Juillet Août 2016

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Cross asset
investment
strategy
Recherche, Stratégie et Analyse
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MENSUEL
Juillet/Août 2016
Allocation d’actifs
Brexit :
l’onde de choc
Devises émergentes :
le poids du renminbi
Marché immobilier
chinois
Marché du travail
en zone euro
Actions :
perspectives de bénéfices
Marché immobilier
japonais
Secteur de la construction
américaine
Achevé de rédiger le 8 juillet 2016
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
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Juillet-Août 2016
Sommaire
Repères
Allocation d’actifs : stratégies d’investissement d’Amundi
Le Post-Brexit
en quelques questions — réponses
Page 4
Après 43 ans d’appartenance à l’Union européenne, le Royaume-Uni a donc décidé de
se retirer par voie référendaire. L’objet de cet article est de se pencher sur les impacts
politiques et économiques d’une part, et sur les impacts sur les marchés financiers et les
allocations d’actifs d’autre part. Il répond aux principales préoccupations actuelles.
Facteurs de risque
Page 16
Contexte macroéconomique
Page 21
Prévisions macroéconomiques et financières
Page 22
Brexit
1 Brexit : vers une récession au Royaume-Uni et un
tassement de la croissance en zone euro
Page 23
Le vote du Brexit est une immense source d’incertitude. L’absence totale de visibilité va
inciter les acteurs économiques à différer leurs projets ou décisions d’achat. Le « choc
d’incertitude » peut ainsi faire tomber l’économie britannique en récession tandis que le
ralentissement de la zone euro devrait rester modéré. Nous abaissons nos prévisions de
croissance en Europe.
> FOCUS > Incertitude et croissance : que sait-on ?
Chine
2 Le renminbi, nouvelle pierre angulaire
des devises émergentes
Page 26
Les réformes monétaires adoptées en 2015 par les autorités chinoises ont fait prendre à
l’évolution du renminbi une importance inédite sur le marché des changes. Le nouveau
régime de change chinois a fait entrer le marché des changes dans un nouveau paradigme.
3 Le marché immobilier chinois
est-il en situation de bulle ?
Page 30
L’état du secteur immobilier chinois détermine les perspectives de l’économie du pays
et a donc des impacts sur l’économie mondiale. Compte tenu du déstockage massif de
biens observé au cours de l’année écoulée, la bulle commence vraiment à se dégonfler.
Toutefois, les prix des terrains sont en forte hausse dans certaines villes et régions, et c’est
bien ce facteur qui pourrait être à l’origine d’une bulle immobilière.
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Juillet-Août 2016
Zone euro
4 Zone euro, le marché du travail s’améliore sûrement…
et un peu moins lentement
Page 37
Contrairement au PIB, les grands indicateurs du marché du travail dela zone euro sont
encore loin d’avoir retrouvé leurs niveaux d’avant crise. Pour autant, la diffusion de la
reprise économique au marché de l’emploi s’opère tout de même, avec de notables signes
d’accélération au cours des derniers trimestres.
Actions
5 Les bénéfices vont-ils retrouver le chemin
de la croissance l’an prochain ?
Page 40
Les marchés d’actions ont été pris de court par le Brexit. Les valorisations ont parfois
nettement chuté mais ceci est rarement un motif d’achat suffisant. L’article examine la
crédibilité des perspectives bénéficiaires, selon le consensus. À cet égard, l’examen des
contributions sectorielles de 2015 à 2018 — très déséquilibrées et plus ou moins visibles
— s’avère fort instructif…
Japon
6 Immobilier japonais et investisseurs :
une relation passionnelle mais instable
Page 43
Dans un environnement où les opportunités d’investissement s’amenuisent, le secteur de
l’immobilier est à prendre en considération car il propose un haut niveau de dividendes
et le marché a crû significativement. Alors que l’immobilier de bureau a bénéficié de la
croissance économique des dernières années, les biens servant à l’entreposage en ont
bénéficié plus récemment en raison de nouveaux besoins des prestataires de services
logistiques.
Éclairage sectoriel
7 Les perspectives de la construction américaine
restent favorables
Page 46
Faisant suite à la crise immobilière de 2007-2009, le secteur de la construction américain
vient de connaître quatre années de croissance relativement soutenue. Aujourd’hui, dans
un contexte économique mondial toujours difficile, on peut légitimement s’interroger sur la
poursuite de ce rebond qui a été un des facteurs de croissance des résultats des grands
groupes de matériaux de construction.
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Juillet-Août 2016
Achevé de rédiger le 28 juin 2016
Allocation d’actifs : stratégies d’investissement d’Amundi
Le Post-Brexit
en quelques questions — réponses
PHILIPPE ITHURBIDE, Directeur Recherche, Stratégie et Analyse
Après 43 ans d’appartenance à l’Union européenne (UE), le Royaume-Uni (RU)
a donc décidé de se retirer par voie référendaire.
L’impact de marché a été important : en l’espace d’une semaine (donc en date
du 30 juin au matin), et suite au référendum britannique), le GBP aura perdu
contre EUR près de 8 % (-12 % depuis le début de l’année). Dans le même
temps, les actions européennes ont perdu 5 % (Eurostoxx) et les valeurs
refuges comme les Bunds ou les USTreasuries se sont nettement appréciées :
le taux 10 ans US et le 10 ans Bund sont désormais respectivement à 1,50 %
(-19pb) et -0,12 % (-18pb). Les obligations d’entreprises ont vu leur spread de
crédit se dégrader, mais l’effet spread a été au moins partiellement compensé
par l’effet-taux. Les valeurs bancaires (actions et produits de dette) ont en
revanche fortement chuté (-12 % par exemple pour l’indice MSCI des valeurs
financières de l’UEM). Quant aux spreads souverains, l’élargissement a été
contenu grâce au QE de la BCE : le spread italien est quasiment revenu sur
son niveau d’avant Brexit (+ 13pb, soit 150 pb au-dessus du 10 ans allemand),
tandis que le spread espagnol s’est même resserré (de 5 pb) depuis le
référendum (à 138pb).
Il est utile de se pencher sur les impacts politiques et économiques d’une part, et
sur les impacts sur les marchés financiers et les allocations d’actifs d’autre part.
L’objet de cette note est de répondre aux principales préoccupations actuelles.
QUESTION # 1
Le Royaume-Uni peut-il rester dans l’Union européenne
malgré l’adoption du Brexit par voie référendaire ?
QUESTION # 2
Peut-il y avoir un second référendum ?
QUESTION # 3
Une pétition peut-elle suffire à renverser le processus ?
QUESTION # 4
Quelle peut (doit) être la réponse des pays de l’Union
européenne ?
QUESTION # 5
Les négociations à venir entre le Royaume-Uni et l’Union
européenne vont-elles être déterminantes dans l’impact
économique du Brexit sur le Royaume-Uni ?
QUESTION # 6
Quels sont les impacts politiques du Brexit sur le
Royaume-Uni ?
QUESTION # 7
Quels sont les impacts économiques directs du Brexit sur
l’Union européenne ?
QUESTION # 8
Le Brexit peut-il provoquer à lui seul un ralentissement de
l’économie mondiale ?
QUESTION # 9
Le Brexit met-il en danger les systèmes bancaires
de l’Europe continentale ?
QUESTION # 10
Le Brexit aura-t-il des conséquences pour la place
financière de Londres ?
QUESTION # 11
Doit-on craindre des référendums en cascade en Europe ?
QUESTION # 12
Le Brexit conforte-t-il la poursuite de politiques monétaires
accommodantes ?
QUESTION # 13
Le Brexit confor te-t-il l’environnement de taux bas
et la recherche de rendement ?
4
L’essentiel
Après 43 ans d’appartenance à
l’Union européenne, le Royaume-Uni
a donc décidé de se retirer par voie
référendaire. L’objet de cet article
est de se pencher sur les impacts
politiques et économiques d’une part,
et sur les impacts sur les marchés
financiers et les allocations d’actifs
d’autre part. Il répond aux principales
préoccupations actuelles.
Notre scénario central est i) que le RU va
déclencher l’article 50 et entamera donc
les négociations de sortie avec l’UE, ii)
qu’une pétition n’est pas suffisante pour
annuler le scrutin, iii) qu’il n’y aura pas de
second référendum. Les dommages sur
l’économie européenne sont limités (sans
doute -0,3 % de PIB en moins étalés sur
deux ans), ce qui ne sera sans doute pas
le cas du RU : l’économie britannique va
connaître vraisemblablement une période
de récession, qui sera plus forte si les
négociations finales débouchent sur des
accords restrictifs : la perte du passeport
européen, la fin des accords commerciaux
privilégiés sont notamment deux aspects
majeurs. Sur le plan politique, les dommages
sont importants à court terme au RU :
le futur premier ministre conservateur
sera-t-il pro-Brexit ou anti-Brexit ? Rien
n’est moins sûr à ce stade. Pour l’UE, la
gestion de la sortie du RU, les dossiers sur
l’immigration, sur la croissance et l’emploi
sont les thèmes majeurs qui montreront (ou
pas) la fermeté et la cohésion des 27 pays
restants. Sur le plan financier, on retiendra
essentiellement le stress qui régnait déjà
sur les banques (taux négatifs, coût du
capital, difficultés à discriminer banques et
systèmes bancaires), un stress que le Brexit
a amplifi é… Car une chose est sûre, c’est
que les banques centrales vont conserver
(Fed notamment) voire amplifi er (BCE, BoJ,
BoE…) le caractère accommodant de leur
politique monétaire.
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Juillet-Août 2016
QUESTION # 1 Le RU peut-il rester dans l’UE malgré l’adoption
du Brexit par voie référendaire ?
Peut-on vraiment croire qu’un pays démocratique comme le RU ne suivra pas
les résultats d’un scrutin aussi important et ayant fait l’objet d’une participation
aussi large ? On peut en douter. Pourtant, alors que le référendum a livré
un verdict clair, le débat semble ouvert. Certes, sur les 650 députés que
comprend la Chambre des Communes, 479 s’étaient prononcés pour le
« Remain », mais on se demande comment le gouvernement et le Parlement
pourraient aller à l’encontre du vote de près de 17,5 millions d’électeurs. Les
juristes s’affrontent désormais : certains mettent en avant le fait que la prise
de décision se fait par les représentants du peuple, et pas par le peuple
lui-même ; autrement dit, les députés devraient voter avant d’engager la
procédure de sortie. D’autres juristes reconnaissent que cela est possible en
théorie, mais impossible en pratique car les représentants du peuple doivent
tenir compte des suffrages des électeurs, comme dans toute démocratie.
Selon la procédure en vigueur, tout pays désirant sortir de l’UE doit « activer »
l’article 50 du Traité de Lisbonne (voir encadré ci-dessous), ouvrant la voie
aux négociations de sortie de l’Union (c’est la seule façon légale de sortie
de l’UE)… Pour cela, il doit notifier sa décision au Conseil européen, qui
prend acte de cette décision, et c’est à ce moment-là que doivent débuter
les négociations. Cela promet d’être difficile, car il s’agit sans aucun doute
de gérer le divorce le plus complexe de l’histoire. C’est sans doute pour cela
que le gouvernement britannique « souhaite avoir d’abord une vision claire
des nouveaux arrangements recherchés avec nos voisins européens » (G.
Osborne, Ministre des Finances). En outre, D. Cameron préfère laisser cette
(lourde) tâche à son successeur et « gagner du temps ». Rappelons que ces
négociations débuteront dès l’ouverture de la procédure et dureront jusqu’à
deux ans : moins de deux ans si accord, et plus de deux ans si nécessaire
après unanimité des États européens. Dans le cas où l’unanimité ne serait pas
trouvée, le RU se retrouverait hors de l’Union, sans accords commerciaux ni
accords de libre circulation… certains considèrent qu’il est possible que le
RU n’active jamais l’article 50 et reste de facto à l’intérieur de l’UE. Cela nous
paraît extrêmement peu plausible. Ce qui est sûr, en revanche, c’est que les
États européens ne montrent pas une grande cohésion : certains souhaitent
que la gestion de la sortie du RU débute rapidement (comme la France),
d’autres semblent moins pressés (l’Allemagne). L’accord final avec le RU doit
être accepté par les 27 pays à la majorité qualifiée.
Peut-on vraiment croire qu’un
pays démocratique comme le
RU ne suivra pas les résultats
d’un scrutin aussi important ?
Article 50 du Traité de Lisbonne
1. Tout État membre peut décider, conformément à ses règles constitutionnelles,
de se retirer de l’Union.
2. L’État membre qui décide de se retirer notifi e son intention au Conseil européen.
À la lumière des orientations du Conseil européen, l’Union négocie et conclut avec
cet État un accord fi xant les modalités de son retrait, en tenant compte du cadre
de ses relations futures avec l’Union. Cet accord est négocié conformément à
l’article 218, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.
Il est conclu au nom de l’Union par le Conseil, statuant à la majorité qualifi ée,
après approbation du Parlement européen.
3. Les traités cessent d’être applicables à l’État concerné à partir de la date d’entrée
en vigueur de l’accord de retrait ou, à défaut, deux ans après la notifi cation visée
au paragraphe 2, sauf si le Conseil européen, en accord avec l’État membre
concerné, décide à l’unanimité de proroger ce délai.
4. Aux fins des paragraphes 2 et 3, le membre du Conseil européen et du Conseil
représentant l’État membre qui se retire ne participe ni aux délibérations ni aux
décisions du Conseil européen et du Conseil qui le concernent.
5. Si l’État qui s’est retiré de l’Union demande à adhérer à nouveau, sa demande est
soumise à la procédure visée à l’article 49.
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Juillet-Août 2016
QUESTION # 2 Peut-il y avoir un second référendum ?
En théorie, tout est possible. Mais nous ne misons pas sur un enlisement de
la situation débouchant, à terme plus ou moins rapproché, sur un second
référendum au Royaume-Uni. Certes, la presse britannique pro-Brexit a
atténué ses vues et certains hommes politiques favorables au Brexit clament
désormais leur attachement pour l’Europe, mais il est difficile de croire qu’il
sera possible de temporiser (les pays européens n’y sont évidemment pas
favorables) et de préparer un nouveau suffrage. En revanche, il est fort possible
qu’il y ait un second référendum… mais en Écosse seulement. Il s’agira alors
d’un référendum sur l’appartenance au RU. Nicola Sturgeon, la première
ministre écossaise a déjà annoncé que si les sondages sont favorables, elle
décidera de mener un tel référendum afin de postuler ensuite à l’entrée dans
l’UE. Un retrait de l’Écosse du Royaume-Uni serait très défavorable à ce dernier
sur le plan économique. Le RU perdrait notamment l’exploitation pétrolière de
la Mer du Nord, qui est sur le territoire écossais.
Il est fort possible qu’il y ait
un second référendum…
mais en Écosse seulement
QUESTION # 3 Une pétition peut-elle suffire à renverser
le processus ?
La présence d’une pétition excédant 100 000 signataires a des conséquences :
dans un tel cas de figure, le Parlement peut être amené à en débattre (mais il
n’y est pas obligé légalement)… or il y a une pétition pour un nouveau scrutin :
elle revendique en effet que si un camp l’emportait avec moins de 60 % avec
une participation de moins de 75 %, il devrait y avoir un nouveau référendum.
Cela est le cas, et le nombre de signataires a dépassé les 3,9 millions.
Rappelons toutefois que cette pétition, initialement lancée par un pro-Brexit, a
été lancée avant le référendum, au moment où le « remain » était en tête dans
les sondages. Le sérieux de cette pétition est cependant remis en cause, et
elle fait l’objet d’une enquête : certains signataires seraient mineurs, d’autres ne
seraient pas britanniques, d’autres enfin seraient plutôt « fantaisistes : 39 000
signataires du Vatican pour 900 habitants, 23 000 signataires de Corée du Nord
alors que ses habitants n’ont pas accès à internet… Bref, non seulement cette
pétition est sous certains aspects non recevable, mais en outre elle ne saurait
renverser le vote, mais simplement faire l’objet d’une discussion au Parlement.
Insuffisant, donc, pour remettre en cause les suffrages britanniques.
QUESTION # 4 Les négociations à venir entre le RU et l’UE
vont-elles être déterminantes dans l’impact
économique du Brexit sur le Royaume-Uni ?
Si tout le monde s’accorde sur le fait que l’économie britannique sera
durablement affectée par la décision de sortie de l’Union (50 % des
exportations du RU sont à destination des pays de l’UE, et ces exportations
représentent actuellement près de 70 % du PIB, contre 20 % il y a 40 ans), les
négociations avec l’UE en détermineront les dommages exacts. Plusieurs cas
de figure se présentent :
• 1er cas de figure : le RU conserve un accès au marché unique et son
appartenance à l’Espace Économique Européen (EEE)… comme c’est le
cas pour la Norvège qui par ailleurs contribue au budget européen, assure
la libre circulation des biens et des personnes, mais ne bénéficie pas des
accords de libre-échange de l’UE ;
Les négociations avec l’UE
détermineront les dommages
exacts sur l’économie
britannique
• 2 e cas de figure : le RU conserve son appartenance à l’Association
Européenne de Libre-Echange (AELE) comme la Norvège, mais avec des
accords commerciaux négociés avec l’UE… comme c’est le cas pour la
Suisse. À noter que la Suisse a par ailleurs des restrictions, comme un
accès restreint à l’UE pour son industrie bancaire. Ce point serait crucial
pour le RU ;
• 3 e cas de figure : le RU ne bénéficie plus d’accords commerciaux
spécifiques, mais bénéficie de l’absence des droits de douane entre le
RU et l’UE, comme cela est le cas pour le Canada par exemple. À noter
cependant qu’une partie du camp du Brexit souhaite lever des droits de
douane envers l’UE.
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Juillet-Août 2016
• 4 e cas de figure : le RU s’engage dans une renégociation un par un
d’accords commerciaux avec les pays partenaires de l’UE. Rappelons que
la mise en place d’accords commerciaux nécessite entre 4 et 10 ans de
négociations.
Selon les estimations, l’impact sur le PIB serait significativement négatif, et ce
d’autant plus que les accords commerciaux ne seraient pas renouvelés. Le
RU « perdrait » entre 2,5 % et 9,5 % de son PIB selon le Trésor britannique,
tandis que le patronat anglais considère que l’UE contribue à elle seule à 4 %
— 5 % du PIB, soit autour de 70 Mds de GBP. Volume et coûts du commerce
en seraient affectés, notamment dans le secteur des services financiers,
de la chimie, de l’automobile, autant de secteurs très intégrés dans l’Union
européenne.
Le Trésor britannique craint une baisse de 6 % du PIB, une baisse des salaires
de 4 % et la perte de plus de 800 000 emplois à horizon 2 ans. Le Centre for
Economics and Business Research espère néanmoins que le Royaume-Uni
évitera la récession, sous l’hypothèse d’un policy-mix complaisant (politique
monétaire et politique budgétaire). Rien d’étonnant à ce que les agences
de notation aient abaissé la note de crédit du Royaume-Uni (qui n’est plus
désormais AAA).
On comprend mieux aussi pourquoi le RU préférerait aboutir à un accord
(pré-négocié avant déclenchement de l’article 50) lui permettant de contrôler
seul ses flux migratoires, de ne pas contribuer au budget européen… et de
conserver les accords commerciaux actuels. En bref, d’obtenir encore plus
ce qui lui avait été octroyé juste avant le référendum. Est-ce crédible ? Pas
vraiment.
QUESTION # 5 Quelle peut (doit) être la réponse des pays de l’UE ?
Les pays européens doivent désormais faire preuve de cohésion, et deux
dossiers majeurs se présentent.
1er dossier : sortir de l’impasse qui est en train de se développer concernant
la volonté – ou pas – du RU d’activer l’article 50. C’est au RU de le faire,
et sans cela, pas de début de négociations. Même s’ils ne représentent à
eux seuls ni l’UEM, ni l’UE, Allemagne, France et Italie sont à l’unisson : il n’y
aura pas de pré-négociations avec le RU. Mais le Conseil européen n’a aucun
moyen de forcer le RU. Attendre la nomination d’un nouveau premier ministre
(le 2 septembre) et que celui-ci active la sortie laisse l’Europe et ses institutions
dans une situation de blocage. Qui aurait imaginé qu’un pays désirant sortir
de l’UE décide finalement de ne pas activer la demande ? On peut s’interroger
une fois de plus sur le contenu du Traité et sur la gouvernance.
Une nécessité pour les
gouvernements européens :
montrer que l’Europe n’est
pas en panne de projet
2 e dossier : montrer (rapidement) que l’Europe n’est pas en panne de
projet. Parmi les pays de l’Union, les intérêts divergent parfois et les agendas
électoraux ne favorisent pas les décisions communes, tandis que les grandes
promesses non tenues alimentent les votes extrémistes. Angela Merkel,
François Hollande et Matteo Renzi ont présenté en début de semaine les quatre
priorités : la sécurité, la croissance, la jeunesse, et l’harmonisation fiscale et
sociale dans la zone euro. Rien de bien nouveau, en réalité. La difficulté n’est
pas de nommer les objectifs, mais bien de les réaliser. En sous-jacent se
retrouvent d’autres débats de fond : le poids de la dette dans certains pays, le
désamour envers l’Europe, la montée des extrémismes (de droite dans les pays
du cœur, de gauche dans les pays de la périphérie), les réformes en France,
les blocages sur l’Union Bancaire Européenne, les craintes de progresser vers
une Europe à la carte…
Les pays de l’UE doivent montrer désormais un grand volontarisme pour
adresser ces questions et faire reculer les tentations d’une Europe à la carte
que les Britanniques ont avivées.
QUESTION # 6 Quels sont les impacts politiques du Brexit
sur le Royaume-Uni ?
Durant la campagne, David Cameron a souvent rappelé qu’en cas de
vote favorable à une sortie, celle-ci devra être actionnée rapidement, les
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Juillet-Août 2016
négociations avec l’UE promettant d’être longues et difficiles. Depuis l’issue
du référendum, son agenda politique a changé : il a certes annoncé son
départ pour le mois d’octobre, mais se refuse – du moins pour l’instant — à
activer l’article 50 du Traité de Lisbonne, cet article qui donne précisément le
« go » aux négociations de sortie. Il ne souhaite pas prendre la responsabilité
d’un acte politique qui vraisemblablement entraînera l’économie britannique
en récession, laissant cela à son successeur, sans doute un pro-Brexit. Les
démissions se succèdent par ailleurs au sein du parti travailliste. Tous les
partis semblent en fait fragilisés par la situation. On entre donc dans une
phase d’instabilité politique qui noircit encore un peu plus le tableau. Et ce
d’autant plus que nombreux sont les pays européens qui souhaitent en finir au
plus vite avec ce dossier.
Tous les partis politiques
sont fragilisés par la situation,
et on entre dans une phase
d’instabilité politique au RU
Au-delà de cet environnement compliqué, le prochain Premier Ministre devra
tenir compte de la multitude de clivages outre-Manche :
• Un clivage fort entre les villes et les campagnes : des grandes villes comme
Londres se sont prononcées à 75 % en faveur du « Bremain », tandis que
des circonscriptions plus rurales ont favorisé le « Brexit » à 75 % ;
• Un clivage entre les générations, les jeunes ayant majoritairement voté pour
le « Remain », et les seniors pour le « Leave » ;
• Un clivage entre les États : l’Angleterre (à 53,5 %) et le pays de Galles (à
52,5 %) en faveur d’une sortie ; l’Écosse (à 62 %) et l’Irlande du nord (à
56 %) pour le maintien dans l’UE ;
• Un clivage à l’intérieur même des partis politiques, qu’ils aient été favorables
au « Leave » ou au « Remain ». L’onde de choc a commencé à se faire
sentir, avec la démission de certains leaders et la mise en avant de fortes
dissensions ;
Autrement dit, ce vote va laisser des traces durables dans la société britannique.
D’ailleurs, après le référendum sur l’Union, se profile un référendum sur le
Royaume-Uni : l’Écosse a déjà annoncé qu’elle souhaitait rester européenne,
ce qui laisse augurer d’un nouveau scrutin référendaire.
Quant au prochain premier ministre, on sait qu’il sera conservateur, que ce
sera une femme, mais on ne sait pas encore si elle sera un défenseur du
« Leave » ou du «Remain ». Cela fera sans doute une différence pour les
négociations, et cela risque également d’influencer les marchés financiers
durant les semaines à venir, au gré des déclarations et des sondages. Nous n’en avons donc pas fini avec l’instabilité politique au RU. La succession au
poste de Premier Ministre, en remplacement de David Cameron, se jouera
entre Theresa May (actuelle secrétaire d’État à l’Intérieur, pro-Remain), et
Andrea Leadsom (Ministre de l’énergie et du changement climatique, proLeave). Verdict le 9 septembre.
Nous n’en avons donc
pas fini avec l’instabilité
politique au RU
QUESTION # 7 Quels sont les impacts économiques directs
du Brexit sur l’Union européenne ?
L’UEM va désormais représenter 86 % du PIB de l’UE (contre 71 %
précédemment, en incluant le RU). En première lecture, le retrait du RoyaumeUni n’aura pas de conséquences économiques graves pour les pays de
l’Union, notamment parce que la croissance est fortement tirée par la demande
intérieure. Si l’on creuse un peu, on remarque cependant que le retrait du RU
de l’Union aura des effets visibles, et assez différents d’un pays à l’autre.
Trois angles peuvent être mis en avant :
• Angle # 1
- L’impact sur les exportations : Irlande, Malte et Chypre, ainsi que Pays-Bas,
Belgique et Norvège sont les pays les plus touchés ;
• Angle # 2
- L’impact sur les flux d’investissement directs : Malte, Irlande, Luxembourg,
Chypre, Suisse, Belgique et Pays-Bas sont les pays les plus touchés ;
• Angle # 3
- L’impact sur le secteur financier : Luxembourg, Suisse et Malte sont les
pays les plus touchés.
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L’Irlande, Malte et Chypre
ainsi que les pays du Benelux
seront les pays les plus
affectés par le retrait du
RU de l’UE
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Juillet-Août 2016
Pays
Exportations vers le RU (en % du PIB)
Irlande
10.6 %
Chypre
7.5 %
Norvège
7.4 %
Malte
7.1 %
Belgique
6.8 %
Pays-Bas
6.7 %
Luxembourg
5.3 %
Lituanie
3.9 %
Hongrie
3.5 %
Allemagne
2.8 %
MÉDIANE
2.8 %
Espagne
2.7 %
Suède
2.7 %
Danemark
2.7 %
Lettonie
2.5 %
France
2.0 %
Finlande
1.8 %
Italie
1.6 %
Autriche
1.5 %
Suisse
1.3 %
Canada
0.8 %
Source : S & P, juin 2016
Au total, l’Irlande, Malte et Chypre ainsi que les pays du Benelux seront les pays
les plus affectés par le retrait du RU de l’UE. À l’inverse, l’Autriche, l’Italie et
la Finlande seront les pays les moins touchés, car ce sont les pays les moins
connectés au RU. Au total, nous estimons que l’impact du Brexit sur la croissance
de la zone euro est limité : nous estimons que la croissance de la zone sera de
1,5 % en 2016 (1,6 % précédemment) et de 1,3 % en 2017 (1,5 % précédemment).
Rappelons enfin que le RU contribue au budget européen pour un montant de
200 millions d’euros par semaine, montant qui devra être réparti entre les pays de
l’Union au prorata de leur contribution actuelle. Rien d’insurmontable à ce stade.
QUESTION # 8 Le Brexit peut-il provoquer à lui seul un
ralentissement de l’économie mondiale ?
L’économie britannique va sans doute connaître une récession dans les deux ans
à venir. Même si sa croissance reste positive en 2016 et en 2017, il est très fort
probable qu’elle connaisse au moins deux trimestres consécutifs de contraction.
Cela sera-t-il suffisant pour entraîner l’économie mondiale dans un ralentissement
généralisé ? Sans doute pas : 5e puissance économique mondiale avant la chute
du GBP, l’économie britannique n’est cependant pas assez importante pour
faire chuter la croissance mondiale. La croissance des autres pays développés
est suffisamment solide pour ne pas craindre un nouvel effondrement de la
croissance globale. Rappelons également que la croissance de nombreux pays est
actuellement davantage tirée par la demande intérieure que par les exportations (a
fortiori vers les RU). Quant aux pays dits « émergents », la vague d’impact est trop
faible pour que cela change radicalement la donne. Au total, la croissance mondiale
restera autour de 3 %, et les dangers viennent d’ailleurs : la Chine, les États-Unis,
les risques géopolitiques… ce sont ces risques qu’il convient de craindre s’agissant
de la croissance mondiale, pas les conséquences du Brexit :
• Pour les pays développés, la faiblesse de l’investissement, la croissance
chinoise et un ralentissement éventuel de la consommation restent les
facteurs de risque majeurs.
1
Exposition des indices nationaux
au Royaume-Uni en % des ventes
Mid Cap
Large Cap
Mega Cap
Moyenne
Conso. Courante
Services collectifs
Financières
Conso. Discrét.
Telecom
Industrielles
IT
Santé
Materiaux de base
Energie
0%
20%
Exposition au Royaume-Uni
Reste du Monde
40%
60%
80%
100%
Reste de l'Europe
Source : Morgan Stanley, Recherche Amundi
2
Exposition par secteur du MSCI Europe
au Royaume- Uni en % des ventes
Royaume-Uni
Irlande
Moyenne Europe
Danemark
Espagne
Suisse
Allemagne
France
Finlande
Suède
Pays-Bas
Belgique
Norvège
Autriche
Italie
Portugal
36%
16%
12%
7%
6%
6%
5%
5%
4%
0%
10%
20%
30%
40%
Source : Morgan Stanley, Recherche Amundi
La croissance mondiale restera
autour de 3 %, et les dangers
viennent d’ailleurs : la Chine,
les États-Unis, les risques
géopolitiques…
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Juillet-Août 2016
• Pour les pays émergents, la politique monétaire de la Fed, la croissance
chinoise, le prix des matières premières et les anticipations relatives à la
croissance mondiale sont les facteurs de risque principaux.
QUESTION # 9 Le Brexit met-il en danger les systèmes bancaires de
l’Europe continentale ?
Les banques européennes n’ont aujourd’hui rien à voir avec les banques de
2008 ou de 2011 : non seulement elles ont levé des montants très élevés de
capitaux, mais le dispositif anti-crise de la BCE est désormais bien établi :
surveillance bancaire, stress tests… En outre, elles ont accès depuis plus d’un
an et demi à des facilités d’accès aux liquidités BCE, ce qui a fortement réduit
risque spécifique et risque systémique.
• La surveillance des systèmes bancaires a considérablement progressé
depuis la crise financière, ainsi que la communication autour de ce sujet.
La BCE a réalisé un audit important et complet, les stress tests ont été
rassurants et les risques bien identifiés ;
• Les banques européennes sont désormais bien capitalisées : elles ont
levé plus de 500 Mds d’equity depuis la crise ;
• Le 10 mars dernier, la BCE a lancé un nouveau programme TLTRO, ce qui
a rassuré sur le soutien de la banque centrale aux banques de la zone euro ;
• L’exposition au crédit aujourd’hui rien à voir avec celle qui prévalait en
2008 : nous sommes passés d’une bulle de crédit à un « déficit » de crédit.
La fragilité des banques
européennes est liée
à la difficulté à discriminer
les systèmes bancaires,
et aux pressions
supplémentaires de baisses
des taux (courts et longs)
Les banques restent néanmoins fragilisées par la baisse des taux en territoire
négatif et le maintien du coût du capital à un niveau relativement élevé.
La baisse des taux a été favorable dans un premier temps : les banques
ont ainsi pu bénéficier instantanément de coûts de financement très bas et,
surtout, sans lien avec leur risque réel. Certaines banques ont certes eu au
début de la crise des difficultés de refinancement sur le marché interbancaire
et l’ensemble des banques ont vu leur cours de bourse s’effondrer, mais
aussi bien aux États-Unis qu’au Japon ou en Europe, les politiques non
conventionnelles ont tout d’abord amélioré la profitabilité des banques : les
QE ont en effet fait chuter les taux longs, tandis que la duration des dépôts est
par construction bien plus courte que celles des actifs que les banques ont
en portefeuille. L’abondance de liquidités et le maintien des taux bas ont dans
certains cas retardé le nettoyage des bilans, et dans un second temps, avec
la baisse des taux et l’aplatissement de la courbe des taux, la marge d’intérêt
s’est littéralement écroulée et la profitabilité a décliné. Autrement dit, l’écart de
taux d’intérêt entre les passifs (courts) et les actifs (longs) a quasiment disparu.
De son côté, le coût du capital des banques n’a pas baissé, et ce pour
plusieurs raisons :
• Le poids des crises passées : le retour à la normale n’a finalement pas eu
lieu, la crise bancaire de 2011-2012 ayant laissé des traces durables ;
• Les craintes de crises futures : l’environnement bancaire est encore fragile
dans certains pays (Italie et bad bank, Portugal… et craintes et rumeurs
récurrentes concernant Deutsche Bank…) ;
• L’incertitude réglementaire n’est pas étrangère au maintien d’un coût du
capital élevé. Que contiendra in fine Bâle 4 ? Le moins que l’on puisse dire,
c’est que la réglementation, qui souhaite éviter des crises, ne favorise pas
non plus la croissance et le cycle. On retrouve là le débat habituel sur le
caractère pro-cyclique des mesures réglementaires ;
• La difficulté à discriminer les systèmes bancaires. Le marché ne sait
pas faire cette discrimination. S’agissant des banques, on parle toujours de
risque systémique, d’interactions et de contagion… Tout cela ne favorise
pas le bon fonctionnement du marché interbancaire, allant même jusqu’à
fragiliser les banques les plus faibles et donc à impacter par contagion les
plus solides ! Ce cercle vicieux va davantage dans le sens du deleveraging
et du repli national que dans celui de la fluidité des échanges, de la
mutualisation des risques et de la prise de risque de crédit supplémentaire.
Le Brexit affaiblit les banques britanniques et fait donc craindre des effets de
10
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Juillet-Août 2016
contagion, alors même que les difficultés à venir des banques britanniques
offrent des opportunités aux banques européennes.
• Le niveau « anormalement » bas des taux d’intérêt et des courbes
des taux, avec un impact direct sur la profitabilité, et donc sur l’offre de
crédit. On pourrait également ajouter le risque de taux, devenu totalement
asymétrique désormais. Plus les banques considèrent que les taux vont
durablement rester bas, et plus elles sont encouragées à réduire le risque
et à aller à l’encontre de la politique monétaire…
Le secteur financier britannique – et notamment ses banques – est fragilisé
par le Brexit. La perte du passeport européen, l’impact potentiel sur la place
financière de Londres et la perspective d’une récession au Royaume-Uni en
sont les principales raisons. La fragilité des banques européennes est liée à la
difficulté à discriminer les systèmes bancaires, et aux pressions supplémentaires
de baisses des taux (courts et longs). On ne doit pas pour autant miser sur un
effondrement des banques européennes, on doit plutôt prêter attention à leur
valorisation, excessivement basse.
QUESTION # 10 Le Brexit aura-t-il des conséquences
pour la place financière de Londres ?
La décision de sortir de l’UE n’est pas neutre pour la place financière de
Londres, et cela explique pourquoi la City (et la Banque d’Angleterre) était
hostile au scénario du Brexit.
• La première conséquence, c’est que les banques britanniques vont
très vraisemblablement perdre leur passeport européen. Ce passeport
permet à un établissement de crédit ou de paiement agréé dans un pays
d’exercer ses activités dans les autres pays de l’Union : sans passeport, les
banques installées à Londres vont devoir se faire agréer ailleurs, et donc
transférer activités et employés… sauf à attendre la fin des négociations
entre l’UE et le RU à espérer que le passeport européen ne disparaîtra
pas. Impossible de miser sur cela. Trop long et trop aléatoire. Il y aura
donc bien des transferts d’activités, notamment de banques américaines
et suisses (certaines, comme JP Morgan ou encore HSBC ont déjà évoqué
cette possibilité), et donc des transferts d’emplois (Londres emploie
2,2 millions de personnes dans ses activités bancaires et financières).
Vers quelle destination : l’Irlande, le Luxembourg, la France, les PaysBas, l’Allemagne… ? Si les deux premières places financières (Irlande et
Luxembourg) ont un atout fiscal, la France bénéficie de la forte présence de
grands groupes bancaires et de sociétés de gestion de premier plan.
• La fusion London Stock Exchange – Deutsche Börse peut-elle être
remise en question pour des raisons économiques et financières (que
vaut la valorisation du LSE depuis le récent effondrement du GBP) ? Le
Land de Hesse peut-il également utiliser son droit de veto pour des raisons
politiques (localisation de cette entité à Londres) ? L’avenir (proche) le dira.
• Le point clef réside donc dans la position des instances européennes :
autant il était possible de considérer que des infrastructures financières
majeures pour l’UEM se trouvent dans l’UE et pas dans l’UEM… autant cela
paraît difficile dans le nouveau contexte. En effet, est-il encore possible
que des éléments indispensables au bon fonctionnement de la zone
euro se retrouvent en dehors de la zone euro et de l’Union européenne ?
Probablement pas. Cela signifie que les Européens vont probablement
œuvrer pour le rapatriement en Europe de certaines activités, et
notamment des chambres de compensation (qui assurent et centralisent
le paiement entre les banques commerciales).
• L’Association Bancaire Européenne a par ailleurs déjà annoncé qu’elle
déménagera de Londres vers un pays européen…
• La Banque centrale européenne (BCE) avait annoncé il y a quelques
semaines que la question de la localisation du marché de l’euro à
Londres se poserait en cas de Brexit. La capitale britannique est la
première place mondiale pour les transactions de change (dont l’euro), mais
elle est aussi majeure pour les transactions sur les obligations corporates et
les obligations souveraines libellées en euro.
On doit miser sur une perte
d’influence de la place
financière de Londres…
pour peu que les européens,
allemands et français en tête,
s’en donnent la peine
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Juillet-Août 2016
Au total, on doit miser sur une perte d’influence de la place financière de
Londres… pour peu que les Européens, allemands et français en tête, s’en
donnent la peine.
QUESTION # 11 Doit-on craindre des référendums en cascade
en Europe ?
Le Brexit a redonné vie aux anticipations de référendum dans différents
pays de l‘Union européenne, confortées par les déclarations de nombreux
partis d’opposition voyant notamment dans cette opportunité la possibilité
de préparer un vote de rejet des pouvoirs en place. Rappelons que le mode
référendaire a été utilisé au cours de ces dernières années en Europe : Slovénie,
Slovaquie, République Tchèque, Pays-Bas, Malte, Luxembourg, Lituanie,
Lettonie, Irlande, Hongrie, Espagne, Estonie avaient voté par référendum
sur la constitution européenne, le Traité de Lisbonne ou sur leur adhésion à
l’UE, alors que Portugal et Pologne avaient annulé le leur. L’Écosse est un
cas à part : désireuse de se couper du RU et de rester dans l’UE, la probabilité
d’un référendum est redevenue très élevée. Plus profondément européens
qu’ils ne sont britanniques, nombreux sont ceux qui croient en une Écosse
indépendante et européenne. Pourtant, la situation n’est pas aussi simple : il
faut que le parlement britannique donne son feu vert à une telle proposition
et la période de transition serait très complexe. Tout d’abord, le retrait du
RU de l’UE concerne également l’Écosse. Il faudra donc attendre l’issue des
négociations et la sortie officielle du RU pour que l’Écosse, à supposer qu’elle
devienne alors indépendante, puisse demander son appartenance à l’UE. Un
processus long et hasardeux… car il faudra alors préparer l’introduction d’une
monnaie nationale : ce ne sera pas le GBP, et sans doute pas non plus l’euro…
puisque l’Écosse ne sera même plus dans l’UE. Un vrai casse-tête. Quant
aux autres pays, les choses ne sont également pas simples. En Allemagne,
la loi fondamentale ne prévoit de référendum que pour le changement de
tracé des frontières des Länder, leur fusion ou leur scission. Le référendum
a lieu dans les territoires concernés. Cependant, en fonction des législations
des différents Länder et communes, des référendums locaux sont autorisés.
La constitution Belge ne prévoit pas la possibilité d’un référendum, Il faut
500 000 signataires en Italie pour qu’un référendum soit possible… mais le
processus officiel prend au moins un an… sauf que les référendums sur des
traités ne sont pas possibles actuellement et que la cour constitutionnelle ne le
permettra sûrement pas. Même chose en Autriche où les traités ne sont pas
couverts par des référendums. En France, le référendum national (articles 11,
88-5 et 89 de la Constitution) couvre notamment le champ législatif, celui
des traités et le champ constitutionnel. Tout référendum intervient à l’initiative
du président, et pour l’heure, ce sont plutôt les élections présidentielles qui
importent (avril – mai prochain). On voit mal le parti républicain ou le parti
socialiste s’engager sur une telle voie suite aux élections présidentielles. Sans
l’accord du président, il faut le soutien de 25 % des membres du parlement
(Assemblée Nationale + Sénat) et au moins le soutien de 10 % de l’électorat.
En Finlande, 50 000 signatures forcent le débat parlementaire, mais celui-ci
n’est pas tenu de passer par un référendum. En Pologne, 500 000 signataires
suffisent à provoquer un référendum… sauf s’il s’agit de rejeter les conditions
d’un traité européen. En Hongrie, 100 000 signataires suffisent normalement
à provoquer un référendum, mais il ne peut y avoir de référendums contre un
traité de l’UE ou contre les obligations résultant d’un traité international. En
termes clairs, faible probabilité d’assister à des référendums en cascade, mais
sans aucun doute beaucoup de débats sur ces thèmes.
Faible probabilité d’assister
à des référendums
en cascade, mais sans aucun
doute beaucoup de débats
sur ces thèmes
QUESTION # 12 Le Brexit conforte-t-il la poursuite de politiques
monétaires accommodantes ?
Si le Brexit a une vertu, c’est de conforter l’environnement de taux bas. La
croissance britannique va fléchir, l’impact sur les échanges commerciaux est
une certitude, et la crainte d’un impact sur les différentes économies va inciter
les grandes banques centrales à poursuivre dans la voie de la prudence.
S’agissant de la Fed, nous savons depuis bien longtemps que l’on ne peut
parler ni de normalisation monétaire, ni de véritable cycle de resserrement.
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#
Juillet-Août 2016
La Fed est « derrière la courbe », et elle n’est pas parvenue jusqu’ici à se
redonner des marges de manœuvre sur les taux d’intérêt. Il faut dire que
l’appréciation du cours du dollar effectif réel a été conséquente (+13 %
depuis 2008), et elle représente un resserrement monétaire implicite : les
modèles de la Fed indiquent qu’une hausse du cours effectif réel du dollar
de 10 % équivaut à une hausse des taux de 175 pb ! Une appréciation
supplémentaire du billet vert, découlant de sa qualité de valeur refuge (et
de la qualité de valeur refuge des US Treasuries) représenterait donc un
resserrement monétaire implicite supplémentaire. Notons cependant que
depuis le début de l’année le dollar (effectif réel) s’est… déprécié de 0,6 %.
Malgré tout, dans le contexte actuel, la courbe des eurodollars a renvoyé à
2017 la prochaine hausse de taux des Fed funds.
Nous savons également que la Banque du Japon est forcée de conserver
une politique de taux ultra-bas (désormais négatifs) et de QQE (Quantitative
and Qualitative Easing) afin de relancer la croissance économique et l’inflation
et de pousser le yen à la baisse. Le Brexit a provoqué une appréciation
conséquente du yen, valeur refuge. Autant dire que la BoJ n’est pas proche
de renverser sa politique monétaire bien au contraire : elle doit désormais
utiliser la politique de change (des interventions sur le marché) afin de limiter
la hausse du yen, néfaste pour les profits, les actions et la croissance.
Quant à la BCE, elle continuera de veiller à ce que les taux restent
durablement bas. L’impact du Brexit sur la croissance de la zone euro est
encore incertain (tout va dépendre des négociations RU/UE), mais il sera
visible.
La Banque d’Angleterre n’a sans doute pas d’autres options que d’assouplir
de nouveau sa politique pour contrer le ralentissement économique à venir.
C’est en tout cas le sens des récentes déclarations de son gouverneur,
Mark Carney.
Tant pis pour ceux qui
croyaient à des hausses
de taux… ils en seront
sans doute – une fois de plus –
pour leurs frais
Au total, tant pis pour ceux qui croyaient à des hausses de taux… ils en
seront sans doute – une fois de plus – pour leurs frais.
QUESTION # 13 Le Brexit conforte-t-il l’environnement
de taux bas et la recherche de rendement ?
La réponse est clairement oui.
En premier lieu, le Brexit favorise les US-Treasuries, à la fois valeur refuge,
libellés en USD (également valeur refuge) et offrant un portage significatif par
rapport aux actifs obligataires européens. Les taux longs US sont favorisés
durant cet épisode trouble ;
Le Brexit favorise également les obligations souveraines de la zone
euro. Pour calmer les pressions à l’élargissement des spreads de crédit et
des primes de risque, la BCE pourrait bien accélérer son programme d’achats
d’actifs, ce qui incite à reprendre position sur les marchés concernés par le
QE de la BCE. Dans un tel contexte, être court en duration et sous-pondéré
en actifs sûrs n’est pas judicieux.
Il soutient également les obligations corporates de la zone euro, et plus
particulièrement la catégorie Investment Grade compte tenu du programme
d’achats de la BCE. La BCE a d’ailleurs accéléré ses achats depuis le résultat
du référendum, preuve supplémentaire, si besoin était, de sa volonté d’éviter
une hausse des primes de risque sur les marchés du crédit européen.
La BCE maintient les taux
bas et évite une dégradation
des primes de risque
Il soutient le segment du high yield, car non seulement son environnement
est stabilisé (taux des souverains, spreads IG…), mais il bénéficie d’un bon
accès à la liquidité et de la poursuite de la recherche de rendement.
Le cas des banques est spécifique : comme mentionné ci-dessus (section 9),
la baisse des taux et le niveau élevé du coût du capital sont deux marqueurs
négatifs qui pèsent depuis quelque temps sur les valeurs bancaires. Le
Brexit ajoute à cela des craintes sur la croissance, des baisses de taux
supplémentaires, et des craintes de contagion entre systèmes bancaires.
Cela fait beaucoup dans le contexte actuel.
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Juillet-Août 2016
Les actions européennes sont également tirées à la baisse par les
financières et le repricing des primes de risque. Le thème value en Europe
pour les industrielles est encore plus d’actualité désormais.
Quant aux marchés émergents tout ce qui a été écrit ces derniers mois
reste valide (oasis de spreads et de rendement, valorisation des marchés
d’actions et de dette, sous-évaluation de nombreuses devises, politiques
monétaires mondiales encore accommodantes point bas atteint sur le prix
des matières premières…), et nous conservons nos positions.
> Stratégies de Macro Hedging
Variation
sur 1 mois
0
+
Long US Treasuries

