Revue Intérêt des oméga-3 marins dans la prévention et le

Revue
Intérêt des oméga-3 marins
dans la prévention
et le traitement
du syndrome métabolique
J. Delarue, C. Corporeau, G. Alain
Laboratoire régional de nutrition humaine, CHU Cavale Blanche, 29200 Brest.
Faculté de médecine de Brest.
Fax : 02 98 34 78 82
Le syndrome métabolique constitue une entité qui regroupe chez le même individu plusieurs
anomalies métaboliques. Plusieurs définitions successives en ont été proposées. Il se caracté-
rise essentiellement par l’accroissement notable du risque cardiovasculaire. À côté de la perte
de poids (ou du maintien d’un poids normal) et de l’activité physique, principales mesures
démontrées efficaces, les acides gras polyinsaturés à longue chaîne n-3, essentiellement
contenus dans les aliments d’origine marine (poissons gras, huiles de poisson), ont une forte
potentialité pour sa prévention et son traitement. Les effets protecteurs cardiovasculaires des
omégas-3 marins ne seront pas abordés dans cette revue.
Mots clés :EPA, DHA, insulino-résistance, nutrition
Définitions
Nous ne rapporterons que les deux
définitions les plus récentes et qui sont
aujourd’hui les seules usitées : la défi-
nition dite ATPIII (Adult Treatment
Panel III) proposée en 2001 par le
NCEP (National Cholesterol Educa-
tion Program Expert Panel on Detec-
tion, Evaluation, and Treatment of
High Blood Cholesterol in Adults) [1],
et celle de l’IDF (International Diabe-
tes Federation) proposée en 2005 [2].
Le diagnostic selon la définition
dite ATPIII requiert pour le diagnostic
l’association d’au moins trois des cri-
tères suivants :
Obésité centrale (viscérale) :
tour de taille > 102 cm (hommes)
ou > 88 cm (femmes).
Hypertriglycéridémie : triglycé-
rides (TG) 1,7 mmol/L (1,50 g/L).
HDL cholestérol bas : < 1.03
mmol/L (0,40 g/L) (hommes)
ou < 1,29 mmol/L (0,50 g/L) (fem-
mes).
Élévation de la pression artérielle :
pression artérielle 135/85 mmHg ou
traitement de cette élévation.
Glycémie à jeun 6,1 mmol/L
(1,10 g/L).
Le diagnostic selon la définition de
l’IDF requiert comme critère obliga-
toire l’obésité viscérale plus au moins
deux autres critères :
Obésité centrale : tour de
taille 94 cm (hommes) ou 80 cm
(femmes).
Autres critères :
Hypertriglycéridémie : TG 1,7
mmol/L (1,50 g/L) ou bien traitement
spécifique de cette anomalie.
HDL cholestérol bas : < 1,03
mmol/L (0,40 g/L) (hommes)
ou < 1,29 mmol/L (0,50 g/L) (femmes),
ou bien traitement spécifique de cette
anomalie.
m
t
Tirés à part : J. Delarue
doi: 10.1684/met.2006.0037
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Élévation de la pression artérielle : pression artérielle
systolique 130 ou diastolique 85 mmHg ou HTA trai-
tée.
Glycémie à jeun 5,6 mmol/L (1,0 g/L) ou diabète
de type 2 connu. En cas de glycémie > 5,6 mmol/L, une
hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO) est for-
tement recommandée mais non obligatoire pour le dia-
gnostic de SM.
Il est à noter que dans la définition de l’IDF le critère
d’obésité centrale proposé est celui qui s’applique aux
populations blanches d’origine européenne quel que soit
leur pays de résidence. Ce critère est différent pour
d’autres ethnies (asiatiques en particulier).
