 Motivation . . . . . . . . . . . . .
5.2 Definition d’un espace compact .
5.3 [a, b] est compact . . . . . . . . .
5.4 Sous-espaces compacts . . . . . .
5.5 Propriétés des espaces compacts .
5.6 Théorème de Heine–Borel . . . .
II
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Surfaces
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6 Définition et exemples de surfaces
6.1 Défintion . . . . . . . . . . . . .
6.2 Surfaces dans Rn . . . . . . . . .
6.3 Quotients de polygones . . . . . .
6.4 Cartes et atlas . . . . . . . . . .
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7 La classification des surfaces
49
7.1 Surfaces compactes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
7.2 Orientabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
2
7.3
7.4
7.5
7.6
Le caractéristique d’Euler
Couper-et-coudre . . . . .
La classification . . . . . .
Sommes connectés . . . .
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1
Introduction
Ce cours a deux parties principales. La première est de vous donner une
introduction aux espaces topologiques. Un espace topologique T est un espace pour lequel il est possible de parler de fonctions continues T → R,
généralisant l’idée de fonction continue R → R, que vous avez déjà rencontrée pendant la première année. Quelques exemples d’espaces topologiques
sont Rn , la sphère ou, d’une certaine manière, n’importe quel espace “géométrique”. Il y a aussi beaucoup d’autres exemples ou la géométrie et moins
évidente. Par exemple, l’espace des fonctions bornées f : [a, b] → R est un
espace topologique et sa topologie nous aide à l’étudier.
Bien que la motivation initiale vienne d’analyse, les techniques et le style
du sujet sont très différents. La définition d’un espace topologique met en
valeur la chose sur laquelle le concept de continuité est basée : le comportement de sous-ensembles ouverts. Un des avantages de cette approche est que
la définition est suffisamment abstraite pour admettre plusieurs exemples qui
ne ressemblent pas du tout la droite réelle. Il y a beaucoup de situations où
le langage de topologie est essentielle pour bien comprendre les propriétés
d’un espace et certaines de ses fonctions.
La deuxième partie du cours concerntre sur les surfaces. Briévement,
une surface est un espace qui “parait localement” comme R2 . Un exemple
est la sphère : du point de vue d’une fourmis rampant sur d’une sphère
enorme, la surface parait comme un plan plat. Une surface est un espace
topologique et en utilisant nos travaux avec tels espaces, on classifiera toutes
les surfaces : elles paraissent toutes dans une liste simple (à condition qu’elles
soient compactes). La deuxième partie du cours vous introduira aux surfaces
et leur classification.
La classification des surfaces n’est pas juste un but soi-même, mais aussi
une introduction à des sujets plus avancés. Les espaces qui “paraissent localement” comme Rn — variétés — sont beaucoup plus compliquées que les
surfaces et sont toujours à la frontière de la recherche aujourd’hui. Egalement, une des techniques pour distinguer les surfaces — le caractéristique
d’Euler, un nombre associé à chaque surface — peut être généralisé à d’autres
situations topologiques. C’est le début de la topologie algébrique, une autre
branche active de la recherche. Les variétés et la topologie algébrique sont
introduites dans des cours du premier cycle du masters.
Remerciements
La première partie de cet note est basé sur le livre “An Introduction to
Metric and Topological Spaces” par W. Sutherland et aussi sur le cours du
même nom donné à l’Université d’Oxford.
4
Première partie
Espaces Topologiques
2
Espaces métriques
2.1
Définition d’un espace métrique
On voudrait généraliser l’idée d’une fonction continue f : R → R aux
autres situations. On commencera en se rappelant la définition.
Définition 2.1. Une fonction f : R → R est dite continue au point a ∈ R si
pour tout réel ! > 0, il existe un réel δ > 0 tel que
|x − a| < δ ⇒ |f (x) − f (a)| < !.
Une fonction f est dite continue si elle est continue en tout points a ∈ R.
En utilisants des mots, et pas grec : une fonction f est continue si n’importe quel petit changement de x entraîne un petit changement de f (x).
Afin de généraliser cette définition aux espaces autre que R, il faut d’abord
généraliser l’idée d’un “petit changement” ou, plutôt, l’idée de la distance
entre deux points. La chose qui nous permettra de mesurer la distance entre
points s’appelle une metrique, un ensemble avec une métrique est appelé un
espace métrique. Formellement,
Définition 2.2. Soit X un ensemble non-vide. Une application
d: X × X → R
est dite une métrique si les conditions suivantes sont satisfaites :
M1 Pour tous points x, y, ∈ X, d(x, y) ≥ 0. De plus, d(x, y) = 0 si et
seulement si x = y.