Long Bunds


Long USD


Long JPY


Long volatilité

Long cash USD

Long Or


Long US TIPS





++
+++
La plus grande prudence liée à la perspective du référendum
britannique aura été payante pour tous ceux qui auront protégé
leurs portefeuilles. La chute du sterling, des valeurs bancaires
et des actions en général a été conséquente. Sur les produits
de taux, la présence de la BCE a limité la casse, notamment
parce qu’elle a accéléré ses achats, et en particulier sur les
obligations d’entreprises. Comme dans le même temps,
les taux ont baissé, l’effet spread a été au moins pour partie
compensé par l’effet taux. À noter que le spread Espagne –
Allemagne s’est même resserré durant cette période de stress,
ce qui mérite d’être souligné. Rester long en volatilité, long
or et long obligations américaines (dollar et portage)
et long obligations cœur Europe et long duration est
encore approprié. Le rebond de marché est salutaire, mais
sans doute encore fragile : des échéances importantes se
profilent à l’horizon, comme le choix du prochain premier
ministre britannique en septembre, et les dossiers européens
ne manquent pas (gestion de la sortie du RU, immigration,
croissance, emploi…). Le tableau ci-dessus prend en compte un horizon court, entre 1 et 3 mois. Les modifi cations (colonne 2) refl ètent les vues exprimées lors de notre
dernier comité d’investissement. Les lignes expriment notre aversion au risque et nos stratégies de macro hedging. Elles sont à mettre en relation
avec les tableaux d’allocation d’actifs. Une vue négative en allocation d’actifs n’incitera pas à hedger, mais à ne pas investir. Une vue positive
moyen terme mais négative court terme (transitoire) peut nous inciter à protéger le portefeuille sans remettre en question nos vues.
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Allocation d’actifs : vues et convictions multi-classes
Variation sur 1 mois
---0
+
++
+++
Actions/Govies


Obligations corporates/Govies


Actions/Obligations corporates


Duration


Corporate bonds


Pétrole


Or


Cash EUR


Cash USD


Le tableau ci-dessus prend en compte un horizon entre 6 et 12 mois. Les modifications (colonne 2) reflètent les vues exprimées lors de notre
dernier comité d’investissement. Les lignes expriment notre vue multi-classes d’actifs à horizon 6/12 mois. Les vues, variations de vues et
les avis sur les classes d’actifs reflètent la direction attendue (+/-) et les forces de convictions (+/++/+++) ; elles sont indépendantes des
contraintes et considérations relatives à la construction de portefeuille.
Allocation d’actifs : vues et convictions relatives par grande classe d’actifs
Variation sur 1 mois
---0
+
++
+++
Actions US


Actions Japonaises


Actions Euro


Actions UK


Actions Pacifi que excl. Japon


Actions Marchés émergents


Obligations gouvernementales US bonds, court


US bonds, long


Euro core, court


Euro core, long


Euro périphériques


UK bonds


Japanese bonds


Obligations d’entreprises
IG US


HY US


IG EURO


Euro HY


Dette EMG devises "dures"