Les principales différences entre la définition ATPIII et
IDF portent d’abord sur l’obésité centrale comme critère
obligatoire dans la définition de l’IDF ; ce choix a été fait
parce que l’obésité centrale, facilement estimée par le tour
de taille, est associée de manière très forte au risque
cardiovasculaire (CV) et aux autres critères du syndrome
métabolique (SM), insulino-résistance incluse qu’il n’est
pas aisé de mettre en évidence en pratique. De plus,
l’obésité centrale est probablement une étape précoce
dans la cascade d’événements qui constituent le SM. Le
seuil de tour de taille choisi par l’IDF a été revu à la baisse
par rapport à l’ATPIII. Ces seuils ont été choisis parce que
la plupart des données épidémiologiques montrent que le
risque associé aux facteurs de risque CV autres que l’obé-
sité centrale s’accroît à partir de ces seuils. Les autres
différences portent sur le niveau de la pression artérielle
qui est revu à la baisse pour la systolique. De plus, dans la
définition IDF une séparation claire est faite entre systoli-
que et diastolique, chacune des deux ayant un seuil pro-
pre, ce qui n’était pas le cas dans la définition ATPIII. Enfin,
le seuil de la glycémie à jeun a été revu à la baisse dans la
définition IDF pour intégrer la nouvelle définition de
l’intolérance au glucose de l’ADA (American Diabetes
Association).
Prévalence
La prévalence mondiale du SM selon la définition
ATPIII diffère selon les pays [3]. Aux États-Unis, après
ajustement pour l’âge, elle était estimée à 20,1 % dans
l’étude NHANES III (1988-1994) [4]. Notons que chez
l’enfant, elle est toujours aux États-Unis de 4,8 % pour la
tranche d’âge de7à11ans, de 3 % pour celle de
12-17 ans [5]. En France, la prévalence rapportée est de
10 % chez l’homme et 7 % chez la femme [6] et plus
récemment à 9 % chez l’homme [7]. Une comparaison a
été faite dans une population américaine de la prévalence
du SM selon la définition utilisée [8]. Avec la définition
ATPIII, la prévalence était de 33,7 % chez les hommes et
de 35,4 % chez les femmes ; avec la définition IDF, les
prévalences étaient respectivement de 39 et 39,9 %, soit
plus élevées ; 93 % des sujets étaient classés comme ayant
un SM en utilisant les deux définitions.
Physiopathologie
Celle-ci n’est pas univoque. Elle est résumée sur la
figure 1. Il n’y a pas actuellement d’arguments décisifs en
faveur d’une cause unique responsable de l’ensemble des
anomalies. Le stress psychologique, la suralimentation,
l’obésité viscérale et l’insulino-résistance font partie inté-
grante des mécanismes incriminés dans la genèse et l’évo-
lution du SM vers les complications CV et le diabète de
type 2. Le stress psychologique a un rôle important. Une
étude récente montre que le stress professionnel est un
facteur indépendant du risque de SM [9]. Le stress active
l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et le système
sympathique [10]. Le cortisol en excès favorise la différen-
ciation des adipocytes viscéraux, ce qui accroît la masse
adipeuse viscérale, stimule la néoglucogenèse et induit
une insulino-résistance hépatique. L’effet vasoconstricteur
des catécholamines favorise l’HTA. L’excès de catéchola-
mines associé à la moindre inhibition de la lipase
hormono-sensible du fait de l’insulino-résistance du tissu
adipeux favorise la lipolyse, en particulier du tissu adipeux
viscéral [11], avec libération d’acides gras libres (AGL) en
excès entraînant : a) stimulation de la néoglucogenèse et
insulino-résistance hépatique ; b) réestérification hépati-
que en triglycérides incorporés dans les VLDL qui sont
exportés en excès contribuant à l’hypertriglycéridémie ; c)
diminution de l’extraction hépatique de l’insuline, ce qui
accroît l’hyperinsulinémie déjà induite par l’insulino-
résistance ; d) stockage ectopique de triglycérides (pan-
créas, muscle, foie) altérant l’insulino-sécrétion et la voie
de signalisation de l’insuline dans le muscle (lipotoxicité).
L’insulino-résistance induit aussi une moindre activa-
tion de la lipoprotéine lipase, d’où un moindre catabo-
lisme des VLDL qui favorise les échanges avec les HDL et
les LDL conduisant à la génération de LDL3 athérogènes et
à une diminution du HDL cholestérol.