M2 Pour points x, y ∈ X, d(x, y) = d(y, x).
M3 Pour points x, y, z ∈ X, d(x, z) ≤ d(x, y) + d(y, z).
Le couple (X, d) est appelé un espace métrique. Quand il n’y a pas de possibilité de confusion, et que le choix de la métrique d est évident, on dit que
X est un espace métrique.
La motivation géométrique derrière cette définition n’est pas difficile à
voir. M1 dit que les distances doivent être positives, et null uniquement
quand les points x et y sont les mêmes. M2 dit que la distance de x à y doit
être égale à la distance de y à x. M3 s’appelle l’inégalité triangulaire. Afin
5
de comprendre son nom, imaginez que x, y, z sont des points sur le plan qui
font un triangle T et que d est la distance habituelle. Dans ce cas, l’inégalité
dit que la longueur d’un des arrêt de T est plus petite que la somme des
longueurs des deux autres arrêts.
Exemples 2.3.
1. La métrique euclidienne sur R. On défini une métrique sur R par
d(x, y) = |x−y|. Les conditions M1–3 ne sont pas difficile à démontrer.
2. La métrique euclidienne sur Rn . Soit x = (x1 , . . . xn ) et y = (y1 , . . . yn )
deux points de Rn . On défini une métrique dE par
!
dE (x, y) = (x1 − y1 )2 + · · · (xn − yn )2 .
Les conditions M1 et M2 sont évidentes. Pour démontrer l’inegalité
triangulaire, soit x, y, z ∈ Rn et soit rj = xj − yj , sj = yj − zj . Alors,
il faut démontrer que
"#
"#
"#
rj2 +
s2j ≥
(rj + sj )2 .
Puisque les deux cotés sont positifs, en prenant le carré, il suffit de
démontrer que
"# "#
#
#
#
#
#
rj2 + 2
rj2
s2j +
s2j ≥
rj2 + 2
rj sj +
s2j .
Cette inégalité est équivalente de l’inégalité de Cauchy :
Lemme 2.4 (L’inégalité de Cauchy). Soit r1 , . . . rn , s1 , . . . sn ∈ R.
Alors,
%2
$#
# #
rj sj .
s2j ≥
rj2
&
Démonstration. Soit t ∈ R. On considère F (t) = (rj + tsj )2 . Comme
la somme des carrés, cette expression est positive, nous donnant
#
#
#
F (t) =
rj2 + 2t
rj sj + t2
s2j ≥ 0,
pour réel t. Le coefficient de t2 est positif, alors l’équation quadratique
F (t) = 0 ne peut jamais avoir deux racines réelles distinctes t1 et t2 ;
2 − 4ac”
sinon F (t) < 0 pour t entre t1 et t2 . Donc
& le discriminant “b &
doit être négatif. Dans ce case, b = 2 rj sj , alors que a =
s2j et
& 2
2
c = rj ; l’inégalité b − 4ac ≤ 0 est l’inégalité de Cauchy.
3. Espaces discrets. Soit X un ensemble non-vide. On défini une métrique d sur X par
'
0 si x = y,
d(x, y) =
1 si x (= y.
6
M1 et M2 sont évidents. Pour M3, constatez que, si x = z, d(x, z) = 0
alors d(x, z) ≤ d(x, y) + d(y, z). De l’autre coté, si x (= z, alors soit
x (= y, soit y (= z. Donc d(x, y) + d(y, z) est égal à 1 ou 2, et alors
supérieur ou égal à d(x, z) = 1.
Cette métrique s’appelle la métrique discrète. Elle n’est pas utilisé pour
étudier un espace. Par contre elle est très utile comme un exemple “pathologique” ; c’est un contre-exemple potentiel que vous devriez considérer avant d’essayer de démontrer quelque chose.
4. La métrique de Manhattan. Soit x = (x1 , x2 ), y = (y1 , y2 ) points de
R2 . On défini une métrique dM sur R2 en prenant
dM (x, y) = |x1 − y1 | + |x2 − y2 |
M1 et M2 sont évidents. Pour démontrer l’inégalité triangulaire, soit
z = (z1 , z2 ) un troisième point de R2 . On a
|x1 − z1 | ≤ |x1 − y1 | + |y1 − z1 |
par l’inégalité triangulaire pour la métrique euclidenne sur R. Egalement, on a |x2 −z2 | ≤ |x2 −y2 |+|y2 −z2 |. La somme des deux inégalités
démontre que dM (x, z) ≤ dM (x, y) + dM (y, z).
Le nom de cette métrique vient de la géométrie de Manhattan : toutes
les rues sont perpendiculaires, alors la distance d’un trajet par voiture
est donné par la métrique dM et non par la métrique euclidienne.
5. Soit B l’ensemble de toutes fonctions [a, b] → R qui sont bornées. Pour
f, g ∈ B, soit L, M ∈ R tel que |f (t)| ≤ L et |g(t)| ≤ M pour tous
t ∈ [a, b]. Alors,
|f (t) − g(t)| ≤ |f (t)| + |g(t)| ≤ L + M
Donc,
d(f, g) = sup{|f (t) − g(t)| : t ∈ [a, b]}
est bien définit. Comme le supremum d’un ensemble des nombres positifs, d(f, g) ≥ 0. En plus, d(f, g) = 0 si et seulement si |f (t) − g(t)| = 0
pour tous t ∈ [a, b], c’est à dire si et seulement si f = g. Alors M1
est clair. M2 est satisfaites puisque |f (t) − g(t)| = |g(t) − f (t)|. Pour
démontrer M3, soit f, g, h ∈ B. A tous les points t ∈ [a, b], on a que
|f (t) − h(t)| = |f (t) − g(t) + g(t) − h(t)| ≤ |f (t) − g(t)| + |g(t) − h(t)|
En prenant le supremum, on obtient que
d(f, h) ≤ sup{|f (t) − g(t)| + |g(t) − h(t)|}
≤ sup{|f (t) − g(t)|} + sup{|g(t) − h(t)|}
= d(f, g) + d(g, h).
7
Cet exemple indique que le langage des espace métriques s’applique aux
ensembles beaucoup plus grands que ceux que l’on trouve dans la géométrie traditionelle. Le fait que les axiomes métriques sont satisfaites
nous permet de utiliser l’intuition géométrique même si l’espace des
fonctions bornées est un espace vectoriel de dimension infini. L’usage
des métriques dans l’etude des espaces des fonctions est une technique
très importante d’analyse.
6. Sous-ensembles métriques. Soit (X, d) un espace métrique et A ⊂ X
un sous-ensemble. La restriction de d à A × A defini une métrique sur
A. Les conditions M1–3 sont forcement satisfaites, puisque elles sont
satisfaites pour tous les points de X.
7. Espace produits. Soit (X, dX ) et (Y, dY ) espaces métriques. Il y a des
métrqiues diverses sur le produit X × Y . La plus intuitive, peut-être
est la généralisation de la métrique euclidienne sur R2 , défini pour
p = (x1 , y2 ), q = (x2 , y2 ) ∈ X × Y par
!
d(p, q) = dX (x1 , x2 )2 + dY (y1 , y2 )2
M1 et M2 sont évidents. M3 est laissé comme exercice pour le lecteur.
Egalement, on pourrait imiter la métrique de Manhattan sur R2 et
prendre une métrique dˆ défini par
ˆ q) = dX (x1 , x2 ) + dY (y1 , y2 ).
d(p,
La vérification des axiomes est laissée au lecteur.
2.2
Fonctions et applications continues
Ayant vu la définition d’un espace métrique, c’est facile de généraliser le
concept d’une fonction continue :
Définition 2.5. Soit (X, d) un espace métrique. Une fonction f : X → R et
dite continue au point a ∈ X si pour tous réel ! > 0, il existe un réel δ > 0
tel que
d(x, a) < δ ⇒ |f (x) − f (a)| < !.
Une fonction est dite continue si elle est continue à tous les points de X.
Quand c’est nécessaire de spécifier la métrique on dit que f est dX -continue.
En plus, on peut parler de la continuité d’une application f : X → Y
entre deux espaces métriques (X, dX ) et (Y, dY ).
Définition 2.6. Soit (X, dX ), (Y, dY ) deux espace métriques. Une application f : X → Y est dite continue au point a ∈ X si pour tous réel ! > 0, il
existe un réel δ > 0 tel que
dX (x, a) < δ ⇒ dY (f (x), f (a)) < !,
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