Traitement de la douleur provoquée par un cancer
Il arrive bien souvent que des mesures de soulagement de la douleur soient indispensables tout au long des divers
stades du cancer. Bien que moins de 15 % des patients souffrant d’une maladie non métastatique fassent état de
douleur, 80 % ou plus des patients en phase terminale souffrant de douleur largement disséminée provoquée par le
cancer requièrent un traitement [7]. La plupart des patients que l’on envoie chez un spécialiste pour prendre en charge
leurs symptômes liés au cancer présentent au moins deux sites de douleur anatomiquement distincts et plus de 40 %
d’entre eux présentent quatre sites ou plus [11].
La douleur peut être causée par de nombreux mécanismes. La douleur associée à une tumeur directe se produit chez 65
à 85 % des patients souffrant d’un cancer avancé [6]. Le traitement contre le cancer est responsable de la douleur chez
environ 15 à 25 % des patients recevant des traitements de chimiothérapie, chirurgie ou radiothérapie [8]. La douleur
causée par des problèmes non liés au cancer tels que les maladies pré-existantes affecte entre 3 à 10 % des patients.
La prise en charge de la douleur et des autres symptômes est devenue l’objectif principal du traitement de bien des
patients et cet objectif est inscrit dans la philosophie des soins palliatifs. Les soins palliatifs impliquent un certain nombre
de professionnels de la santé et offrent une prise en charge continue des symptômes, le maintien des fonctions normales,
un soutien psychosocial et spirituel pour le patient et pour sa famille, de même que des soins complets en fin de vie [4].
L’objectif du traitement est d’offrir un soulagement efficace de la douleur de façon à ce que le patient puisse profiter d’une
meilleure qualité de vie et d’une mort exempte de douleur.
Approches relatives à la prise en charge de la douleur
Le traitement de la douleur provoquée par un cancer devrait débuter par une explication des causes de la douleur au
patient, suivie d’une évaluation clinique précise et d’options thérapeutiques multimodales.
La plupart des personnes souffrant de cancer éprouvent crainte et anxiété au moment du diagnostic et certaines d’entre
elles subissent une dépression. Dans de nombreux pays en voie de développement, le diagnostic de cancer est souvent
perçu comme une « sentence de mort », car les options de prise en charge sont sévèrement limitées au moment où les
patients arrivent à l’hôpital.
L’évaluation du patient devrait être complète et englober tous les aspects des problèmes du patient, qu’ils soient
physiques, psychologiques, sociaux ou spirituels. Comme la douleur est une expérience subjective, seul le patient peut
l’évaluer et le praticien doit croire ce que lui déclare le patient. Chaque type de douleur doit être évalué.
Évaluation du patient
Une évaluation complète de la douleur provoquée par un cancer requiert des antécédents précis, un examen physique
complet du patient et l’étude des analyses de laboratoire, des radiographies ou autres examens. L’observation du patient
durant l’évaluation clinique peut fournir des informations utiles.
Évaluation de la douleur
Des antécédents détaillés révéleront l’endroit où se situe la douleur, sa répartition, sa sévérité et sa nature, sa nature
continue ou intermittente, les facteurs qui l’aggravent ou la soulagent et les limitations qu’elle impose au patient de même
que l’effet qu’elle a sur son sommeil. La sévérité de la douleur se mesure simplement par l’utilisation d’une échelle
visuelle analogique, verbale, numérique ou encore par des questionnaires plus complexes [1]. Ce type d’évaluation aide
le patient à décrire la douleur ressentie avec ses propres mots, par exemple douleur lancinante, brûlure ou aiguë. De tels
mots peuvent indiquer le type de douleur, y compris s’il s’agit d’une douleur nociceptive ou neuropathique. De jeunes
enfants peuvent être à même de décrire l’intensité de la douleur par la sélection d’un ensemble de dessins de visages,
qui vont de neutre ou souriant à pleurant. L’observation effectuée par les personnes qui soignent des patients cancéreux
est particulièrement utile au niveau des enfants et des patients souffrant d’une déficience cognitive. Les informations
relatives à l’incapacité fonctionnelle, au niveau d’anxiété, à la dépression et aux pensées suicidaires sont un outil précieux
dans l’évaluation de l’état psychologique du patient.
© 2009 International Association for the Study of Pain
®
Des antécédents détaillés et un examen attentif peuvent constituer les seuls éléments requis pour déterminer le type et la
cause de la douleur. Des examens spécifiques, comme la tomodensitométrie (TDM) ou l’imagerie par résonance
magnétique (IRM), peuvent s’avérer nécessaires dans certains cas. Une augmentation de l’intensité de la douleur suite à
une période stable nécessite une ré-évaluation de l’étiologie sous-jacente et une ré-évaluation de chaque type de
douleur. Une évaluation et un traitement rapides sont nécessaires pour les urgences impliquant la douleur (par exemple,
fractures pathologiques, douleurs dorsales dues à une compression médullaire ou maux de tête dus à une augmentation
de la pression intracrânienne).
Méthodes de soulagement de la douleur
La douleur provoquée par un cancer est facilement traitable, et le traitement thérapeutique constitue la base même de la
prise en charge de la douleur. Entre 70 et 90 % des douleurs provoquées par un cancer peuvent être contrôlées grâce à
des médicaments par voie orale[14]. Un soulagement adéquat de la douleur peut être obtenu chez plus de 75 % des
patients ayant reçu une prise en charge analgésique optimale à l’aide de techniques simples, telles que les opioïdes,
analgésiques non opioïdes et médicaments adjuvants, comme l’indique l’échelle analgésique de l’Organisation mondiale
de la Santé [12,13]. Il est recommandé que les médicaments soient administrés par voie orale, à heures fixes,
personnalisés selon chaque patient en prenant garde aux détails.
L’acétaminophène (paracétamol) ou les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS) constituent des analgésiques
efficaces pour les patients souffrant de douleur provoquée par un cancer légère et peuvent être associés à des opioïdes
chez les patients souffrant d’une douleur variant de modérée à sévère. L’expérience avec l’utilisation de l’échelle de
l’OMS a montré que le principe simple de passer d’analgésiques non opioïdes à des analgésiques opioïdes forts est sûr
et efficace. Chez la plupart des patients, les effets indésirables associés à l’utilisation d’opioïdes peuvent facilement être
pris en charge en combinant l’éducation des patients et la réassurance sur la nature passagère de la sédation et de
l’émèse, la sélection précise de la dose et de la voie d’administration de l’opioïde, ainsi que l’utilisation de médicaments
supplémentaires, tels que les antiémétiques et les laxatifs [2].
Des médicaments adjuvants sont utilisés pour les syndromes de douleur difficiles, dont la douleur neuropathique et
osseuse. Parmi les agents couramment utilisés pour la prise en charge de la douleur neuropathique, les antidépresseurs
tricycliques, les anesthésiques locaux systémiques et le baclofène ont été traditionnellement utilisés pour la douleur
dysesthésique, tandis que les anticonvulsivants, tels que la gabapentine, la carbamazépine et la phénytoïne, ont été plus
fréquemment utilisés pour la prise en charge de la douleur lancinante [3].
La douleur incidente, définie comme douleur soudaine et sévèrement aggravée par les mouvements, l’ingestion, la
défécation ou la miction, est généralement contrôlée si le patient reste immobile ou s’empêche de faire des manœuvres
douloureuses [10]. D’autres techniques visant à augmenter le contrôle local des épisodes de douleur incidente
comprennent la radiothérapie, les procédures orthopédiques ou neurologiques, telles que la cordotomie percutanée. Les
bisphosphonates sont utiles pour soulager les éléments de douleur continue et incidente chez les patients souffrant de
douleur due à un cancer des os [5].
La douleur peut également être soulagée en modifiant le processus de la maladie, lorsque cela est approprié, avec une
intervention chirurgicale, une chimiothérapie ou une radiothérapie. D’autres méthodes comprennent les interventions
psychologiques, la kinésithérapie et les suppléments médicamenteux.
Environ 10 % des patients peuvent requérir des techniques interventionnelles (anesthésies par blocage nerveux
périphérique, par blocage du système nerveux autonome, lésions par radiofréquence et procédures neurochirurgicales)
pour des problèmes de douleur dans le cadre d’une approche multimodale et multidisciplinaire visant à contrôler la
douleur.
Pour la douleur non contrôlée par des médicaments par voie orale, de faibles doses d’un opioïde plus un anesthésique
local peuvent être administrées par voie rachidienne ou épidurale pour soulager quelques effets secondaires. Les
systèmes utilisés pour l’administration chronique d’opioïdes par voie intraspinale comprennent des cathéters tunnelisés
rachidiens ou épiduraux percutanés, des cathéters tunnelisés connectés à des ports d’injection implantés de façon
sous-cutanée, ainsi que des pompes à perfusion implantées [9].
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