Lipotoxicité et glucotoxicité (qui accompagnent l’élé-
vation même modérée de la glycémie) se conjuguent pour
induire un stress oxydant qui participe à la dysfonction
endothéliale [12-16]. Celle-ci favorise les complications
CV (HTA et athérome). Enfin, insulino-résistance, hyperin-
sulinisme, concentrations excessives de lipides circulants
induisent des anomalies du métabolisme lipidique des
cellules musculaires lisses vasculaires contribuant à
l’athérome.
Une partie des altérations métaboliques du SM s’amé-
liore rapidement après restriction calorique avant les
modifications de composition corporelle, montrant que la
suralimentation per se a une action sur ces anomalies
métaboliques [17].
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Effets des oméga-3 marins
sur l’hypertryglycéridémie,
l’insulino-résistance, l’intolérance
au glucose et l’obésité viscérale
Études dans les modèles animaux
expérimentaux
Effets sur l’hypertriglycéridémie et la stéatose hépatique
Ils ont été mis en évidence dans deux types de modèles
chez le rat ou la souris : le régime riche en saccharose ou
en fructose d’une part, et le régime hyperlipidique d’autre
part [18]. Le régime riche en saccharose ou en fructose
reproduit les différentes composantes du SM : hypertrigly-
céridémie, augmentation des AGL, insulino-résistance du
foie, du muscle et du tissu adipeux, obésité viscérale,
accumulation hépatique, pancréatique et musculaire de
TG, et enfin hypertension. Le régime hyperlipidique induit
aussi une hypertriglycéridémie, une stéatose hépatique et
musculaire et une insulino-résistance généralisée.
Au niveau du foie, l’introduction d’huile de poisson
dans le régime diminue l’hypertriglycéridémie, la produc-
tion de VLDL, la stéatose et l’insulino-résistance [19-22].
La diminution de la production des TG et de la stéatose
résulte à la fois d’une diminution de la lipogenèse de novo
(synthèse de palmitate à partir de l’acétyl CoA généré par
la glycolyse intrahépatique), d’un accroissement de l’oxy-
dation hépatique des acides gras et d’une diminution de la
synthèse et de l’exportation des VLDL. Les oméga-3
marins diminuent l’expression des gènes de la lipogenèse
de novo (acétyl CoA carboxylase, acides gras synthase,
protéine S14, D9-désaturase, enzyme malique, ATP citrate
lyase), et de la glycolyse (L-pyruvate kinase) qui génère de
l’acétyl CoA précurseur de la lipogenèse de novo [23].
L’augmentation de l’expression et de l’activité des enzy-
mes de l’oxydation intrahépatique des acides gras : carni-
tine palmitoyl transférase 1 et 2 et oxydase des acides gras
réoriente les acides gras vers l’oxydation aux dépens de
leur réestérification en TG. De plus, les oméga-3 marins
diminuent la production des VLDL en diminuant leur
assemblage et leur sécrétion [24, 25]. Le contrôle de la
sécrétion par les oméga-3 marins résulterait d’une inhibi-
tion de la synthèse d’ApoB100 et d’ApoCIII. Les effets des
oméga-3 marins sur l’expression des gènes du métabo-
lisme lipidique hépatique sont directs (ne nécessitent pas
stress
AGL
AGL AGL
insuline
Hypothalamus
Pituitary gland
Pineal gland
cortisol
caté cholamines
vasoconstriction
Dysfonction endothéliale
Insulino-résistance
Insulino-résistance
Insulino-résistance
Captage
glucose
Captage
glucose
PHG
VLDL
Medulla
Cortex
Figure 1. Physiopathologie du syndrome métabolique
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leur métabolisme en eicosanoïdes) et transcriptionnels,
faisant intervenir trois facteurs de transcription auxquels
ils se lient : PPARa, LXR et SREBP-1c [23].
Effets sur l’adiposité viscérale
L’introduction d’huile de poisson dans la fraction lipi-
dique, en substitution d’une partie des autres acides gras,
diminue l’excès d’adiposité viscérale, voire la corrige
complètement chez le rat soumis à un régime riche en
saccharose ou hyperlipidique [26-29]. Cet effet résulte de
plusieurs mécanismes : moindre accumulation de TG
dans le tissu adipeux viscéral, due à la fois à une diminu-
tion de leur synthèse et à un accroissement de la lipolyse,
et augmentation de l’oxydation des acides gras. L’effet
inhibiteur sur la lipogenèse résulte, comme dans le foie,
d’une inhibition de l’expression des enzymes de la lipo-
genèse (acides gras synthase en particulier). Cet effet anti-
lipogénique ne s’exerce que sur le tissu adipeux viscéral
[30]. À la différence du foie, l’effet inhibiteur de la lipoge-
nèse par les AGPI-LC n-3 n’est pas direct mais met en jeu
la production d’eicosanoïdes dérivés de leur métabolisme
par les cyclo-oxygénases [31].
Un autre mécanisme est l’induction de l’expression et
de l’activité de la phosphoénolpyruvate carboxykinase
cytosolique (PEPCK-C). Cette enzyme synthétise du glycé-
rol 3-phosphate à partir du pyruvate, du lactate et de
certains acides aminés (glycéronéogenèse). Le glycérol
3-phosphate permet la réestérification in situ des AGL. La
libération nette des AGL par le tissu adipeux (lipolyse
nette) dépend non seulement de l’hydrolyse des TG stoc-
kés mais aussi de la réestérification in situ d’une partie des
AGL libérés. Lorsque l’activité de la PEPCK-C est dimi-
nuée, la réestérification des AGL est moins importante et
leur libération (lipolyse nette) est accrue. Le DHA inhibe
l’expression de la PEPCK-C dans des lignées d’adipocytes
murins [32]. S’il en est de même in vivo, ce pourrait être
un mécanisme d’augmentation de lipolyse.
Enfin, les oméga-3 marins augmentent dans le tissu
adipeux viscéral l’expression de la CPT1 et des enzymes
de la bêta-oxydation des acides gras [28].
Effets sur l’insulino-résistance
Le régime riche en saccharose ou hyperlipidique
induit une insulino-résistance chez le rat [33-35]. L’intro-
duction d’huile de poisson en substitution d’une partie des
autres types d’acides gras dans ces deux régimes prévient
et parfois corrige l’insulino-résistance [18-20, 22, 26, 27,
36-38]. Les mécanismes de cet effet restent encore mal
compris au cours du régime riche en saccharose. L’effet
hypolipidémiant tissulaire pourrait jouer un rôle. En effet,
l’introduction d’huile de poisson s’accompagne d’une
diminution ou d’une normalisation du contenu en TG
hépatiques et musculaires, ce qui pourrait lever la lipo-
toxicité. Il existe en effet une forte corrélation entre
l’insulino-résistance hépatique et musculaire et le contenu
en TG respectivement dans le foie et le muscle de rats
soumis à un régime riche en saccharose. Les oméga-3
marins pourraient aussi agir en levant l’altération de la
signalisation de l’insuline induite par le saccharose dans le
foie [39], mais l’on manque de données pour étayer cette
hypothèse. Un autre mécanisme pourrait être un effet via
la voie de signalisation de l’adiponectine et de la leptine.
En effet, le régime riche en saccharose induit une baisse
des concentrations circulantes d’adiponectine (adipokine
insulino-sensibilisatrice) et de son expression dans le tissu
adipeux, corrigée par l’introduction d’huile de poisson
[22].
Les mécanismes des effets de l’huile de poisson sont un
peu plus clairs chez le rat soumis au régime hyperlipidi-
que. Un régime très hyperlipidique (60 % apport énergé-
tique) à base d’huile de maïs induit une altération marquée
de la signalisation de l’insuline dans le foie, le muscle et le
TA [38]. Cette altération se caractérise par une diminution
de 50 % de l’activité de la phosphatidyl inositol 3’ kinase
(PI3K) dans le foie et le muscle et de son expression dans le
TA d’une part et par une diminution de 50 % du nombre
de transporteurs GLUT4 dans le muscle et de son expres-
sion dans le TA d’autre part. La substitution d’HP (1/3)
dans ce régime hyperlipidique prévient ces deux anoma-
lies dans le muscle et le tissu adipeux [38].
