Résistances à la vitamine D par défaut de fonction de son récepteur Vitamin D resistances due to defects in vitamin D receptor function M. Garabedian, M. Nguyen* points FORTS ▲ Cette revue traite de la clinique des patients porteurs d’un défaut de fonction du récepteur de la vitamine D et des anomalies génétiques connues pour en être responsables. ▲ Elle aborde également une question plus actuelle sur les conséquences pathologiques de cette résistance sur la différenciation cellulaire et les fonctions immunologiques. ▲ Elle évoque enfin de possibles “résistances” liées à des polymorphismes du gène codant pour le VDR dans la population générale. Ces variants pourraient, en effet, influencer le risque de survenue de maladies posant des problèmes majeurs en santé publique, telles que l’ostéoporose, le cancer ou les maladies auto-immunes. Mots-clés : Vitamine D – Récepteur – Rachitisme. Keywords: Vitamin D – Receptor – Rickets. L a vitamine D est indispensable pour l’absorption intestinale du calcium alimentaire et, par conséquent, la minéralisation du squelette. Son action osseuse résulte également d’un effet local sur la prolifération/différenciation des cellules osseuses, sur la production de l’hormone parathyroïdienne, et, possiblement, sur la réabsorption tubulaire rénale du calcium et des phosphates. De plus, depuis une dizaine d’années, le champ de ses fonctions s’est étendu au contrôle de régulateurs clés des défenses immunitaires et à celui de la prolifération/différenciation de cellules tumorales. * Inserm U561, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, Paris. Pour assurer ses fonctions, la vitamine D doit être transformée, dans le foie puis les reins, en sa forme active, la 1,25-dihydroxyvitamine D (1,25-[OH]2D). Celle-ci agit ensuite en se liant à son récepteur spécifique (VDR), présent dans les cellules cibles. Ce récepteur est codé par un gène porté par le chromosome 12. Un défaut de fonction majeur de ce récepteur entraîne un rachitisme dit “vitaminorésistant”, parce qu’il n’est pas corrigé par un apport de vitamine D suffisant pour compenser une carence en vitamine D. Ce rachitisme s’accompagne d’une hypocalcémie et d’une hyperparathyroïdie secondaire et résulte majoritairement du défaut d’absorption intestinale de calcium. Il s’associe dans la moitié des cas à une alopécie, totale ou partielle, visible dès les premiers mois de la vie. La transmission récessive de la maladie et les études cliniques qui ne révèle pas d’anomalies majeures chez les parents de patients atteints, suggèrent qu’un seul allèle fonctionnel suffit à assurer une réponse normale des cellules cibles à la vitamine D. Conséquences cliniques d’un défaut de fonction du récepteur de la vitamine D sur le métabolisme calcique et la minéralisation du squelette aux hormones stéroïdes Syndromes de résistance Les mutations sur le gène codant pour le récepteur de la 1,25-(OH)2D (VDR) entraînent un rachitisme hypocalcémique vitaminorésistant (13). Cette forme de rachitisme décrite depuis 1978 est appelée HVDRR par certains auteurs (hypocalcemic vitamin D resistant rickets). D’autres auteurs lui préfèrent l’appellation de “rachitisme pseudo-carentiel de type II” (en anglais, pseudo-deficiency rickets type II ou PDR II) pour le distinguer du rachitisme carentiel (deficient rickets) et du rachitisme par défaut génétique de production de 1,25-(OH)2D (PDR type I). Cette pathologie est transmise de façon autosomique récessive. Elle est rare (moins de 50 cas en France) et elle est principalement observée parmi les populations originaires du pourtour méditerranéen. La maladie est