V ARIATION Antoine Lutumba NTETU, Ph.D. Professeur, Directeur du module des sciences de la santé, Université du Québec à Chicoutimi Françoise COURVILLE, M. Sc., Doctorant en éducation, Professeure, Université du Québec à Chicoutimi Maud-Christine CHOUINARD, M. Sc., Doctorant en sciences infirmières, Professeure, Université du Québec à Chicoutimi Hélène TREMBLAY, Inf., Infirmière-chef, Complexe hospitalier de la Sagamie SOINS INFIRMIERS AUX PERSONNES ÂGÉES : RÉACTIONS À L’UTILISATION DE LA COUVERTURE DE SÉCURITÉ DANS LA PRÉVENTION DES CHUTES DE LIT RÉSUMÉ ABSTRACT Cet article présente les résultats du premier volet d’une recherche qui vise à évaluer les chances d’adoption et d’utilisation de la couverture de sécurité, un nouveau dispositif de prévention des chutes de lit. Dans ce premier volet les chercheurs voulaient connaître les réactions des acteurs de l’univers de soins à l’utilisation de ce matériel. Trente-quatre personnes dont cinq bénéficiaires, neuf membres de familles, quinze intervenants et cinq gestionnaires, interagissant dans le contexte d’une unité de soins pour personnes âgées d’un centre hospitalier, ont été interviewées. Les données des entrevues ont été analysées selon une procédure à six séquences : audition des entrevues et lecture des descriptions ; dégagement des énoncés significatifs ; analyse et reformulation de la signification des énoncés ; regroupement des unités de signification en thèmes plus globaux; rassemblement des résultats de l’analyse et description exhaustive du phénomène à l’étude ; validation de la description exhaustive. Globalement, les réactions enregistrées ont été positives et sont une indication que la couverture de sécurité a de fortes chances d’être adoptée par les établissements de services de santé. This article presents the results of the first part of a survey aiming at assessing the chances for adoption and use of the safety blanket, a new device preventing the falls from the beds. In this part, the resarchers wanted to know how the caretakers reacted to the use of this material. Thirty four people with five beneficiaries among them, nine family members, fifteen contributors and five managers, interacting in the context of a care unit for elderly people of a hospital centre were interviewed. The data of the interviews were analysed according to a six step procedure : listening to the interviews and reading the descriptions ; deriving the significant statements, analysing and reformulating the meaning of the statements ; regrouping the signification units under more global themes ; gathering the analysis results and describing exhaustively the studied phenomenon ; validating the exhaustive description. As a whole, the reactions recorded were positive and indicate that the safety blanket has big chances to be adopted by the healthcare units. Mots clés : Prévention ; Chute de lit ; Personne âgée ; Milieu hospitalier. Keywords : Prevention ; fall from bed ; elderly people ; hospital environment. 78 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 V ARIATION SOINS INFIRMIERS AUX PERSONNES ÂGÉES : RÉACTIONS À L’UTILISATION DE LA COUVERTURE DE SÉCURITÉ DANS LA PRÉVENTION DES CHUTES DE LIT PROBLÉMATIQUE En milieux institutionnels, les chutes sont une cause importante de la diminution de la qualité de vie des bénéficiaires (BUSSIÈREs et Coll., 1992) car, avec ou sans blessure, il en résulte toujours un choc psychologique (GAGNON, ROY et TREMBLAY, 1995). Elles sont aussi une importante cause de la dégradation des liens de partenariat entre les acteurs de l’univers de soins, les bénéficiaires et leurs familles : d’un côté, les intervenants et les gestionnaires, de l’autre côté (ASSOCIATION DES HÔPITAUX DU QUÉBEC « A.H.Q. », 1996 ; CANATSET et ROPER, 1997). Les personnes âgées constituent un groupe à plus haut risque de chutes (TIDEIKSAAR, 1996; TINETTI, BAKER, GARRETT et Coll., 1993). De toutes les formes de chutes auxquelles sont exposées les personnes âgées, les chutes de lit sont les plus fréquentes (GAEBLER, 1993) mais aussi celles que l’on peut prévenir avec efficacité. Une bonne manipulation de l’environnement physique immédiat des bénéficiaires et un bon contrôle de leurs mouvements suffisent à réduire sensiblement la fréquence des chutes de lit. Dans la lutte contre les chutes de lit, la contention physique reste encore un des moyens parmi les plus utilisés alors qu’il devrait en être autrement, étant donné les effets négatifs que son utilisation a sur le physique et le psychisme des bénéficiaires (MION et STRUMPF, 1994; STRUMPF, EVANS et SCHWARTZ, 1990; STRUMPF et EVANS, 1991 ; ROBBINS, BOYKO, LANE, COOPER et JAHNIGEN, 1987; ROBERGE, 1991). En effet, l’utilisation de la contention physique provoque chez des bénéficiaires des changements biochimiques, physiologiques et psychologiques défavorables au recouvrement de la santé (ROBERGE, 1991), augmente les risques de strangulation, d’asphyxie, de constipation, d’escarres, d’incontinence urinaire (JAMETON, 1990 ; ROBBINS, BOYKO, LANE, COOPER et JAHNIGEN, 1987), affecte grandement les besoins de mobilité des bénéficiaires et exacerbe l’agitation (BLOOM et BRAUN, 1994; GINTER et MION, 1992). Ce sont toutes ces raisons qui, par ailleurs, rendent difficile et complexe la systématisation de l’utilisation de la contention physique dans des établissements de santé. Très souvent, il faut qu’un bénéficiaire ait été victime de chutes successives pour que le recours à une telle mesure soit jugé nécessaire. Même dans ce cas, la loi oblige un établissement de services de santé à établir des conditions à l’utilisation de la contention physique, par exemple, en exigeant à l’égard de son personnel soignant l’obtention d’une ordonnance médicale (A.H.Q., 1987). Or, de l’avis de GAGNON et Coll. (1995), l’idéal est de prévenir toutes les chutes, car de cette façon peuvent être évitées celles qui ont de graves conséquences physiques et psychologiques. L’objectif de la prévention des chutes chez les personnes âgées, renchérissent TINETTI et SPEECHLEY (1989), est de minimiser le plus possible les risques de tomber sans toutefois compromettre leur mobilité et leur autonomie fonctionnelle. Au regard d’un tel objectif, la contention physique ne convient plus comme solution à la problématique des chutes chez les aînés ; elle devient, elle-même, un problème qui appelle des solutions aux préoccupations cliniques, juridiques et éthiques que son utilisation soulève. Comme solution alternative à la contention physique, la couverture de sécurité commercialisée sous l’appellation Prev-2000, offre des perspectives intéressantes. Elle a la forme d’une couverture rectangulaire et est munie d’une sangle qui se glisse au-dessous du matelas et qui se maintient en place au moyen de crochets. Elle peut être déployée du pied à la tête d’un lit grâce à un système d’attaches glissant sur les deux côtés latéraux de la sangle. Complètement déployée, la couverture de sécurité enveloppe l’occupant d’un lit, le mettant ainsi à l’abri de chute tout en lui laissant beaucoup de liberté dans ses mouvements et une large autonomie fonctionnelle. Le manufacturier la présente comme un moyen de sécurité parmi les moins contraignants. Cependant, la possibilité que ce nouveau matériel soit adopté par les établissements de services de santé dépend largement du comment il sera perçu par les différents acteurs de l’univers de soins. Par ailleurs, comme l’affirment certains auteurs (A.H.Q., 1996; BRYANT et FERNALD, 1997), si les perceptions des bénéficiaires, des familles, des intervenants et des gestionnaires sont celles qui pèsent le plus dans la décision d’utiliser ou non la contention physique, tout porte à croire que les réactions* de ces mêmes acteurs seront déterminantes dans l’adoption ou non de la couverture de sécurité par les établissements de services de santé. C’est à ce niveau que la présente étude prend tout son sens, d’autant plus que l’adoption de la couverture de sécurité implique un changement de pratique clinique, et, dans cette perspective, comme l’affirmaient récemment STRATMANN, VINSON, MAGEE et HARDIN (1997), toute utilisation d’un nouveau matériel de soins doit s’appuyer sur des résultats de recherches établissant les bénéfices de la nouvelle pratique pour les bénéficiaires. Tout compte fait, si les résultats de la présente recherche démontrent qu’il y a, fût-ce sur le plan humain, des avantages à recourir à la couverture de sécurité dans la prévention des chutes de lit, le domaine de la santé aura en main les éléments pour en promouvoir l’utilisation. 79 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 OBJECTIFS DE L’ÉTUDE ET QUESTIONS DE RECHERCHE RECENSION DES ÉCRITS Définitions, formes, origines causales de la chute L’étude comportait deux objectifs : 1) recueillir et analyser les réactions des bénéficiaires, des familles, des intervenants et des gestionnaires à l’utilisation de la couverture de sécurité chez les personnes âgées; 2) évaluer à partir de ces réactions les chances de voir la couverture de sécurité être adoptée par les établissements de santé. Quant aux questions de recherche, elles furent formulées de la manière suivante : 1) Les réactions des bénéficiaires, des familles, des intervenants et des gestionnaires à l’utilisation de la couverture de sécurité sont-elles positives ou négatives? 2) Se basant sur ces réactions, doit-on estimer fortes ou plutôt faibles les chances de l’adoption de la couverture de sécurité par les établissements de santé? La chute est définie comme étant un événement non contrôlé et non dirigé dans lequel le patient se retrouve au sol (MION, GREGOR, BUETTNER et Coll., 1989). Cette définition se rapproche de celle donnée, neuf ans plus tôt, par MORRIS et ISAACS (1980) : un événement malencontreux dans lequel le patient se retrouve involontairement au sol. Cependant, MORSE (1996) pense que de telles définitions sont trop limitatives, parce qu’elles excluent des cas où un bénéficiaire se rattrape ou est rattrapé dans sa chute et ne tombe pas par terre. De même les cas où un bénéficiaire est trouvé déjà au sol, qu’il ne soit pas en mesure d’expliquer ce qui lui est arrivé et que l’incident se soit produit en l’absence 80 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 SOINS INFIRMIERS AUX PERSONNES ÂGÉES : RÉACTIONS À L’UTILISATION DE LA COUVERTURE DE SÉCURITÉ DANS LA PRÉVENTION DES CHUTES DE LIT de tout témoin. Selon cette dernière auteure, tous ces incidents doivent être considérés comme des cas de chute et être rapportés. C’est cette vision de cette dernière auteure qui a été adoptée dans le cadre de la présente étude. Il existe plusieurs types de chutes. Selon leur origine causale, MORSE (1996) distingue : 1) les chutes accidentelles, représentant 14 % des cas et survenant pendant le sommeil, en trébuchant ou à la suite d’un quelconque incident ; 2) les chutes physiologiques prévisibles, représentant 78 % des cas, sont celles attribuées à des facteurs physiologiques et qui surviennent chez des bénéficiaires reconnus comme à haut risque ; enfin, 3) les chutes physiologiques imprévisibles, représentant une proportion de 8 %, également attribuables à des facteurs physiologiques mais que l’on ne peut prévoir avant qu’un premier incident apparaisse. Du point de vue de leurs formes, on distingue : les chutes d’un lit, les chutes d’un fauteuil, les chutes pendant la marche et les chutes se produisant pendant les transferts de la toilette (FRANCOEUR et SOUCY, 1998 ; STRUMPF et EVANS, 1988). L’intérêt porté aux chutes de lit dans la présente recherche s’explique par le fait que la couverture de sécurité, qui fait l’objet d’évaluation, a été spécialement conçue pour contrer cette forme de chutes. De nombreux écrits traitent des facteurs de risque associés aux chutes chez les personnes âgées et du profil des bénéficiaires les plus susceptibles d’en être victimes. Ils soulignent l’importance des facteurs intrinsèques tels : les antécédents de chutes, l’âge et les problèmes reliés à la marche (GROSS, SHIMAMOTO, ROSE et FRANK, 1990). La diminution sensorielle, le dysfonctionnement urinaire et vésical et certaines maladies comme le cancer, les affections cardiovasculaires, neurologiques et cérébrovasculaires et la consommation de certains médicaments sont aussi incriminés dans l’augmentation du taux de chutes (MAUGOURD, 1992). Ce dernier auteur mentionne aussi la part contributive des facteurs extrinsèques dans l’augmentation du taux de chutes chez les bénéficiaires âgés. Sont ici incriminés des facteurs environnementaux tels : l’instabilité des commodités, leur hauteur mal ajustée, le carrelage glissant, les chaussures avec semelles non adhérentes ou tout simplement inadaptées, les vêtements trop longs, le mauvais éclairage des chambres et des corridors. Définitions de la contention physique JANELLI, DICKERSON et VENTURA (1995) reconnaissent que la définition de ce qui est ou n’est pas une contention physique a évolué au cours des années, et diffère dans le contexte d’un centre d’accueil et d’hébergement ou dans celui d’un centre hospitalier de soins aigus. Cette définition varie aussi selon le but poursuivi par le recours à une mesure de contrainte. En fait, il n’y a pas de consensus sur une conception universelle de ce qui est ou n’est pas une contention physique. STRUMPF et EVANS (1988) se placent en contexte gériatrique pour définir la contention physique comme étant tout dispositif utilisé pour réduire la liberté physique du mouvement d’un bénéficiaire. La JOINT COMMISSION ON ACCREDITATION OF HEALTHCARE ORGANIZATIONS (cité dans JANELLI et Coll., 1995) réserve l’utilisation de ce terme au dispositif utilisé pour contrôler les mouvements physiques dans le seul but de protéger les bénéficiaires contre les risques de blessures. Elle ne classe pas dans la catégorie de contention les dispositifs suivants : l’encolure, le corset moelleux de poitrine, la chaise roulante, ou autres moyens qui aident à maintenir une personne dans une position. L’OMNIBUS BUDGET RECONCILIATION ACT définit la contention physique comme étant toute méthode manuelle ou tout moyen mécanique, tout matériel, ou tout équipement attaché ou adjacent au corps d’un résident dont ce dernier ne peut se débarasser facilement et lequel limite sa liberté de mouvements ou l’accès normal à son corps (U.S. DEPARTMENT OF HEALTH AND HUMAN SERVICES, cité dans JANELLI et Coll., 1995). Cette définition se rapproche de celle de ROBERGE (1991) qui conçoit la contention physique comme un genre d’immobilisation et de limitation des mouvements de la personne à l’aide d’un moyen physique. Entre autres moyens physiques de contention, ce dernier auteur cite : le côté de lit, la veste, la ceinture, la chaise gériatrique, la mitaine, le bracelet de poignet, le bracelet de cheville et la demi-porte. Les deux définitions ont comme caractéristiques communes d’être larges et d’inclure aussi bien les appareils de positionnement qui aident à maintenir une personne dans une position donnée que les appareils de contention proprement dits qui sont utilisés pour limiter les mouvements d’une personne, pouvant aller jusqu’à immobiliser complètement l’individu. MARUSCHOCK (1996) établit une différence entre une contention physique et un dispositif de sécurité. La contention est, selon lui, un moyen qui limite au maxi- 81 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 mum la capacité de la personne à mouvoir les extrémités de son corps ; elle a comme caractéristique de contenir entièrement l’individu de façon à l’immobiliser complètement. Un dispositif de sécurité, quant à lui, permet à la personne de bouger quand même les extrémités de son corps. Sont inclus dans cette catégorie les moyens suivants : le gilet, la ceinture de genou, le côté de lit, la table de devant la chaise et l’attelle. Par contre, pour JANELLI, DICKERSON et VENTURA (1995), la contention physique réfère à tout moyen mécanique aussi bien de protection que d’immobilisation. Comme on peut le constater, la divergence autour de la notion de contention physique conduit indubitablement à une catégorisation des différents objets utilisés en vue de contrôler les comportements des bénéficiaires. Trois catégories peuvent ainsi être proposées permettant d’inclure le maximum d’objets disponibles : 1) les objets dits de sécurité, 2) les objets dits de positionnement et 3) ceux dits d’immobilisation. En raison de la grande latitute de liberté des mouvements et d’autonomie fonctionnelle qu’il laisse aux bénéficiaires, la couverture de sécurité convient d’être classée dans la catégorie d’objets de sécurité. Le tableau 1 dresse une liste non exhaustive et non exclusive d’objets susceptibles d’être classés dans l’une ou l’autre des trois catégories. Aspects humains, légaux et éthiques de la contention physique L’utilisation de la contention physique est une problématique qui touche, à la fois, à des aspects d’ordre humain, légal et éthique. Sur le plan humain, l’utilisation effective et même potentielle d’une contention constitue une menace à l’intégrité psychologique et physique, elle est vécue par la personne âgée comme une crise d’existence (SULLIVANMARX, 1995), et peut précipiter une lutte développementale pour la personne âgée désespérée à l’idée de n’exercer qu’un contrôle limité sur son avenir (BLAZER, 1990). Différentes théories expliquent le vécu et les appréhensions de la personne âgée confrontée à une situation de l’utilisation de la contention physique. La Continuity theory of successful aging élaborée par ATCHLEY (1989), par exemple, propose que la personne âgée utilise une stratégie d’adaptation où elle s’inspire de ses propres expériences individuelles et sociales antérieures afin de préserver et de maintenir les structures internes et externes existantes. Cette théorie assume qu’une personne adulte maintient des compositions psychodynamiques internes et externes personnelles en appliquant des stratégies qui lui sont familières dans les domaines qui lui sont familiers. Elle met l’emphase sur la cohérence et la consistance des patrons de comportements individuels tout au long de la vie. En d’autres termes, comme l’explicite THOMAS (1997), la Continuity theory of successful aging assume la capacité de l’individu d’employer les concepts de son passé comme un moyen pour concevoir et structurer son avenir. En référence à la Continuity Theory, SULLIVAN-MARX (1995) soutient que l’expérience d’initiation à la contention (un changement dans la continuité externe) peut être dramatique pour la personne âgée qui peut tabler à la fois sur ses traits de personnalité et ses expé- Tableau 1 : Catégories d’objets de contrôle des comportements des bénéficiaires Objets de sécurité Objets de positionnement Objets d’immobilisation Coté de lit Attelle Bracelet de poignée Drap Encolure Bracelet de cheville Housse de lit Corset moelleux de poitrine Veste ou gilet Chaise gériatrique Corset pelvien Ceinture Chaise roulante Camisole de force Demi-porte Cuir de contention à 4 points Couverture de sécurité Socquette Mitaine Attache pour chaise roulante 82 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 SOINS INFIRMIERS AUX PERSONNES ÂGÉES : RÉACTIONS À L’UTILISATION DE LA COUVERTURE DE SÉCURITÉ DANS LA PRÉVENTION DES CHUTES DE LIT riences antérieures avec la contention (ou des expériences analogues) pour s’adapter à la situation. Il est même pensable que la personne âgée utilise l’humour ou la rationalisation comme des stratégies d’adaptation en vue de s’adapter à l’expérience de contention en milieux institutionnels, comme elle peut aussi ne pas être capable d’appliquer les principes de la continuité interne et de la continuité externe si un état de démence ou de délire affecte ses habiletés de résolution des problèmes. Dans ce cas, son désarroi peut être si profond qu’il se traduise par des comportements agressifs, voire par des actes hostiles. D’autre part, l’expérience de la contention constitue aussi une menace à l’identité individuelle. Elle apparaît si étrangère à l’individu, qu’elle suscite en lui la peur, voire l’horreur. La continuité de l’environnement est aussi une clef de l’adaptation. En effet, bien que la première expérience avec la contention soit vécue de façon dramatique par la personne âgée et qu’elle suscite en elle un besoin de recourir à ses forces internes, l’usage répété de la contention peut amener la personne âgée à s’apprivoiser à cette pratique. Cette théorie permet donc d’expliquer la diversité des réponses des personnes âgées à l’expérience de la contention. Du point de vue légal, au Québec, on ne peut faire allusion à l’utilisation de la contention physique sans évoquer la Charte canadienne des droits et libertés, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, le Code civil du Québec, la Loi sur les services de santé et les services sociaux, et la Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui. Ces différents textes de loi garantissent les droits de chaque personne à jouir de la vie, de la sécurité, de l’intégrité physique et de la liberté. Sur le plan éthique, le vrai défi pour les établissements de santé et ses professionnels est d’harmoniser la question du respect des droits de la personne avec l’obligation d’assurer le traitement et la sécurité à tout résident (A.H.Q., 1987 ; FRANCOEUR et SOUCY, 1998). Selon JAMETON (1984), l’utilisation de la contention soulève un problème d’ordre moral, dans la mesure où le processus décisionnel suscite, chez les professionnels de la santé, un conflit de valeurs et de règles au sujet d’une conduite conventionnelle. Ce conflit place les professionnels devant un dilemme qui réside essentiellement dans le choix entre l’action pour les meilleurs intérêts du bénéficiaire et le respect de son droit d’exercer son autonomie personnelle (QUINN, 1996). Réactions à l’égard de la contention physique : quelques données empiriques Comme le font remarquer certains auteurs (KANSKI, JANELLI, JONES et KENNEDY, 1996 ; SULLIVANMARX, 1995), peu d’intérêt a été porté à l’exploration des effets psychologiques de l’usage de la contention physique chez les bénéficiaires âgés et ce, en dépit de l’évidence des conséquences négatives de son utilisation ainsi que de son inefficacité dans le contrôle des comportements non adaptés et dans le maintien de la sécurité des bénéficiaires et de celle de leur entourage. Du côté des familles, on déplore également que peu de recherches aient été consacrées à connaître leurs attitudes, leurs sentiments et réactions à l’égard de la contention physique (KANSKI, JANELLI, JONES et KENNEDY, 1996). On relève dans la littérature une étude effectuée par NEWBER et LINDSEY (1994). Ces auteurs se sont intéressés à un échantillon de six femmes dont les maris étaient ou avaient été sous contention dans un centre d’hébergement pour vétérans d’une capacité de 900 places. Ils utilisèrent l’approche qualitative avec entrevues. La fin de l’existence est l’un des thèmes majeurs qui est ressorti de cette étude, dans le sens où les épouses interviewées se représentaient l’utilisation de la contention chez leur mari comme une décision qui revêtait un caractère permanent. De ce thème découlaient quatre sousthèmes : le contrôle, la dénégation, la colère et l’humiliation. Les chercheurs conclurent que les épouses n’étaient pas préoccupées par le fait que la contention fut appliquée à leur mari mais plutôt par ce que cette décision symbolisait. Concernant les intervenants, MASON, O’CONNOR et KEMBLE (1995) soulignent que ceux-ci perdent rapidement de vue que l’utilisation de la contention physique a des conséquences dommageables pour le corps et l’esprit humains au point de la considérer comme un standard de soins et d’y recourir facilement. Selon SCHLEENBAKER, McDOWELL, MOORE, COSTICH et PRATER (1994), dans 95,8 % des cas ce sont les infirmières qui décident de l’application ou du retrait de la contention physique. Les résultats d’une recherche effectuée par BRYANT et FERNALD (1997) établissent, cependant, une différence d’attitudes entre les infirmières des services de soins prolongés et celles des services de soins aigus : les premières recourent moins souvent à la contention physique mais plus souvent aux moyens alternatifs en comparaison avec leurs collègues des services de soins aigus. JANELLI, DICKERSON et VENTURA (1995) rapportent une recherche qualitative phénoménologique qui a 83 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 étudié la structure du vécu des infirmières qui faisaient usage de la contention physique en milieux hospitaliers. Des focus groups ont été privilégiés comme technique de cueillette des données. Parmi les éléments importants, qui ont émergé de cette étude, les auteurs retinrent, entre autres : que les infirmières étaient réticentes à recourir à la contention, quand elles prennent en considération l’aspect de la dignité du bénéficiaire ; qu’il y avait une divergence d’opinions parmi les infirmières relative à l’utilisation de la contention physique mais que, de façon générale, leurs décisions de recourir à ce moyen reposait sur une évaluation qui prenait en considération les caractéristiques des bénéficiaires, la sécurité de leur entourage et les pratiques en usage dans leur milieu de travail. Une autre étude a été menée par QUINN (1993), en vue de décrire comment les infirmières expliquent le recours à la contention physique chez les bénéficiaires âgés et d’examiner si oui ou non cette décision leur posait un problème d’ordre moral. La théorie ancrée a orienté la collecte et les procédures d’analyse des données obtenues par entrevues semi-structurées auprès d’un échantillon de 20 infirmières. Les résultats ont révélé que la majorité des infirmières vivaient un conflit moral et que leurs valeurs personnelles rentraient souvent en conflit avec les valeurs professionnelles et/ou les règles de conduite. La plupart des participantes exprimèrent aussi un conflit entre, d’un côté, les droits des bénéficiaires à l’autodétermination et, de l’autre côté, leurs responsabilités, comme infirmières, de faire ce qu’elles jugeaient bon pour les bénéficiaires. milieu donné plutôt que par les caractéristiques individuelles des infirmières (années d’expérience, âge, niveau de formation). Les facteurs motivant l’usage de la contention physique chez les bénéficiaires âgés en milieux hospitaliers ont été examinés par MATTHIESEN, LAMB, McCANN, HOLLINGER-SMITH et WALTON (1996). Ces auteurs cherchèrent, entre autres, à décrire les attitudes des infirmières par rapport à l’utilisation de la contention physique et à déterminer si les caractéristiques démographiques et les pratiques en usage en milieux hospitaliers influençaient ces attitudes. Le Revised Restraint Questionnaire développé par NEARY, KANSKI, JANELLI, SCHERER et NORTH (1991) et adapté ensuite au contexte de soins prolongés par SCHERER, JANELLI, WU et KUHN (1993) fut utilisé comme échelle d’évaluation des attitudes. Le questionnaire fut soumis à 445 infirmières sélectionnées au hasard dans 15 unités de soins (9 unités de médecine générale, 4 unités de gériatrie, 2 unités de géropsychiatrie) de quatre hôpitaux différents. Le taux de participation fut de 63 %, puisque 281 infirmières seulement complétèrent le questionnaire et le retournèrent aux enquêteurs. Les résultats indiquèrent que les attitudes relatives à l’utilisation de la contention étaient influencées plus par la philosophie et les standards de pratique en vigueur dans un HELMUTH (1995) rapporte une étude qui a exploré, entre autres, la probabilité de l’existence de liens entre les perceptions que 52 infirmières, oeuvrant en services de soins aigus, avaient de la contention physique et l’utilisation qu’elles en faisaient. Si les résultats ont permis de démontrer que ces perceptions étaient généralement positives, ils n’ont pu établir des liens significatifs entre ces perceptions et l’utilisation de la contention. Cependant, des relations significatives ont été établies entre l’utilisation des moyens de contention physique et certains autres facteurs tels que : le nombre de personnes âgées et de bénéficiaires confus assignés à une infirmière, la charge de travail sur l’unité de soins, l’âge des bénéficiaires, leur état mental, et la présence ou non de cas d’incontinence. L’auteur conclut que d’autres stratégies s’avéreraient plus efficaces dans la réduction de l’utilisation de la contention physique que celles axées sur la modification des attitudes des infirmières. D’autres études avaient auparavant confirmé que les infirmières ont en général des perceptions positives de la contention physique (BLAKESLEE, GOLDMAN, PAPOUGENIS et TORELL, 1990 ; EVANS et STRUMPF, 1990). RAMPROGUS et GIBSON (1991) cherchèrent, entre autres à connaître les perceptions des soignantes et leurs justifications de recourir à la contention physique. La recherche a été conduite dans un hôpital pour soins prolongés d’une capacité d’accueil de 81 lits. Un questionnaire a été utilisé comme technique de collecte des données et administré à 55 soignantes dont 32 infirmières auxiliaires et 23 infirmières. Les résultats indiquent que la contention physique étaient perçue par les auxiliaires principalement comme un moyen qui assurait la sécurité des bénéficiaires alors que les infirmières la percevaient principalement comme un moyen qui réduisaient la liberté et la dignité des bénéficiaires. SCHIRM, GRAY et PEOPLES (1993) ont réalisé une étude pour évaluer les perceptions des infirmières à l’égard de l’utilisation de la contention physique en soins prolongés. Un questionnaire a été distribué dans trois centres dont le plus petit avait une capacité d’accueil de 100 lits et le plus grand une capacité de 222 lits. Le questionnaire fut complété par 142 intervenantes dont 92 infirmières auxiliaires et 32 infirmières. Les résultats indiquèrent que les auxiliaires étaient moins enclines à réduire l’utilisation de la contention, convaincues qu’une telle décision accroîtrait la dépendance et l’invalidité des bénéficiaires, et mettrait en danger leur sécurité et celle des intervenantes. 84 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 SOINS INFIRMIERS AUX PERSONNES ÂGÉES : RÉACTIONS À L’UTILISATION DE LA COUVERTURE DE SÉCURITÉ DANS LA PRÉVENTION DES CHUTES DE LIT Les gestionnaires des programmes d’utilisation de la contention physique en milieux de soins aigus ont été les sujets d’une étude réalisée par CRUZ, ABDULHAMID et HEATER (1997). L’étude visait à évaluer l’efficacité d’un programme d’éducation dans la réduction de l’utilisation de la contention en focalisant sur la modification des perceptions. Le Research-Based Practice Education Programm et le Perceptions of Restraint Use Questionnaire, élaborés par STRUMPF et EVANS (1988) furent utilisés respectivement comme programme d’éducation et instrument de mesure des perceptions. Les résultats indiquèrent une baisse de l’importance accordée à la contention physique pour 7 des 17 éléments du questionnaire, et une augmentation de l’importance accordée à la contention physique relativement à 4 éléments. CADRE DE RÉFÉRENCE L’étude a emprunté de l’Association des hôpitaux du Québec (A.H.Q.) son cadre de référence d’analyse de la dimension éthique de l’utilisation de la contention physique chez les personnes âgées (A.H.Q., 1996). C’est ce cadre qui a fourni les axes autour desquels les réactions des participants ont été appréhendées, c’està-dire les effets sur le plan perceptuel résultant de l’utilisation de la couverture de sécurité. Ces axes constituent en quelque sorte des standards de soins auxquels doit répondre un bon matériel de contrôle de comportements des bénéficiaires. Selon le modèle de l’A.H.Q., les réflexions sur la révision des principes de l’utilisation de la contention physique chez les personnes âgées doivent porter sur quatre dimensions : 1) l’utilité de l’application du matériel qui vérifie dans quelle mesure le matériel constitue, dans les circonstances, le moyen le moins problématique en vue d’assurer la sécurité et l’intégrité du bénéficiaire ; 2) la recherche d’un moyen plus sécuritaire qui vérifie dans quelle mesure le matériel respecte les droits fondamentaux de liberté, de sécurité et de dignité du bénéficiaire, mis de l’avant dans toute société qui se veut démocratique ; 3) le libre consentement qui vérifie dans quelle mesure l’utilisation du matériel requiert le consentement libre du bénéficiaire ; enfin 4) le respect des autres qui vérifie dans quelle mesure la décision de recourir à ce matériel est influencée par les répercussions que le comportement du bénéficiaire peut avoir sur les autres bénéficiaires et les autres acteurs de l’univers de soins. APPROCHE MÉTHODOLOGIQUE Univers de recherche, échantillon à l’étude Un centre hospitalier à vocation de soins généraux de la province de Québec, situé dans la région du SaguenayLac-Saint-Jean, a servi d’univers de recherche. Ce choix a été fait en raison de la présence, dans ce milieu, d’une unité de soins hébergeant une clientèle du troisième âge où la couverture de sécurité était déjà utilisée. Au moment des entrevues, cette unité hébergeait 30 bénéficiaires âgés dont les soins étaient assurés par une équipe composée de 8 infirmières et 18 infirmières auxiliaires. La répartition des bénéficiaires, en fonction de certaines caractéristiques sociodémographiques, donnait le portrait suivant : 11 hommes et 19 femmes; un âge moyen de 67 ans pour les hommes et de 81 ans pour les femmes. Au moment où débutait l’enquête, seuls 6 bénéficiaires avaient les capacités cognitives pour accorder une entrevue, une seule femme était sous contention physique, et la couverture de sécurité était déployée chez six bénéficiaires dont 3 hommes et 3 femmes. Des échantillons opérationnels de 5 bénéficiaires, 9 membres de familles, 15 intervenants, dont 5 infirmier(e)s et 10 infirmières auxiliaires, et 5 gestionnaires ont finalement été retenus. La représentativité par sexe fut de 12 hommes (35 %) et de 22 femmes (65 %). La sélection des participants s’est faite par une procédure à la fois intentionnelle et contrastée. Elle ne visait pas la représentativité statistique mais bien la richesse de l’éventail des situations possibles. Les participants ont été choisis en fonction principalement de leur intérêt pour la problématique du risque de chutes de lit et pour la couverture de sécurité, qui faisait l’objet de la présente recherche. Techniques de collecte des données Au plan de la méthodologie, l’approche privilégiée dans cette étude est essentiellement qualitative phénoménologique. L’entrevue semi-structurée, individuelle, face à face, avec questions ouvertes, a été utilisée afin d’obtenir des répondants les données qui devaient permettre à la présente étude d’atteindre ses objectifs. Deux questionnaires-guides ont été élaborés : un premier pour recueillir des données auprès des patients et des familles, un deuxième pour recueillir des données auprès des intervenants et des 85 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 gestionnaires (annexes 1 et 2). Ces questionnairesguides avaient été au préalable validés auprès de deux groupes d’étudiants bacheliers en sciences infirmières qui ont suivi à l’Université du Québec à Chicoutimi, durant la session d’hiver 1998, le cours Initiation à la recherche en nursing au Campus central de Chicoutimi (15 étudiants) et au Centre horscampus de Sept-Îles (25 étudiants). Considérations éthiques, déroulement de l’étude Le devis de recherche prévoyait l’installation de la couverture de sécurité sur tous les lits de l’unité. Toutefois, la couverture ne devait être entièrement déployée chez un bénéficiaire que si l’état de santé de ce dernier l’exigeait, en tenant compte de l’avis de l’équipe soignante. Dans le souci d’un respect strict des participants, le protocole de recherche a été soumis aux comités de recherche et d’éthique du centre hospitalier, et a reçu leur approbation. Des détails sur le déroulement de l’étude et sur les modalités de collaboration furent donnés à toute personne sollicitée pour participer à l’étude. À la suite des explications, chaque participant signa une feuille de consentement pour marquer officiellement sa collaboration. L’enquête sur le terrain s’est déroulée également dans le respect le plus strict des habitudes de vie des bénéficiaires et des conditions naturelles du fonctionnement de l’unité concernée. Les entrevues ont été réalisées sur l’unité même, dans un bureau réservé à cet effet. Toutes les entrevues ont été enregistrées sur cassettes audio avec l’accord des répondants. La durée moyenne des entrevues était de 45 minutes. PRÉSENTATION ET ANALYSE DES DONNÉES Les données recueillies auprès des participants ont été analysées en suivant la séquence en six étapes proposée par COLAIZZI (1978) : 1) auditionner les entrevues, lire chaque description et en saisir l’impression ; 2) dégager des entrevues les énoncés significatifs et les relier aux dimensions à l’étude ; 3) analyser la signification des énoncés retenus et tenter de les reformuler clairement ; 4) regrouper les unités de signification en thèmes plus globaux ou tendances générales ; 5) rassembler les résultats de l’analyse et tenter une description exhaustive du phénomène à l’étude ; 6) valider la description exhaustive ainsi obtenue auprès de quelques-uns des répondants. Afin de préciser le sens des termes et aussi le contexte dans lequel ces termes ont été utilisés et augmenter ainsi la crédibilité des données, les différents énoncés émergeant de l’analyse des entrevues ont, dans un premier temps, fait l’objet d’échanges entre les chercheurs et l’interviewer, un professionnel engagé pour fins de recherche. Ensuite, suivant la méthode recommandée par COLAIZZI (1978) et ayant déjà été utilisée avec succès par d’autres chercheurs (JANELLI, DICKERSON et VENTURA, 1995), une validation des mêmes énoncés a été faite auprès d’un échantillon réduit de six personnes choisies parmi les participants : deux intervenants, deux gestionnaires et deux personnes de la catégorie des membres de la famille. Quant à l’analyse des données comme telle, elle a permis de dégager 72 énoncés (tableaux 2, 3, 4 et 5) qui, après avoir été regroupés, ont donné lieu à neuf thèmes principaux. Le tableau 6 reprend les neuf thèmes en précisant, pour chaque thème, la dimension du cadre théorique avec laquelle il est relié et les catégories des répondants qui les ont mentionnés. Il est important de mentionner qu’aucune différence marquante, du point de vue sexe ou âge, n’est ressortie dans les opinions émises par les personnes interviewées. INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS La discussion et l’interprétation des résultats ont porté sur les neuf thèmes principaux retenus à la suite de l’analyse et du regroupement des énoncés. Thème 1 : La couverture de sécurité n’est pas perçue comme un moyen de contention, elle est davantage associée à un matériel de prévention. Cette façon de voir la couverture de sécurité s’explique surtout par le fait que le matériel n’est pas directement appliqué au corps du bénéficiaire, ce qui n’est pas le cas de la plupart des moyens de contention traditionnels. Par ailleurs, malgré la diversité des définitions relatives à la contention physique, la restriction de la liberté des mouvements volontaires ressort comme la caractéristique principale d’un matériel dit de contention (MARUSCHOCK, 1996 ; ROBERGE, 1991 ; U.S. DEPARTMENT OF HEALTH AND HUMAN SERVICES, cité dans JANELLI et Coll., 1995). Par rapport à la couverture de sécurité, la grande latitude de liberté de mouvement laissée au bénéficiaire est très appréciée et aurait amené des participants à ne pas l’inclure dans la catégorie des contentions, lui trouvant une mission de prévention plutôt que de contrôle des chutes et des comportements à risque. 86 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 SOINS INFIRMIERS AUX PERSONNES ÂGÉES : RÉACTIONS À L’UTILISATION DE LA COUVERTURE DE SÉCURITÉ DANS LA PRÉVENTION DES CHUTES DE LIT Tableau 2 : Liste des énoncés dégagés à la suite de l’analyse des données et relatifs à l’utilité de l’application du matériel Des commentaires des bénéficiaires 01 • La couverture de sécurité, en plus d’offrir une sécurité, est un matériel confortable. 02 • La couverture de sécurité est un matériel moins restreignant. 03 • La couverture de sécurité est un matériel pour bénéficiaires moyennement agités et/ou confus. o4 • La couverture de sécurité est un matériel anodin. Des commentaires des familles 05 • La couverture de sécurité, même déployée, reste très discree et d’apparence anodine. 06 • La couverture de sécurité est un moyen de protection plutôt qu’un moyen de contention. 07 • La couverture de sécurité est un matériel nécessaire dans le contexte des soins prolongés. 08 • La couverture de sécurité préserve la dignité et l’intimité des bénéficiaires. 09 • La couverture de sécurité présente les caractéristiques d’un matériel moderne et adapté. 10 • La couverture de sécurité est un matériel pour bénéficiaires moyennement agités et/ou confus. 11 • La couverture de sécurité ne peut retenir quiconque veut s’en libérer. Des commentaires des intervenants 12 • La couverture de sécurité est un matériel de compromis. 13 • La couverture de sécurité n’est pas une contention. 14 • La couverture de sécurité risque d’être utilisée de manière abusive. 15 • La couverture de sécurité est un moyen de première intervention en situation de risque. 16 • La couverture de sécurité est plus acceptée et suscite moins de réticence. 17 • La couverture de sécurité accorde aux bénéficiaires une liberté relative très appréciée. 18 • La couverture de sécurité est un matériel pour bénéficiaires moyennement agités et/ou confus. 19 • La couverture de sécurité est un matériel discret pouvant passer inaperçu aux yeux des visiteurs. 20 • La couverture de sécurité ne peut retenir quiconque veut s’en libérer. 21 • La couverture de sécurité pose des problèmes d’ordre ergonomique. Des commentaires des gestionnaires 22 • La couverture de sécurité peut gêner l’administration d’autres soins. 23 • La couverture de sécurité doit être appliquée en considérant chaque cas individuellement. 24 • La couverture de sécurité peut causer des problèmes en raison de la complexité de son installation. 25 • La couverture de sécurité est un matériel pour bénéficiaires moyennement agités et/ou confus. 26 • La couverture de sécurité est moins traumatisante pour les bénéficiaires. 27 • La couverture de sécurité contribue à réduire le taux de chutes survenant surtout de nuit. 28 • La couverture d e sécurité a l’apparence typique du matériel hospitalier. 29 • La couverture de sécurité est onéreuse. 87 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 Thème 2 : La couverture de sécurité est un matériel de premier recours davantage indiqué dans des cas de confusion et/ou d’agitation modérées. Ce thème touche jusqu’à un certain point quelques aspects déjà abordés dans le thème précédent, en ce sens que la couverture de sécurité laisse un certain degré de liberté et qu’elle ne soit pas, de ce fait, conseillée si un bénéficiaire est dans un état de confusion et d’agitation extrêmes qui nécessite le recours à des moyens plus restrictifs. Par ailleurs, il est établi que l’agitation et le comportement perturbateur occupent le deuxième rang, après la probabilité d’un risque de chute, comme raison invoquée par le personnel soignant pour initier l’utilisation d’une mesure de contention (TINETTI, LIU, MAROTTI et GINTER, 1991). La couverture de sécurité n’étant pas perçue comme un moyen de contention, il est donc tout à fait logique que des participants ne lui reconnaissent pas comme principale mission le contrôle d’agitation et du comportement perturbateur, et que, par conséquent, ils recommandent son utilisation qu’à titre palliatif et préventif afin de donner aux intervenants un délai de réaction supplémentaire. Thème 3 : La couverture de sécurité respecte les droits fondamentaux des bénéficiaires en ce qui a trait à leur dignité, à leur intimité et à leur sécurité, vis-à-vis d’eux-mêmes et vis-à-vis de leur entourage. L’harmonisation de la question du respect des droits de la personne avec celle d’assurer à tout bénéficiaire un traitement et une sécurité a toujours été un grand défi, aussi bien pour les établissements de soins que pour les intervenants qui ont la responsabilité de traduire dans la pratique la politique institutionnelle (A.H.Q., 1987 ; FRANCOEUR et SOUCY, 1998). Relativement à cet aspect, la couverture de sécurité apparaît aux yeux de plusieurs participants comme offrant un compromis intéressant. Il fait l’unanimité autour du respect de l’intimité et de la dignité des bénéficiaires qu’il permet de préserver, ne fut-ce qu’en couvrant le bas du corps habituellement laissé à découvert. Et même si elle ne garantit pas une sécurité maximale, elle a l’avantage d’assurer le confort des bénéficiaires. Thème 4 : La couverture de sécurité soulève un questionnement d’ordre ergonomique relativement à la manoeuvre nécessaire à son déploiement. Par rapport à cette situation, des répondants ont signalé des cas de lombalgies; des plaintes qui ont été confirmées, par la suite, par les gestionnaires. Ces derniers ont, en plus, fait allusion aux difficultés que peuvent éprouver les intervenants, une fois la couverture de sécurité entièrement déployée, à accéder à la télémétrie lors des activités de Tableau 3 : Liste des énoncés dégagés à la suite de l’analyse des données et relatifs à la recherche d’un moyen plus sécuritaire Des commentaires des bénéficiaires 30 • La couverture de sécurité ne retient ni n’emprisonne mais ralentit. Des commentaires des familles 31 • La couverture de sécurité offre une protection fiable et sécuritaire. 