Dette locale EMG


Change
USD


EUR


JPY


GBP


Le tableau ci-dessus prend en compte un horizon entre 6 et 12 mois. Les modifi cations (colonne 2) refl ètent les vues exprimées lors de notre
dernier comité d’investissement. Les lignes expriment notre vue multi-classes d’actifs à horizon 6/12 mois. Les vues, variations de vues et les avis
sur les classes d’actifs refl ètent la direction attendue (+/-) et les forces de convictions (+/++/+++) ; elles sont indépendantes des contraintes et
considérations relatives à la construction de portefeuille.
Actions
Type de portefeuille
> Portefeuilles d’actions
• Bêta du portefeuille autour de 1
• Petite préférence pour les actions
zone euro (mais neutre financières
et sous-pondéré utilities) vs US
• Marchés émergents :
choix pays clivant mais biais de nouveau
positif globalement.
Au sein des pays émergents :
- Surpondéré : Inde, Thaïlande, Pérou,
Europe, Philippines, Corée, Russie
- Neutre : Indonésie, Brésil
- Sous-pondéré : Taïwan, Grèce, Malaisie,
Chine, Afrique du Sud
• Positions longues en devises EMG
> Portefeuilles obligataires
• Surpondération crédit
• Réduction des positions sur les financières
• Duration : globalement neutre, avec un biais
short sur les segments à taux négatifs et
court duration en GBP et JPY.
Long duration en cœur zone euro
• Dettes émergentes :
- Préférer la dette en devises dures
(long USD)
- Augmenter la poche dette en monnaie
locale
- Jouer des thématiques sur les EMG
• Long USD vs EUR
• Neutre sur GBP mais pas plus
• Augmentation des positions longues
en devises matières premières (RUB, BRL,
MXN), plutôt short Asie (CNH, KRW, TWD)
et neutre Europe EMG
> Portefeuilles diversifi és
• Légère réduction du risque global
• Portefeuilles globalement neutre en actions
• Positions longues en actions zone euro
• Rester neutre actions japonaises et US
• Jouer le thème « value » en zone euro,
et le thème « quality » aux US
• Rester surpondéré actions émergentes
• Garder la surpondération en obligations
périphériques euro par rapport au cœur…
mais « fair value » proches ou atteintes
• Conserver les positions longues govies US
(portage + macro-hedging)
• Obligations d’entreprises :
positif sur HY et sur IG
• Positions longues en devises EMG
via la dette en monnaie locale
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Juillet-Août 2016
Achevé de rédiger le 4 juillet 2016
Facteurs de risque
PHILIPPE ITHURBIDE, Directeur Recherche, Stratégie et Analyse
Le tableau ci-dessous reprend les quatorze principaux facteurs de risque probabilisés avec les impacts de
marchés qui nous paraissent les plus crédibles.
[ RISQUE # 1] Et si la Fed se trompait ?
[ PROBABILITÉ ] 20 %
ANALYSE Une mauvaise interprétation des décisions de la Fed reste un facteur de risque important. Cela est d’autant plus vrai
que dans la moitié des cas (6 fois sur 12), les cycles de resserrement monétaire ont été suivis, depuis 1945, d’une récession
de l’économie américaine dans les deux ans qui ont suivi. C’est sans doute ce que le marché craindra s’il était avéré que la
Fed va trop vite et surtout trop fort. Pour l’instant, la Fed reste prudente. Elle a bien conscience d’une part que le niveau de
croissance et le cycle actuel ne justifiaient pas jusqu’ici une hausse significative des taux et d’autre part que le renversement
d’une politique monétaire ultra-accommodante depuis 8 ans revêt plus d’importance que d’habitude. Par ailleurs, le récent
référendum britannique pousse l’ensemble des banques centrales à la prudence. Dans le cas de la Fed, il s’agit d’éviter une
appréciation du dollar (les modèles de la Fed indiquent qu’une appréciation du dollar effectif réel de 10 % équivaut à un
resserrement monétaire de 175pb). Les indicateurs d’inflation se sont rapprochés de la cible de la Fed et celle-ci préparait
les marchés à un resserrement monétaire au cours de l’été. Cela n’aura pas lieu… la courbe eurodollar a renvoyé à 2017 le
prochain resserrement monétaire. La Fed doit éviter toute erreur de communication, d’où la crainte d’une mauvaise réaction
des marchés en cas de hausse des taux prématurée, excessive ou mal argumentée.
IMPACT DE MARCHÉ Si la Fed fait une erreur, il faudra miser sur une forte baisse des actions, et sur une contagion notamment sur
des marchés émergents déjà fragilisés. Cette situation favoriserait l’écartement des spreads et taux entre Europe et ÉtatsUnis, ainsi qu’une nouvelle faiblesse de l’euro, deux arguments en faveur des actifs risqués européens.
[ RISQUE # 2] Un « hard landing » chinois
[ PROBABILITÉ ] 20 %
ANALYSE Le modèle économique chinois a changé sur la dernière décennie : il est désormais moins tiré par les exportations,
et davantage lié à la demande intérieure. Ceci est une bonne évolution, mais ce modèle garde des caractéristiques à certains
égards inquiétantes : l’excès de crédit est visible, le poids de la dette enfle, la (faible) compétitivité de l’industrie s’étiole, les
gains de productivité sont en retrait… en clair, un fléchissement de la croissance potentielle. La question n’est pas de savoir si
la croissance future et potentielle sera plus faible : c’est un fait bien connu. La question est plutôt de savoir si la croissance ne
va pas rapidement (et nettement) passer en dessous de sa croissance potentielle (sans doute entre 3 % et 5 % contre 10 % il
y a un peu plus de 10 ans)… En clair, si la Chine ne va pas connaître une crise économique de grande ampleur, un repli plus
dramatique de la croissance chinoise viendrait s’ajouter à une liste déjà longue de pressions déflationnistes mondiales. Les
indicateurs les plus récents atténuent ce risque.
IMPACT DE MARCHÉ Un tel scénario aurait un impact très négatif et ses effets en cascade seraient particulièrement désastreux :
vulnérabilité des systèmes bancaires, vulnérabilité du système financier, vulnérabilité liée à l’endettement public et privé de la
Chine, impacts sur les matières premières et les pays émergents, impacts sur les devises des pays exportateurs de matières
premières, pays avancés et pays émergents… La Fed interromprait son cycle de resserrement et la BCE poursuivrait son QE.
[ RISQUE # 3] Un effondrement de la croissance mondiale
[ PROBABILITÉ ] 20 %
ANALYSE Un hard landing chinois entraînerait une chute de la croissance mondiale, mais d’autres causes sont possibles. La
poursuite de la baisse du prix des matières premières et du commerce mondial, une politique monétaire américaine excessivement
restrictive et la faiblesse structurelle de l’activité économique européenne sont autant de facteurs qui font également craindre
un épisode de baisse de la croissance mondiale. Jusqu’ici, le ralentissement du monde émergent est une réalité tangible, tandis
que le monde « avancé » progresse depuis quelques années. Un nouveau ralentissement de ce dernier pourrait provenir de
l’effet de second rang des pays EMG (chute des exportations), d’un nouveau fléchissement de l’investissement, de l’emploi…
bref, de la demande intérieure, actuellement le principal moteur de leur croissance.
IMPACT DE MARCHÉ Mis à part le recours à des politiques économiques expansionnistes, on peut craindre le retour d’une guerre
des changes, entre pays émergents d’une part, et entre monde avancé et émergent d’autre part. S’attendre à une sousperformance marquée des actifs risqués, actions et crédit.
[ RISQUE # 4] Une récession aux États-Unis
[ PROBABILITÉ ] 20 %
ANALYSE Nous avons à de nombreuses reprises mentionné que le consensus de marché était trop optimiste, et nous avons
récemment assisté à une vague de révisions des anticipations de croissance pour de nombreux pays ou zones, y compris les
États-Unis. Nous avons pour notre part, révisé nos prévisions de croissance en 2014, et nous misons sur une croissance de
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Facteurs de risque
l’ordre de 2 % en 2016 et 1,8 % en 2017 (soit environ le niveau de la croissance potentielle actuelle). En ce qui concerne les
États-Unis, il faut rappeler d’une part la bonne tenue de la consommation (qui représente plus de 70 % du PIB), et d’autre part
le grand écart (souvent peu soutenable dans l’histoire) entre le secteur des services (solide) et le secteur manufacturier (plus
fragile, mais dont le momentum récent est positif). La question de fond est de savoir si tout cela va se maintenir. Les indicateurs
précurseurs continuent de plaider pour une croissance de l’ordre de 2 % et non pour une croissance négative. Il n’est pas
question à ce jour de récession aux États-Unis, mais ce qui inquiète, c’est l’absence de marges de manœuvre de la part de
la Fed, incapable jusqu’ici de relever ses taux. La situation actuelle diffère totalement de 2004-2006, deux années durant
lesquelles la Fed avait pu relever 17 fois ses taux, pour un total de 400pb, se créant ainsi les marges de manœuvre… qu’elle
n’allait pas tarder à utiliser, dès la crise financière. On est bien loin de cette situation aujourd’hui : la Fed est en retard sur son
cycle économique, et la stabilité financière – et à un degré moindre le dollar – ne peuvent pas s’offrir de telles hausses de taux.
IMPACT DE MARCHÉ Une récession aux États-Unis serait catastrophique pour l’économie mondiale, et l’Europe, bien qu’elle soit en
meilleure santé, ne serait pas épargnée. Les taux courts resteraient bas pour très longtemps, et la Fed, n’ayant pas de marges
de manœuvre sur la politique conventionnelle, n’aurait pas d’autre choix que de procéder à un QE4. C’est ce qu’a semblé
indiquer implicitement Janet Yellen, il y a près de deux mois. Ne pas miser sur un effet positif sur les classes d’actifs risqués.
Le premier impact sera négatif, et le manque de crédibilité des banques centrales ajoutera certainement de la volatilité et du
stress. Miser sur des nouveaux – et importants – déséquilibres budgétaires.
[ RISQUE # 5] Une forte dévaluation du yuan
[ PROBABILITÉ ] 5 %
ANALYSE En plein mois d’août 2015, la Chine a donné l’impression pendant quelques jours qu’elle abandonnait sa politique de
change, préparant les marchés à une vaste dépréciation du yuan (en 1994, elle avait dévalué le yuan de 30 %). Ces mêmes
craintes ont resurgi début janvier. Jusqu’ici, la Chine a utilisé la politique monétaire, la politique budgétaire, la politique fiscale
et la politique de revenus comme outils de relance, veillant à ne pas utiliser la politique de change. Elle s’est d’ailleurs engagée
auprès du G20 en ce sens, et le yuan sera une des composantes du DTS dès octobre prochain. Au-delà des conséquences
immédiates très négatives sur les marchés financiers, une telle décision (une dévaluation brutale de 10 % au moins) serait sans le
moindre doute interprétée comme un aveu de faiblesse quant à la politique économique dans son ensemble. Faible probabilité,
car la Chine a depuis montré son net désir – et sa capacité – de gérer la stabilité du yuan contre panier, pas de préparer
une forte dévaluation. Un risque faible, mais des dégâts potentiels très importants. L’enjeu majeur de la Chine est désormais
l’ouverture de son compte en capital : attirer des investisseurs internationaux signifie accepter une politique monétaire moins
indépendante, un cours de change plus volatil, des règles différentes entre marché onshore et marché offshore, des flux de
capitaux plus volatils, des marchés moins faciles à administrer et davantage dépendants des investisseurs internationaux, une
plus grande transparence sur l’état des entreprises et notamment des entreprises d’État… bref, un changement assez radical
de gouvernance.
IMPACT DE MARCHÉ Dans un tel scénario, s’attendre à une vague de baisse généralisée des marchés. Une dévaluation surprise
serait l’amorce d’une guerre des changes plus féroce, notamment en Asie. Les politiques monétaires deviendraient extrêmement
accommodantes pour éviter les appréciations de change. Un coup dur pour l’euro — et l’économie européenne, car les devises
EMG représentent plus de 70 % de son cours effectif.
[ RISQUE # 6] La poursuite du ralentissement économique des émergents
(nouvelle chute du prix des matières premières)
[ PROBABILITÉ ] 20 %
ANALYSE La baisse du prix des matières premières, le repli de la croissance chinoise, le renversement à venir de la politique
monétaire américaine sont autant de facteurs qui font craindre un épisode « à la 1997-1998 » pour les émergents, période
d’effondrement généralisé. Il faut rappeler que depuis la fin des programmes de QE américains, les marchés émergents sont en
souffrance. Jusqu’ici, seule l’Asie tenait le choc, portée par la bonne tenue de la Chine et sa capacité à endiguer les difficultés.
Des défauts d’entreprises ou des indicateurs avancés d’activité ont certes de temps en temps alerté les marchés, mais les
moyens utilisés par les officiels chinois (baisse des taux, baisse des taux de réserves des banques, injection de liquidités,
mesures budgétaires et fiscales, maintien de la politique de change…) avaient finalement permis que tout rentre dans l’ordre.
Cela devient plus compliqué désormais. Les prévisions de croissance ont ces derniers mois été régulièrement révisées à la
baisse, et le risque était de voir la demande interne se déliter et les politiques économiques rester inefficaces. Ce risque s’est
néanmoins atténué depuis quelques semaines : la remontée des prix du brut et l’afflux de capitaux ont redonné des couleurs à
ces marchés.
IMPACT DE MARCHÉ Ce scénario serait la continuation des tendances observées en début d’année, en pire pour bon nombre
de pays émergents. Même si la baisse du prix du pétrole est un atout pour les pays avancés consommateurs de matières
premières, il sera difficile de croire en une insularité totale de ces pays. Avec la baisse des prix des matières premières, il faudra
miser sur la poursuite de la baisse des devises EMG, ainsi que des sorties de capitaux des EMG. Favoriser les classes d’actifs
des pays avancés, et les valeurs refuge.
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Facteurs de risque
[ RISQUE # 7] Une nouvelle crise européenne liée au Brexit
[ PROBABILITÉ ] 10 %
ANALYSE Les institutions européennes montrent régulièrement leurs limites, car le « dogme de la convergence » ne les avait
pas préparé aux scénarios de risque. Il s’agissait de répondre à des problèmes comme le déficit de gouvernance européenne,
le manque de coordination des politiques budgétaires, le défaut de surveillance des déséquilibres budgétaires, les écarts de
compétitivité entre pays, le caractère encore inachevé du mécanisme de soutien aux pays en difficulté, la sous-estimation des
interdépendances entre pays membres (même si le dispositif anti-contagion de la BCE a fortement progressé, il n’en est pas de
même du côté budgétaire)… Le récent référendum britannique ajoute une nouvelle couche d’incertitude. La gestion de la sortie
du RU de l’UE ressemble fort à la gestion du divorce le plus complexe de l’histoire. Ce qui est sûr, c’est qu’il s’agit d’un test
important sur la capacité de l’Europe a (une nouvelle fois), gérer une situation de crise, à convaincre sur l’existence d’un projet
pour l’Europe et à ôter toute velléité d’Europe à la carte qui pourrait émerger ici ou là dans l’UE. Une nouvelle crise européenne,
si elle devait avoir lieu, pourrait être fatale… à moins d’un grand saut vers le fédéralisme.
IMPACT DE MARCHÉ On ne connaît que trop bien les impacts négatifs : élargissement des spreads souverains et de crédit, hausse
de la volatilité… mais avec sans doute cette fois un vrai fléchissement de l’euro. Une nouvelle crise européenne risque fort de
valider les scénarios d’éclatement de la zone ou, à tout le moins, de sortie des pays fragiles de la zone… à moins que le scénario
de sortie ne tente le(s) plus solide(s) d’entre eux, ce qui est hautement crédible, car ils finiront par se lasser – sur le plan politique
– de supporter économiquement et financièrement les pays en difficulté.
[RISQUE # 8] Une plus grande instabilité financière
[ PROBABILITÉ ] 50 %
ANALYSE Les banques centrales ont permis le retour de la stabilité financière : baisse des taux, courts et longs ; maintien des
taux à de bas niveaux ; baisse de la volatilité, resserrement des spreads de crédit… autant de facteurs qui ont généré un
environnement de plus grande stabilité. Attention toutefois : cette stabilité a des côtés artificiels qu’il ne faut pas sous-estimer.
Les banques centrales ne peuvent pas à elles seules résoudre tous les problèmes (emploi, investissement, croissance…) et si
les conditions générales ne s’améliorent pas de façon plus nette, une certaine désillusion/déception risque bien de s’installer et
cette stabilité pourrait se transformer en instabilité.
IMPACT DE MARCHÉ Dans un tel cas de figure, on doit miser sur une remontée de la volatilité et des spreads de crédit, particulièrement
en Europe où le marché de l’emploi est plus déprimé et les risques politiques et sociaux plus élevés.
[ RISQUE # 9] Une crise de liquidité
[ PROBABILITÉ ] 20 %
ANALYSE Outre les scénarios de risque présentés ci-dessus et qui pourraient inciter à des liquidations de positions et/ou
de portefeuilles, il convient de rappeler encore une fois que les contraintes actuelles de liquidité incitent à une prudence
supplémentaire : depuis la crise financière de 2008, la baisse des inventaires des banques d’investissement, les contraintes
réglementaires qui ont poussé des grands acteurs à acheter beaucoup d’obligations et à les conserver, la réduction des
activités de prop-trading et market-making, la domination des banques centrales via les QE… tout cela a « asséché » les
marchés de taux, et fermer une position ou un portefeuille prend désormais davantage de temps (7 fois plus de temps
qu’avant la crise financière de 2008 si l’on en croit la Banque d’Angleterre). Même si les bid-offer spreads se sont resserrés
depuis la crise financière (du fait notamment de la chute des taux d’intérêt), les quantités que l’on peut traiter sont en net repli,
ainsi que la rapidité d’exécution, deux critères majeurs reflétant l’absence de liquidité. Rappelons que moins les marchés sont
liquides, et moins les prix reflètent les fondamentaux, plus ils sont manipulables, plus les risques de contagion sont forts, plus
la volatilité est élevée et instable, et moins leur capacité d’absorption des chocs est élevée. Rien de bien rassurant.
IMPACT DE MARCHÉ Cela doit être intégré dans les décisions d’investissement et faire partie des contraintes de construction de
portefeuille et des tests de résistance (stress tests). Prévoir des plans de sortie ou de macro-hedging pour les segments de
portefeuilles moins liquides ou susceptibles de le devenir en cas de crise.
[ RISQUE # 10] Les marchés financiers se trompent dans leurs prévisions de taux longs
[ PROBABILITÉ ] 30 %
ANALYSE Ce risque s’est matérialisé et les anticipations sur la Fed et les taux longs ont été revues à la baisse. Nous révisons donc
à la baisse le risque de voir les marchés refaire la même erreur : les arguments en faveur du maintien des taux (courts et longs)
ne manquent pas (facteurs structurels, institutionnels (attitude des banques centrales) et facteurs cycliques), ce qui explique
pourquoi les taux allemands et japonais 10 ans sont passés en territoire négatifs (-0,10 % et -0,26 % respectivement) et les
10 ans US se sont également repliés (1,43 %). Les marchés ont eu tendance à anticiper systématiquement trop de hausses
depuis près de 4 ans, notamment aux États-Unis. La fin de la crise financière, le redressement de l’activité économique et les
anticipations de resserrement monétaire ou d’inflation étaient les facteurs généralement avancés pour de telles prévisions.
Or les croissances potentielles sont plus basses, la reprise économique moins soutenue que lors des reprises passées
(l’investissement est insuffisant, les salaires contenus, les gains de productivité trop faibles…) et la normalisation monétaire
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Juillet-Août 2016
Facteurs de risque
est prématurée. En outre, l’excès de liquidité mondiale n’est pas près de se tarir : le Japon et la zone euro n’en ont pas fini
avec le QE, les politiques de taux de la Chine, de l’Inde et de nombreux autres pays restent expansionnistes, la Fed va rester
prudente et la Banque d’Angleterre annonce déjà de nouvelles baisses des taux en réponse au Brexit…
IMPACT DE MARCHÉ Les facteurs de maintien des taux longs à de bas niveaux sont puissants, et même si l’on peut assister de
temps en temps à des « repricing » des niveaux de taux longs au gré d’informations, de rumeurs ou d’indicateurs économiques,
les courbes de taux pourraient rester plates et basses plus longtemps qu’escompté.
[ RISQUE # 11] Les banques s’effondrent
[ PROBABILITÉ ] 10 %
ANALYSE Ce risque nous paraît très largement exagéré. Nous ne sommes pas candides pour autant : les taux négatifs pénalisent
les banques, le niveau élevé du coût du capital reflète le poids des crises passées, les craintes d’une nouvelle crise, l’incertitude
sur la régulation, et la difficulté pour les investisseurs à discriminer les banques et les systèmes bancaires sont les facteurs
principaux de la sous-performance des banques… une sous-performance amplifiée par le Brexit précisément parce qu’il ajoute
quelques incertitudes sur la croissance. Nous ne sommes pas non plus exagérément pessimistes. Les banques de 2016 n’ont
rien à voir avec les banques de 2008 ou de 2011 : non seulement elles ont levé des montants très élevés de capitaux, mais le
dispositif anti-crise de la BCE est désormais bien établi : surveillance bancaire, stress tests… En outre, les facilités d’accès aux
liquidités BCE ont fortement réduit risque spécifique et risque systémique depuis plus d’un an et demi. Cependant, on montre
aisément le lien étroit entre sous-performance des banques et baisse des taux longs jusqu’en territoire négatif et la question
qui se pose est bien de savoir jusqu’à quel point les banques peuvent faire face à un maintien durable des taux en territoire
négatif. Nous n’anticipons pas un effondrement, mais des pressions sur la profitabilité amplifiées par l’enjeu de la digitalisation
qui pousse les banques à réduire leur endettement et à rester prudentes en matière de crédit.
IMPACT DE MARCHÉ Parmi les facteurs de fragilité, l’incapacité à discriminer est sans doute le plus gênant : des rumeurs sur une
banque allemande, des mauvaises nouvelles sur les banques italiennes ou portugaises, tout cela entraîne des vagues de
stress, d’élargissement de spreads et de chute des valeurs bancaires. Inutile de montrer en détail les implications sur la stabilité
financière et sur les économies si des faillites bancaires devaient se produire.
[ RISQUE # 12] Les risques politiques et géopolitiques
[ PROBABILITÉ ] 70 %
ANALYSE Les marchés financiers évoluent désormais dans un contexte difficile sur le plan politique et géopolitique : Syrie,
État islamique, flux de migrants, attentats terroristes… autant d’éléments qui ont tendu et fragilisé les relations diplomatiques
entre pays, notamment en Europe. En outre, la situation politique de certains pays comme le Brésil ou la Turquie n’est
pas pour apaiser le climat. Le regain de tensions entre l’Arabie Saoudite et l’Iran était déjà venu conforter ce sentiment
d’insécurité début janvier.
IMPACT DE MARCHÉ Il ne fait aucun doute qu’il y aura régulièrement des regains de tensions et de volatilité. Les risques politiques
actuels sont bien identifiés et spécifiques. Cela sera-t-il suffisant pour ne pas affecter les perspectives de croissance et les
orientations des marchés financiers ? Rien n’est sûr à ce stade.
[ RISQUE # 13] Le dossier post-Brexit entraîne des remous politiques
importants et durables
[ PROBABILITÉ ] 60 %
ANALYSE Le Royaume-Uni a voté : le retrait de l’UE est en marche, même si deux nations s’y sont opposés (l’Écosse et l’Irlande
du Nord). Selon les estimations, l’impact sur le PIB serait significativement négatif. Le RU « perdrait » entre 2,5 % et 9,5 % de
son PIB. Volume et coûts du commerce en seraient affectés, notamment dans le secteur des services financiers, de la chimie,
de l’automobile, autant de secteurs très intégrés dans l’Union européenne. Le camp du Brexit est fortement divisé, avec
des protectionnistes en faveur de la fermeture des frontières et des libre-échangistes désireux de mener des renégociations
d’accords commerciaux. La situation politique s’est assombrie : on sait que le prochain premier ministre (début septembre)
sera conservateur, mais on ne sait pas encore s’il sera un défenseur du « Leave » (par exemple Michael Gove, actuel ministre
de la Justice) ou du « Remain » (par exemple, Theresa May, actuelle secrétaire d’État à l’Intérieur). Nous n’en avons donc
pas fini avec l’instabilité politique au RU. Le retrait du Royaume-Uni n’aurait pas de conséquences économiques graves
pour les pays de l’Union (les pays les plus touchés seraient néanmoins ceux qui ont des liens étroits avec le Royaume-Uni :
l’Irlande en premier, puis le Luxembourg, la Belgique, la Suède, Malte et Chypre si l’on regarde l’angle des exportations,
des flux d’investissements directs et du secteur financier. Le risque est essentiellement politique, celui de voir d’autres pays
européens prôner l’Europe à la carte et ou faire preuve de fortes divisions dans le traitement du dossier britannique.
IMPACT DE MARCHÉ Dans un tel cas de figure, on assistera à un affaiblissement supplémentaire de la livre sterling et du PIB long
terme de l’économie britannique, deux éléments susceptibles de prolonger le statu quo monétaire. On assisterait aussi, sans
aucun doute à une fragilisation des actifs financiers de la zone euro.
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Juillet-Août 2016
Facteurs de risque
[ RISQUE # 14] Des craintes de référendums en cascade en Europe
[ PROBABILITÉ ] 40 %
ANALYSE Le Brexit a redonné vie aux anticipations de référendum dans différents pays de l‘Union européenne, confortées par
les déclarations de nombreux partis d’opposition voyant notamment dans cette opportunité la possibilité de préparer un vote
de rejet des pouvoirs en place. L’Écosse est un cas à part : désireuse de se couper du RU et de rester dans l’UE, la probabilité
d’un référendum est redevenue très élevée. Plus profondément européens qu’ils ne sont britanniques, nombreux sont les
écossais qui croient en une Écosse indépendante et européenne. Pourtant, la situation n’est pas aussi simple : il faut que le
parlement britannique donne son feu vert à une telle proposition et la période de transition serait très complexe. Le retrait du
RU de l’UE concerne également l’Écosse. Il faudra donc attendre l’issue des négociations et la sortie officielle du RU pour que
l’Écosse, à supposer qu’elle devienne alors indépendante, puisse demander son appartenance à l’UE. Un processus long et
hasardeux… car il faudra alors préparer l’introduction d’une monnaie nationale : ce ne sera pas le GBP, et sans doute pas non
plus l’euro… puisque l’Écosse ne sera même plus dans l’UE. Un vrai casse-tête. En Allemagne, la loi fondamentale ne prévoit
de référendum que pour le changement de tracé des frontières des Länder, leur fusion ou leur scission. Le référendum a lieu
dans les territoires concernés. Cependant, en fonction des législations des différents Länder et communes, des référendums
locaux sont autorisés. La constitution Belge ne prévoit pas la possibilité d’un référendum, Il faut 500 000 signataires en Italie
pour qu’un référendum soit possible… mais le processus officiel prend au moins un an… sauf que les référendums sur des
traités ne sont pas possibles actuellement et que la cour constitutionnelle ne le permettra sûrement pas. Même chose en
Autriche où les traités ne sont pas couverts par des référendums. En France, le référendum national (articles 11, 88-5 et 89 de
la Constitution) couvre notamment le champ législatif, celui des traités et le champ constitutionnel. Tout référendum intervient
à l’initiative du président, et pour l’heure, ce sont plutôt les élections présidentielles qui importent (avril – mai prochain). On
voit mal le parti républicain ou le parti socialiste s’engager sur une telle voie suite aux élections présidentielles. En Finlande,
50 000 signatures forcent le débat parlementaire, mais celui-ci n’est pas tenu de passer par un référendum. En Pologne,
500 000 signataires suffisent à provoquer un référendum… sauf s’il s’agit de rejeter les conditions d’un traité européen. En
Hongrie, 100 000 signataires suffisent normalement à provoquer un référendum, mais il ne peut y avoir de référendums contre
un traité de l’UE ou contre les obligations résultant d’un traité international. En termes clairs, peu de probabilité d’assister à
des référendums dans ces pays, mais sans aucun doute des débats sur ces thèmes.
IMPACT DE MARCHÉ Les perspectives de référendums ou de demandes de référendums vont, au moins dans un premier temps,
affaiblir les pouvoirs en place, souvent peu désireux de procéder à de tels votes. Cela est d’autant plus vrai que se profilent
des élections importantes en France (élections présidentielles les dimanches 23 avril et 7 mai 2017), en Allemagne (élections
fédérales entre août et octobre 2017), pour ne citer que celles-là… les débats sur d’éventuels référendums ne suffiront sans
doute pas à affaiblir l’euro ou les spreads souverains et de crédit.
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Juillet-Août 2016
Contexte macroéconomique
JUILLET
AMÉRIQUES
FACTEURS DE RISQUE
ÉTATS-UNIS
> Potentiel de croissance
La reprise va continuer tout en décélérant progressivement
durablement entamé
> Décélération graduelle de la reprise en raison d’une progression moins soutenue de la consommation.
(« stagnation
> Le quasi plein-emploi et l’érosion des marges des entreprises (à partir de niveaux très élevés)
séculaire »)
vont ralentir le rythme d’amélioration du marché du travail. L’accélération modérée des salaires ne
> Hausse excessive
compensera pas, en termes de pouvoir d’achat global, le ralentissement des créations d’emplois.
du dollar (y compris
Les gains de pouvoirs d’achats de 2015 liés au pétrole ne pourront être répétés.
suite au Brexit)
> L’amélioration du climat des affaires dans l’industrie, après les difficultés de 2015, va rester
> Risque politique
graduelle. La décélération de la consommation va peser sur les services.
(élection présidentielle)
> Malgré l’accélération tendancielle des coûts salariaux unitaires (faible productivité, progression
des salaires), l’inflation est (et restera) contenue par l’érosion des marges.
BRÉSIL
> Le nouveau Gouvernement a annoncé de nouvelles mesures en matière de discipline budgétaire et ce > Moindre consolidation
budgétaire que
afin de restaurer la confiance des investisseurs. Toutefois, le contexte économique (récession de forte
nécessaire
ampleur) et politique (les enquêtes sur les affaires de corruption continuent incriminant de nouveaux
> Reprise des pressions
politiciens) pourrait rendre difficile la mise en œuvre de ces mesures.
inflationnistes
> Le nouveau Gouverneur de la BCB envisage un assouplissement de la politique monétaire pour
stimuler la croissance. Mais, entre Brexit et incertitude sur la politique monétaire américaine, il existe > Une monétisation
de la dette
un risque d’appréciation du dollar. Le réal pourrait alors de nouveau se déprécier et accroitre les
pressions inflationnistes de sorte que la BCB maintienne ses taux inchangés.
EUROPE
ZONE EURO
Poursuite, mais ralentissement, de la reprise, sous l’effet du choc d’incertitudes lié au Brexit. > Risque politique
(Brexit, montée des
> La reprise va continuer, soutenue par la demande interne. Elle a progressé en rythme et en qualité
partis contestataires,
début 2016.
crise des réfugiés)
> L’incertitude liée au Brexit va entraîner une baisse de régime fin 2016 et début 2017 en raison 1) d’un
> Contagion des
fort ralentissement au Royaume-Uni se répercutant sur les exportations vers ce pays 2) d’effets négatifs
difficultés économiques
de confiance pesant sur l’investissement. Nous avons baissé de 1,5 % à 1,2 % notre prévision de
et/ou financières du
croissance du PIB pour 2017.
monde émergent
> Les prochains rendez-vous politiques en zone euro (référendum italien en octobre, élections aux
> Intensifi cation des
Pays-Bas, en France et en Allemagne en 2017) peuvent également inciter les entreprises à décaler
pressions défl ationnistes
leurs projets d’investissement.
ROYAUME-UNI
> Choc d’incertitude lié
Fort ralentissement sous l’effet de l’incertitude politique.
au Brexit
> Le manque de visibilité concernant les modalités de sortie de l’UE et le futur cadre des relations
économiques avec l’Europe va fortement pénaliser l’économie. Nous anticipons une récession de > Déficits (public et
externe) très élevés
courte durée au S2 (très probablement au T4) suivie d’un rebond au S1 2017 mais à un rythme affaibli.
> L’investissement privé (entreprises, immobilier) et la consommation vont être affectés. Ils vont subir
l’effet de la remontée de l’inflation liée à la dépréciation de la livre. Nous avons baissé de 2 % à
0,2 % notre prévision de croissance du PIB pour 2017.
ASIE
CHINE
> Un moteur de croissance
Chine : un moteur de croissance de l’économie mondiale en 2016 et 2017
de l’économie mondiale
> Le point bas de l’économie chinoise va perdurer, mais une reprise en forme de U est improbable.
en 2016 et 2017
> Impact retardé des mesures radicales d’assouplissement prises en 2015 et perspectives de
> Le RMB chinois
nouvelles mesures monétaires et budgétaires.
demeure une incertitude
> Le RMB chinois demeure une incertitude pour les marchés financiers mondiaux en 2016
pour les marchés
> Le Brexit est plutôt favorable à la Chine car la PBOC va pouvoir assouplir sa politique à sa discrétion
financiers mondiaux
et ainsi contribuer à la dépréciation du RMB
INDE
> La croissance indienne
Inde : un moteur de croissance régulier pour l’Asie en 2016
est en passe de
> L’Inde s’inscrit dans une trajectoire de croissance en constante amélioration.
rebondir
> L’inflation devrait continuer à ralentir en 2016 compte tenu des perspectives de mousson favorable.
> Le ralentissement de
> Raghuram Rajan a annoncé son départ de la RBI le 4 septembre 2016 ; le nouveau gouverneur
l’inflation est durable
devrait pouvoir soutenir la croissance en assouplissant la politique monétaire. La RBI va maintenir
sa politique accommodante plus longtemps et l’assouplir davantage que ne l’anticipe le marché.
JAPON
> Exposition au
Poursuite de la croissance à un rythme lent.
ralentissement chinois
> La consommation est soutenue par l’amélioration du marché du travail (hausse du taux de
participation) et le reflux de l’inflation. Le plan de stimulus budgétaire et la baisse de l’impôt sur > Montée du yen
les résultats des entreprises constitueront également des soutiens.
> En revanche, la hausse des salaires reste très lente et la hausse du yen pénalise les exportations.
> Malgré le fait que le PM Abe conservera une très large majorité au parlement lors des élections de
juillet, il peu probable qu’il parvienne à vaincre les résistances aux réformes structurelles attendues.
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Juillet-Août 2016
Prévisions macroéconomiques et financières
PRÉVISIONS MACROÉCONOMIQUES
États-Unis : fin de cycle. Les profits ont atteint leur pic mais le marché de l’emploi reste
dynamique et des tensions salariales commencent à apparaître. L’industrie se stabilise après
un passage à vide fin 2015 mais les services, qui ont jusqu’à présent soutenu la reprise grâce au
dynamisme de la consommation des ménages, donnent quelques signes de ralentissement.
Japon : une lente sortie de la déflation. Les ménages doivent s’adapter à des prix plus élevés.
La hausse des salaires est la clef d’une reprise durable mais le ralentissement chinois pèse
sur la confiance des entreprises.
Zone euro : la reprise se poursuit et gagne en qualité grâce à un rebond de l’investissement
des entreprises. Les facteurs cycliques internes sont favorables mais les risques (incertitudes
politiques, exposition au ralentissement émergent) augmentent.
Brésil : bien que l’acquis de croissance pour 2016 soit de -2,5 %, nous préférons à ce stade
maintenir inchangées nos prévisions de croissance à -2,5 % en 2016 et -0,5 % en 2017 et
ce contrairement au consensus qui mise sur une forte récession cette année (-3,7 %) et un
retour à des taux de croissance positifs en 2017. L’inflation sous le poids de la détérioration
du marché du travail pourrait diminuer et limiter la contraction de la consommation privée.
Par ailleurs, eu égard à la situation économique et politique, les réductions de dépenses
publiques pourraient être moindres qu’annoncé.
Russie : en Russie, les chiffres conjoncturels du second trimestre sont plutôt encourageants.
Par ailleurs, le PIB au premier trimestre est ressorti moins dégradé qu’au dernier trimestre
2015 et meilleur qu’attendu (croissance du PIB de -1,2 % en ga contre -3,8 % au T4 2015).
Nous avons donc révisé nos prévisions de croissance avec une récession moins marquée en
2016 (-0,7 % contre -1,8 % prévus avant) et un rebond plus significatif en 2017 (+1 % contre
+0,5 % avant).
Croissance du PIB
réel, %
2015 2016 2017
2,4
2,0
1,8
0,5
0,6
0,8
1,6
1,5
1,2
1,5
1,6
1,3
1,1
1,4
1,1
0,8
1,1
1,1
3,2
2,6
1,3
2,2
1,1
0,2
-3,8 -2,5 -0,5
-3,7 -0,7 1,0
7,3
7,5
7,6
4,8
5,0
5,1
6,9
6,7
6,5
3,8
2,6
3,0
1,9
1,7
1,4
4,1
4,1
4,4
3,1
3,1
3,1
Moyennes
annuelles (%)
États-Unis
Japon
Zone euro
Allemagne
France
Italie
Espagne
Royaume-Uni
Brésil
Russie
Inde
Indonésie
Chine
Turquie
Pays développés
Pays émergents
Monde
Inflation (IPC, a/a, %)
2015
0,1
0,8
0,0
0,1
0,1
0,1
-0,5
0,1
9,0
15,5
5,2
6,4
1,4
7,7
0,2
4,0
2,4
2016
1,5
0,7
0,4
0,5
0,4
0,2
0,0
0,8
6,8
10,0
5,4
4,5
1,2
7,5
1,0
4,2
2,8
2017
2,0
1,7
1,1
1,4
1,1
1,4
1,1
1,6
6,0
8,5
5,2
4,5
1,2
7,0
1,6
3,7
2,8
Source : Recherche Amundi
PRÉVISIONS DE TAUX DIRECTEURS
Fed : la détérioration du contexte macrofinancier va amener la Fed à être plus prudente. Il
est désormais peu probable que la Fed relève ses fed funds en 2016.
BCE : les annonces du 10 mars ont été conséquentes. La politique de la BCE redeviendra un
thème de marché lorsqu’il sera question des modalités de l’extension du QE au-delà de mars 2017.
BoJ : dans un contexte économique très médiocre et de très forte appréciation du yen, il est
très probable que la BoJ augmente son programme de QE.
01/07/2016
États-Unis
Zone euro
Japon
Royaume-Uni
0,50
0,00
-0,10
0,50
Amundi Consensus Amundi Consensus
+ 6m.
T4 2016 + 12m. T2 2017
0,50
0,70
0,75
1,05
0,00
0,00
0,00
0,00
-0,10
-0,10
-0,10
-0,10
0,00
0,35
0,00
0,55
BoE : la baisse des taux directeurs de la BoE le 14 juillet est acquise. Le recours à des outils
de politique monétaire non conventionnels (QE) est probable.
PRÉVISIONS DE TAUX LONGS
États-Unis : la forte incertitude macrofinancière, la perspective d’un resserrement
monétaire très réduit de la part de la Fed, les réinvestissements de titres du Trésor de
la Fed et les réallocations de portefeuille des investisseurs européens ne plaident pas
pour une remontée significative des taux longs. La pente va continuer à s’aplatir.
Zone euro : les pressions baissières sur les taux vont se prolonger. Les modifications
de la structure du QE sont susceptibles d’être bénéfiques pour les obligations
périphériques. les pressions baissières sur les taux vont se prolonger. Les modifications
de la structure du QE sont susceptibles d’être bénéfiques pour les obligations
périphériques.
Royaume-Uni : les marchés vont sûrement la question d’un QE ou de taux négatifs
de la part de la BoE. En conséquence, les taux ont encore de la marge pour baisser.
Japon : l’introduction de taux négatifs a induit une forte baisse des taux japonais. Avec
la poursuite de la politique du QQE, les taux resteront très bas pendant une période
prolongée
Taux 2 ans
Amundi Consensus Amundi Consensus
01/07/2016
+ 6m.
T4 2016 + 12m. T2 2017
États-Unis
0,56 0,60/0,80
0,69
0,60/0,80
0,81
Allemagne
-0,64 -0,60/-0,40 -0,64 -0,60/-0,40 -0,65
Japon
-0,33 -0,40/-0,20 -0,34 -0,40/-0,20 -0,32
Royaume-Uni
0,14 -0,20/0,00 0,12 -0,20/0,00 0,20
Taux 10 ans
Amundi Consensus Amundi Consensus
01/07/2016
+ 6m.
T4 2016 + 12m. T2 2017
1,41 1,60/1,80 1,50 1,60/1,80 1,58
États-Unis
Allemagne
-0,13 0,00/0,20 -0,09 0,00/0,20 -0,05
Japon
-0,25 -0,20/0,00 -0,25 -0,20/0,00 -0,22
Royaume-Uni
0,81 0,60/0,80 0,87 0,60/0,80 0,95
PRÉVISIONS DE CHANGE
EUR : nous nous attendons à une relative stabilité de l’euro en termes effectifs dans
les mois à venir.
USD : le dollar s’est apprécié après le vote sur le Brexit mais il n’existe pas de
catalyseur permettant à cette appréciation d’être durable. Le dollar pourrait repartir à
la baisse si la Fed renonçait à son cycle de hausse de taux.
JPY : lêtre long yen est devenu plus risqué, étant donné qu’une réaction des autorités
japonaises est désormais très probable.
GBP : la livre a lourdement chuté après le vote sur le Brexit. Bien qu’elle soit sousévaluée d’après de nombreux modèles, elle pourrait continuer à baisser davantage
dans les semaines à venir.
22
06/07/2016
EUR/USD
USD/JPY
EUR/GBP
EUR/CHF
EUR/NOK
EUR/SEK
USD/CAD
AUD/USD
NZD/USD
1,10
101
0,86
1,08
9,38
9,48
1,30
0,75
0,71
Amundi Consensus Amundi Consensus
+ 6m.
T4 2016 + 12m. T2 2017
1,10
1,08
1,10
1,08
110,00 105,00 110,00 107,00
0,90
0,84
0,90
0,83
1,10
1,08
1,10
1,10
9,10
9,19
9,00
9,18
9,10
9,22
8,90
9,10
1,30
1,32
1,30
1,30
0,75
0,71
0,75
0,72
0,70
0,67
0,70
0,66
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
7/8
#
Juillet-Août 2016
Achevé de rédiger le 6 juillet 2016
1 Brexit : vers une récession au Royaume-Uni et
L’essentiel
un tassement de la croissance en zone euro
DIDIER BOROWSKI, Recherche, Stratégie et Analyse
Le vote du Brexit est une immense
source d’incertitude : incertitude
sur le devenir des relations
commerciales entre le RU et l’UE,
incertitude politique, incertitude
encore sur l’unité du pays. Le « choc
d’incertitude » peut faire tomber
l’économie britannique en récession.
Le vote du Brexit est une immense source d’incertitude : incertitude sur le devenir
des relations commerciales entre le Royaume-Uni (RU) et l’Union européenne
(UE) et donc potentiellement sur la localisation future de certains segments
d’activité, incertitude politique (Quel premier ministre ? Pour quelle politique et
quel modèle de négociation ?), incertitude encore sur l’unité du pays (référendum
d’indépendance possible en Écosse). Une chose est sûre, ces incertitudes ne
seront pas levées rapidement. Les chefs d’État et de gouvernement ont été
clairs lors du sommet des 29-30 juin : aucune négociation, même informelle,
ne peut commencer tant que le gouvernement britannique n’active pas l’article
50 (qui entérine la procédure de sortie d’un pays de l’UE). Dans le meilleur des
cas, l’incertitude à ce sujet se prolongera donc jusqu’au 16 septembre (date du
prochain sommet informel de l’UE-27). Mais à peine une semaine après l’élection
du leader du parti conservateur qui succédera à David Cameron comme premier
ministre, il est peu probable que le gouvernement britannique se décide. Le RU
s’engage néanmoins de plus en plus clairement sur le vote du Brexit. L’ensemble
des candidats au poste de premier ministre s’accordent désormais sur le fait qu’il
faudra activer l’article 50 mais probablement pas avant fin 2016 ou début 2017.
L’absence totale de visibilité va inciter
les acteurs économiques à différer leurs
projets ou décisions d’achat. En revanche,
en l’absence du durcissement significatif
des conditions monétaires et financières,
l’impact sera moindre sur la zone euro.
Nous revoyons à la baisse nos prévisions
de croissance. La balle est dans le camp
des chefs d’État et de gouvernement. Eux
seuls sont aujourd’hui en mesure 1) d’éviter
un scénario d’enlisement sur le dossier
britannique, 2) de garantir la cohésion
de l’UE et 3) de lancer des initiatives qui
relancent le projet européen. À plus court
terme, pour endiguer le stress financier, ils
devront déjà s’entendre sur les modalités
de la recapitalisation du secteur bancaire
italien.
Ce choc d’incertitude peut faire tomber l’économie britannique en
récession. Dans la mesure où le RU restera membre à part entière de l’UE
pendant encore deux ans au minimum, ce n’est pas le canal du commerce qui
va affecter l’économie britannique. En revanche, l’absence totale de visibilité
va inciter les acteurs économiques à différer leurs projets ou décisions d’achat.
On devrait ainsi observer d’ici la fin de l’année :
• Un repli de l’investissement et coup d’arrêt aux embauches. Le
principal déterminant de l’investissement des entreprises est la demande
anticipée (qui va chuter). Les projets d’investissement seront donc, quand
c’est possible, reportés dans le temps. Il en va de même en ce qui concerne
les embauches qui vont vraisemblablement connaître un coup d’arrêt.
• Une remontée du taux d’épargne des ménages. Les ménages, craignant
pour leur emploi, constituent en règle générale une épargne de précaution.
Le taux d’épargne des ménages, qui a beaucoup baissé au cours des
dernières années (passant de 9 % en 2012 à 4,2 % en 2015), peut remonter
brutalement (rappelons que 9 % correspondent à la moyenne du taux
d’épargne entre 1996 et 2011). Sans compter que l’inflation induite par
la dépréciation de la livre va peser sur leur pouvoir d’achat (les ménages
importent en grande partie les biens qu’ils consomment).
Il ne faut toutefois pas sombrer dans un excès de pessimisme. L’économie
britannique s’est toujours avérée flexible et résiliente face aux chocs. En outre, une
grande partie des biens consommés étant importée, l’impact sur le PIB devrait
être finalement inférieur à celui sur la demande domestique. Et ce d’autant que
les exportations devraient bénéficier de la dépréciation de la livre (le GBP s’est
déprécié de 15,6% contre le US dollar par rapport à la moyenne du 2nd semestre
2015). Enfin et surtout, la politique économique va devenir très accommodante :
outre la Banque d’Angleterre qui va rapidement baisser ses taux d’intérêt, il faut
prendre en compte la politique budgétaire. Une fois en place, le nouveau Premier
ministre va probablement mener une politique expansionniste (baisses d’impôts).
Dans ces conditions, nous anticipons une récession de courte durée (2 trimestres
de contraction du PIB, T3 et T4 2016) puis un rebond de la croissance dès le 1er
semestre 2017, mais sur un rythme plus faible qu’avant le Brexit. Tout compte
fait, nous révisons notre prévision de croissance (en moyenne annuelle)
1
Indice de stress fi nancier sysstémique de
la Banque centrale européenne
0.7
0.6
0.5
Composite
23/06/2016 (pré-Brexit)
0.4
0.3
0.2
0.1
0
01-10
06-10
11-10
04-11
09-11
02-12
07-12
12-12
05-13
10-13
03-14
08-14
01-15
06-15
11-15
04-16
• Une baisse de l’immobilier. Il y a une bulle sur l’immobilier résidentiel,
notamment à Londres. La chute de la demande va faire baisser les prix. La
bonne nouvelle est que cela va re-solvabiliser les ménages les moins nantis.
Mais cela va parallèlement générer un « effet richesse négatif » qui pèsera
lourdement sur la consommation.
L’article 50 sera
vraisemblablement activé fin
2016 ou début 2017
Source : Bloomberg, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
23
7/8
#
Juillet-Août 2016
au RU de 1,8 % à 1,1 % en 2016 et de 2,0 %- à 0,2 % en 2017 (+1,3 % en
glissement annuel fin 2017).
La récession au Royaume-Uni
sera de courte durée
La reprise dans la zone euro va se poursuivre mais à un rythme affaibli.
Le choc d’incertitude concerne avant tout le RU. Rappelons que la zone euro
bénéficiait (avant le Brexit) d’une bonne dynamique conjoncturelle tirée par la
demande domestique. Cette dynamique n’est pas fondamentalement remise
en cause. À ce stade, les conditions financières demeurent particulièrement
accommodantes. L’épisode actuel n’a donc rien en commun avec la récession
précipitée par la faillite de Lehman Brothers, ni même avec celle engendrée par
la crise des dettes souveraines. L’impact économique direct sur la zone euro
transite d’abord par l’exposition commerciale (biens et services) des pays de
l’UE au RU. Mécaniquement, les exportations de la zone euro vers le RU vont
chuter en raison de la chute de la demande domestique et de la dépréciation de
la livre. Mais la part des exportations vers le RU ne représente que 4 % du PIB
de la zone euro, ce qui n’est pas suffisant pour faire dérailler la reprise. Ceci dit,
il serait imprudent de penser que la transmission des effets néfaste du Brexit
se limitera au canal des exportations. Il est très probable que les enquêtes se
détériorent avec l’incertitude et que la demande domestique se tasse en zone
euro (cf. encadré). Nous révisons donc notre prévision de croissance de 0,3pp
de 1,5 % à 1,2 % en 2017. Tout compte fait, le Brexit provoquerait donc
un ralentissement de la croissance en zone euro, mais sans remettre en
cause l’amélioration sur le front de l’emploi.
C’est une crise politique avant
d’être une crise économique
et financière
> Incertitude et croissance : que sait-on ?
L’incertitude est un concept difficile à mesurer. Il en existe plusieurs de
multiples dimensions. Nous nous limiterons ici à l’examen de deux d’entre
elles : l’incertitude politique et l’incertitude financière.
700
Indice Europe
600
Indice Royaume-Uni
500
400
300
200
100
2016
2015
2014
2013
2012
2011
2010
2009
2008
0
2007
Dans un travail séminal sur le lien entre incertitude et décisions d’investissement, Ben
Bernanke 3 avançait comme argument le coût élevé de la réversibilité d’un investissement
(vs. le coût lié à l’attente de nouvelles informations) pour expliquer l’impact. Dans
une entreprise, un projet d’investissement se réalise quand son rendement anticipé
dépasse le coût du projet. Mais l’incertitude vient brouiller les cartes et il peut être
rationnel de reporter dans le temps les décisions d’investissement. Pour les mêmes
raisons, les entreprises peuvent ralentir leurs embauches (le phénomène est d’autant
plus marqué que la rigidité du marché du travail est forte car les coûts de réversibilité
sont élevés) et les ménages différer leurs achats de biens durables De nombreuses
études empiriques ont confirmé que l’incertitude pesait sur la demande interne.
Indices d’incertitude politique
2006
– Pour appréhender l’incertitude financière, on se propose ici de retenir l’indice
de stress construit par la BCE. Cet indicateur retient plus particulièrement notre
attention dans la mesure où, d’une part, il est observable par tous et où, d’autre
part, il est un élément qui peut conditionner le discours et les interventions de la
BCE. Cet indice a retrouvé post Brexit des niveaux inobservés depuis la crise des
dettes souveraines 2 (cf. graphiques).
2
2005
– L’incertitude politique est appréhendée de façon assez rudimentaire par la fréquence
à laquelle certains mots ou expressions clé sont employés dans la presse financière 1.
Cette dernière s’est envolée suite au vote du Brexit (cf. graphiques).
Source: Economic Policy Uncertainty, Recherche Amundi
1
Pour le Royaume-Uni (cf. graphique ci-joint), l’indice reporte la part des articles de
presse parus dans le Financial Times et le Times of London traitant d’économie
(i.e. contenant les termes « économie » ou « économique »), de politique (« taxe »,
« politique », « régulation », « dépense », « déficit », « budget », ou « Banque
d’Angleterre ») et d’incertitude (« incertain » ou « incertitude »).
2
Le fait que ce soit lors de l’envolée de cet indicateur de stress que la BCE ait laissé
circuler la rumeur selon laquelle, elle envisageait d’acheter les titres au prorata des
dettes des Etats et non plus au prorata de la participation au capital de la BCE n’est
peut-être pas un hasard. Acheter au prorata des dettes bénéficierait davantage à l’Italie
(et à la France) au détriment de l’Allemagne. L’Allemagne consentirait d’autant plus
facilement à cela qu’elle est la première victime de l’actuelle clé de répartition qui
contribue à faire plonger les taux allemands en territoire négatif. Un changement de clé
de répartition serait stabilisateur pour l’Italie en cas d’aggravation de la crise bancaire.
3
Ben Bernanke « Irreversibility, uncertainty and cyclical investment », quarterly journal of
economics, vol.98, no. 1 (1983).
24
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
7/8
#
Juillet-Août 2016
Le ralentissement de la demande interne induit par ce climat d’incertitude
est néanmoins impossible à calibrer ex ante (trop d’inconnues). À ce stade,
on note toutefois qu’il n’y a pas de durcissement des conditions de crédit ce
qui est un facteur rassurant pour la dynamique conjoncturelle. Les conditions
financières restent accommodantes en dépit du « stress financier » enregistré :
les taux d’intérêt restent faibles dans tous les pays, les établissements financiers
ont un accès illimité à la liquidité et l’euro s’est stabilisé en termes de taux de
change effectif. Dans ces conditions, nous pensons que l’impact de l’incertitude
sur la demande finale sera contenu, très inférieur en l’occurrence à celui observé
lors de la crise des dettes souveraines.
500
France
Allemagne
Italie
400
300
200
100
2016
2015
2014
2013
2012
2011
2010
0
2009
La fragilité des banques italiennes combinée à un agenda politique particulièrement
chargé (sommet informel de l’UE-27 à Bratislava le 16 septembre sur le Brexit,
référendum sur la constitution en Italie début octobre) ajoutent à l’incertitude. Sans
compter l’organisation de nouvelles élections présidentielles en Autriche (2 octobre)
et le référendum en Hongrie sur les « quotas d’immigration européens » (planifié à
la même date) qui peuvent venir exacerber les forces centrifuges au sein de l’UE.
Indices d’incertitude politique
2008
D’une certaine façon, on peut expliquer l’affaiblissement de la conjoncture préreferendum au RU par le niveau d’incertitude élevé atteint dans les mois qui ont
précédé le scrutin. Après le vote, le niveau d’incertitude politique s’est envolé
au RU mais aussi plus généralement en Europe comme l’atteste l’évolution des
indices d’incertitude politique (cf. graphique).
3
2007
Du côté des entreprises, B. Julio et Y. Yook4, ont étudié sur le plan microéconomique
les investissements dans 48 pays entre 1980 et 2005. Ils trouvent que l’organisation
d’élections perturbe significativement les cycles d’investissement. Ils observent
en par ticulier que dans l’année qui précède une élection, les entreprises
tendent à réduire leurs dépenses d’environ 5 % par rappor t aux années non
électorales. L’effet est encore plus prononcé quand le résultat des élections est
incertain. Durant ces épisodes, les entreprises augmentent leur trésorerie, ce
qui est compatible avec l’idée qu’elles ne renoncent pas définitivement à leurs
projets d’investissement mais temporisent en attendant d’y voir plus clair. Si
l’environnement réglementaire ou la fiscalité sont incer tains, les effets des
cycles électoraux sont encore plus marqués. L’impact sur l’investissement est
d’autant plus fort que le gouvernement est instable, notamment dans les secteurs
potentiellement sensibles à la politique économique. C’est pourquoi on trouve par
ailleurs que les élections serrées et dont les enjeux sont importants ont davantage
d’impact que celles dont les résultats sont prévisibles. Une fois l’incertitude
levée, on observe néanmoins un rebond de l’investissement (l’impact négatif sur
l’investissement est donc, dans la plupart des cas, temporaire).
Source: Economic policy uncertainty website,
Recherche Amundi
Toutefois, force est de reconnaître que les risques sont baissiers. C’est la raison
pour laquelle 1) les banques centrales se tiennent prêtes à en faire davantage et 2)
les taux d’intérêt à long terme continuent de baisser (fuite vers les « valeurs refuge »).
4
Political uncertainty and corporate investment cycles", B. Julio and Y. Yook, the
Journal of Finance (2012)
Cette prévision est toutefois assortie d’un biais baissier très significatif.
La crise politique au RU est susceptible d’engendrer une crise politique dans
toute l’Europe. On verrait alors le choc de confiance se propager à l’ensemble
de la zone euro : la consommation et l’investissement ralentiraient nettement¸
la croissance pourrait tomber très en deçà de 1 % et le chômage remonter.
Un choc de cette nature renforcerait les pressions déflationnistes, obligerait
la BCE à faire davantage d’assouplissement monétaire et les gouvernements
à mettre en place des programmes de stimulation budgétaire ou fiscale. La
balle est dans le camp des chefs d’État et de gouvernement. Eux seuls sont
aujourd’hui en mesure 1) d’éviter un scénario d’enlisement sur le dossier
britannique, 2) de garantir la cohésion de l’UE et 3) de lancer des initiatives
qui relancent le projet européen. À plus court terme, pour endiguer le stress
financier, ils devront déjà s’entendre sur les modalités de la recapitalisation du
secteur bancaire italien.
Le Brexit est un frein pour
la zone euro
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
25
7/8
#
Juillet-Août 2016
Achevé de rédiger le ??????? 2016
2 Le renminbi, nouvelle pierre angulaire
des devises émergentes
BASTIEN DRUT, Stratégie et Recherche Économique
ROBERTA FORTES, Stratégie et Recherche Économique
Depuis l’été 2015, la parité USD/RMB a pris une importance inédite
sur les marchés financiers. L’accélération de la dépréciation du renminbi
face au dollar en août 2015 et en janvier 2016 ont été à l’origine de violentes
turbulences de marché.
Elles ont ravivé les inquiétudes au sujet de l’économie chinoise et par
extension au sujet des économies émergentes, ce qui a joué négativement
sur les actifs risqués (du moins, de façon temporaire) et a ralenti le cycle
de resserrement de taux directeurs de la Fed. Le renminbi a également
acquis un nouveau statut sur le marché des changes, son évolution étant
désormais déterminante pour les devises émergentes.
Les programmes de « quantitative easing » (QE) successifs de la Fed,
de la BoJ et de la BCE ont mené à une dépréciation significative en
termes effectifs du dollar, du yen et de l’euro, qui se sont traduites lors
des années post-Grande Récession par une très forte appréciation
réelle du renminbi, la seule devise de poids du système international pour
laquelle la banque centrale n’a pas mené de politique de QE.
En mai 2016, le taux de change réel effectif de la Chine était 30 % audessus de sa valeur moyenne sur 2008 alors qu’il était 14 % et 11 % plus
bas dans le cas de la zone euro et du Japon et 13 % plus haut dans le cas
des États-Unis. Alors que la question de la sous-évaluation du renminbi
pouvait se poser avant la Grande Récession, il ne fait aujourd’hui plus de
doute que le renminbi est surévalué, notamment eu égard aux défis que
connaît et qui attendent l’économie chinoise. La question de la gestion de
la surévaluation du yuan par les autorités chinoises est l’une des questions
les plus déterminantes pour les marchés sur les années à venir.
Le renminbi a atteint un niveau très élevé au cours de l’année 2015,
notamment en raison de la réappréciation du dollar, ce qui a précipité
le besoin de réformes monétaires. Le 11 août 2015, la PBoC a annoncé
que les forces de marché joueraient un plus grand rôle dans le mécanisme
de formation du fixing du renminbi.
En deux jours, la parité USD/RMB avait pris 2,8 %. Deux semaines après
l’admission du renminbi dans le panier de droits de tirage spéciaux du FMI
(le 30 novembre 2015), la PBoC a annoncé qu’elle suivrait l’évolution du
renminbi, non plus contre le dollar mais contre un panier de treize devises
(souvent appelé panier CFETS). Cette décision a été dans le sens d’un
désarrimage progressif du renminbi d’avec le dollar.
La Chine a pris une place de plus en plus importante et même désormais
prépondérante dans les relations commerciales des pays émergents
ces vingt dernières années. Par exemple, la Chine représente 18 % des
exportations de la Malaisie et 20 % des exportations du Brésil, contre
respectivement 8 % et 3 % au milieu des années 1990. Cela a évidemment
de grandes répercussions pour la valorisation des taux de change. Alors
que le cours du renminbi n’avait que peu d’intérêt pour valoriser le ringgit
malais ou le real brésilien il y a 20 ans, c’est l’inverse aujourd’hui : l’évolution
du renminbi est devenue prépondérante aujourd’hui.
Le meilleur moyen de s’en convaincre est sans doute de regarder l’évolution
du poids des grandes devises (USD, EUR, JPY, RMB) dans les taux de
change effectif calculés par la BRI pour les devises émergentes.
Les graphiques A, B et C représentent l’évolution de ces poids pour trois
périodes distinctes : 1993-1995, 2002-2004 et 2011-2013.
26
L’essentiel
Jusqu’à une époque récente,
l’augmentation du poids économique
de la Chine se manifestait sur le
marché des changes essentiellement
par l’impact que pouvait avoir
sa conjoncture sur les prix des
matières
premières.
L’évolution
du renminbi en elle-même n’avait
que relativement peu d’impact sur
les autres devises car le renminbi
était extrêmement stable et très
fortement ancré au dollar. Cela dit,
les réformes monétaires récentes
changent radicalement la donne.
Le nouveau régime de change chinois a
fait entrer le marché des changes dans
un nouveau paradigme. Les moindres
variations du renminbi se révèlent
déterminantes pour l’évolution des devises
émergentes par rapport aux devises
développées.
Le renminbi a acquis un
nouveau statut sur le marché
des changes, son évolution
étant désormais déterminante
pour les devises émergentes
La Chine a pris une place
de plus en plus importante
et même désormais
prépondérante dans
les relations commerciales
des pays émergents
ces vingt dernières années
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7/8
#
Juillet-Août 2016
A — Poids des devises principales dans les taux de change effectifs (1993-1995)
35
30
25
Taux de change effectif du dollar et du
renminbi, et parité USD/RMB
1
130
6.80
125
6.70
20
6.60
120
15
10
6.50
115
6.40
5
110
Argentine
Philippines
Brésil
Af. du sud
Singapour
Indonésie
Inde
USD
6.20
100
6.10
95
6.00
35
07-16
04-16
01-16
10-15
07-15
04-15
01-15
10-14
B- Poids des devises principales dans les taux de change effectifs (2002-2004)
07-14
Source: BRI, Recherche Amundi
04-14
JPY
Thailande
NZ
Malaisie
Pérou
EUR
6.30
105
01-14
RMB
Australie
Chili
Taiwan
Corée Sud
0
Taux de change effectif USD de la Fed
Taux de change effectif RMB de la PBoC
USDRMB (R.)
30
25
20
Source : Bloomberg, Recherche Amundi
15
10
5
RMB
EUR
JPY
Argentine
Philippines
Brésil
Af. du sud
Singapour
Indonésie
Inde
Thailande
NZ
Malaisie
Pérou
Australie
Chili
Taiwan
Corée Sud
0
Source: BRI, Recherche Amundi
USD
C- Poids des devises principales dans les taux de change effectifs (2011-2013)
Les réformes monétaires
récentes changent
radicalement la donne
35
30
25
20
15
10
5
JPY
USD
Argentine
Philippines
Brésil
Af. du sud
Singapour
Indonésie
Inde
Thailande
NZ
Malaisie
Pérou
Australie
EUR
Source: BRI, Recherche Amundi
Le renminbi est désormais la devise dont le poids dans le taux de change
effectif est le plus important dans le cas de la Corée du Sud, de Taïwan,
du Chili, de l’Australie, du Pérou, de la Malaisie, de la Nouvelle-Zélande, de
la Thaïlande, de l’Indonésie, de Singapour… mais aussi de la zone euro, des
États-Unis et du Japon.
Jusqu’à une époque récente, l’augmentation du poids économique
de la Chine se manifestait sur le marché des changes essentiellement
par l’impact que pouvait avoir sa conjoncture sur les prix des matières
premières. L’évolution du renminbi en elle-même n’avait que relativement
peu d’impact sur les autres devises car le renminbi était extrêmement
stable et très fortement ancré au dollar. Cela dit, les réformes monétaires
récentes changent radicalement la donne.
Le nouveau régime de change chinois a fait entrer le marché des changes
dans un nouveau paradigme. Il est clair que les mouvements de la parité USD/
RMB ont joué un rôle de plus en plus significatif dans l’évolution des devises
émergentes. L’un des moyens d’évaluer l’impact du renminbi sur les devises
d’autres pays est d’estimer les régressions dites de « Frankel-Wei » (« Yen bloc
or dollar bloc ? Exchange rate policies of the East Asian Economies », 1994).
Celles-ci expliquent la variation d’une devise « X » par rapport à un numéraire
(le franc suisse par exemple) par la variation des quatre grandes devises (USD,
EUR, RMB, JPY) contre ce même numéraire :
2
Taux de change réel effectif
(100 = moyenne de 2008)
180
RMB
USD
160
EUR
140
JPY
120
100
80
60
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
RMB
Chili
Taiwan
Corée Sud
0
Source : Datastream, Recherche Amundi
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Juillet-Août 2016
ο ln ൬
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ܴ‫ܤܯ‬௧
‫ܴܷܧ‬௧
‫ܻܲܬ‬௧
൰ = ߙ + ‫݌‬ଵ ‫ כ‬ο ln ൬
൰ + ‫݌‬ଶ ‫ כ‬ο ln ൬
൰ + ‫݌‬ଷ ‫ כ‬ο ln ൬
൰ + ‫݌‬ସ ‫ כ‬ο ln ൬
൰
‫ܨܪܥ‬௧
‫ܨܪܥ‬௧
‫ܨܪܥ‬௧
‫ܨܪܥ‬௧
‫ܨܪܥ‬௧
La devise de référence est définie comme la devise ayant le coefficient positif
le plus élevé. Nous avons estimé les régressions de « Frankel-Wei » pour deux
périodes : la période A allant de juillet 2014 à fin juillet 2015 et la période B,
allant de début août 2015 à fin juin 2016. La période A couvre la première phase
de l’appréciation du dollar, lors de laquelle les autorités chinoises laissaient le
renminbi s’apprécier avec le dollar. La période B couvre le nouveau régime de
change chinois avec le désarrimage du renminbi au dollar et le suivi du panier
CFETS. Les résultats apparaissent dans le tableau suivant.
Régressions de « Frankel-Wei »
Période A : juillet 2014 — juillet 2015
Période B : août 2015 — juin 2016
INR
0.42
0.54
-0.03
0.04
0.95
Devise de
référence
CNY
0.4 **
0.57 ***
-0.1
-0.16 **
0.81
Devise de
référence
CNY
IDR
0.15
0.78 *
0.03
-0.02
0.93
CNY
0.15
0.75 **
-0.24
-0.27
0.42
CNY
MYR
0.47
0.29
0.13
0.07
0.9
USD
-0.32
1.34 ***
-0.2
-0.58 ***
0.49
CNY
SGD
0.29
0.23
0.21 ***
0.2 ***
0.98
USD
-0.08
0.71 ***
0.13
-0.16 *
0.64
CNY
HKD
0.97 ***
0.02
0.01 **
0
1
USD
0.96 ***
0.05 **
-0.02
-0.01
1
USD
USD
CNY
EUR
JPY
R²
USD
CNY
EUR
JPY
R²
KRW
0.53
0.13
0.1
0.16
0.9
USD
0.32
0.55
-0.06
-0.27 *
0.45
CNY
PHP
1.42 ***
-0.38
-0.08
0.02
0.97
USD
0.59 ***
0.35 **
-0.12
-0.17 ***
0.84
USD
THB
0.39
0.5
-0.05
0.13 *
0.96
CNY
0.5 **
0.38 *
-0.07
-0.12
0.69
USD
TWD
0.51 *
0.38
0.02
0.03
0.98
USD
0.4 **
0.57 ***
-0.14
-0.13 *
0.81
CNY
BRL
-0.78
1.03
0.2
0.46
0.57
CNY
0.27
0.43
-0.07
-0.48 *
0.14
CNY
CLP
-0.2
0.87
0.23 **
0.16
0.88
CNY
0.13
0.72 **
0.13
-0.15
0.45
CNY
COP
-0.42
0.91
0.26
0.06
0.57
CNY
-0.43
1.32 **
0.25
-0.36
0.26
CNY
MXN
-0.76
1.49 **
0.08
0.15
0.83
CNY
-0.14
1.32 ***
0.21
-0.39 *
0.5
CNY
PEN
0.52 **
0.41
0.06
0.02
0.98
USD
0.47 **
0.5 **
0.11
-0.08
0.74
CNY
CZK
0.56 **
-0.54 **
0.94 ***
-0.01
0.98
EUR
-0.03
0.03
0.99 ***
-0.01
0.97
EUR
HUF
0.08
-0.06
0.96 ***
0.08
0.92
EUR
-0.31
0.23
1.19 ***
0
0.53
EUR
PLN
-0.01
0.04
0.92 ***
0.13
0.93
EUR
-0.21
0.29
0.88 ***
-0.16 *
0.42
EUR
RON
0.16
-0.07
1.01 ***
-0.07
0.97
EUR
-0.12
0.12
0.95 ***
0.04
0.83
EUR
RUB
-5.13 **
5.81 **
0.01
0.58
0.46
CNY
0.15
0.95
-0.83
-0.45
0.25
CNY
TRY
-0.95
1.58 *
0.29 *
0.11
0.78
CNY
0.04
0.88 **
-0.3
-0.29
0.4
CNY
ILS
1.29 **
-0.84
0.33 ***
0.18
0.9
USD
0.49 *
0.15
0.58 ***
-0.18 *
0.58
EUR
ZAR
-1.01
1.46
0.21
0.34 *
0.78
CNY
-0.87
1.72 **
0.41
-0.48
0.22
CNY
*** significativité à 1 %, ** significativité à 5 %, * significativité à 10 %
Nous pouvons observer d’importants changements dans la dynamique
des devises entre les deux périodes considérées. Sur les 26 devises
émergentes considérées, le nombre de devises ayant le renminbi comme devise
de référence est passé de 10 sur la période A à 14 sur la période B alors que le
nombre de devises ayant le dollar comme devise de référence est passé de 8 à
3. L’euro est la devise de référence pour les autres devises alors que le yen n’est
la devise de référence pour aucune d’entre elles.
Par ailleurs, le pouvoir explicatif des régressions dites de « Frankel-Wei » a baissé pour
toutes les devises considérées. Il était très élevé sur la période juillet 2014 – juillet 2015
et a fortement baissé depuis début août 2015. Cela indique que les devises émergentes
ont suivi moins clairement les quatre grandes devises qu’auparavant. Notons que le
coefficient du renminbi a augmenté dans 17 cas sur 26 entre la période A et la période
B alors qu’il a baissé dans la majorité des cas pour le dollar, l’euro et le yen.
28
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7/8
#
Juillet-Août 2016
Il est particulièrement intéressant d’observer que le renminbi a gagné de
l’infl uence relativement au dollar au cours de la période B. Il est ainsi devenu
la principale devise d’influence des économies asiatiques. On remarque en
particulier que le coefficient du renminbi dans les régressions de Frankel-Wei se
sont soit stabilisés, soit nettement accrus. Par ailleurs, l’influence du renminbi
s’est également affirmée sur les devises d’Amérique latine. Ces deux tendances
peuvent s’expliquer d’une part par l’importance des liens commerciaux entre
la Chine et ses voisins asiatiques, et d’autre part par l’importance des flux de
matières premières entre la Chine et les économies latino-américaines. Certains
travaux insistent sur le fait que l’influence grandissante du renminbi proviendrait
non seulement des liens économiques mais aussi des liens financiers que la
Chine entretient avec de nombreux pays, et qui s’étendent autant à l’échelle
régionale que mondiale (voir par ex. Eichengreen et Lombardi, 2015).
Dans le cas de l’Asie, il est important de souligner que nos résultats
contredisent une idée reçue assez répandue à propos de l’existence d’un
supposé « bloc dollar » dans la région et semblent au contraire corroborer la
vision selon laquelle les devises asiatiques sont peut-être en train d’adopter une
politique davantage axée sur leur taux de change effectif (voir par ex. Ho, Ma et
McCauley, 2005). Cela étant, l’USD demeure la devise de référence dominante
pour le peso philippin et le bath thaïlandais, et son coefficient reste toujours
élevé pour la roupie indienne.
En ce qui concerne l’Amérique latine, nos résultats sont assez singuliers
car ils suggèrent un faible lien avec le dollar. Pour des raisons géographiques,
historiques et même politiques, l’Amérique latine est souvent considérée comme
une zone d’influence naturelle du dollar (voir par ex. Eichengreen et Lombardi,
2015). Pourtant, d’après nos résultats, le dollar aurait perdu de son influence
dans cette zone au profi t du renminbi. À noter que le pouvoir prédictif de ces
régressions a nettement diminué dans le cas des devises latino-américaines,
ce qui dénote un rôle plus important des facteurs idiosyncratiques pendant la
période B : ainsi, le BRL a été largement influencé par la crise politique brésilienne
(le R² passant de 0,57 à 0,14). Le même raisonnement peut s’appliquer au ZAR,
l’Afrique du Sud ayant également connu une grande instabilité politique.
L’un dans l’autre, alors que le débat sur l’émergence potentielle du RMB en
tant que devise de référence mondiale continuera de faire couler beaucoup
d’encre (en 2015, Eichengreen et Lomabrdi ont insisté sur la difficulté extrême
de cet exercice de prévision), nos résultats indiquent de toute évidence que
l’infl uence du RMB s’accroît en tant que devise de référence pour les pays
émergents et que cette influence s’étend bien au-delà des pays voisins,
résultats qui viennent donc corroborer les recherches récentes menées
en la matière.
Conclusion
Le nouveau régime de change instauré par la Chine en août dernier a institué un
nouveau paradigme sur les marchés des changes. Il est désormais clair que les
fluctuations du renminbi ont un impact plus important qu’avant sur les devises
émergentes. Cela met en évidence l’importance de l’évolution de la paire USD/
RMB pour les devises émergentes dans les trimestres à venir et en particulier
de l’importance des prochaines réformes du régime monétaire chinois : une
dépréciation désordonnée serait vraisemblablement très préjudiciable à
l’ensemble des devises émergentes.
Nos résultats contredisent une
idée reçue assez répandue à
propos de l’existence
d’un supposé « bloc dollar »
en Asie
L’influence du RMB s’accroît
en tant que devise de
référence pour les pays
émergents et elle s’étend bien
au-delà des pays voisins
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7/8
#
Juillet-Août 2016
Achevé de rédiger le 23 juin 2016
3 Le marché immobilier chinois
est-il en situation de bulle ?
L’essentiel
MO JI, Stratégie et Recherche Économique
Les perspectives du marché immobilier chinois pour 2016 et 2017 sont de
plus en plus floues pour les investisseurs internationaux. En effet, on constate
d’une part un déstockage des biens disponibles, d’abord dans les villes
de 1ère catégorie puis dans les catégories 2/3/4 (pas de bulle ?), et d’autre
part une augmentation des prix des terrains en particulier dans les villes de
catégorie 1 et 2, qui pourrait se répercuter sur les villes des catégories 3 et 4
(grossissement de la bulle ?). En tant qu’investisseurs, comment devons-nous
interpréter ces chiffres ?
Pourquoi donner autant d’importance au marché immobilier
chinois ?
L’état du secteur immobilier chinois
détermine les perspectives de
l’économie du pays et de l’économie
mondiale.
C o m pte te nu d u d é sto c k ag e m a s s i f
d e b i e ns o bse r vé au c ou r s d e l’a n n é e
é c ou l é e, l a bu ll e c o m m e nc e v ra im e nt
à s e d é g o nf l e r. Tou tefo i s, l e s p r i x d e s
te r ra ins so nt e n fo r te h au s se d a ns
c e r ta i n e s v i l l e s et ré g i o n s, et c’e st
b i e n c e fac te u r q u i p ou r ra i t être à
l’or igin e d’u n e bull e im mob ili è re.
L’économie chinoise repose sur un seul et même pilier, le secteur immobilier.
Compte tenu de ses liens avec plus de 200 secteurs, tant en amont qu’en aval,
le secteur immobilier joue un rôle majeur dans l’orientation de la croissance
de l’économie chinoise. La logique est donc simple : en cas d’atterrissage
forcé de l’immobilier chinois, l’économie du pays s’effondrera et entraînera
dans son sillage l’économie mondiale. L’état du secteur immobilier chinois
détermine donc clairement les perspectives de l’économie du pays et a donc
un impact important sur l’économie mondiale.
Contrairement aux actions, aux obligations, aux contrats à terme sur matières
premières et aux devises, l’incidence du marché immobilier sur l’économie
est très nette.
Quels sont les principaux débats ?
1. Existence d’une bulle ? Les arguments des tenants de cette thèse
sont les suivants : (1) l’accessibilité est faible, (2) les rendements locatifs
sont bas, (3) les volumes construits au cours des dernières années sont
considérables, avec déjà de nombreux logements vides, etc.
Le marché immobilier
chinois est-il dans une
situation de bulle ?
2. Inexistence d’une bulle ? Les arguments des tenants de cette thèse
sont les suivants : (1) officiellement, les revenus augmentent plus vite que
les prix des logements (ces derniers sont probablement sous-estimés et
les revenus ont augmenté fortement surtout chez les plus riches, d’où le
problème des inégalités) ; (2) pas de levier financier ; le ratio crédit/valeur
des biens (LTV) est faible, la dette des ménages est limitée et les prêts des
banques au secteur immobilier sont aussi limités (il s’agit de prêts directs).
3. Une bulle structurelle ? Les arguments avancés pourraient être les
suivants : (1) l’essentiel du patrimoine des ménages est détenu sous la
forme de dépôts, qui génèrent de faibles rendements (plus faibles que
la hausse des prix immobiliers), ce qui incite la population à acquérir des
biens ; (2) pas d’impôts fonciers ; (3) les autorités locales tirent les prix des
terrains à la hausse ; (4) de très nombreux logements déjà construits ; (5) la
construction en % du PIB et par personne augmente constamment.
4. L’offre immobilière. La notion d’« offre » est assez difficile à quantifier,
en particulier dans le cadre du système de pré-vente grâce auquel les
promoteurs peuvent accélérer la construction pour satisfaire aux critères
de pré-vente ou, au contraire, ralentir le processus et ainsi réduire l’« offre ».
Le gouvernement peut lui aussi réduire l’offre en arrêtant d’émettre des
autorisations de pré-vente. L’offre est donc assez dynamique.
Une bulle structurelle ?
5. La demande immobilière. De même, le marché utilise normalement les
volumes de transaction pour quantifier la demande, qui est aussi, selon
nous, plutôt dynamique. Plus fondamentalement, la demande réelle reflétée
par l’urbanisation, les mariages, les rénovations des biens immobiliers, etc.
se traduit par un meilleur équilibre entre l’offre et la demande. Même si,
dans la réalité, cela est naturellement difficile à quantifier.
30
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
7/8
#
Juillet-Août 2016
6. Équilibre du marché immobilier. L’équilibre entre l’offre et la demande
du marché de l’immobilier résidentiel dépend du nombre de « vacances
excédentaires » (nombre de logements vacants au-dessus du niveau
observé en temps normal). Y compris lors de périodes normales,
lorsque l’offre et la demande sont plus ou moins équilibrées, il existe des
logements vacants en raison de la rotation des maisons secondaires
et des déménagements . Les vacances excédentaires sont un bon
indicateur de l’offre surabondante de logements. Toutefois, elles sont
également difficiles à calculer de manière précise.
Les six points évoqués ci-dessus ne datent pas d’aujourd’hui mais compte
tenu de l’insuffisance des données, il est compliqué de se forger un avis. Il
faut donc que nous modifiions nos angles d’analyse.
Les prix de l’immobilier
à Shenzhen ont augmenté
de 167 % en 18 mois !
Concernant les échéances à long terme, nous avions clairement montré dans
notre numéro d’octobre 2015 du Cross Asset que les nouvelles naissances
sont étroitement corrélées avec la nouvelle demande en logements des
années après.
D’après l’expérience du Japon, la baisse de 41 % du nombre de naissances
entre 1948 et 1961 s’est traduite par un recul de 29 % des mises en chantier
entre 1973 et 1983 ; de même, la baisse de 40 % du nombre de naissances
entre 1973 et 1989 a fait reculer de 46 % les nouvelles mises en chantier
entre 1994 et 2012. En Chine, le nombre de naissances a diminué de 38 %
entre 1987 et 2003 : par conséquent les nouvelles mises en chantier sont
probablement appelées à baisser considérablement. Le secteur immobilier
étant le pilier de l’économie chinoise, la croissance du PIB réel va ralentir.
Quels sont les faits ?
Dans cet article, nous allons nous concentrer sur l’immobilier résidentiel
et son évolution à court terme (2016 et 2017) pour tirer des conclusions en
matière d’investissement.
1. Prix
• Dans les villes de catégorie 1 (Beijing, Shanghai, Shenzhen et
Guangzhou), les prix de l’immobilier ont fortement augmenté en 2015
et jusqu’en juin 2016. La hausse moyenne a été de 167 % à Shenzhen
(cette envolée, que personne n’attendait, est essentiellement due
aux restrictions annuelles de l’offre) et de 49 % à Beijing, tandis qu’à
Shanghai et Guangzhou ils sont restés plus ou moins inchangés.
• Concernant les villes de catégorie 2 (villes de province) comme Chengdu,
la capitale de la province de Sichuan, les prix ont augmenté d’environ
45 % en 18 mois ; en revanche, Haikou, la capitale de la province de
Hainan, a enregistré une baisse continue des prix de 23 %.
• Dans les villes de catégorie 3, comme Dongguan dans la province du
Guangdong, les prix ont grimpé de près de 39 % sur la même période ;
les prix dans la ville de Wenzhou se sont stabilisés après une vive
correction, ce qui constitue un signal positif pour les régions de l’Est
de la Chine.
Le stock de biens
disponibles à Shanghai
n’est que 5,5 mois !
• La Chine compte plus de 600 villes et même dans celles de la catégorie
5, la population est d’au moins 1 million de personnes. Les variations
des prix entre les catégories de ville et au sein-même de ces catégories
sont assez importantes, et elles dépendent de nombreux facteurs (la
multitude d’agglomérations, leur localisation, la rareté des biens, les
restrictions sur l’offre, l’existence ou non de politiques de restrictions
des achats, les prix des terrains, etc.
• L’envolée des prix immobiliers dans les villes de Beijing, Shenzhen,
Chengdu et de Dongguan ne cadre pas du tout avec l’objectif du
gouvernement (qui vise plutôt la stabilité). Des mesures de durcissement
ont été mises en place après le bond des prix en mars/avril.
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
31
7/8
#
Juillet-Août 2016
Prix, par mètre carré en RMB
4 janvier-15
19-juin-16
Variation en %
Catégorie 1
Beijing
21,498
31,951
49 %
Shanghai
22,881
22,346
-2 %
Shenzhen
25,539
68,149
167 %
Guangzhou
15,003
16,263
8%
Hangzhou
22,188
24,187
9%
Chengdu
7,130
10,373
45 %
Catégorie 2
Catégorie 3
Haikou
11,876
9,114
-23 %
Wenzhou
14,376
14,629
2%
Dongguan
10,176
14,126
39 %
Les prix des terrains ont
augmenté de plus de 57 %
entre janvier et mai 2016
dans 300 villes chinoises !
Source : Soufun, Wind, CEIC, Recherche Amundi
2. Volume
• Le stock de biens restants, exprimés en mois, est un bon indicateur de
l’existence d’une bulle (en règle générale, s’il dépasse 20 mois) et de son
ampleur (s’il dépasse 30 ou 40 mois).
• À Beijing, dans la catégorie 1, le stock à liquider est passé de 32,4 mois
(en mars 2015, pic) à 7,8 mois (déc. 2015, creux), soit une diminution très
marquée de 24,6 mois de stocks en seulement 9 mois. Entre mars 2015
et mars 2016, les stocks disponibles ont diminué de 17 et 17,9 mois à
Shanghai/Shenzhen, ce qui constitue également une tendance baissière
prononcée.
• Même évolution à Ningbo/Xiamen dans l’est de la Chine (catégorie 3), les
stocks disponibles ont diminué de 39,3/33,2 mois en un an.
• Il nous faut également étudier le statut actuel des stocks restants en mois.
À la mi-juin 2016, l’offre (en termes de stocks disponibles) est très faible à
Shanghai (5,5 mois), Hangzhou (2,4 mois) et Nanjing (2,2 mois).
• Cet écoulement des stocks pourrait doper les flux de trésorerie des
promoteurs, qui pourraient ainsi investir dans de nouveaux projets
immobiliers.
Stocks restants en nb. de mois, janv. 2015 — juin 2016
Pic
Mois
Creux
Mois
juin-16
32.4
mar-15
7.8
déc-15
13.5
Shanghai
20.2
mar-15
3.2
mar-16
5.5
Shenzhen
22.9
mar-15
5.0
mar-16
14.2
Guangzhou
28.4
mar-15
6.6
mai-16
7.7
15.6
mar-15
2.1
avr-16
2.4
Nanjing
22.4
mar-15
1.9
juin-16
2.2
Catégorie 1 Beijing
Catégorie 2 Hangzhou
Fuzhou
29.9
juin-15
6.7
avr-16
10.3
Catégorie 3 Ningbo
46.1
mar-15
6.8
avr-16
8.8
Xiamen
37.5
mar-15
4.3
mai-16
9.2
La politique immobilière
doit rester globalement
accommodante !
Source : Soufun, Wind, CEIC, Recherche Amundi
3. Investissements en capital fi xe
• Cet écoulement massif des stocks de biens immobiliers a donc donné
un coup de fouet aux cash-flows des promoteurs immobiliers et, par
conséquent, à leurs nouveaux projets d’investissement. Avec la forte
augmentation des stocks, jusqu’à leur pic au mois de mars 2016, les
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Juillet-Août 2016
investissements immobiliers ont été relativement atones et ont même
affiché une croissance négative de septembre 2015 à janvier 2016. Le
rebond des investissements a eu lieu entre février (2 %), mars (8 %), avril
(11 %) et mai (8 %), l’écoulement massif des stocks s’étant quasiment
interrompu au mois de mars.
• Le marché s’inquiète surtout de la viabilité des investissements immobiliers
au 2nd second semestre 2016 et en 2017. Dans les régions et les villes avec
un stock déficitaire, la croissance des investissements immobiliers va selon
nous se maintenir entre 5 et 9 % au moins jusqu’à la fin 2016. À l’échelle
de la Chine, il est fort probable que la croissance des investissements
immobiliers s’établisse aux alentours de 5 %, ce que le marché n’anticipe
pas depuis la fin 2015.
1
Residential Property Investment, yoy %
15%
10%
5%
0%
-5%
4. Prêts immobiliers
04-16
02-16
03-16
01-16
11-15
12-15
09-15
10-15
08-15
06-15
07-15
04-15
05-15
-10%
02-15
03-15
• Les crédits immobiliers affichent une croissance régulière en variation
trimestrielle de 6 % à 7 %, avec une accélération au 1er trimestre 2016
(7,2 %). Cette tendance s’explique essentiellement par la baisse des taux
des crédits, qui sont aujourd’hui de seulement 4,17 % contre plus de 5,5 %
précédemment.
Source: Soufun, Wind, CEIC, Amundi Research
• En pourcentage du PIB, les crédits immobiliers sont en forte hausse et leur
accélération est intervenue entre le 1er trimestre 2015 (19 % du PIB) et le 1er
trimestre 2016 (23 % du PIB).
5. Ventes foncières
• Les « seigneurs terriens » ont fait leur retour grâce au déstockage massif
et à la reprise dynamique des investissements immobiliers. Sur les
5 premiers mois de l’année, la valeur des ventes de terrains à Hangzhou a
augmenté de plus de 286 % par rapport à l’année dernière ; à Suzhou, la
croissance est même de 1 533 % par rapport aux cinq premiers mois de
2015. La croissance moyenne des prix des 300 plus grandes villes a été de
68 % sur la même période, témoignant d’une augmentation généralisée et
importante des prix des terrains. Dans les principales villes de catégorie 2,
les ventes de terrains ont augmenté de 163 %.
• Qu’illustre concrètement ce phénomène ? Dans certaines villes où
la demande en logements est solide mais l’offre limitée, l’une des
conséquences inévitables est la réapparition des « seigneurs terriens ».
Ces acteurs vont à coup sûr amplifier la croissance des prix de l’immobilier
résidentiel.
2
Chinese Housing Mortgage Loan
25%
20%
Ventes de terrains résidentiels en Chine
17 %
-54 %
152 %
42 %
Hangzhou
286 %
72 %
124 %
50 %
Nanjing
576 %
168 %
152 %
71 %
Suzhou
1533 %
106 %
693 %
64 %
300 villes
68 %
7%
57 %
35 %
Villes de catégorie 1
-18 %
-44 %
48 %
15 %
Principales villes de catégorie 2
163 %
7%
145 %
23 %
1Q16
Shanghai
5%
4Q15
-9 %
3Q15
56 %
2Q15
-65 %
1Q15
-45 %
4Q14
Pékin
10%
3Q14
Prix
des
terrains
2Q14
Volume
foncier
(GFA)
Sur les 5 premiers mois
de 2016, en GA
15%
1Q14
Ventes
foncières
% du prix
vendu par
rapport
au prix de
lancement
Housing mortgage as % of GDP
Housing mortgage loan growth, % qoq
Source : Soufun, Wind, CEIC, Recherche Amundi
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Juillet-Août 2016
• Les gouvernements locaux restent très dépendants des revenus fonciers en
raison des longs arriérés d’impôts fonciers.
• La bulle de l’immobilier chinois est due à la hausse ininterrompue des
prix des terrains ; et c’est précisément lorsque ces prix sont nettement
supérieurs au taux de rendement potentiel que la bulle éclate. Il est
donc essentiel de surveiller de près l’évolution des prix des terrains
pour évaluer les risques potentiels du marché immobilier chinois.
• Shanghai est l’une des villes symboliques où l’offre foncière diminue mais
où les prix sont en forte hausse. Le prix de vente final est même plus élevé
de 42 % par rapport au prix de lancement sur les 5 premiers mois de 2016.
Ce type de tendance est naturellement intenable !
Quelle est l’orientation probable de la politique immobilière ?
Selon nous, l’immobilier conserve son rôle de pilier de l’économie chinoise.
Ainsi, pour atteindre l’objectif de croissance du PIB (entre 6,5 % et 7 % en
2016 et 6,5 % par an d’ici 2020), la politique immobilière devra adopter un biais
accommodant.
Le gouvernement chinois s’efforce toutefois de trouver un juste milieu entre
la stabilité des prix de l’immobilier et des terrains et un niveau de stocks
relativement bas. Ainsi, dès que les prix de l’immobilier et des terrains
augmenteront, les autorités devront durcir leur politique pour en atténuer
l’impact. Le gouvernement surveille tout particulièrement les stocks ; si ces
derniers augmentent, des mesures d’assouplissement seront très certainement
annoncées dans la foulée. Entre le début du mois de mai et la mi-juin, les
mesures d’assouplissement sont plus nombreuses que les mesures de
durcissement alors que les stocks sont en moyenne déjà assez faibles.
Conclusion
L’état du secteur immobilier chinois détermine donc clairement les perspectives
de l’économie du pays. Compte tenu du déstockage massif de biens observé
au cours de l’année écoulée, la bulle commence vraiment à se dégonfler.
Toutefois, les prix des terrains sont en forte hausse dans certaines villes
et régions, et c’est bien ce facteur qui pourrait être à l’origine d’une bulle
immobilière. C’est lorsque la croissance des prix des terrains dépasse le taux
de rendement potentiel que la bulle doit éclater.
L’immobilier conserve
son rôle de pilier de
l’économie chinoise
Le gouvernement chinois
s’efforce de trouver
un juste milieu entre
la stabilité des prix de
l’immobilier et des terrains
et un niveau de stocks
relativement bas
Mesures d’assouplissement dans le secteur immobilier
6 mai 2016
Réduction de la durée d’approbation des prêts du HPF (Housing Provident Fund) de 15 à 10 jours : Le gouvernement publie
un avis pour améliorer la fourniture de prêts personnels du HPF, en cherchant à simplifier les procédures de demande
de prêts au HPF et à optimiser les procédures administratives. Selon cet avis, les nouveaux documents exigés incluront
les cartes d’identité et les justificatifs de domiciliation. S’agissant des maisons secondaires, un emprunteur potentiel,
son épouse/son mari et le vendeur peuvent soumettre les documents exigés à des succursales capables de fournir une
réponse initiale aux demandeurs. Pour les autres types de logements, le demandeur peut aussi soumettre son offre via des
agences. Par conséquent, la procédure de demande d’approbation devrait passer de 15 à 10 jours.
9 mai 2016
Le Ministère chinois du Logement et du Développement Urbain et Rural (MoHURD) va soutenir le marché de la location avec
6 mesures : M. Lu Kehua, Vice-ministre du MoHURD, a déclaré lors d’une réunion que le marché de la location était encore
en phase de développement et qu’il manquait de standardisation ainsi que de règles et de réglementations. Le ministère
soutiendra le marché de la location avec 6 mesures clés : i) soutenir les acteurs assurant l’offre de biens immobiliers ; ii)
encourager la location ; iii) améliorer le système de la location publique ; iv) accompagner la construction de biens destinés
à la location ; v) accroître le degré de soutien des politiques ; et vi) renforcer le suivi du marché de la location.
10 mai 2016
Les citoyens de Nanjing sont encouragés à solliciter le HPF pour le paiement des loyers : La direction du HPF à Nanjing a
émis un avis selon lequel la période de demande pour le retrait du HPF en matière de paiement des loyers sera allongée.
Les demandes sont possibles de juin à décembre chaque année. Précédemment ces demandes n’étaient possibles qu’en
juin et en décembre. Le quota mensuel pour le paiement des loyers est 900/1 800 RMB pour les personnes seules/les
couples.
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Juillet-Août 2016
10 mai 2016
Barrière à l’entrée pour les agriculteurs de Henan en matière de crédit immobilier : Le MOHURD de la province de Henan, le
ministère des Finances de la province et la Agricultural Bank (601288.SS ; 1288.HK) ont annoncé dans un communiqué conjoint
un nouveau plan d’aide aux agriculteurs dans leur demande de crédits immobiliers pour l’achat de logements résidentiels.
Voici certaines des dispositions : un scoring de référence plus faible imposé pour les demandes de crédits immobiliers ;
simplification de la procédure de déclaration de revenus ; flexibilité pour choisir des remboursements trimestriels, semestriels
ou annuels ; aucune pénalité pour les remboursements anticipés ; acceptation des garanties données par des agences de
garantie financière contrôlées par l’État en vue d’améliorer la qualité du crédit.
13 mai 2016
Pékin va proposer des logements publics à loyer modéré aux nouveaux employés : Le MOHURD de Beijing a émis un avis
mentionnant que 490 logements publics à loyer modéré avaient été alloués à trois projets réservés aux nouveaux employés
âgés entre 18 et 35 ans. Les demandeurs doivent être « employés » et ne pas posséder de biens immobiliers dans la ville. Les
citoyens non-locaux peuvent aussi en bénéficier s’ils satisfont aux critères d’acquisition de logements à Beijing.
16 mai 2016
La région de Zibo a lancé un projet pilote sur les loyers subventionnés des logements publics sous-loués : Selon certains
médias, depuis la fin de l’année 2015, un nouveau mode de subventions applicable aux logements publics a été lancé pour
atténuer les difficultés rencontrées dans la construction de logements à loyer modéré. À Zibo, dans la Province du Shandong,
le gouvernement local loue des logements de GFA dont la superficie maximale est de 100 m2 et « sous-loue » les logements à
des citoyens « éligibles » à des loyers réduits ; la différence de loyer sera prise en charge par le gouvernement local. Selon les
représentants des autorités compétentes, ce projet pilote pourrait améliorer le taux d’utilisation des logements vides dans la
ville et réduire les contraintes de temps et de financement pour la construction de logements à loyer modéré.
19 mai 2016
Le Comité de gestion du HPF de Chengdu annonce qu’à partir du 6 juin, l’échéance des prêts du HPF aux particuliers passera de
20 ans à 30 ans. Pour les familles de deux personnes ou plus, le montant forfaitaire maximal pouvant être emprunté est de 700
000 RMB. De plus, le ratio prêt maximal/contribution du HPF passera à 30 fois, et tout citoyen dont la contribution individuelle
est inférieure à 10 000 RMB ne sera pas soumis à ce ratio et pourra emprunter jusqu’à 300 000 RMB auprès du HPF.
20 mai 2016
Premier lot de logements en copropriété à Nanjing : Le Nanjing Price Bureau publie un avis sur le prix des logements disponibles
provenant du parc de logements à loyer modéré. Les logements des 4 projets immobiliers à loyer modéré seront convertis et
utilisés dans le cadre des tout premiers logements en copropriété de la ville, et seront vendus à un prix moyen d’environ 9 952
RMB par m2, contre environ 19 000 RMB par m2 pour les logements résidentiels de base. Les acheteurs éligibles pourront
choisir des logements à partir du 1er juillet 2016.
24 mai 2016
La banque centrale chinoise (PBOC) autorise l’injection de 30 000 milliards RMB sur le marché obligataire : la PBOC a publié un
document le 20 mai selon lequel les investisseurs institutionnels éligibles (comme le HPF, les fonds de pension, les fonds de
bienfaisance et autres produits de gestion de fortune) pourront intervenir sur le marché interbancaire. La PBOC appliquera les
critères et les procédures standards pour émettre l’avis relatif à l’approbation des demandes des investisseurs éligibles. Cet
avis sera valide pendant trois mois. Selon les professionnels du secteur, cette disposition de la PBOC optimise la procédure
de demande et accroît l’engagement des intervenants sur le marché obligataire. Selon les médias, les fonds mobilisés sont
d’environ 30 000 milliards RMB.
2 juin 2016
La province de Hunan cherche à réduire l’offre de terrains dans les villes présentant un stock élevé : les autorités de la province
de Hunan ont fait savoir qu’elles souhaitaient améliorer l’usage des ressources foncières. Les villes présentant un stock élevé
seront tenues de réduire l’ampleur de leurs plans d’utilisation des terres et l’offre foncière. En outre, le gouvernement pourrait
suspendre l’offre foncière dans les villes dont le stock couvre 3 années. Le gouvernement encourage néanmoins la location à
long terme, la location d’un site avant son achat futur et d’autres pratiques flexibles en matière d’offre de terrains susceptibles
de réduire les coûts fonciers des entreprises. (Hexun)
3 juin 2016
Le Conseil d’État publie de nouvelles politiques sur le marché de la location : le 3 juin, le Conseil d’État publie un avis et se
prononce en faveur d’une accélération du développement du marché de la location résidentielle. Voici les mesures : autoriser
les conversions de biens commerciaux en biens résidentiels ; la TVA applicable aux revenus locatifs des particuliers sera de
1,5 % ; la TVA ne sera pas appliquée pour les particuliers dont le revenu locatif est inférieur à 30 000 RMB par mois jusqu’à la fin
2017 ; application d’une TVA de 6 % aux agences immobilières offrant des services de courtage dans l’immobilier résidentiel ;
la TVA applicable au revenu locatif des biens acquis avant le plan pilote de la TVA sera de 5 %.
10 juin 2016
La ville de Dalian annonce un assouplissement de ses politiques sur le déstockage : le 8 juin, les autorités de la ville de
Dalian ont publié un document détaillant les nouvelles politiques relatives au développement du marché immobilier de la
ville. Les principales politiques ayant vocation à réduire les stocks dans la ville sont les suivantes : i) achever les travaux de
réaménagement des quartiers délabrés d’ici 2 à 3 ans ; ii) offrir aux « talents », aux leaders et autres personnes brillantes
une aide maximale de 3 millions RMB pour l’achat d’un logement ; iii) fournir une aide de 100 RMB par m2 pour les travaux
d’entretien dans des conditions prédéfinies ; iv) supprimer les restrictions aux achats de biens immobiliers imposées dans les 4
districts de la ville et dans la zone dédiée aux hautes technologies ; v) supprimer les restrictions portant sur le nombre maximal
de logements résidentiels de base que les étrangers sont autorisés à acheter.
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Juillet-Août 2016
15 juin 2016
Nouvelles mesures d’assouplissement dans la province de Shanxi pour régler les problèmes de stocks : le gouvernement
de la province de Shanxi a publié un document le 13 juin détaillant 11 mesures censées contribuer au déstockage dans le
secteur immobilier. En voici les principales mesures : abaisser à 20 % les arrhes à verser pour les prêts des primo-accédants
de logements résidentiels de base ; réduire à 30 % le ratio appliqué aux achats de biens avec rénovation ; réduire entre 1 et
2 % les taxes notariales pour les transactions immobilières ; assouplir les conditions des travailleurs des zones rurales pour
transférer leur hukou (le hukou indique le lieu de résidence officiel d’une personne, classée rurale ou urbaine) vers leur lieu
de travail actuel ; modifier les biens de base invendus et les mettre à disposition pour le e-commerce et les incubateurs de
sociétés technologiques.
Mesures de durcissement dans le secteur immobilier
5 mai 2016
L’offre de terrains sera contrôlée de manière très stricte pour le développement de la province Beijing-Tianjin Hebei : le
ministère du Territoire et des Ressources (MLR) et la National Development and Reform Commission (NDRC) ont publié un
plan d’aménagement du territoire pour le développement de la province Beijing-Tianjin-Hebei sur la période 2015-2020.
Pour les régions devant réduire l’offre de terres, aucun nouveau logement ne pourra être construit et les terrains déjà en
construction seront aménagés dans une démarche écologique. Dans d’autres régions, la superficie des terres exploitables
— sur lesquelles des projets de construction (de grande envergure) seraient néfastes -, sera stabilisée. Pour les régions
nécessitant une augmentation de l’offre de terrains, la nouvelle offre foncière sera contrôlée en mettant l’accent sur les
infrastructures sociales.
5 mai 2016
Le MOHURD de Pékin et le gouvernement local du District de Tongzhou ont publié un avis conjoint concernant des mesures
de durcissement sur le marché immobilier : les acheteurs éligibles d’appartements pour un usage commercial/résidentiel
devront remplir au moins l’un des critères suivants : i) des familles ou des individus avec un hukou local mais ne possédant
aucun bien immobilier ; ii) des familles possédant un bien immobilier dans la ville ; iii) des familles non-locales ne possédant
pas de bien immobilier dans la ville, ayant contribué à l’assurance sociale et pouvant justifier du paiement de l’impôt pendant
5 années consécutives. L’avis mentionne également que les biens nouvellement construits à usage commercial ou de bureau
ne peuvent être vendus qu’à des entreprises ou des organisations, et des mesures identiques seront appliquées à la revente
de ces biens.
18 mai 2016
Le MLR de la municipalité de Suzhou annonce un plafonnement des prix des parcelles de terre qui seront vendues aux
enchères le 23 mai ou ultérieurement, et le ministère se réserve le droit d’annuler une vente foncière si le prix final dépasse
le plafond (mécanisme de coupe-circuit). Des sources proches du dossier ont fait savoir que la priorité du ministère était
désormais d’éviter que les prix atteignent de nouveau des niveaux excessifs et de réduire l’appétit des promoteurs pour de
nouveaux terrains situés dans la ville, avant de mettre en place de potentielles restrictions sur les achats. (Guandian)
27 mai 2016
Les autorités de Nanjing ont émis un avis prévoyant la mise en place de mesures de durcissement afin de contrôler les prix des
terrains et des biens immobiliers de la ville. Ces mesures sont les suivantes : i) fixer un plafond maximal sur la prime totale
à la surface dans le cadre des procédures d’enchères. Si les acheteurs font monter les prix au-delà de la limite, l’enchère
sera interrompue et le prix offert sera invalide. ii) Au-delà de 45 % au-dessus de la prime par rapport au prix demandé, les
promoteurs feront des offres pour des logements sociaux entrant dans le cadre du même projet. En outre, le coût des projets
fera l’objet d’un étroit suivi par le Pricing bureau. La part du prix des terres supérieure à une prime de 45 % au prix demandé
ne peut entrer dans les coûts de développement ; ainsi, ce facteur ne sera pas pris en compte dans la fixation des prix.
Source : Sina.com.cn, Bloomberg, Recherche Amundi
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Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
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Juillet-Août 2016
Achevé de rédiger le 4 juillet 2016
4 Zone euro, le marché du travail s’améliore
L’essentiel
sûrement… et un peu moins lentement
TRISTAN PERRIER, Stratégie et Recherche Économique
Contrairement au PIB, les grands
indicateurs du marché du travail de
la zone euro sont encore loin d’avoir
retrouvé leurs niveaux d’avant crise.
Le niveau général de l’emploi, dont
l’amélioration reste pourtant limitée,
donne une vision encore trop
optimiste d’une situation en réalité
beaucoup plus dégradée si l’on
considère des indicateurs tels que
le niveau d’emploi à temps plein ou
le degré de divergences entre pays.
Après la récession en « double dip » des dernières années et la reprise amorcée
depuis début 2013, le PIB de la zone euro a retrouvé, en 2016, le niveau de
son pic pré-crise du T1 2008. Ce n’est pas le cas, en revanche, des principaux
indicateurs du marché du travail, qui, malgré un incontestable début de
réparation, restent loin d’avoir rétabli leurs niveaux d’il y a 8 ans.
La réparation du marché du travail est signifi cative, mais très en retard
sur celle du PIB. Si l’on s’en tient aux indicateurs du marché du travail les plus
couramment observés, à l’échelle de l’ensemble de la zone euro, on observe
que seuls un peu plus des deux tiers (dans le cadre de l’emploi total) et un
peu plus d’un tiers (dans le cas du taux de chômage et du nombre des
chômeurs) de la dégradation maximale observée au cours des années de crise
(généralement entre le T1 2008 et mi-2013) ont aujourd’hui été effacés (voir
graphique 1 et tableau à la fin de cet article).1
Pour autant, la diffusion de la reprise
économique au marché de l’emploi s’opère
tout de même, avec de notables signes
d’accélération au cours des derniers
trimestres. Cette tendance fait partie des
raisons pour lesquelles nous jugeons que
la reprise en zone euro est désormais
suffisamment bien engagée pour résister
aux grands défis d’incertitudes politiques
des prochains mois. Une situation où le
marché de l’emploi pourrait, à l’échelle
de la zone euro, générer des pressions
véritablement inflationnistes reste, en
revanche, une perspective encore lointaine.
Une étude un peu plus affinée des emplois perdus et créés montre d’ailleurs
que ces premiers indicateurs, pour peu flatteurs qu’ils soient, donnent
encore une image trop positive de la réalité, notamment pour les deux
raisons suivantes :
1. Une grande partie de l’amélioration est due à une augmentation de
l’emploi à temps partiel. Ainsi, le terrain perdu est bien plus important
mesuré en heures travaillées qu’en nombre d’emplois (graphique 1). En ne
considérant que cet indicateur ou, de façon similaire, les seuls emplois à
temps plein (graphique 2), c’est à peine plus d’un tiers du terrain perdu
qui a, aujourd’hui, été retrouvé. De même, en ajoutant aux chômeurs les
personnes travaillant à temps partiel parce qu’elles n’ont pu trouver un
emploi à temps plein, la décrue du taux de chômage ainsi recalculé est
nettement moindre que celle du taux de chômage général (20,6 % en 2015
après un maximum à 21,1 % en 2013 — cf. tableau en fi n d’article).
Par conséquent, le marché de l’emploi de la zone euro paraît encore loin
d’une situation à même de générer des tensions salariales généralisées.
Il est vrai que le taux de chômage (10,1 en mai) n’est désormais plus si
éloigné des estimations officielles des seuils du chômage censés générer une
accélération de l’inflation (NAIRU 2 de l’OCDE, à 9,4 %, NAWRU 3 d’Eurostat
à 9,7 %). Cependant, au vu des éléments mentionnés plus haut (réserve
constituée par les travailleurs à temps partiel « contraints », autres indicateurs
toujours très dégradés dans certains pays), il paraît probable que ces seuils
devront être revus en baisse (comme cela a été le cas, au cours des dernières
années, aux États-Unis), ceci sans exclure cependant, la possibilité de
tensions salariales localisées (surtout en Allemagne, où l’entrée progressive
des réfugiés sur le marché du travail devrait cependant être un facteur de
modération des salaires) ou sectorielles.
1
2
3
Les différences entre ces degrés de réparations s’expliquent, pour l’essentiel, par le fait
que la population active a continué d’augmenter durant cette période.
Non-accelerating infl ation rate of unemployment
Non accelerating wage rate of unemployment.
Zone euro, emploi, heures travaillées et PIB,
volume, base 100 au T1 2008
1
101
100
99
98
97
96
95
94
93
Emploi
Heures travaillées
PIB
92
T1 2008
T3 2008
T1 2009
T3 2009
T1 2010
T3 2010
T1 2011
T3 2011
T1 2012
T3 2012
T1 2013
T3 2013
T1 2014
T3 2014
T1 2015
T3 2015
T1 2016
2. Le marché de l’emploi est l’un des domaines où les divergences entre
États membres restent très fortes. En effet, les chiffres de la zone euro
sont tirés à la hausse par ceux de l’Allemagne, dont les grandes variables
du marché de l’emploi n’ont été que peu (et brièvement) affectées par la
crise, et qui, en réalité, a connu un cycle de l’emploi très spécifique (son
taux de chômage était parmi les plus élevés de la zone euro au début des
années 2000). Hors Allemagne la zone euro est bien loin d’avoir récupéré la
moitié des emplois perdus durant les années de crise (et encore bien plus
loin si l’on ne considère que les emplois à temps plein, cf. graphique 2).
Source : Eurostat, Recherche Amundi
Le taux de chômage
a baissé et n’est plus
si éloigné du NAIRU
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
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Juillet-Août 2016
38
92
2015T4
2015T2
2014T4
2014T2
2013T4
2013T2
2012T4
2012T2
2011T4
2011T2
2010T4
2010T2
2009T4
2009T2
2008T4
90
Source : Eurostat, Recherche Amundi
3
Zone euro, croissance du PIB et croissance de
l’emploi
0.0%
-0.5%
-1.0%
1Q13
Q1 2009
1Q10
-1.5%
Q3 2009
-1%
-2%
-3%
-4%
1%
PIB, var. ann.%
-2.5%
0%
-2.0%
4%
0.5%
3%
1.0%
1Q16
3Q15
1Q15
Q3 2008
3Q14
1Q11
1Q14
3Q11
1Q12
3Q10
3Q12
3Q13
2%
1.5%
Emploi var. ann.%
2.0%
Source: Eurostat, Recherche Amundi
4
Zone euro, taux de chômage court/moyen terme,
long terme, très long terme, %
10
Taux de chômage, hors long terme et très
long terme
Taux de chômage de long terme hors très
long terme
Taux de chômage de très long terme
9
8
7
6
5
4
3
2
1
T4 2015
T1 2015
T2 2014
T3 2013
T4 2012
T1 2012
T2 2011
T3 2010
T4 2009
T1 2009
0
T2 2008
Cependant, la dynamique du marché de l’emploi est tout de même redevenue
positive et même en légère accélération. C’est là un point fondamental alors que
l’économie de la zone euro va devoir, au cours des prochains mois, faire face au
défi représenté par le « Brexit » (baisse des exportations vers le Royaume-Uni en
raison du choc que l’incertitude politique devrait générer sur l’économie de ce
pays, effets, plus amortis, de ce même choc sur l’investissement en zone euro
94
T3 2007
Au total, le tableau de l’amélioration du marché de l’emploi est donc en
demi-teinte. Si l’on privilégie la comparaison avec la situation qui prévalait avant
la crise, il est certain qu’il faudra encore beaucoup de temps pour récupérer les
niveaux d’il y a 8 ans. Concernant certains indicateurs (emplois à temps plein
notamment) il est même peu probable que, mutations structurelles du marché
du travail et évolution démographique obligent, les niveaux pré-crise puissent
être retrouvés lors du cycle économique actuel.
96
-5%
Enfi n, la proportion des jeunes dits « NEETs » (hors structures
professionnelles et/ou éducatives, Not in Employment, Education or Training
en anglais) a connu, en 2015, une baisse plus prononcée que les années
précédentes, ainsi qu’un début de baisse en Italie où cet indicateur se trouve
sur un niveau particulièrement élevé (renvoyant à une situation à certains
égards plus préoccupante que celle qui prévaut en Espagne, où le taux de
chômage des jeunes est pourtant nettement plus élevé, mais parce que ceux-ci
participent davantage à la population active cf. graphique 5). C’est un élément
particulièrement important dans un contexte où le défi représenté par les forces
politiques « anti-système », largement alimentées par la déception de ceux qui
ne perçoivent pas les retombées positives de la reprise économique, figure
parmi les principaux facteurs d’incertitude préjudiciables au climat des affaires.
98
T4 2006
Par ailleurs, indicateurs des dégâts durables de la crise, les taux de
chômage de long terme et de très long terme, qui n’avaient que très peu baissé
en 2014, ont commencé à se replier en 2015, après avoir doublé (voir plus) avec
la crise (graphique 4). Même s’il convient d’être prudent avec ces chiffres (de
nombreux ex-chômeurs de long terme sont probablement sortis de la population
active), c’est là tout de même un signe que la reprise commence à se diffuser à
de plus larges segments de la population. Une partie de cette évolution est très
probablement à mettre au compte des réformes du marché du travail menées au
cours des dernières années. On note, en particulier, que la France, pays qui n’a fait
que peu de réformes de ce type, n’est que peu concernée par cette amélioration.
Emploi total
Emploi total hors Allemagne
Plein temps seult, total
Plein temps seult, hors Allemagne
100
-6%
De plus, rappelons que l’année 2015 a été celle d’un début de re-corrélation
positive entre États membres : le taux de chômage a baissé en Italie, ce qui n’était
pas encore le cas en 2014 (l’économie italienne n’a repris une trajectoire haussière
que très tardivement) et même, à partir de fin 2015, en France (où la relative vigueur
de la démographie rend nécessaire un rythme de création d’emplois supérieur à
celui des pays voisins pour obtenir une baisse du taux de chômage).
102
T1 2006
Tout d’abord, la baisse du taux de chômage lui-même a gagné en vitesse
au cours des 12 derniers mois (-0,9pp entre mai 2015 et mai 2016, après
-0,6pp entre mai 2014 et mai 2015) sans que la croissance ait accéléré dans une
telle proportion (graphique 3). Pour s’en tenir aux dernières prévisions publiées
par la BCE avant le choc du Brexit, notons que, malgré sa révision en baisse, en
un an, des perspectives de croissance du PIB pour 2016 et 2017 (passées de,
respectivement, 1,9 % et 2 % en juin 2015 à 1,6 % et 1,7 % en juin 2016), cette
institution n’avait pas, dans le même temps, relevé celles concernant le taux de
chômage (légèrement abaissées de 10 % à 9,9 %).
Zone euro, emploi total et emploi à plein temps,
volume, MM4T, base 100 au T4 200
2
T2 2005
Cependant, même si l’on est encore loin d’une situation infl ationniste, la
transmission de la reprise au marché de l’emploi se fait tout de même
de façon de plus en plus nette depuis 2015. Il est normal que, variables
habituellement retardées par rapport au PIB, emploi et chômage ne réagissent
que lentement dans une première phase de reprise (et ce d’autant plus dans
le cadre d’une reprise particulièrement lente). Alors que le nouveau cycle
d’expansion européen entame sa quatrième année, des signes d’accélération
sont tout de même observés sur plusieurs grands indicateurs, y compris
certains de ceux refl étant les conséquences les plus problématiques et les plus
durables de la crise.
Source : Eurostat, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
7/8
#
Juillet-Août 2016
9
7
2015
2014
2013
2012
2011
2010
2009
2008
2007
2006
2005
5
Source : Eurostat, Recherche Amundi
Salaire horaire nominal
variation annuelle en %
6
Chômeurs, milliers
11 393
19 333
16 267
Heures travaillées, millions
62 730
57 950
59 630
Emploi à temps complet, milliers
118 597
109 527
111 446
Emploi à temps partiel, milliers
28 159
/
32 069
4
Taux de participation, % de la pop
active
71,3
/
72,4
3
Taux d’emploi, % de la pop 15-64
ans
65,9
63,4
64,7
2
Taux de chômage de long terme, %
2,8
6,1
5,4
Taux de chômage de très long
terme, %
1,7
3,7
3,6
Taux de chômage 16-24 ans, %
15,1
24,6
21
Taux de chômage "recalculé"*
18,3
21,1
20,6
Allemagne
Italie
5
France
Zone euro
Espagne
1
0
Source : Eurostat, les chiffres non retraités des variations saisonnières sont lissés par des
moyennes mobiles 4 trimestres.
2016T1
2015T3
2015T1
2014T3
2014T1
2013T3
2009T1
-1
2013T1
10,1
11
2012T3
152 624
12,1
13
2012T1
148 797
7,2
15
2011T3
154 360
Taux de chômage, %
17
2011T1
Emploi total, milliers
19
2010T3
Dernier
21
2010T1
"Pire" durant
la crise
Zone euro
Allemagne
France
Italie
Espagne
23
2009T3
Meilleur
pré-crise
25
2004
Du point de vue des perspectives d’inflation, en revanche, l’amélioration du marché
de l’emploi reste, pour l’heure, davantage un facteur à même de limiter les pressions
déflationnistes que d’alimenter des tensions véritablement inflationnistes, qui
restent une perspective encore lointaine. L’évolution des salaires (graphique 6) ne
montre, en effet, que peu d’évolution en ce sens. L’Allemagne peut, faire exception,
ce qui peut soulever d’importants défis de politique monétaire comme de politique
générale, mais il est peu probable, pour finir, de voir dans l’amélioration du marché
de l’emploi un facteur de nature à inciter la BCE à réduire, avant longtemps, ses
mesures de soutien monétaire non conventionnel.
Part des 16/24 ans hors études, travail et
apprentissage, %
5
2003
elle-même). En rétroagissant positivement sur la consommation, l’amélioration
du marché de l’emploi permet tout de même d’alimenter une dynamique de
demande interne auto-entretenue probablement plus saine et durable que les
effets des grands facteurs temporaires de soutien de 2015 (baisse de l’euro et du
cours du pétrole). Il figure (au côté de l’amélioration récente de l’investissement
des entreprises en Allemagne et en France) parmi les principales raisons pour
lesquelles nous jugeons que la reprise en zone euro va être freinée, mais pas
interrompue, par la crise politique ouverte avec le Royaume-Uni.
Source: Eurostat, Recherche Amundi
Emploi par secteur,
variation du T1 2008 au T1 2016
7
Construction
50%
Industrie
45%
Taux de chômage "augmenté"
(chômage + temps partiel involontaire)
Total
40%
Agriculture, sylviculture et pêche
Finance et assurance
35%
Commerce, transport, hébergement, restauration
30%
Immobilier
25%
Zone euro
Espagne
France
Italie
Information et communication
20%
Art, culture, employés domestiques
15%
Service public, défense, social, santé
Activités spécialisées, techniques et scientifiques
Source : Eurostat, Recherche Amundi
2015
2014
2013
2012
2011
2010
4
2009
2
2008
0
2007
-2
2006
10%
-4
Source : Eurostat, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
39
7/8
#
Juillet-Août 2016
Achevé de rédiger le 5 juillet 2016
5 Les bénéfices vont-ils retrouver
L’essentiel
le chemin de la croissance l’an prochain ?
IBRA WANE, Stratégie et Recherche Économique
L’a r ticle exa mine la c r é dibilité
des perspectives bénéficiaires du
consensus en mettant l’accent sur
les composantes sectorielles.
Les marchés d’actions ont été pris de court par le Brexit. Les valorisations
ont parfois nettement chuté mais ceci est rarement un motif d’achat
suffisant. À l’heure du retour aux fondamentaux, l’article se propose plutôt
d’examiner la crédibilité des perspectives bénéficiaires selon le consensus.
Pour cela, l’accent sera mis sur les composantes sectorielles qui sont
pleines d’enseignements.
Si l’atonie des résultats attendus du MSCI
World AC en 2016 (+2 %) ne surprendra
personne, le rebond supposé en 2017
(+13 %) et 2018 (+12 %) intrigue. À l’analyse,
le rebond 2017 s’expliquerait à plus de
50 % par celui de l’énergie et des matériaux
de base qui ne représentent ensemble que
12 % de l’indice. En 2018, ces mêmes
secteurs contribueraient encore à près de
30 % du rebond total. Si un net rebond de
ces derniers en 2017 semble très plausible,
ceci sera moins aisé en 2018. Par ailleurs,
la visibilité sur les financières, censées
également apporter une forte contribution
à la croissance des résultats 2017-2018,
demeure très réduite. Entre hétérogénéité et
faible visibilité, la pertinence de l’allocation
sectorielle sera encore plus décisive qu’à
l’accoutumée.
La victoire surprise du Brexit a pris de revers le marché. Après bien des
atermoiements, celui-ci s’était soudain emballé quelques jours avant l’élection.
Du 16 au 23 juin dernier — soit à partir de l’assassinat de Jo Cox au référendum
— MSCI EMU et UK avaient en effet tous deux progressé d’environ 7 %, plus
5 % supplémentaires pour la livre britannique. De nombreux investisseurs
ayant finalement été pris de court par le résultat du référendum, ceci a
entraîné une chute brutale des actifs risqués et un repli sur les « actifs
refuges » comme les taux souverains, le yen, le franc suisse, le dollar ou l’or.
Le lundi 27 juin au soir, au pic de la crise, MSCI EMU et UK plongeaient
respectivement de 11 % et 6 % par rapport au 23 juin et la Livre chutait en sus
de 11 %. Depuis lors, les marchés d’actions ont regagné une partie du chemin
perdu. Une semaine plus tard, le 4 juillet, le MSCI EMU ne perdait « plus que »
5 % par rapport au 23 juin, le MSCI Europe était à peu près stable (-2 %) et le
MSCI UK progressait même de +3 % (cf. graphique 1).
En apparence, la situation semble donc se stabiliser. La réalité est
toutefois plus complexe. Si les indices actions américains et émergents
se sont montrés très résilients, la situation en Europe est beaucoup plus
contrastée. Si la Suisse et l’Europe du nord ont bien résisté, la zone euro et,
surtout, sa périphérie ont été fortement impactées. Par ailleurs, la performance
du MSCI UK est trompeuse car la Livre demeure en baisse de 10 % contre
USD. Signe de l’anxiété persistante, les « actifs refuges » demeurent tous en
hausse sensible. Enfin, les performances sectorielles sont très révélatrices du
malaise. Ainsi la quasi stabilité du MSCI Europe (-2 %), masque en réalité une
très bonne tenue de l’énergie (+7 %) et des secteurs défensifs (+4 %), mais
une baisse des cycliques (-4 %) et un effondrement des financières (-13 %),
notamment italiennes (-25 %). En d’autres termes, ce retour au calme est
loin d’être généralisé et, d’une place ou d’un secteur à l’autre, les réalités
demeurent très tranchées.
On n‘attrape pas un couteau qui tombe. La valorisation d’un marché — à
moins d’avoir touché le fond, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui — étant rarement
un motif d’achat suffisant, nous poursuivrons cette revue par l’appréciation
des bénéfi ces en mettant l’accent sur les perspectives sectorielles ; celles-ci
étant particulièrement riches d’enseignement car très hétérogènes.
Des biais sectoriels riches
d’enseignements
1
Variation de l’or, des devises et des indices
MSCI (monnaies locales) du 23/6 au 4 /7/2016
Si l’on débute la comparaison fin 2007, soit avant le pic de la crise financière,
les BPA ont progressé depuis de 32 % aux États-Unis quand, dans le
même temps, ils ont baissé de 46 % en zone euro. Entre les deux, on relèvera,
le cas du Japon à -6 %, des Émergents à -20 %, et du Royaume-Uni à -26 %.
Si la zone euro est très en retard par rapport au reste du monde, on sait que
c’est en bonne partie du fait qu’elle a connu deux récessions sur la période
contre une seule pour les autres régions. On sait aussi que sa devise est
longtemps demeurée très forte, ce qui a pesé sur les BPA, exprimés ici en
monnaie locale (à l’exception des marchés émergents en USD). On relève enfin
que, d’une région à l’autre, les pondérations sectorielles étant différentes,
ceci peut brouiller la mesure ; les États-Unis ayant, par exemple, été porté
par le dynamisme et le poids de leur secteur technologique (20 % du poids du
MSCI US contre seulement 4 % en Europe) alors que la zone euro a pâti des
difficultés des financières et des services collectifs (respectivement 19 % et
6 % du MSCI EMU) qui pèsent ensemble pour 25 % de l’indice.
40
Title Arial 8 Bold (1 or 2 lines maxi)
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7/8
#
Juillet-Août 2016
Quand on observe plus particulièrement la période récente, on note
depuis juillet 2014 un changement de tendance du MSCI World AC, avec,
pour la première fois depuis la grande crise financière de 2008, une baisse
prolongée des BPA (cf. graphique 2).
2
Bénéfi ces par action du MSCI World AC
Si l’amplitude de cette baisse est sans commune mesure avec celle de 2008,
sa durée est néanmoins comparable. Par ailleurs, comme en 2008, ce
repli ne s’est pas cantonné à une ou deux régions mais a été quasiment
généralisé. Ainsi, à l’exception notable de la zone euro, repartie timidement
de l’avant depuis quelques mois, les autres régions connaissent, une érosion
continue de leurs BPA : le Royaume-Uni depuis août 2012, les Émergents
depuis septembre 2014, les États-Unis depuis octobre 2015 et désormais le
Japon depuis avril 2016.
Quand on s’interroge sur les raisons de cette baisse, le ralentissement de la
croissance économique globale en 2015 et notamment celle des Émergents
a pu jouer un rôle, mais celui-ci est assez secondaire, compte tenu de la
baisse limitée des profits émergents (-7 % en 2015) et de leur faible pondération
dans les indices (11 % du MSCI World AC). En revanche, avec l’effondrement
des prix des matières premières, les aspects sectoriels ont joué à plein.
Ainsi, au sein du MSCI World AC, les BPA 2015 des matériaux de base
et du secteur pétrolier ont baissé respectivement de 26 % et 54 %. Ces
secteurs pesant chacun pour 5 % et 7 % de l’indice, toutes choses égales par
ailleurs, la chute de leur BPA aurait amputé l’ensemble de 500 points de base.
En d’autres termes, hormis ces deux secteurs, au lieu de baisser de 3 %,
les BPA 2015 du MSCI World AC aurait continué de croître aux environs
de +2 % (cf. graphique 3).
Title Arial 8 Bold (1 or 2 lines maxi)
3
Pondération sectorielle et croissance
des BPA du MSCI World AC
Cet impact sectoriel ayant été décisif en 2015, qu’en sera-t-il pour la
suite ? Pour l’année en cours et les deux suivantes, le consensus IBES des
analystes table respectivement sur une croissance de +2 % en 2016, +13 % en
2017 et +12 % en 2018. Si l‘atonie des résultats 2016 ne surprendra personne,
on ne peut être en revanche qu’étonné d’une telle accélération à partir de 2017 ;
la reprise cyclique américaine ayant déjà largement atteint son asymptote, de
nouvelles menaces pesant sur l’Europe depuis le Brexit, les Abenomics et la
dépréciation du Yen ayant fait long feu et la locomotive chinoise ayant de la
peine à maintenir sa vitesse.
Afin d’en juger plus avant, un examen des contributions sectorielles est une
nouvelle fois fort instructif. Ainsi, en 2017, le quasi-doublement attendu des
BPA dans l’énergie contribuerait jusqu’à 700 points de base. Autrement
dit, la progression de +13 % des BPA du MSCI World AC en 2017 serait
attribuable pour une large part à ce seul secteur et, dans une moindre mesure,
au redressement des matériaux de base et aux financières.
Une progression aussi hétérogène des profits pose cependant de
nombreuses questions ; une reprise sur des bases étroites apparaissant plus
vulnérable et, surtout, peu susceptible d’être auto entretenue. Si un net rebond
de l’énergie et des matériaux de base en 2017 est très plausible, compte tenu
des bases de départ déprimées, ceci sera moins aisé en 2018. De même,
compte tenu des taux d’intérêt négatifs, de l’environnement économique,
politique et réglementaire, ainsi que de l’environnement de marchés, la visibilité
sur les financières demeure très réduite.
Concernant le secteur de l’énergie, notre hypothèse de base est que les prix
du pétrole devraient se stabiliser dans une fourchette comprise entre 50 $
et 55 $ à l’horizon 18 mois. Ceux-ci ayant été divisés par quatre de juin 2014 à
janvier 2015 (de 114 à 28 $) ils ont commencé à remonter la pente depuis. Les
comparaisons sur douze mois glissants, très défavorables jusque-là, devraient
donc s’améliorer à partir du début de l’année prochaine. Dans ce contexte, entre
des effets prix plus favorables et de moindres charges exceptionnelles, les résultats
du secteur, à défaut de doubler, devraient fortement s’améliorer. En revanche,
sur 2018, sauf à imaginer une réelle amélioration du substrat économique et une
poursuite de la remontée des cours du pétrole aux environs de 65-70 $, le nouveau
bond de 38 % du secteur de l’énergie et partant de +12 % des résultats du MSCI
World AC nous semble plus aléatoire, sans parler des financières où rien n’est écrit.
Title Arial 8 Bold (1 or 2 lines maxi)
Source : Datastream, Factset, Recherche Amundi
4
Pondération sectorielle et croissance
des BPA du MSCI zone euro
Source : Datastream, Factset, Recherche Amundi
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41
7/8
#
Juillet-Août 2016
Après ce tour d’horizon global, la même approche peut être déclinée au
plan régional
Concernant la zone euro, le consensus prévoit des résultats en très légère
en hausse sur 2016 (+2 %), suivis d’une forte accélération au-delà (+14 % en
2017 et +11 % en 2018). Comme pour le MSCI World AC, ces résultats seront
largement tributaires de l’énergie et des matériaux de base (soit un delta de
+510 points de base entre 2016 et 2017) ainsi que des financières. Ainsi, selon
IBES, après avoir déprimé les résultats 2016 (-6 % soit -130 pb), ces dernières
pourraient repartir de l’avant en 2017 (+15 %, soit +370 pb). La zone euro étant
toutefois particulièrement concernée par les répercussions du Brexit et des taux
d’intérêt négatifs, la visibilité des financières est particulièrement limitée.
Concentrant près de la moitié des prêts non performants de la zone euro,
les banques italiennes se trouvent à l’épicentre de la crise. Leurs modalités
de renflouement divisent aujourd’hui les Européens. Avec les résultats des
prochains stress tests de la BCE le 29 juillet prochain, l’issue de ce dossier
devrait se dessiner dans les toutes prochaines semaines. Ce sera déterminant
pour juger des perspectives du secteur.
Aux États-Unis, après +1 % attendu en 2016, il peut également sembler
étrange que les résultats repartent aussi fort de l’avant en 2017 (+14 %) ; ceuxci étant notoirement en haut de cycle, depuis longtemps. Mais là-bas plus
qu’ailleurs, ce redémarrage procéderait largement d’un effet d’optique. En
effet, si le secteur pétrolier américain pèse environ du même poids dans les
indices qu’en Europe, en revanche, il est beaucoup plus orienté amont. Ce
secteur a donc plus souffert qu’en Europe de la chute des prix du pétrole.
Inversement, à partir de 2016, il devrait également davantage profiter de la
hausse ; la contribution de l’énergie à la progression des résultats des ÉtatsUnis en 2017 éclipsant alors celle des autres secteurs.
5
Pondération sectorielle et croissance des
BPA du MSCI USA
MSCI USA
Poids
Croissance des BPA
2015 2016 2017 2018
IT
20%
7%
2%
12%
12%
Cons. Discret.
13%
14%
14%
13%
14%
Santé
15%
12%
8%
11%
11%
Energie (1)
7%
-62% -70% 249% 55%
Services collectifs
4%
-1%
3%
4%
7%
Industrielles
10%
-1%
4%
10%
11%
Telecom
3%
13%
4%
5%
5%
Matériaux de base (2)
3%
-5%
0%
15%
8%
Financières (3)
16%
14%
0%
11%
11%
Conso. Courante
10%
0%
4%
10%
9%
Total
100%
0%
1%
14%
13%
dont Energ (1) et Mat (2)
10%
-5%
-5%
ns
4%
dont Financières (3)
16%
2%
0%
2%
2%
Total ex 1, 2,3
74%
3%
6%
ns
7%
Source : Datastream, Factset, Recherche Amundi
6
Pondération sectorielle et croissance des
BPA du MSCI Japon
À l’inverse, au Japon, le poids de l’énergie dans les indices est très faible
(moins de 1 % du MSCI Japon). Dans ce contexte, son impact positif sur les
résultats 2016 sera minime. On peut dès lors s’interroger sur le rebond de +15 %
espérés par le consensus. L’examen révèle que ceci serait très largement lié à
la forte amélioration attendue des secteurs de l’industrie et de l’informatique.
Étant donné l’envolée du JPY depuis le début de l’année (environ 20 % contre
USD, EUR et CNY), ceci nous laisse passablement sceptique…
Du côté des émergents enfin, les biais sectoriels sont finalement assez
équilibrés. Comme ailleurs, on note une amélioration sensible en 2017 des
résultats dans l’énergie, les matériaux de base et la finance, mais aussi dans
l’industrie et l’informatique. Autrement dit, cette amélioration se produirait
sur un front large. Ce scénario encourageant serait cohérent avec celui de
la sortie du purgatoire des pays exportateurs de matières premières, et de
conditions financières relativement accommodantes compte tenu du faible
resserrement attendu de la Fed et de la baisse de l’aversion au risque.
Source : Datastream, Factset, Recherche Amundi
7
Pondération sectorielle et croissance des
BPA du MSCI Marchés émergents
Pour conclure, quand on s’interroge sur les bénéfices à venir, les moyennes
sont trompeuses et il est devenu vital d’inclure une dimension sectorielle. Au
plan mondial, compte tenu du contrecoup de la crise des matières premières,
les BPA des secteurs Énergie et Matériaux de base joueront un rôle central
dans ce rebond en 2017, sans garantie toutefois que ceci se prolonge
aussi nettement en 2018. Au plan régional, en zone euro, si la composante
« Commodities » du rebond des résultats 2017 ne pose guère problème, en
revanche la contribution des financières, attendue en forte hausse, demeure
plus aléatoire (conséquences du Brexit, taux d’intérêts négatifs, traitement de
la crise italienne…). Aux États-Unis, contre toute attente, une bonne tenue des
résultats 2017 n’est pas à exclure… mais celle-ci procéderait très largement
d’un effet d’optique lié au triplement attendu des résultats dans l’énergie.
Sur les marchés émergents enfin, la progression des résultats semble assez
équilibrée, ce qui serait plutôt de bonne augure pour leur soutenabilité.
Source : Datastream, Factset, Recherche Amundi
42
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7/8
#
Juillet-Août 2016