Il est à noter par ailleurs que la dose d’oméga-3 marins
joue un rôle important tissu-spécifique sur la signalisation
de l’insuline. En effet, un apport de 2,2 % d’huile de
poisson dans un régime normolipidique chez le rat induit
une baisse de l’activité de la PI3 kinase dans le foie et le
muscle, mais au contraire une forte augmentation dans le
tissu adipeux par comparaison aux rats soumis à un
régime à base d’un mélange d’huile d’arachide-colza
riche en acides gras mono-insaturés et polyinsaturés n-6
[40]. Cela illustre aussi la nécessité de poursuivre des
études mécanistiques portant en particulier sur les effets
de différents niveaux d’apport en oméga marins.
Effets de l’huile de poisson chez l’homme
Études épidémiologiques
Les études épidémiologiques conduites dans les
années 70 chez les Inuits du Groenland, les populations
indigènes de l’Alaska et d’autres régions arctiques et
subarctiques ont mis en évidence une bien moindre inci-
dence du diabète de type 2 que chez les Danois, les
résidents des États-Unis, et d’autres populations [41-44].
De plus, le diabète de type 2 avait une moindre préva-
lence chez les Japonais insulaires que chez les Japonais
continentaux [45]. La moindre incidence du diabète de
type 2 a été attribuée principalement à la consommation
d’aliments riches en oméga-3 marins. Au cours des 15
dernières années, l’incidence du diabète de type 2 a
augmenté rapidement chez ces populations indigènes et
migrantes [46, 47]. Cet accroissement de l’incidence a été
attribué à une alimentation différente de l’alimentation
traditionnelle, à un changement de mode de vie et à un
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changement de répartition des acides gras [48]. Par
ailleurs, il existe chez les Esquimaux de l’Alaska une forte
relation entre la teneur en 20:5 n-3 (EPA) et 22:6 n-3
(DHA) des acides gras plasmatiques d’une part et la gly-
cémie à jeun et à 2 h (après HGPO), l’index de sensibilité
à l’insuline, l’insulinémie à jeun et à 2 h post-HGPO, le
taux de triglycérides et la pression artérielle d’autre part
[49]. Plus récemment, la réintroduction d’une alimenta-
tion traditionnelle riche en oméga-3 marins dans une
population d’Esquimaux de l’Alaska a permis une amélio-
ration très significative de la tolérance au glucose chez
60 % d’entre eux [50], confirmant la participation de
l’alimentation traditionnelle riche en oméga-3 à la moin-
dre incidence du diabète de type 2 dans ces populations.
Études physiopathologiques
Effets sur la sensibilité à l’insuline chez l’homme sain
Il existe peu de travaux étudiant l’effet des oméga-3
marins sur la sensibilité à l’insuline chez l’homme sain.
Nous avons observé que la supplémentation de l’alimen-
tation avec 6 g/j d’HP (1,8 g/j EPA + DHA) pendant
3 semaines induisait une baisse de 40 % de la réponse
insulinique au cours d’une charge en glucose sans modi-
fication de la réponse glycémique et sans modification de
l’utilisation totale de glucose ; le maintien de la même
réponse glycémique et de la même utilisation du glucose
pour une réponse insulinémique moindre suggérait très
fortement une augmentation de la sensibilité à l’insuline
[51]. De plus, nous avons montré que le même niveau
d’apport en huile de poisson prévenait partiellement
l’insulino-résistance induite expérimentalement par un
glucocorticoïde, la dexamethasone [52].
Effets sur les triglycérides et la production de VLDL
Faeh et al. [53] ont étudié l’effet d’un apport de 7,2 g
d’huile de poisson (1,2 g EPA + 0,8 g DHA) pendant 28 j
chez des volontaires sains soumis à un régime fortement
enrichi en fructose (suralimentation de 25 % de l’apport
énergétique sous forme d’une solution de fructose pen-
dant 6 j avant les explorations). Ils observaient une
insulino-résistance hépatique, une augmentation des TG
plasmatiques et de la lipogenèse de novo induites par le
fructose. L’huile de poisson ne prévenait pas l’insulino-
résistance hépatique mais l’élévation des TG plasmatiques
était moindre. La lipogenèse de novo tendait à être dimi-
nuée (non significatif).
Chez des patients avec obésité viscérale et hypertrigly-
céridémiques, un apport relativement élevé de 3,36 g/j
d’EPA + DHA diminue significativement l’hypertriglycéri-
démie et la production de VLDL [54-56]. L’effet sur
l’hypertriglycéridémie est additif de celui de l’atorvasta-
tine. Sur le plan physiopathologique, l’effet des oméga-3
est complémentaire de celui de l’atorvastatine. En effet,
l’atorvastatine diminue les TG plasmatiques en augmen-
tant le catabolisme des VLDL alors que les oméga-3 inhi-
bent leur production [56].
Oméga-3 marins et stress psychologique
Les oméga-3 marins, en particulier le DHA [57-61],
abolissent les manifestations psychologiques (agressivité)
et l’élévation de la noradrénaline liées au stress chronique
(préparation prolongée d’examens universitaires). Cet
effet est observé pour un apport de 2 mois de seulement de
0,44 g/j EPA + 0,32 g/j DHA [57]. De plus, un apport de
2 g/j d’EPA + DHA abolit la réponse cortico-adrénergique
au stress mental aigu chez le sujet normal [62]. Une étude
chez le rat [63] suggère que le DHA pourrait avoir un effet
antistress en stimulant le récepteur GABA(A).
Oméga-3 marins et fonction endothéliale
Les oméga-3 marins diminuent l’expression des molé-
cules d’activation de la fonction endothéliale [64, 65] et
améliorent la relaxation artérielle chez des patients hyper-
triglycéridémiques (1,8 g EPA pendant 3 mois) [66, 67] ou
hypertendus [68].
Oméga-3 marins et stress oxydant
La consommation journalière de poisson (équivalant à
3,6 g/j d’EPA + DHA) diminue le stress oxydant des
patients dyslipidémiques [69].
Oméga-3 marins et athérosclérose
Les oméga-3 marins ralentissent le développement de
l’athérome chez l’homme [70, 71]. De plus, ils sont rapi-
dement incorporés dans les lipides des plaques d’athé-
rome, ce qui entraîne la stabilisation de la plaque [72].
Comme indiqué dans l’introduction, les effets sur le risque
CV ne seront pas abordés dans cette revue.
Oméga-3 marins et HTA
Une méta-analyse récente [73] a colligé 105 essais
randomisés avec durée d’étude d’au moins 8 semaines
chez 6 805 sujets avec pression artérielle d’au moins
140/85. Le but était de déterminer les facteurs liés au
mode de vie susceptibles d’affecter favorablement la pres-
sion artérielle chez des sujets traités ou non traités. Parmi
les 105 essais, huit essais comportaient une supplémenta-
tion de 0,1 à 17 g d’huile de poisson. La méta-analyse
conclut que la supplémentation en huile de poisson
s’accompagne d’une diminution de la pression artérielle,
de même que la réduction de la consommation de sel et
d’alcool et l’activité physique. Cependant, la plupart des
études utilisent des doses très élevées d’EPA et DHA
supérieures aux 2 g/j jugés comme non délétères par
l’Afssa. Certaines des études sont négatives. Un bénéfice
réel des oméga-3 au cours de l’HTA reste à confirmer.
Conclusion
Les oméga-3 marins ont une potentialité indiscutable
dans la prévention et le traitement du syndrome métabo-
lique par leur effet insulino-sensibilisateur, leur effet
modulateur du stress, leur effet hypotriglycéridémiant,
leur capacité à améliorer la dysfonction endothéliale, le
mt, vol. 12, n° 5-6, septembre-décembre 2006 323
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