reconnue assez tôt dans la vie, entre 6 mois et 3 ans, Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 3, mai/juin 2006 et n° 4, juillet/août 2006 131 Syndromes de résistance aux hormones stéroïdes 132 par l’apparition d’un retard de croissance et de déformations osseuses très importantes (2, 3). Ces déformations osseuses résultent d’un défaut de minéralisation des plaques métaphyso-épiphysaires clairement visible sur les radiographies des os longs. Elles s’accompagnent de fractures et de douleurs osseuses. Elles siègent majoritairement aux membres inférieurs et aux côtes, mais peuvent concerner les membres supérieurs. Elles sont similaires à celles trouvées chez les enfants ayant un rachitisme carentiel et chez ceux ayant un défaut génétique de production de 1,25-(OH)2D, mais s’en distinguent souvent par leur sévérité. Le tableau clinique inclut par ailleurs les autres signes classiquement observés chez les enfants carencés en vitamine D, tels que troubles respiratoires, les infections des voies respiratoires, l’asthénie musculaire. Quelques signes d’hyperexcitabilité neuromusculaire résultant de l’hypocalcémie peuvent être observés, mais peu de convulsions hypocalcémiques ont été rapportées chez ces enfants. Enfin, un trait caractéristique est l’association fréquente de ce tableau de rachitisme à une alopécie, totale ou partielle (tableau I). Le tableau biologique est semblable à ceux des rachitismes carentiel et pseudo carentiel de type I : hypocalcémie/hypocalciurie, hyperparathyroïdie secondaire, hypophosphatémie et élévation du taux de réabsorption tubulaire des phosphates, élévation de l’activité sérique des phosphatases alcalines (tableau I). Le diagnostic repose sur les dosages des métabolites de la vitamine D avant et sous traitement de même que sur la notion d’une résistance à des doses très élevées de vitamine D. Avant traitement, le dosage de la 25-hydroxyvitamine D (25-[OH]D) circulante permet le plus souvent d’éliminer une carence en vitamine D (tableau I). Celui de la 1,25(OH)2D permet d’identifier les patients résistant à la 1,25-(OH)2D, lorsqu’il est effectué 5 à 10 jours après une charge de vitamine D. En effet, les valeurs de 1,25-(OH)2D dans le sang s’élèvent alors très audessus des valeurs normales en cas de résistance (figure 1), à la différence de ce qui est observé chez les patients avec rachitisme par défaut de synthèse de la 1,25-(OH)2D. De plus, en cas de résistance sévère au 1,25-(OH)2D, on observe une correction insuffisante des signes biologiques de rachitisme malgré l’élévation franche des valeurs circulantes de 1,25-(OH)2D sous traitement. Des tests in vitro peuvent par ailleurs être réalisés à partir de cellules prélevées chez le patient, fibroblastes de peau ou cellules circulantes, pour affirmer la résistance et évaluer l’effet de la 1,25-(OH)2D sur la prolifération cellulaire et certaines activités enzymatiques. Il est également possible d’analyser dans ces cellules l’expression du récepteur, ainsi que sa capacité à lier la 1,25-(OH)2D, à former un hétérodimère avec le RXR, ou à se lier à des séquences spécifiques (VDRE) de promoteurs de gènes cibles, ou encore à des coactivateurs ou corépresseurs. Lorsque les mutations du gène VDR ont été identifiées, le même type d’études peut être réalisé sur des cellules transfectées avec un VDR présentant la mutation identifiée chez le patient. Mais le diagnostic s’appuie maintenant sur le séquençage d’ADN génomique ou d’ADNc à partir des cellu- Tableau I. Clinique et biologie des rachitismes carentiels et pseudo-carentiels. Carence Gène muté PDR I PDR II CYP17-1 VDR Âge début Consanguinité > 3 mois ± > 6 mois ± > 6 mois +++ Rachitisme Alopécie +++ non ++ non +++ oui/non Biologie Hypocalcémie Hypophosphatémie PAL élevée PTH élevée 25-(OH)D basse 1,25-(OH)2D basse 1,25-(OH)2D élevée +++ ++ +++ +++ oui ± ± +++ ++ +++ +++ non oui non +++ ++ +++ +++ non non oui Calciurie basse Hyperaminoacidurie +++ +++ +++ +++ +++ +++ Tableau II. Traitement des rachitismes carentiels et pseudo-carentiels. Carence Mutation PDR I PDR II CYP17-1 VDR Vitamine D 1-hydroxyvitamine D 5 mg (1 Mg/j) 0,25-1 mg/j (1-6 Mg/j) > 5 mg/j > 10 Mg/j Calcium oral Perfusion de calcium 0,5-1,5 g/j ± 0,5-1,5 g/j ± > 3 g/j ++++ Évolution des déformations osseuses Correction en 3-24 mois Correction en 3-24 mois Correction en 6-24 mois Durée du traitement 3-6 mois à vie à vie Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 3, mai/juin 2006 et n° 4, juillet/août 2006 les sanguines des patients mettant en évidence les anomalies sur le gène codant pour le VDR. Enfin, les cellules du liquide amniotique peuvent être utilisées pour un dépistage anténatal lorsque l’on sait qu’un membre de la fratrie est porteur de la maladie. Le traitement de ces résistances fait appel à des doses massives de vitamine D2 ou D3, de 25-(OH)D3, ou de dérivés 1-alpha-hydroxylés de la vitamine D3 (tableau II). Les concentrations efficaces de 1,25(OH)2D sont dans cette maladie 100 à 1 000 fois plus élevées que celles mesurées chez les sujets bien portants (figure 1). Elles peuvent être obtenues par un apport massif de vitamine D, jusqu’à 15 mg/j, ou de 25-(OH)D3, jusqu’à 5 mg/j, leur conversion en 1,25-(OH)2D n’étant pas rétrocontrôlée en cas de mutation du VDR. Ces concentrations sont plus difficilement atteintes par un apport élevé des dérivés 1-hydroxylé de la vitamine D (10 à 50 µg/j), car la demi-vie dans le sang de ces dérivés n’est que de quelques heures. La réponse à ces vitaminothérapies massives est variable d’un sujet à l’autre, satisfaisante de façon durable ou transitoire pendant quelques mois chez certains, insuffisante ou nulle chez d’autres. Chez certains patients, la correction des troubles n’est obtenue qu’au prix de traitements contraignants, calcithérapie orale à haute dose, jusqu’à 9 g/j/m2, ou calcithérapie par voie endoveineuse au long cours nécessitant la pose d’un cathéter intracave ou d’une fistule artérioveineuse et imposant une surveillance dans des centres spécialisés (4). 2,6 2,4 CALCÉMIE (mmol/l) 2,2 2 1,8 1,6 1,7 PHOSPHATÉMIE (mmol/l) 1,5 1,3 1,1 1 200 PHOSPHATASES ALCALINES (IU/l) 800 400 250 PTH (ng/ml) 150 50 1 800 1 400 1,25-(OH)2D (pg/ml) 1 000 600 200 450 350 25-(OH)D (ng/ml) 250 150 50 0 250 TRAITEMENT 8 1-(OH)D3 (Mg/j) 25-(OH)D3 (Mg/j) 1993 15 100 1995 1997 75 1999 aux hormones stéroïdes Syndromes de résistance 2001 Figure 1. Évolution des marqueurs sanguins du métabolisme phosphocalcique avant et sous traitement vitaminique D chez un enfant avec résistance à la vitamine D par mutation du VDR. Sont indiquées sur cette figure les concentrations sériques en calcium, phosphore, activité des phosphatases alcalines, hormone parathyroïdienne (PTH), 25-hydroxyvitamine D, forme de réserve de la vitamine D (25-[OH]D) et 1,25-dihydroxyvitamine D, forme active de la vitamine D (1,25-[OH]2D). Le traitement a comporté successivement un analogue de la 1,25-(OH)2D3 (1-[OH]D3) puis de la 25-(OH)D3 qui a permis d’augmenter significativement les réserves de vitamine D et la production de 1,25-(OH)2D3, et ainsi de corriger les signes cliniques, radiologiques et biologiques de rachitisme (hypocalcémie, hypophosphatémie, élévation de PTH et élévation de l’activité des phosphatases alcalines). Les valeurs normales pour l’âge sont indiquées en gris pour tous les paramètres. Anomalies génétiques responsables du défaut de fonction du VDR Après une première identification en 1988, la liste des anomalies du gène VDR responsables de rachitisme s’allonge chaque année (1-3). Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 3, mai/juin 2006 et n° 4, juillet/août 2006 133 Syndromes de résistance aux hormones stéroïdes Tableau III. Mutations identifiées sur le gène codant pour le récepteur de la vitamine D chez des patients avec rachitisme hypocalcémique vitaminorésistant avec ou sans alopécie. Rachitisme hypocalcémique vitaminorésistant avec alopécie Changement de base Exon Domaine Arg30stop CGA-TGA 2 DBD Zhu et al. (12), Mechica et al. (13) Gly33Asp GCC-GAC 2 DBD Hughes et al. (14) His35Gln CAC-CAG 2 DBD Yagi et al. (15) Lys45Glu (42*) AAA-GAA 2 DBD Rut et al. (16), Nguyen et al. (17) Gly46Asp GGC-GAC 2 DBD Lin et al. (18) Phe47Ile (44*) TTC-ATC 2 DBD Rut et al. (16) Arg50Gln (47*) CGA-CAA 3 DBD Saijo et al. (19) Arg73stop CGA-TGA 3 DBD Wiese et al. (20), Cockerill et al. (21) Arg80Gln (77*) CGG-CAG 3 DBD Sone et al. (22), Malloy et al. (23) Intron E Hawa et al. (24) Mutation homozygote Glu92fs Références Gln152stop (149*) CAG-TAG 4 charnière Kristjansson et al. (25) Cys190Trp TGT-TGG 5 LBD Thompson et al. (26) Leu233fs GTC-GTG 6 LBD Cockerill et al. (21) Phe251Cys TTC-TGC 6 LBD Malloy et al. (27) Gln259Pro CAG-CCG 7 LBD Cockerill et al. (21) Tyr295stop TAC-TAA 7 LBD Malloy et al. (28, 30), Ritchie et al. (29), Wiese et al. (20) Gln317stop CAG-TAG 8 LBD Malloy et al. (31) Arg391Cys CGC-TGC 9 LBD Whitfield et al. (32) LBD Thompson et al. (26) Exon7-9 délétion aucune Hewison et al. (33) Mutations hétérozygotes Glu329Lys 366del C Arg391Ser Leu263Arg GAG-AAG CGC-AGC CTG-CGG 8 9 9 7 LBD LBD LBD LBD Miller et al. (34) Nguyen et al. (35) HVDRR sans alopécie Changement de base Exon Domaine Ile268Thr ATT-ACT 7 LBD Malloy et al. (36) Arg274Leu (271*) CGC-CTC 7 LBD Kristjansson et al. (25) Trp286Arg TGG-CGG 7 LBD Nguyen et al. (37) His305Gln CAC-CAG 8 LBD Malloy et al. (38) Ile314Ser ATC-AGC 8 LBD Whitfield et al. (32) Glu420Lys CAA-AAA 9 LBD Malloy et al. (39) Mutation homozygote Références * entre parenthèses sont indiqués les acides aminés mutés avec la numérotation du VDR rapportée par les auteurs (correspondant au récepteur plus court de trois acides aminés, 424 au lieu de 427 acides aminés). 134 Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 3, mai/juin 2006 et n° 4, juillet/août 2006 Près d’une trentaine de mutations différentes sont décrites à ce jour (figure 2, tableau III). Le fort niveau de consanguinité dans les populations sensibles du pourtour méditerranéen rend compte de la fréquence élevée de patients homozygotes pour une mutation donnée. Mais plusieurs cas de doubles mutations hétérozygotes ont maintenant été décrits (tableau III). La plupart des mutations sont des mutations ponctuelles localisées sur l’un des 8 exons codants du gène VDR, mais quelques mutations nonsens et délétions ont été décrites (figure 2). Ces mutations concernent aussi bien le domaine de liaison à l’ADN (exons 2 et 3) que le domaine de liaison du ligand (exons 6-9), ainsi que la région charnière (exons 4 et 5). Leurs conséquences sur la fonctionnalité du VDR dépendent de leur localisation : défaut de liaison de l’hormone, défaut de translocation du complexe hormone-récepteur ou défaut de liaison du complexe à l’ADN. Certaines de ces mutations altèrent également la capacité du VDR à s’hétérodimériser avec un autre récepteur, le RXR, et/ou à lier des coactivateurs