MATRICES, INVERSIBILITÉ, DÉTERMINANT 1. L`anneau des

MATRICES, INVERSIBILITÉ, DÉTERMINANT
SAMUEL BAUMARD
1. L’anneau des matrices carrées
~Si nest un entier naturel et Kun corps commutatif, alors Mn(K)est un anneau, en général non commutatif,
dont l’élément unité est la matrice identité In.
Exercice 1. Combien valent les produits A B et B A, si A=112
101
11 1 et B=1 0 0
3 4 1
2 3 1 ?
~La définition de l’inversibilité est la même que dans n’importe quel anneau unitaire : une matrice est
inversible si elle possède une inverse à gauche et à droite.
~Pour déterminer si une matrice est inversible ou non, et pour déterminer son éventuelle inverse, on peut
employer la méthode du pivot par lignes. Cela provient entre autres de l’inversibilité des matrices élémentaires.
Exercice 2. Montrer que les deux matrices Aet Bde l’exercice 1 sont inversibles et déterminer leur inverse.
Exercice 3. Quelle est la complexité algorithmique de la méthode du pivot ?
~Inverser une matrice est une façon de résoudre un système linéaire, si celui-ci est de Cramer.
Complément : stabilité numérique de la méthode du pivot ; méthodes alternatives de résolution de systèmes,
numériques (Cholesky, Householder, Jacobi, Gauss-Seidel, relaxation...) ou sur des matrices à coefficients en-
tiers (Bareiss...). Voir [Cia, SP].
~L’inversion de matrices permet aussi d’effectuer des changements de base pour des vecteurs ou des appli-
cations linéaires.
Exercice 4. Soit Kun corps, et soit AMn(K). Montrer que Aadmet une inverse à gauche si et seulement
si elle admet une inverse à droite. Indication : voir la multiplication à gauche par Acomme un endomorphisme
du K-espace vectoriel Mn(K).
2. Le déterminant
~Le déterminant est défini comme l’unique forme multilinéaire alternée sur l’espace des colonnes des
matrices carrées, valant 1sur In. Cette définition a plusieurs conséquences importantes :
une expression en termes de permutations : si AMn(K), alors det(A) = P
σSn
n
Q
i=1
aσ(i),i, qui entraîne
à son tour
la possibilité d’effectuer des développements selon une ligne ou une colonne,
le caractère polynomial du déterminant,
la formule de la comatrice : si AMn(K), alors AtComA= det(A)In,
la possibilité de faire du calcul par blocs (voir exercice 9) ;
la possibilité de calculer un déterminant à l’aide d’opérations élémentaires sur les lignes et/ou les
colonnes.
Exercice 5. Calculer
51 5
5 3 7
2 1 2
et
1a a2a4
1b b2b4
1c c2c4
1d d2d4
.
Exercice 6. Quelle est la complexité algorithmique des méthodes de calcul de déterminant listées ci-dessus ?
~Géométriquement, dans le cas réel, le déterminant permet de calculer des mesures (aire, volume...) de
domaines simples. Cela se généralise à la formule de changement de variables pour les intégrales multiples. Il
permet aussi d’orienter l’espace et les similitudes vectorielles [Aud].
Exercice 7. Si (a0, . . . , an1)Kn, le déterminant de Vandermonde V(a0, . . . , an1)est det(aj
i)06i,j6n.
(1) En considérant V(a0, . . . , an1, X), montrer par récurrence que V(a0, . . . , an1) = Q
i<j
(ajai).
(2) Application : si Tr(Ak) = 0 pour tout entier k, alors Aest nilpotente.
(3) Autre application : si e1, . . . , ensont vecteurs propres d’un même endomorphisme pour des valeurs
propres distinctes, alors ils sont linéairement indépendants.
Contact: samuel.baumard(arobase)prepas.org.
~Le déterminant est une application polynomiale, donc de classe C, sur Mn(K). Conséquence : GLn(K)est
un ouvert dense de Mn(K).
