111
manque d’héroïne sans intention de substitu-
tion, incarcération, hospitalisation…) sans
que l’on connaisse la part de chacune de ces
situations. Il faut cependant garder à l’esprit
que ces patients représentent une part impor-
tante des consommateurs de buprénorphine
haut dosage retrouvés dans plusieurs études
( e nviron 25 %) ( 1 1 - 1 3 ) .
•Le groupe des u t i l i s a t e u r s “déviants” ou
i r r é g u l i e r sest celui qui rassemble les utilisa-
teurs les plus suspects de détournement et de
mésusage : la délivrance de fortes doses de
bu p r é n o rphine haut dosage et la consultation
de nombreux médecins font suspecter notam-
ment un recours important à la poly p r e s c r i p -
tion. Ce groupe est minoritaire (bien que les
d é f initions varient beaucoup selon les auteurs)
p a rmi les utilisateurs de bu p r é n o rphine haut
dosage. Les quantités totales obtenues par ces
utilisateurs sont loin d’être négligeables. Il est
p o s s i b le qu’une partie de ces utilisateurs ne
soient, en fait, pas réellement des patients,
mais uniquement des vendeurs de bu p r é n o r -
phine haut dosage sur le marché de d e a l .
Les influences de ces trois groupes sur les
posologies m oyennes calculées par les études
d’utilisation ne sont absolument pas compa-
r a bles : les groupes “occasionnels” et “dé-
viants” sont sous-représentés ou soumis à un
biais maximum dans les études déclarative s .
Si l’on interr oge les prescripteurs, les patients
du groupe déviants ne présenteront pas néces-
sairement de doses prescrites anorm a l e m e n t
é l e vées obtenues in fine par le recours à la
p o ly p r e s c r i p t i o n .
L’étude des doses délivrées moyennes fon-
dées sur les données de l’assurance maladie
peut également prêter à confusion si l’on s’en
tient à elles : les patients occasionnels qui font
des interruptions de traitement import a n t e s
p e u v ent contribuer à diminuer le chiffre de la
dose délivrée moyenne tandis que les patients
“déviants” la feront peu augmenter en raison
de leur fa i ble eff e c t i f .
La répartition réelle des utilisateurs de bu p r é -
n o rphine haut dosage parmi ces trois gr o u p e s
n’est pas consensuelle. Elle dépend des défi-
nitions retenues, tous les utilisateurs du
groupe “déviants” ne détournant pas forcé-
ment le produit. Le constat de doses
m oyennes aux alentours de 8 mg par jour
(qu’elles soient consommées, délivrées ou
prescrites, obtenues par enquête déclarative
ou à partir de bases de données) ne doit donc
pas être interprété comme une preuve de la
bonne observance des traitements par bu p r é -
n o rphine haut dosage dans la population : la
dose moyenne est un indicateur caractérisant
essentiellement le comportement du gr o u p e
r é g u l i e r. Il est peu sensible à l’influence des
mésusages et des détournements qui ne
c o n c e rnent qu’une fa i ble part des utilisateurs
de bu p r é n o rphine haut dosage.
En conclusion
La p o s o l og i e quotidienne n’est pas une
notion évidente, notamment en ce qui concer-
ne les traitements susceptibles de détourn e-
ments. Lorsqu’elles rapportent des résultats en
t e r mes de posologies de traitement, les études
sur la bu p r é n o rphine haut dosage devraient les
a s s o rtir d’une définition rigoureuse de celle s
qu’ils ont utilisées (prescrite, déliv r é e ,
consommée), d’une description précise des
méthodes employées pour leur estimation et
d’une discussion des limites inhérentes à ces
méthodes. Si la posologie de 8 mg par jour a
été récemment confi rmée au niveau national
pour la quantité délivrée aux patients, c’est en
fait la notion même de posologie m oye n n e
(impliquant une population homogène) qui
doit être remise en question.
Références bibliographiques
1 . Emmanuelli J. Contribution à l'évaluation de la
politique de réduction des risques: le système SIA-
MOIS. Bull Epidemiol Annu 1998;2:175-8.
2 . Claroux-Bellocq D, De Bailliencourt S, Saint-
Jean F et al. Les traitements de substitution aux
opiacés en France métropolitaine en 2000: les
données du régime général de l'assurance mala-
die. Revue Médicale de l'Assurance Maladie
2003; 34(2):93-102.
3 . La polyprescription (consultation de plusieurs
médecins sur une même période de temps) permet
au patient d’obtenir une dose supérieure à la dose
prescrite par chacun des médecins. La polypres-
cription devrait donc être distinguée du nomadis-
me médical (consultation de plusieurs médecins
sur des périodes de temps successives) qui ne per-
met pas d’obtenir une dose supérieure à la dose
prescrite (d’après OFDT 1999 : Drogues et
dépendances: Indicateurs et tendances, édition
1999. Paris, Observatoire français des drogues et
des toxicomanies) Les deux termes sont cependant
souvent confondus dans la littérature.
4 . Thirion X, Micallef J, Barrau K et al. Recent evo-
lution in opiate dependence in France during
generalisation of maintenance treatments. Drug
Alcohol Depend 2001;61(3):281-5.
5 . AIDES. Attentes des usagers de drogue concer-
nant les traitements de substitution: expérience,
satisfaction, effets recherchés, effets redoutés.
Calderon C, Soletti J, Gaigi H, Gui-chard A, Lert
F. Paris: AIDES 2002:71 p.
6 . Arnold-Richez F, Parquet PJ, Daulouède JP,
Cattan L. Buprénorphine haut dosage, l'âge de
raison. Le Courrier des addictions 2003;5(3):
1 2 1 - 3 .
7 . Fhima A, Henrion R, Lowenstein W, Charpak
Y. (Suivi à 2 ans d'une cohorte de patients dépen-
dants aux opiacés traités par buprénorphine haut
dosage (Subutex®). Résul-tats de l'étude SPESUB.
Ann Med Interne (Paris) 2001;152,suppl. 3:IS26-
3 6 .
8 . Fumeau B, Malinvaud F, Mattern B et al.
S u b u t e x ®: attention aux patients nomades et aux
coprescriptions de benzodiazépines ! Rev Prat
Med Gen 2000; 517:2133-7.
9 . Pradel V. Polyprescription de buprénorphine
haut dosage (Subutex®) dans les Bouches-du-
Rhône: les doses prescrites sont-elles respectées?
Mémoire
de DEA "
Epidémiologie et Intervention
en Santé Publique". Université Victor Segalen,
Bordeaux 2, 2002.
1 0 . Llau ME, Lapeyre-Mestre M, Plas L et al.
Forged medical prescriptions in a community
pharmacy network in Midi-Pyrenees area: assess-
ment of a falsification ratio. Eur J Clin Pharmacol
2002;57 (12):911 - 2 .
1 1 . Pradel V, Thirion X, Ronfle E et al. A s s e s s m e n t
of doctor-shopping for high dosage buprenorphi-
ne maintenance treatment in a French region:
development of a new method for prescription
database. Pharmacoepide-miol Drug Saf, sous
presse, publié en ligne le 15 sept. 2003.
1 2 . Thirion X, Lapierre V, Micallef J et al.
Buprenorphine prescription by general practitio-
ners in a French region. Drug Alcohol Depend
2 0 0 2 ; 6 5 ( 2 ) : 1 9 7 - 2 0 4 .
1 3 . Lapeyre-Mestre M, Llau ME, Gony M et al.
Opiate maintenance with buprenorphine in ambu-
latory care: a 24-week follow-up study of new
users. Drug Alcohol Depend 2003;72(3):
297-303.
Les risques de la ponction
biopsie hépatique
La R e vue Pre s c ri republie une synthèse collective des travaux réalisés sur les
risques de cet examen diagnostique ou pronostique inv a s i f , i n c o n t o u r n a b l e
dans un certain nombre de cas d’hépatites C : des décès ont été rap p o r-
tés (4 pour 10 000), principalement dus à des hémorragies intra-périto-
n é a l e s , plus souvent en cas de lésions hépatiques focales (tumeur maligne).
Les complications graves (hémorragie intra-péritonéale, p e r f o r a tion d’un
a u t r e organe, s e p t i c é m i e ,c o l l ap s u s ) , s u r viennent au cours de 4 biopsies
pour 1 000 env i r o n , le plus souvent dans les 2 à 3 heures qui suivent la
p o n c t i o n . La douleur, plutôt d’intensité modérée, est fréquente puisqu’elle
s u rvient dans un tiers des cas.
R e vue Pre s c ri re Juin 2004;24,251:434-6.
F.A.R.