tels que SRC-1. Défaut de fonction du VDR et signes cliniques non liés au métabolisme calcique et osseux (alopécie, cancer et maladies auto-immunes) Malgré leur diversité, les altérations du gène codant pour le VDR ont une traduction clinique assez univoque : celle d’un rachitisme sévère et résistant à l’administration de 1,25-(OH)2D. Plusieurs actions de la vitamine D non liées au métabolisme phosphocalcique et osseux ont été documentées in vitro et en expérimentation animale, sur la différenciation cellulaire et les fonctions immunitaires, par exemple. Cependant, il n’y a pas, à l’heure actuelle, ATG 1F 1E 1A 1D 1B 1C TGA 2 3 4 5 6 7 8 9 ß-turn Zn2+ DBD Zn2+ Arg30stop Arg50Gln Gly33Asp His35Gln Lys45Glu Gly46Asp Phe47Ile domaine de liaison au ligand (LBD) charnière Hélice H1 H2 H3 H4 H5 Gln259Pro Leu263Arg Arg73Gln Arg73stop Arg80Gln Glu92Fs Leu233fs Phe251Cys Gln152stop Cys190Trp S1 H6 His305Gln Trp286Arg Tyr295stop Ile268Thr Arg274Leu H7 H8 H9 H10 H11 H12 Glu420Lys Glu329Lys 366delC Ile314Ser Gln317stop Arg391Cys Arg391Ser Figure 2. Structure du récepteur de la vitamine D (ADN génomique et de protéine) et localisation des mutations décrites chez les patients avec rachitisme hypocalcémique résistant à la vitamine D. Partie supérieure : structure de l’ADN génomique avec exons codants (2 à 9) et non codants. Partie médiane : structure de la protéine avec les deux structures en doigt de zinc du domaine de liaison à l’ADN, le domaine charnière, et le domaine de liaison au ligand avec ses structures en hélice et sa région b-turn. Partie inférieure : mutations décrites et leur localisation sur la protéine (ponctuelles, codon stop, délétion, décalage du cadre de lecture). d’évidence de risque plus élevé de développer un cancer ou une maladie auto-immune chez les patients porteurs d’un défaut de fonction du VDR, même si quelques défauts de leurs fonctions macrophagiques ont pu être objectivés in vitro. De même, les souris ayant subi une invalidation de leur gène VDR présentent un défaut de fonction macrophagique et une maturation plus grande de leurs cellules dendritiques présentatrices d’antigènes, mais n’ont pas de risque plus élevé de développer un diabète de type I (5, 6). Cependant, des études récentes suggèrent l’existence possible, mais restreinte à certains patients avec mutations du VDR, d’anomalies concernant les actions de la vitamine D non liées au métabolisme calcique et osseux. Ainsi, les premières expériences de transfection cellulaire avec des VDR mutés montrent que l’effet délétère de ces mutations sur la transcription de gènes dépend du gène cible considéré et du type de mutation (tableau IV). Par exemple, certaines mutations bloquent l’effet de la 1,25-(OH)2D sur la transcription de gènes impliqués dans le métabolisme osseux et la minéralisation du squelette (ostéocalcine et ostéopontine), mais n’affectent pas celle de gènes impliqués dans la prolifération/différenciation de granulocytes/macrophages (GMCSF) ou dans la maturation des cellules dendritiques présentatrices d’antigènes (RelB). À l’inverse, d’autres mutations, dont Arg391Ser, bloquent l’effet inhibiteur de la 1,25-(OH)2D sur la transcription du gène RelB mais non l’effet activateur de cette vitamine sur le gène CYP24 qui code pour la vitamine D-24-hydroxylase, l’enzyme clé du catabolisme de la vitamine D. Ainsi, il est possible que certaines mutations du gène VDR aggravent le risque de développer une maladie auto-immune ou une affection tumorale, sans lien avec la sévérité du rachitisme que présentent les patients. L’alopécie est une autre conséquence, non liée au métabolisme