Exercice 8. Calculer n(a, b)pour a6=b, puis en déduire n(a, a), où n(a, b)est le déterminant tridiagonal
n(a, b) =
a+b b 0
a a+b b
a a+b···
··· ··· b
0a a+b
~Le déterminant est multiplicatif : si Aet Bsont deux matrices carrées de même taille, alors det(AB) =
det(A) det(B). On peut le voir de plusieurs façons (composition d’endomorphismes, utilisation des permutations ;
voir aussi la formule de Binet-Cauchy [Ser]). Conséquence : SLn(K) = Ker(det : GLn(K)K)est un groupe.
Exercice 9. On considère quatre matrices A,B,Cet Davec Aet Dcarrées, et dont les tailles soient compatibles
avec les expressions qui suivent.
(1) Montrer que det ( A B
0D) = det(A) det(D).
(2) Montrer que si Aest inversible et commute avec C, alors det ( A B
C D ) = det(AD CB).
Exercice 10. Si (a0, . . . , an1)Cn, donner une expression du déterminant circulant
a0a1··· an1
an1a0···
··· ··· a1
a1··· an1a0
= det((ajimod n)16i,j6n).
Indication : commencer par calculer le spectre de la matrice associée à (a0, . . . , an1) = (0,1,0,...,0).
~Conséquence : AMn(K)est inversible si et seulement si det(A)6= 0. Cela motive l’introduction du
polynôme caractéristique en réduction.
Exercice 11. Deux matrices à coefficients réels qui sont semblables sur Csont aussi semblables sur R.
Exercice 12. Wronskien : si uet vsont deux solutions de l’équation différentielle y00 +a y0+b y = 0, alors w=
|u v
u0v0|est solution d’une équation différentielle homogène du premier ordre à coefficients constants, donc elle
est de signe constant strict. Conséquence : on peut tester en un point l’indépendance linéaire globale de uet v.
Exercice 13. Discuter en fonction de la valeur de nla possibilité de construire un polygone à nsommets dont
les milieux des côtés soient fixés.
Exercice 14. Montrer que le rang d’une matrice Aest aussi le plus grand entier rtel que Apossède un mineur
de taille rinversible. Application : le rang est une application semi-continue inférieurement sur Mn(K).
Exercice 15. Montrer que det = Com, où le gradient est relatif au produit scalaire hA, Bi=Tr(t
AB).
Idées de développements, compléments
Utilisation du déterminant en géométrie : théorème de Pick [AZ].
Déterminant de Gram pour le calcul de la distance à un sous-espace vectoriel [Gou].
Déterminant de Cayley-Menger pour obtenir le volume d’un tétraèdre en fonction de ses arêtes [Ber].
Inégalité de Hadamard : si AMn(K), alors |det M|6QkCik2, où les Cisont les colonnes de Aet où k·k2
est la norme euclidienne usuelle [Gou]. Prolongement possible vers les matrices de Hadamard.
Déterminant de Cauchy [Gou]. Voir aussi le déterminant de l’exercice qui le précède.
Identité de Desnanot-Jacobi et méthode de condensation de Dodgson [Bre].
Formule de Binet-Cauchy et théorème de l’arbre-matrice : le nombre arbres couvrants d’un graphe simple
ànsommets est égal au déterminant d’un mineur principal quelconque de taille n1de sa matrice
laplacienne [Ser, Wes]. Application : dénombrement de patrons d’un solide.
Références
[Aud] Michèle Audin. ométrie. EDP Sciences, 2006.
[AZ] Martin Aigner and Günter M. Ziegler. Raisonnements divins. Springer-Verlag, Berlin, 2004.
[Ber] Marcel Berger. Géométrie. CEDIC, Nathan Information, 1977.
[Bre] David M. Bressoud. Proofs and Confirmations : The Story of the Alternating-Sign Matrix Conjecture. Cambridge, 1999.
[Cia] Philippe Ciarlet. Introduction à l’analyse numérique matricielle et à l’optimisation. Masson, Paris, 1982.
[Gou] Xavier Gourdon. Les maths en tête – Maths pour M’. Ellipses, Paris.
[Ser] Denis Serre. Les matrices. Dunod, 2001.
[SP] Philippe Saux Picart. Cours de calcul formel - algorithmes fondamentaux. Ellipses, 1999.
[Wes] Douglas B. West. Introduction to graph theory. Prentice Hall Inc., Upper Saddle River, NJ, 1996.
1 / 2 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !