Journal Identification = NRP Article Identification = 0343 Date: June 19, 2015 Time: 3:15 pm
REVUE DE NEUROPSYCHOLOGIE
NEUROSCIENCES COGNITIVES ET CLINIQUES
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Article de synthèse
Cette étude a motivé les auteurs à poursuivre leur
recherche dans le champ du vieillissement. Ils se sont
notamment intéressés à l’utilité que pouvaient avoir les
réminiscences dans le vieillissement réussi [14]. Ils ont
ainsi contrôlé les variables de personnalité des personnes
âgées incluses dans cette étude et ont mis en évidence
l’influence des réminiscences dans la prédiction de la
satisfaction de vie ou de la détresse psychologique. Ils
ont notamment identifié les réminiscences obsédantes,
celles d’évasion de la réalité et celles ayant une fonc-
tion de maintien d’intimité comme étant associées à une
détresse psychologique plus importante chez les personnes
âgées.
Malgré l’affluence d’études sur la technique de rémi-
niscences, ou thérapie par réminiscences, une revue
systématique de la base de données de la Cochrane
[15] retenait seulement cinq études randomisées contrô-
lées valides pour l’évaluation de cette technique chez les
personnes âgées atteintes d’un syndrome démentiel [16-
20]. Les auteurs concluaient que, bien que des effets sur
l’humeur, la cognition ou bien sur le fardeau de l’aidant
aient été retrouvés dans ces études ayant une méthodolo-
gie rigoureuse, il s’agissait toujours d’études sur des petits
échantillons et avec une approche, voire une définition,
différente de la réminiscence. La variabilité des types de
réminiscences et des résultats obtenus entre ces études
indique qu’il y aurait besoin de nouvelles recherches ran-
domisées contrôlées, dans un cadre théorique bien défini,
afin de tirer des conclusions davantage robustes.
Le même constat a été fait récemment par Westerhof
et Bohlmeijer [21], dans une revue de la littérature sur les
interventions de type «Life-review »comparées aux inter-
ventions fondées sur la réminiscence. Ils concluent à la
nécessité d’orienter les recherches selon les connaissances
actuelles sur les différentes fonctions des réminiscences et
ouvrent la voie vers un lien possible avec la mémoire auto-
biographique. En effet, les auteurs insistent sur l’importance
d’ouvrir les recherches sur la revue de vie et les rémi-
niscences vers la psychologie cognitive, en particulier les
travaux sur la mémoire autobiographique, afin d’utiliser
les méthodes expérimentales issues de ce champ. Selon
eux, les paradigmes d’étude de la psychologie cognitive
et les connaissances acquises sur la mémoire autobiogra-
phique permettraient d’avoir une meilleure compréhension
des processus cognitifs impliqués dans la remémoration de
souvenirs personnels et dans l’interprétation que l’individu
en a pendant les interventions de type «Life-review »ou
celles utilisant les réminiscences.
En 2006, une nouvelle taxonomie des réminiscences en
trois types a été proposée, selon leurs fonctions par rapport
au soi [22] :
–les fonctions positives se rapportant au soi : elles
regroupent les réminiscences intégratives (identité), les
réminiscences instrumentales (résolution de problème), et
aussi celles de préparation à la mort. Elles correspondent à
un effort d’adaptation positive face aux défis du présent et
du futur ainsi qu’une recherche de sens ;
–les fonctions négatives se rapportant au soi correspondent
au regain d’amertume, aux réminiscences d’évasion de la
réalité (réduction de l’ennui) et à celles qui servent au main-
tien de l’intimité avec les personnes proches disparues. Elles
convergent toutes les trois vers des ruminations mentales à
propos du passé (regrets, deuils) ;
–les fonctions pro-sociales regroupent les réminiscences
narratives (conversation) et instructives qui ont pour objectif
de créer et maintenir le lien social.
Plus récemment, Cappeliez [23] a établi une correspon-
dance entre la taxonomie faite par Watt et Wong et les huit
fonctions des réminiscences identifiées par Webster. À ce
résumé, nous avons inclus la nouvelle taxonomie de 2006
qui est synthétisée dans le tableau 2.
Applications cliniques
Par la suite, les différents types de réminiscences les
plus employés ont été étudiés dans différents échantillons
de la population, notamment chez les sujets dépressifs, les
sujets âgés, et aussi selon des traits de personnalité particu-
liers (introversion, extraversion, névrosisme, anxiété trait,
anxiété état...) [24-26]. Chez les sujets âgés, beaucoup
d’auteurs se sont intéressés au lien entre types de réminis-
cences et bien-être/qualité de vie. En 2007, Bohlmeijer et al.
[24] ont mené une méta-analyse afin de comparer l’effet de
la revue de vie de Butler [4] par rapport à la réminiscence sur
le bien-être des personnes âgées, selon différentes modalités
(individuel versus groupe) et selon différentes caractéris-
tiques de population (personnes vivant à domicile versus
en institution). Ils ont mis en évidence de meilleurs résultats
avec la revue de vie, de manière significative. Néanmoins,
leur méta-analyse a porté sur des études utilisant la réminis-
cence comme un concept large et sans la distinction faite
par la taxonomie de 2006. De plus, les résultats consta-
tés avec la revue de vie concernaient surtout les personnes
ayant des symptômes anxio-dépressifs sévères.
Une autre étude a été réalisée par O’Rourke et al. [25]
intégrant la taxonomie de 2006 dont l’objectif était de déter-
miner si les fonctions des réminiscences influenc¸aient le
bien-être ou si au contraire l’état de santé mentale affectait
le type de réminiscences auquel les adultes âgés avaient
recours. Dans cette étude, deux groupes d’âges étaient
comparés sur leur recours à certains types de réminiscences,
les sujets âgés de moins de 70 ans et ceux de plus de 70 ans.
L’échelle des fonctions des réminiscences a été administrée
ainsi que des échelles de qualité de vie (The Satisfaction
with Life Scale : SLS), de dépression (The Center for Epide-
miologic Studies – Depression Scale : CES-D) et d’anxiété
(The State Trait Anxiety Inventory : STAI ; seuls les 20 items
de l’anxiété-état ont été effectués). Les auteurs concluaient
à une association entre certaines fonctions des réminis-
cences et le bien-être. En effet, les analyses effectuées
retrouvaient une association entre les réminiscences posi-
tives en lien avec le soi, ou les réminiscences négatives avec
le soi et le bien-être 16 mois plus tard, dans le sens où les
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