calcique, du défaut de fonction du VDR. Cette anomalie n’est présente que chez cer- Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 3, mai/juin 2006 et n° 4, juillet/août 2006 aux hormones stéroïdes Syndromes de résistance 135 Tableau IV. Effets dissociés de mutations du gène VDR sur la transcription de gènes cibles de la vitamine D. Mutation dans le gène codant le récepteur de la vitamine D Gène cible Lys45Ala (exon 2) Ostéopontine Arg391Ser (exon 9) 0 (35) activation (35) inhibition (35) 0 (35) 24-hydroxylase GMCSF inhibition (40) relB inhibition (40) inhibition (35) N Gln259Pro Leu263Arg ADN*** H9 Ile314Ser H8 H4 B-turn Ile268Thr Arg274Leu*** H10 Cys190Trp H5 H7 136 Leu263Arg (exon 7) 0 (41) H6 De nombreux sites de polymorphisme ont été décrits sur le gène VDR (8). De plus, des associations ont été observées entre certains de ces polymorphismes et des traits phénotypiques liés aux actions de la vitamine D, tels que la capacité de l’intestin à absorber le calcium, la masse osseuse et le risque de fractures. Enfin, des associations ont également été observées entre certains de ces polymorphismes et le risque de cancer du côlon, du sein, de la prostate ou le risque de développer certaines maladies auto-immunes, dont le diabète de type 1. Cependant, les mécanismes sous-tendant ces associations demeurent obscurs car ces polymorphismes sont situés, pour la plupart, dans des régions introniques Leu262Gly (exon 7) 0 (40) Ostéocalcine Phe251Cys*** Polymorphismes du gène codant pour le VDR et “résistance” clinique à la vitamine D Lys45Glu (exon 2) 0 (40) H3 tains patients et n’est pas corrigée, même en cas de correction de l’hypocalcémie et du rachitisme par des apports massifs de vitamine D et de calcium. L’élucidation de la structure du VDR dans l’espace permet de mieux appréhender les mécanismes qui sont à l’origine de l’alopécie (figure 3). Ainsi, les mutations qui affectent les acides aminés au contact du ligand (hélices 5 et 12 et région β-turn principalement) sont associées aux résistances les plus sévères, alors que les patients qui les portent ne présentent pas d’alopécie. À l’inverse, les patients avec alopécie portent des mutations dans des régions du VDR situées à distance de la poche de liaison du ligand, dans le domaine de liaison du VDR à l’ADN ou dans des régions d’hétérodimérisation. De telles associations génotype/phénotype suggèrent que le VDR, même en l’absence de vitamine D, influence l’activité de facteurs impliqués dans le cycle du follicule pileux (7). H1 Syndromes de résistance aux hormones stéroïdes Arg391Ser Arg391Cys Trp286Arg*** C H12 Glu420Lys*** 1 H1 Sans alopécie His305Gln Avec alopécie *** Résistance sévère Figure 3. Mutations ponctuelles du VDR (domaine de liaison à l’hormone), sévérité de la résistance à la vitamine D et alopécie. dont la fonctionnalité est inconnue. La possibilité que ces polymorphismes soient en déséquilibre de liaison avec d’autres polymorphismes non encore étudiés est actuellement envisagée. D’autres polymorphismes affectent la taille du récepteur mais ne semblent pas en influencer l’activité, principalement FokI, dont l’absence du site de restriction (F/F) entraîne un raccourcissement de trois acides aminés de la partie N-terminale du récepteur. Plus intéressants sont les polymorphismes nouvellement identifiés sur la région régulatrice du gène VDR, car ils influencent l’activité transcriptionnelle de ce gène. Le premier est situé sur le site de fixation de Cdx2, un facteur de différenciation des cellules intestinales qui augmente l’expression du VDR dans ces cellules (9). Les deux autres sont situés en -1012 