Achevé de rédiger le 24 juin 2016
6 Immobilier japonais et investisseurs :
L’essentiel
une relation passionnelle mais instable
MAHFOUD DELAL, Stratégie et Recherche Économique
Le marché de l’immobilier japonais
est au centre du débat actuel sur les
taux d’intérêt. L’immobilier représente
une classe d’actifs attrayante. Les
promoteurs immobiliers bénéficient
des taux d’intérêt négatifs : possibilité
d’emprunter à bas coût pour investir
dans de nouvelles constructions ou
d’améliorer le rendement pour les
actionnaires.
La surperformance relative au Topix, du sous-indice incluant les fonds de
placement immobilier (FPI) a été impressionnante depuis l’introduction du
taux d’intérêt directeur négatif. Outre les traditionnels avantages rattachés à
un investissement dans le secteur de l’immobilier comme l’effet de levier, les
avantages fiscaux, la diversification, une faible volatilité du rendement ainsi
qu’une protection contre l’inflation, certaines caractéristiques propres au marché
japonais le rendent encore plus attractif. Le secteur bénéficie notamment de la
stratégie de croissance économique des autorités.
Les profi ts des sociétés ayant largement augmenté au cours des dernières
années, le secteur de l’immobilier de bureau profi te dans une certaine mesure
de l’amélioration continue du marché du travail et de l’investissement. Le taux
moyen d’inoccupation de ce type de bien s’est contracté jusqu’à atteindre
4.05 % au mois de mai et n’a cessé de diminuer depuis juillet 2012. Conséquence
logique, les loyers sont en augmentation depuis janvier 2014 et le prix moyen
des nouveaux et anciens biens a atteint 5 477 yens par mètre carré en mai 2016
(+11.5 % sur la période), un plus haut depuis six ans.
Les fonds de placement immobiliers ont vu
le prix de leurs titres largement augmenter
depuis le début de l’année. L’introduction
des taux d’intérêt négatifs a confirmé la
demande sur ce secteur
Pourtant les 5 quartiers centraux de Tokyo (Minato, Shibuya, Shinjuku, Chiyoda,
Chuo) comptent de moins en moins de constructions puisque leur nombre
est passé de 2 659 unités en mars 2013 à 2 601 unités en mai 2016. Les
constructions sont souvent le résultat de la relocalisation de bâtiments existants
à des fins de regroupement de personnel.
Le nombre de touristes étrangers visitant le pays n’a cessé d’augmenter ces
quatre dernières années grâce des conditions facilitées d’obtention de visa, à une
gamme élargie de produits éligibles à une déduction de taxe, au développement
récent d’infrastructures aéroportuaires dédiées aux compagnies aériennes à
bas prix et à l’augmentation du PIB par habitant en Asie. Sur la base du taux
de change effectif réel, la dépréciation du yen jusqu’à juin 2015 a aussi joué
un rôle important mais nous observons que le nombre de touristes continue
de croître au-delà de cette période. Alors que la demande a rattrapé l’offre,
la construction de nouvelles infrastructures est motivée par la révision de son
objectif à la hausse (de 20 à 40 millions avant 2020) par le gouvernement. Le
taux d’occupation des infrastructures à Tokyo et Osaka est considérablement
élevé en comparaison à d’autres grandes villes telles que Paris ou New-York,
donnant aux gérants d’hôtel un plus grand pouvoir de tarification.
Toutefois, les principaux intéressés ne sont pas les investisseurs locaux mais
les étrangers qui ont investi massivement dans ce secteur depuis le mois de
février. Leurs investissements se concentrent sur les FPI plutôt que sur les
150
100
50
0
-50
-100
Autres
Banque
Fiducies de placement
étrangers
04-16
02-16
12-15
10-15
08-15
06-15
04-15
02-15
12-14
10-14
08-14
-150
06-14
L’effet de l’environnement de taux bas a donc été amplifi é, attirant les investisseurs
averses au risque ou recherchant un plus haut rendement vers ce secteur : le
montant des dividendes de 3.13 % est plus élevé que la moyenne des sociétés
du principal indice Topix (2.32 % à la fin juin 2016).
Flux de fonds dans les FPI japonais
04-14
Enfin, les mises en chantier immobilières ont augmenté depuis le mois de
février 2016 avec une croissance avoisinant les 9.0 %, se plaçant constamment
largement au-dessus des attentes du marché. L’introduction des taux d’intérêt
négatifs le 29 janvier 2016 a eu un impact considérable sur le secteur. Au mois
de mars, les crédits immobiliers ont atteint leur plus haut niveau depuis la bulle
immobilière américaine. La surface totale disponible à la location a bondi de
1.8 % entre les mois de janvier et mai alors que l’augmentation a été seulement
0.25 % au cours de l’année 2015.
1
Trillion yen
La banque centrale japonaise (BoJ) a rendu le marché plus actif en décidant
d’investir dans des fonds immobiliers un montant de 90 milliards de yens par an
depuis le lancement de la seconde opération d’assouplissement quantitatif à la
fi n de l’année 2014 (QQE2).
Assurance vie et non-vie
BOJ
sociétés de placement
particuliers
Source : BoJ, MOF, Recherche Amundi
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43
7/8
#
Juillet-Août 2016
La question est donc plutôt : pourquoi les investisseurs japonais qui n’ont pas
beaucoup d’opportunités d’investissements sur leur marché domestique, n’ont-ils
pas saisi l’occasion que représente le marché de l’immobilier local ? Étrangement,
les investisseurs japonais ont intensifié leurs prises de positions dans des FPI
internationaux plutôt que domestiques au moment où les étrangers affluaient
sur le marché japonais. Au cours du mois de mars, les dix fonds de placement,
toutes classes d’actifs confondues, qui ont eu l’augmentation nette des apports
les plus larges comptent 6 FPI spécialisés dans les actifs internationaux, dont 5
se plaçaient en tête de liste. En plus d’offrir des dividendes encore plus élevés
que pour les FPI exposés aux actifs domestiques, il semble que ces fonds de
placement modifi ent progressivement leur mode de rémunération passant de
primes d’intéressement (calculées sur l’appréciation en capital) à une prime de
gestion (calculée sur le montant total du fond) pour faire face à la difficulté que
représente le gain de capital. Il y a de plus une corrélation entre les fonds les
plus vendus et le niveau des commissions de vente qui se place souvent audessus de 3.0 %.
Évolution du nombre de touristes
et du taux de change effectif réel
2
60
2.5
Corée
62
Chine
Taiwan
2.0
64
Hong Kong
Autres
66
Taux de change effectif (rhs)
68
1.5
70
72
1.0
74
76
0.5
78
80
0.0
82
05-13
07-13
09-13
11-13
01-14
03-14
05-14
07-14
09-14
11-14
01-15
03-15
05-15
07-15
09-15
11-15
01-16
03-16
promoteurs immobiliers car ils offrent un rendement plus élevé. À la fin du
mois de juin 2016, les dividendes des FPI étaient de 3.13 % contre 1.30 %
pour les promoteurs.
Source : JNTO, Bloomberg, Recherche Amundi
Cependant, les dernières données datant du mois de mai 2016 montrent un
retour des banques et fiducies de placements locales. Après trois mois d’apports
massifs (second record historique en février) faisant suite à l’introduction des
taux d’intérêt négatifs, il n’y a plus eu beaucoup de flux domestiques, excepté
ceux de la Banque du Japon (BOJ). (cf. graphique 1)
Nous pensons que le secteur a encore une marge de progression dans un
environnement avantageux. L’organisation des jeux olympique pour 2020 va
permettre de soutenir les constructions et aménagements pendant au moins
6.0%
5.0%
4.0%
3.0%
2.0%
1.0%
particuliers
sociétés de placement
Assurance vie et non-vie
Autres
04-16
02-16
12-15
10-15
08-15
06-15
04-15
02-15
0.0%
12-14
Le prix moyen des loyers requis est à son plus haut niveau depuis mai 2010
et a largement augmenté depuis l’arrivée au pouvoir du Premier ministre Abe,
poussé par les pressions inflationnistes. Un élément clé sera donc de voir si
l’augmentation des loyers pourra continuer.
Part des ordres par type d’investisseur
10-14
Le taux d’inoccupation a encore une marge d’amélioration. La dernière
publication est encore 159 points de base au-dessus du record de 2.46 %
atteint en novembre 2011. La part de l’immobilier de bureau représente
plus de 46 % des positions des 54 FPI se situant au Japon, faisant du taux
d’inoccupation un indicateur important contribuant au niveau des loyers
demandés.
3
08-14
Les ratios fondamentaux nous en apprennent un peu plus avec une étude de
la société américaine JLL. Parmi les 15 grandes villes concernées, le Japon
se place sixième en termes de prix/revenus derrière Hong-Kong, Singapour
ou encore New York, ce qui peut sembler élever. Cependant le ratio du prix/
loyers place le Japon en onzième position mettant en évidence une relative
sous-évaluation du marché ainsi qu’une compétitivité prééminente.
06-14
Par ailleurs, les flux transfrontaliers aussi bien sortants qu’entrants s’étant
intensifi és récemment, une comparaison au niveau international s’avère utile.
En termes de prix des indices et sur une base harmonisée, alors que le marché
américain se situe largement au-dessus de son pic atteint lors de la bulle
immobilière en février 2007, le marché japonais possède encore une marge de
progression.
Le marché immobilier
japonais devrait continuer
à bien performer aussi
longtemps que le marché est
soutenu par l’argent facile
des banques centrales et de
faibles taux d’intérêt réels,
attirant ainsi les acheteurs
internationaux
04-14
Par ailleurs, la récente expansion pose la question d’un marché en surchauffe
avec des niveaux d’évaluations trop élevés. Les indicateurs tels que les ratios
cours/valeurs comptable (PBR) et cours/bénéfices (PER) peuvent paraître
relativement élevés en comparaison à leur moyenne calculée depuis le
lancement des mesures monétaires d’assouplissement quantitatif. Cependant,
ceci est valable uniquement pour les FPI (valeurs actuelles de 1.52x et 31.9x
pour des moyennes de 1.4x et 30.8x respectivement) alors que les promoteurs
immobiliers profitent aussi de l’environnement actuel (même s’ils n’ont pas une
redistribution des profits aux actionnaires aussi conséquente).
étrangers
Fiducies de placement
Banques
Source : TSE, Recherche Amundi
44
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
7/8
#
Juillet-Août 2016
100.2
100.1
100
99.9
99.8
99.7
99.6
Topix FPI
Topix Banque
Topix
Topix Immobilier
Source : Bloomberg, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
45
06-16
05-16
05-16
04-16
04-16
03-16
03-16
03-16
02-16
99.5
02-16
L’introduction des taux d’intérêt négatifs amplifi e cet effet et les investisseurs
domestiques tels que les fiducies et les banques régionales s’intéressent à ce
type d’investissement. Ces dernières étant moins impliquées dans le courtage
et les prêts à des clients étrangers en comparaison aux "méga banques",
leur manque de diversification en termes de métiers les rend plus à même de
prendre position sur ce secteur attractif dans la dynamique actuelle de notre
environnement.
Performance indices (base 100)
01-16
Par ailleurs, dans un environnement où les opportunités d’investissement
s’amenuisent, les investisseurs recherchent des actifs leur permettant d’ajouter
des revenus fi xes à leur portefeuille. De façon générale, la recherche d’un
rendement plus élevé incite les investisseurs à se tourner vers des classes d’actifs
telles que les obligations à haut rendement et les actions à haut dividende ou
encore les actions dites privilégiées. L’immobilier convient aussi pour une classe
d’actifs alternative.
4
01-16
les deux prochaines années. Au-delà de l’horizon 2020, le doute subsiste
quant à la capacité à maintenir un nombre de visites croissant après l’afflux
"ultime" que le pays aura atteint pendant les J.O.
7/8
#
Juillet-Août 2016
Achevé de rédiger le 30 juin 2016
7 Les perspectives de la construction
L’essentiel
américaine restent favorables
LAURENT PARIS, Analyse Actions
Après l’éclatement de la bulle
immobilière américaine dès 2006 et
l’effondrement brutal du marché de
la construction, le secteur a connu
une nette reprise à partir de 2012.
Après l’éclatement de la bulle immobilière américaine dès 2006 et l’effondrement
brutal du marché de la construction aux États-Unis, le secteur a connu une
nette reprise à partir de 2012, tirée par l’amélioration progressive des principaux
indicateurs économiques et le développement rapide de l’exploitation du gaz de
schiste. Aujourd’hui, après quatre années de croissance relativement soutenue
et dans un contexte économique mondial toujours difficile et marqué par la
forte baisse du pétrole, on peut légitimement s’interroger sur la poursuite de
ce rebond qui a été un des principaux facteurs de croissance des résultats des
grands groupes internationaux de matériaux de construction et notamment de
ciment. L’objet de cet article est de faire le point sur les grandes tendances que
l’on observe au sein des différents segments de la construction américaine (le
résidentiel, le non résidentiel privé et le non résidentiel publique).
Aujourd’hui, après quatre années de
croissance relativement soutenue et dans
un contexte économique mondial toujours
difficile marqué par la forte baisse du
pétrole, on peut légitimement s’interroger
sur la poursuite de ce rebond. L’analyse
des différents segments de la construction
(le résidentiel, le non résidentiel privé et
le non résidentiel public) nous amènent
plutôt à penser que les vecteurs de
croissance restent présents et que si le
rythme des dernières années n’apparait
pas soutenable, les perspectives de la
construction américaine restent favorables.
La construction résidentielle présente toujours un potentiel
de croissance
Au cœur de la crise de 2007-2009, le marché de la construction résidentielle
américaine a connu une contraction de près de 60 % de ses volumes sur la période
2006-2011. Or depuis le point bas atteint en 2011 elle a fortement rebondi, affichant
un doublement en quatre ans (en termes réels). Cependant, elle n’en demeure pas
moins très en deçà de son niveau de 2005. S’il est certainement excessif d’imaginer
à ce stade un retour sur les niveaux élevés d’avant crise, le niveau actuel reste
inférieur à son potentiel niveau normalisé. Ainsi, si on regarde les mises en chantier
de logements, principal indicateur de cette activité, la croissance se poursuivait
début 2016 avec près de 1,2 million de mises en chantier en avril (en données
annualisées). Comme l’illustre le graphique 2, ce rythme est deux fois supérieur
à 2010 mais bien en deçà de la moyenne de long terme (proche de 1,4 million
d’unités sur 30 ans) et aussi du potentiel sous-jacent du marché estimé plus près de
1,5 million d’unités compte tenu de la croissance de la population américaine sur les
10 dernières années. Un simple retour à la moyenne long terme en 2018 impliquerait
une croissance annualisée de 8 % (contre 16 % réalisés entre 2011 et 2015).
700
Résidentiel privé
Non-résidentiel privé
Public
600
500
Traditionnellement en retard sur la construction résidentielle, la construction nonrésidentielle privée (qui englobe principalement les bureaux, les commerces,
l’hôtellerie, la santé, l’énergie et l’industrie manufacturière) a connu son point haut
en 2008. Si elle n’a pas échappé à la crise, sa chute a été moindre (près de 45 %)
que celle de l’immobilier résidentiel. Depuis son point bas atteint en 2011, elle a
progressé sur 4 ans et ne se situe plus très loin de ses plus hauts.
400
En dépit de la forte chute du prix du pétrole, la croissance du non-résidentiel privé
est restée forte en 2015, soutenue par la relative inertie de l’industrie et les effets
bénéfiques sur la consommation de la baisse du prix du pétrole. Ainsi, après
100
46
Dépenses de construction aux États Unis
(Mds $, taux annuel ajusté)
300
01-16
01-15
01-14
01-13
01-12
01-11
01-10
01-09
01-08
01-07
01-06
01-05
01-02
200
01-04
La construction privée non-résidentielle ralentit,
affectée par le tassement de l’industrie manufacturière
1
01-03
Aujourd’hui, les principaux facteurs favorisant l’investissement immobilier restent
en place : faible niveau de chômage, ré-augmentation du nombre de foyers, net
vieillissement du parc immobilier (d’ailleurs souvent de qualité moyenne), niveau
de stocks de logements proche des niveaux moyens historiques, reprise de la
demande de logements individuels (alors que la sortie de crise avait favorisé dans
un premier temps les logements collectifs), augmentation des loyers. Si le principal
risque semble provenir de la forte progression déjà observée des prix des logements
(l’indice Case Schiller des 20 plus grosses villes américaines a progressé de 38 %
depuis 2012) et d’une potentielle remontée des taux d’intérêt, la qualité du crédit
hypothécaire s’est sensiblement améliorée sous la contrainte du législateur. Pour
finir, nous privilégions le scénario de la poursuite d’une croissance du résidentiel
privé, de l’ordre de 7-8 % par an. Ceci est d’ailleurs en grande partie déjà conforté
en 2016 par la progression de 12 % des permis de construire observée en 2015.
Source : Datastream, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
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Juillet-Août 2016
2
Mises en chantier de logement — États-Unis
2500
Mises en chantier (milliers d'unités)
Moyenne sur 30 ans
2000
1500
1000
500
2016
2013
2010
2007
2004
2001
1998
1995
1992
1989
$50.0
Dépenses précédentes
47.1
46.0
45.0
44.0
43.1
$47.5
Autorisées par le "FAST
Act"
$45.0
$42.5
40.1
40.1
$40.0
$37.5
41.0
39.5
37.8
2020e
2019e
2018e
2017e
2016e
2015
$35.0
2014
iii. L’augmentation du trafic routier soutenu par la baisse des prix des carburants.
En effet, en 2015, le nombre de miles parcourus a progressé de 4 % pour
la première fois depuis 2007. Sachant que la taxe sur l’essence est fixe et
inchangée depuis 1993 (18.4c par gallon d’essence et 24.4c par gallon de
diesel), l’augmentation du trafic devrait se traduire par une augmentation
des ressources fiscales affectées aux fonds de financement des travaux
autoroutiers.
Financement des travaux autoroutiers
autorisés par le FAST Act — États-Unis, Md$
2013
ii. Le vote en décembre dernier d’une nouvelle loi pluriannuelle de financement
des infrastructures, le FAST Act (« Fixing America’s Surface Transportation
Act ») qui pour la première fois depuis 2009 garantit un financement sur
5 années des travaux d’infrastructure autoroutières. D’après l’ARTBA
(American Road & Transportation Builders Association), cette nouvelle loi
représente (ajustée de l’inflation et des coûts de projet) une augmentation
de 0.5 % par an sur 5 ans des dépenses d’infrastructure.
3
2012
i. L’amélioration continue du marché de l’emploi a permis de renforcer la
situation financière des États de l’Union. En moyenne, les États prévoient
une hausse de 3 % de leurs dépenses sur 2015-16. De nombreux états
comme le Texas, la Caroline du nord, la Géorgie, la Floride ont fortement
augmenté leurs budgets d’infrastructure tandis que les différents leviers de
financement ont été renforcés ces dernières années.
Source : Datastream, Recherche Amundi
2011
Entre 2009 et 2014, la construction publique américaine a connu en termes
réels un repli de l’ordre de 20 %, principalement du fait de la situation budgétaire
difficile des États tandis que les dépenses fédérales d’infrastructure ont connu
une relative stagnation. Aujourd’hui nous voyons plusieurs éléments susceptibles
de favoriser une reprise des dépenses publiques d’infrastructure :
1986
La construction publique désormais en phase de reprise ?
1983
0
1980
16 % de croissance en 2014, le non-résidentiel privé a progressé de près de 8 %
en 2015. Deux principaux segments ont soutenu cette performance en 2015 : le
secteur manufacturier d’un côté (+33 % en 2015), les bureaux et hôtels de l’autre
(resp. +21 % et +30 %). Le premier est le reflet de la forte croissance issue de la
dynamique autour du développement du gaz de schiste. Quant au second, il est lié
à la reprise économique marquée par la baisse du chômage et l’engouement autour
des start-up informatiques (stimulant la demande de bureaux). Ces deux secteurs
d’activité montrent aujourd’hui des signes d’un potentiel ralentissement : fin du boom
des start-up internet, base de comparaison plus difficile, achèvement des gros
projets de gaz naturel liquéfié ou des gros crackers de pétrochimie, appréciation du
dollar… Le risque principal pèse sur le secteur manufacturier, comme en témoigne
le retournement de l’indice PMI Manufacturing et de la production industrielle depuis
l’automne dernier. Néanmoins, malgré un tassement de l’ordre de 5-6 % attendu en
2016 (par le PCA — Portland Cement Association) dans la partie manufacturière,
la relative résistance des autres segments devrait permettre d’afficher une légère
croissance du non résidentiel privé cette année. Le ralentissement de la dynamique
du non résidentiel privé laisse entrevoir une possible inflexion à la baisse après 2016.
Source : US federal Highway Administration,
Recherche Amundi
La combinaison de ces éléments semble favorable aujourd’hui à une reprise de
la construction publique, même si celle-ci devrait rester mesurée. Notons que les
attentes ne sont pas très élevées (entre 2.5 et 3.0 % de croissance).
Conclusion
Pour finir, les indicateurs du résidentiel privé aux États-Unis apparaissent
toujours bien orientés, confortant la perspective d’une nouvelle croissance
en 2016. Néanmoins, celle-ci pourrait être freinée par le niveau déjà élevé
des prix de l’immobilier et d’éventuelles tensions sur les taux d’emprunt
hypothécaires. À côté, la construction non-résidentielle privée montre des
signes d’essoufflement, pénalisée par le report des nouveaux gros projets dans
le gaz et la chimie et le ralentissement du secteur manufacturier induit par la
baisse du prix du pétrole. Par contre les dépenses publiques de construction
pourraient connaitre une amélioration, soutenues par l’amélioration des
dépenses d’infrastructure de transport. Bien que le rythme des dernières
années n’apparaisse pas soutenable, la construction américaine devrait
continuer d’afficher une dynamique haussière.
Bien que le rythme
des dernières années
n’apparaisse pas soutenable,
la construction américaine
devrait continuer d’afficher
une dynamique haussière
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
47
MENSUEL
7/8
Juillet/août 2016 #
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Portfolio Manager, HASSAN MALONGO — Recherche Quantitative
On the stationarity of dynamic conditional correlation models
JEAN-DAVID FERMANIAN — Professor of Finance & Statistics, CREST/ENSAE
— HASSAN MALONGO — Recherche Quantitative
Asset Allocation under (one’s own) Sovereign Default Risk
DIDIER MAILLARD, Professor — Cnam, Senior Advisor
Designing a corporate bond index on solvency criteria
LAUREN STAGNOL — Recherche Quantitative
Which lever can enhance sustainability in emerging market countries ?
A stochastic approach to better grasp public debt dynamics
ANNE-CHARLOTTE PARET — Stratégie et Recherche Économique
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might feel weakness . While industrial
economic
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Marché des changes : la mécanique du facteur « carry »
EDMOND LEZMI — Recherche Quantitative
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Marchés financiers et environnement de taux bas/négatifs :
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Rédacteur en chef
– PHILIPPE ITHURBIDE
Directeur Recherche, Stratégie et Analyse – Paris
Rédacteurs en chef adjoints
– DIDIER BOROWSKI – Paris, RICHARD BUTLER – Paris, ÉRIC MIJOT – Paris,
MO JI – Hong-Kong, STÉPHANE TAILLEPIED – Paris
Support
– PIA BERGER
Recherche, Stratégie et Analyse – Paris
– BENOIT PONCET
Recherche, Stratégie et Analyse – Paris
AVERTISSEMENT
Directeur de la publication : Pascal Blanqué
Rédacteur en chef : Philippe Ithurbide
Les destinataires de ce document sont en ce qui concerne l’Union Européenne, les investisseurs « Professionnels » au sens de la Directive 2004/39/CE du 21 avril 2004
« MIF », les prestataires de services d’investissements et professionnels du secteur financier, le cas échéant au sens de chaque réglementation locale et, dans la mesure
où l’offre en Suisse est concernée, les « investisseurs qualifiés » au sens des dispositions de la Loi fédérale sur les placements collectifs (LPCC), de l’Ordonnance sur
les placements collectifs du 22 novembre 2006 (OPCC) et de la Circulaire FINMA 08/8 au sens de la législation sur les placements collectifs du 20 novembre 2008. Ce
document ne doit en aucun cas être remis dans l’Union Européenne à des investisseurs non « Professionnels » au sens de la MIF ou au sens de chaque réglementation
locale, ou en Suisse à des investisseurs qui ne répondent pas à la définition d’« investisseurs qualifiés » au sens de la législation et de la réglementation applicable.
Ce document n’est pas destiné à l’usage des résidents ou citoyens des États Unis d’Amérique et des « U.S. Persons », telle que cette expression est définie par la
« Regulation S » de la Securities and Exchange Commission en vertu du U.S. Securities Act de 1933.
Le présent document ne constitue en aucun cas une offre d’achat ou une sollicitation de vente et ne peut être assimilé ni à sollicitation pouvant être considérée comme
illégale ni à un conseil en investissement.
Amundi n’accepte aucune responsabilité, directe ou indirecte, qui pourrait résulter de l’utilisation de toutes informations contenues dans ce document. Amundi ne peut
en aucun cas être tenue responsable pour toute décision prise sur la base de ces informations. Les informations contenues dans ce document vous sont communiquées
sur une base confidentielle et ne doivent être ni copiées, ni reproduites, ni modifiées, ni traduites, ni distribuées sans l’accord écrit préalable d’Amundi, à aucune
personne tierce ou dans aucun pays où cette distribution ou cette utilisation serait contraire aux dispositions légales et réglementaires ou imposerait à Amundi ou à ses
fonds de se conformer aux obligations d’enregistrement auprès des autorités de tutelle de ces pays.
Les informations contenues dans le présent document sont réputées exactes à la date de fin de rédaction indiquée en première page de ce document, elles peuvent
être modifiées sans préavis. Conformément à la loi informatique et liberté, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification ou d’opposition sur les données vous
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