La pensée magique a pris le pas sur la pensée rationnelle

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La pensée magique a pris le pas sur la pensée
rationnelle
On est entré dans une zone de forte incertitude pour les marchés. Elle risque de durer
plusieurs mois car la liste des événements susceptibles de perturber les marchés est longue :
politique monétaire, conséquences du Brexit, élections à haut risques qui ont un fort potentiel de
déstabilisation…
La politique monétaire des banques centrales est devenue inefficaces puisque nous ne
vivons plus avec des prix qui sont fixés par le marché. Au contraire le niveau des taux d’intérêt et
les parités de change sont déterminés par les banques centrales. Nous sommes donc entrés dans
un monde magique. Tout le monde peut constater que les taux d’intérêt négatifs ne créent pas
d’emploi et sont en réalité un impôt sur les pauvres qui ont un peu d’épargne. En ce qui concerne
les retraités, cela provoque assez rapidement la faillite des caisses de retraites et des fonds de
pension. « Acceptons l’inflation pour euthanasier les rentiers » disait Keynes. Comme il n’y a plus
d’inflation, on arrive au même résultat en maintenant des taux négatifs pendant de longues
périodes. Aucun banquier central, aucun homme politique n’a expliqué clairement comment on
pouvait sortir de cette situation. On reste dans une pensée magique incantatoire
extraordinairement dangereuse…
En Grande Bretagne, le Brexit déstabilise la finance et les services financiers.
La moitié de l’excédent commercial britannique provient des services financiers : 78% des
opérations de change sont réalisées à Londres, 74% des contrats sur dérivés de taux, 59% des
primes d’assurance encaissées, 85% des capitaux gérés par les hedge funds et 64% des fonds
gérés par des sociétés de private equity. Ce n’est donc pas un hasard si la City a voté à 60% pour
rester dans l’Europe.
La Livre Sterling a perdu 15 % contre l’Euro depuis le référendum. Elle est maintenant sous
évaluée, ce qui favorise bien sûr les sociétés anglaises exportatrices mais handicape beaucoup
les sociétés étrangères qui avaient construit leur base industrielle en Angleterre pour exporter
leur production sur le continent européen. C’est notamment le cas pour l’industrie automobile.
Une série d’élections à très haut risque est devant nous
Aux Etats Unis, les élections auront lieu début novembre. Pour le moment les sondages
anticipent une victoire d’Hillary Clinton, ce qui serait conforme aux souhaits des milieux d’affaires
et des médias européens. Le rejet des élites est tellement fort, aux Etats Unis comme ailleurs,
que tout semble encore possible. Quel que soit le prochain locataire de la Maison Blanche, le
Pentagone incitera le prochain président à revoir le dispositif militaire américain soit en Asie face
à la Chine, soit en Europe face à Poutine.
Ce sera la fin de la Pax Americana. L’Amérique ne veut plus défendre « gratuitement » ses alliés.
La situation du dollar reste comme toujours très difficile à anticiper. L’histoire nous a appris à
de nombreuses reprises que le billet vert constituait dans les périodes troublées un actif refuge
particulièrement apprécié.
En Italie, le référendum constitutionnel aura lieu début décembre. Comme d’habitude les
électeurs ne répondront pas à la question qu’on leur pose. Il reprochent en effet aux autorités
européennes de laisser arriver 6000 migrants en une seule journée sans rien faire. Cela devrait
se traduire par la victoire du « Mouvement Cinq Etoiles » dont les dirigeants souhaitent sortir de
l’Euro. Le risque d’éclatement de l’Euro est donc beaucoup plus fort qu’il y a cinq ans au moment
où les créances douteuses des banques italiennes représentent encore 16,1% de leur bilan. Cette
éventualité devrait faire beaucoup réfléchir toutes les institutions qui possèdent des obligations
émises par l’Etat italien…
En Hollande, les prochaines élections auront lieu en mars 2017. Si Geert Wilders, le
dirigeant du Parti pour la Liberté gagne, ce qui est probable, il pourrait décider d’organiser un
référendum sur la sortie de l’Europe de son pays. Le député d’extrême-droite souhaite que son
pays ait sa « propre monnaie » et sa « propre politique d’immigration ». La encore on a du mal à
imaginer la survie de l’Euro tel que nous le connaissons…
En France, les élections auront lieu au mois d’avril 2017. Si le bilan du quinquennat de
François Hollande sera extraordinairement médiocre, on a le droit d’être inquiet sur les
programmes économiques des candidats de la droite. Dans un monde en pleine «ubérisation», le
statut du salarié permanent est menacé, les outils de production de biens et de services sont
déstabilisés, le droit de propriété n’est plus au centre des préoccupations du consommateur, la
puissance de l’Etat est remise en cause en permanence. En matière de travail, peu d’idées
circulent pour modifier un droit social totalement désuet. Pour la propriété, les nouveaux modèles
de consommation obligent les grands acteurs de l’économie à créer de nouveaux produits et
services ce qui est pratiquement impossible dans l’environnement réglementaire actuel. En
matière de concurrence la disparition des barrières à l’entrée sur le marché obligent à se poser la
question sur la concurrence et surtout d’y apporter des réponses. L’Etat est totalement dépassé
par la flexibilité des géants d’internet, leurs ruses comptables et leurs optimisations fiscales
demandent là aussi des réponses. Concernant les modes de production il faut que les hommes
politiques comprennent qu’il est temps de remettre en cause le cercle vertueux du fordisme.
Enfin, en matière de capital il faut prendre en compte le fait que ce ne sont plus les actifs
physiques qui comptent, mais les bases de données d’utilisateurs et les algorithmes développés
qui permettent de les exploiter.
Les amendes pénales imposées à des sociétés française émanant du Département de la
Justice ainsi que les amendes imposées par la Securities Exchange Commission ont concerné en
2010 Alcatel (137 M$), Technip (338M$) ; en 2013 Total (398M$) ; en 2014 Alstom (772M$). C’est
une situation totalement inacceptable sur laquelle on entend très peu la classe politique.
En Allemagne, les élections auront lieu en Septembre 2017. Le problème de la Deutsche
Bank devra être traité, ce qui sera très compliqué dans un environnement où
les plans de suppression de postes annoncés par les banques européennes sont impressionnants :
9600 personnes pour la Commerzbank, 7000 pour ING, 3000 pour Lloyds Bank, 3000 pour Banco
Popular, 2000 pour le Crédit Suisse, 2000 pour BBVA, 1800 pour Banco Popolare. Au total cela
concerne plus de 30 000 emplois.
Tous ces éléments qui ne sont pas particulièrement enthousiasmants doivent inciter l’investisseur
à détenir le moins possible d’obligations d’Etat et de privilégier les actions, surtout en Asie. Elles
seront au cours des prochains mois la classe d’actif la plus volatile mais dans la durée la moins
risquée…
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