et -1521 sur le promoteur Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 3, mai/juin 2006 et n° 4, juillet/août 2006 principal du gène, mais les facteurs de régulation se liant à ces sites n’ont pas encore été identifiés (10, 11). Des associations génotype/phénotype ont été observées entre les variants sur ces trois sites de polymorphisme et des traits phénotypiques tels que masse osseuse, risque de fracture et taille dans des populations de personnes âgées ou d’adolescentes (9-11). Il est fort possible que d’autres sites clés de polymorphisme soient identifiés dans un proche avenir. Cependant, d’ores et déjà, il apparaît que les variations sur le gène VDR peuvent induire différents degrés de résistance à la vitamine D selon leur localisation. Ainsi, les mutations sur les parties codantes du gène VDR altèrent ce récepteur et sa fonctionnalité et induisent des résistances cliniques majeures à la vitamine D. Mais, à côté de ces mutations, des variations dans les régions régulatrices du gène VDR peuvent limiter l’expression de ce récepteur, d’où une plus grande susceptibilité à développer des signes cliniques de déficience en vitamine D chez les porteurs de variants défavorables. Références 1. 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Eight Worshop on Vitamin D Walter de Gruyter, New York, 1991 (abstract),pp 116-124. 29. Ritchie HH, Hugues MR, Thompson ET et al. An ochre mutation in the vitamin D receptor gene causes hereditary 1,25-dihydroxyvitamin D3resistant rickets in three families. Proc Natl Acad Sci USA 1989;86:9783-7. 30. Malloy PJ, Hochberg Z, Tiosano D et al. The molecular basis of hereditary 1,25-dihydroxyvitamin D3 resistant rickets in seven related families. J Clin Invest 1990;86:2071-9. 31. Malloy PJ, Zhu W, Bouillon R, Feldman D. A novel nonsense mutation in the ligand binding domain of the vitamin D receptor causes hereditary 1,25-dihydroxyvitamin D-resistant rickets. Mol Genet Metab 2002;77:314-8. 32. Whitfield GK, Selznick SH, Haussler CA et al. Vitamin D receptors from patients with resistance to 1,25-dihydroxyvitamin D3: point mutations confer reduced transactivation in response to ligand and impaired interaction with the retinoid X receptor heterodimeric pattern. 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Two mutations causing vitamin D resistant rickets: modelling on the basis of steroid hormone receptor DNA-binding domain crystal structures. Clin Endocrinol 1994;41:581-90. Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 3, mai/juin 2006 et n° 4, juillet/août 2006 aux hormones stéroïdes Syndromes de résistance 137 Auto-test 1. La résistance à la vitamine D par mutation du récepteur de la vitamine D est : a. fréquente b. rare c. exceptionnelle 2. Sa transmission est : a. dominante b. récessive c. liée à l’X d. autosomique 3. Cette résistance peut entraîner : a. un rachitisme avec hypocalcémie b. un rachitisme sans hypocalcémie c. une anémie d. des signes d’hyperexcitabilité neuromusculaire e. une alopécie f. un retard de croissance 5. des variants fréquents de l’ADN du VDR (polymorphismes) ont été associés dans la population générale à : a. une perte de masse osseuse b. une augmentation du risque de fractures c. une augmentation du risque de cancer du côlon d. une perte de cheveux Nouvelles de l’industrie “La nutrition en question” : Nestlé lance une seconde série de fiches d’information Pour satisfaire à la demande des professionnels de santé, soucieux de compléter leurs connaissances en nutrition, le département Nutrition de Nestlé met à la disposition du corps médical différents outils d’information : les dossiers Nestlé Nutrition, réalisés avec la contribution du centre de recherche du groupe alimentaire ; un site Internet dédié aux professionnels de santé (www.nutripro.nestle.fr), conçu pour fournir des informations immédiatement utilisables en pratique médicale ou paramédicale quotidienne ; un livret d’informations sur la composition nutritionnelle des produits Nestlé ; et enfin, depuis 2004, le coffret “La nutrition en question”, un outil d’aide à l’information des patients. “La nutrition en question” se présente sous forme de fiches, faciles à manier et à consulter, et a pour objectif d’aider le médecin à apporter une réponse précise et fiable aux questions, toujours plus nombreuses, posées par les patients dans le domaine de la nutrition et de l’alimentation. Le médecin 138 4. les mutations sur le gène codant pour le récepteur à la vitamine D entraînant un rachitisme vitaminorésistant : a. sont le plus souvent des mutations ponctuelles b. intéressent surtout le domaine de liaison à l’ADN c. sont surtout des mutations homozygotes 1. c. 2. b et d. 3. a, d, e, f. 4. a, c. 5. a, b, c. Syndromes de résistance aux hormones stéroïdes peut poser le coffret sur son bureau et garder les fiches à portée de main, la face tournée vers le patient étant totalement “neutre”. Comptant 50 fiches à sa sortie, “La nutrition en question” a été complété et en comporte à présent le double. Parmi les six grandes thématiques abordées, deux surtout ont donné lieu à de nouvelles questions. “Pathologie et nutrition” s’enrichit ainsi de 16 nouvelles fiches : plusieurs portent sur l’allergie (“Qu’est-ce que l’allergie à l’arachide ?” “Qu’est-ce que l’allergie à l’œuf ?” “Quelle est la diététique pour l’allergie alimentaire ?”…), d’autres concernent le traitement de la diarrhée aiguë du nourrisson, la diététique des patients sous anticoagulants, celle des patients souffrant de constipation ou d’insuffisance rénale chronique. Le thème “Aliments en question” compte pour sa part 13 nouvelles fiches, centrées sur des questions très variées : “Que signifient les labels de qualité alimentaire ?” “Quels sont les additifs alimentaires ?” “Quel est l’intérêt nutritionnel des algues ?” “Les édulcorants sont-ils dangereux ?”… Mais les autres thématiques ne sont pas en reste, avec 9 fiches supplémentaires Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 3, mai/juin 2006 et n° 4, juillet/août 2006 Communiqués publicitaires des conférences de presse, symposiums, manifestations, organisés par l’industrie pharmaceutique pour “À propos de repas” (“Qu’est-ce que le régime végétalien ?” “Qu’estce que le crudivorisme ?” “Qu’est-ce que le régime macrobiotique ?”…), 8 pour “Nutriments en question” (“Quel est le rôle du fluor ?” “Quel est le rôle de l’iode ?” “Qu’est-ce que les antioxydants ?”…) et 3 pour “Autour du poids” (“Quel est l’intérêt de l’IMC chez l’enfant ?” “Qu’est-ce que la diète protéinée ?” “Que penser des régimes low carb ?”). Seul le thème “Questions de femmes” reste inchangé. Chacune de ces questions reçoit une réponse à la fois concise et claire, pouvant être comprise par le patient. Si nécessaire, les fiches fournissent également des informations pratiques : adresses d’associations ou de fabricants de produits spéciaux, sites Internet, titres d’ouvrages conseillés, etc. Bien entendu, toutes les données tiennent compte des connaissances les plus actuelles et sont conformes aux consensus de la communauté scientifique. Les médecins peuvent se procurer le coffret “La nutrition en question” ou les fiches complémentaires en téléphonant au centre d’information Nutrition : 01 60 53 53 33. ML