32 • La couverture de sécurité protège les bénéficiaires contre les chutes et autres accidents. 33 • La couverture de sécurité offre un compromis entre la sécurité et le confort. 34 • La couverture de sécurité protège contre les plaintes et les poursuites. Des commentaires des intervenants 35 • La couverture de sécurité n’est pas inoffensif. 36 • La couverture de sécurité est plus préventive que corrective. 37 • La couverture de sécurité offre les avantages de protéger les bénéficiaires et de prévenir des réactions non désirées. 38 • La couverture de sécurité contribue à réduire les chutes de lit. Des commentaires des gestionnaires 39 • La couverture de sécurité est plus préventive que corrective. 40 • La couverture de sécurité suscite des faux sentiments de sécurité. 41 • La couverture de sécurité accorde aux intervenants un temps de réaction supplémentaire. 42 • La couverture de sécurité exige une formation particulière pour les utilisateurs. 43 • La couverture de sécurité ne doit être utilisée que chez des bénéficiaires calmes ou moins agités 88 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 SOINS INFIRMIERS AUX PERSONNES ÂGÉES : RÉACTIONS À L’UTILISATION DE LA COUVERTURE DE SÉCURITÉ DANS LA PRÉVENTION DES CHUTES DE LIT soins, occasionnant par ce fait un surcroît de travail. Bien qu’il soit démontré que la suppression des moyens de contention contribue à réduire le coût des soins en termes de réduction des heures de travail pour le personnel en place (PHILLIPS, HAWES et FRIES, 1993), la réalité est qu’en milieux institutionnels de soins une mesure de contrôle des comportements est appliquée aussi avec l’idée de faciliter le travail des intervenants (ROBERGE, 1991). Dans ce sens, la couverture de sécurité ne rejoint pas les attentes de certains intervenants et gestionnaires. Thème 5 : La couverture de sécurité soulève un questionnement d’ordre financier relativement à son coût d’acquisition et de renouvellement. Cette préoccupation repose essentiellement sur les réalités d’un contexte de restriction budgétaire dans lequel les gestionnaires sont appelés, malgré eux, à faire des choix et à établir des priorités. Aussi, la fiabilité très faible du système en vigueur dans les services de buanderie, en ce qui a trait principalement à la redistribution de la lingerie, ne fait que renforcer leur préoccupation. Cependant, replacée dans un univers plus large, cette préoccupation peut être balancée avec les économies réelles que l’utilisation de la couverture de sécurité peut occasionner, en contribuant à une baisse du taux de chutes, surtout quand on sait qu’au Québec, les séjours hospitaliers, à la suite des chutes, entraînent des dépenses élevées puisqu’ils représentent environ 5 % du total des journées d’hospitalisation et 50 % du total des journées d’hospitalisation attribuables aux traumatismes (CHAREST et MALTAIS, 1994). Thème 6 : La couverture de sécurité bénéficie d’une grande latitude pour être déployée sans consentement préalable. Il ressort avec évidence que sur la base de la confiance qu’elles vouent aux intervenants, les familles s’en remettent à eux pour ce qui est de la décision de déployer, de façon ponctuelle, la couverture de sécurité, pour autant qu’ils en sont a priori ou a posteriori informés des raisons. De leur côté, les intervenants sont prêts à assumer cette responsabilité. L’attitude des familles s’explique par le fait que, dans le milieu où la présente étude a été effectuée, les intervenants ont pris l’initiative d’informer les familles afin de les préparer psychologiquement à l’éventualité de l’application de la couverture de sécurité chez leur parent hospitalisé. C’est ce que corroborent les résultats de la recherche conduite par KANSKI, JANELLI, JONES et KENNEDY (1996) qui établissent que le manque d’une information judicieuse est le principal motif de réticence que les familles manifestent envers les mesures de contention. Tableau 4 : Liste des énoncés dégagés à la suite de l’analyse des données et relatifs au libre consentement Des commentaires des bénéficiaires 44 • La couverture de sécurité appelle à la prudence. 45 • La couverture de sécurité est acceptée sur la base de confiance entre soignants et soignés. 46 • La couverture de sécurité est facilement acceptée après un minimum d’explication et de sensibilisation. 47 • La couverture de sécurité requiert le consentement des bénéficiaires. 48 • La couverture de sécurité protège de l’indiscrétion des autres bénéficiaires et des visiteurs. 49 • La couverture de sécurité est mieux tolérée et mieux acceptée. Des commentaires des familles 50 • La couverture de sécurité est facilement acceptée lorsque les raisons de son utilisation sont données. 51 • La couverture de sécurité respecte le droit à la santé des bénéficiaires. 52 • Les familles se sentent moins concernées par la décision de déployer la couverture de sécurité. 53 • Par rapport à la couverture de sécurité, l’équilibre doit être maintenu entre le droit à la sécurité et le droit de refus d’un traitement. Des commentaires des intervenants 54 • La couverture de sécurité n’est pas un moyen de contention et ne requiert pas de consentement. 55 • La couverture de sécurité est rarement refusée par les familles et les bénéficiaires, s’ils sont bien informés. 56 • La couverture de sécurité doit être utilisée chez des bénéficiaires confus et/ou agités sans consentement préalable. Des commentaires des gestionnaires 57 • La couverture de sécurité est moins humiliante et respecte la dignité. 58 • La couverture de sécurité doit être soumise à la reglementation en vigueur. 89 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 Tableau 5 : liste des énoncés dégagés à la suite de l’analyse des données et relatifs au respect des autres Des commentaires des bénéficiaires 59 • La couverture de sécurité est nécessaire dans certains cas. 60 • La couverture de sécurité n’est pas une cause de friction entre les bénéficiaires et les intervenants. 61 • La couverture de sécurité n’a pas d’effets négatifs sur les visiteurs. Des commentaires des familles 62 • La couverture de sécurité n’intimide pas les visiteurs. 63 • La couverture de sécurité permet aux bénéficiaires de conserver une certaine dignité face aux visiteurs. 64 • La couverture de sécurité ne crée pas d’animosité à l’égard des intervenants. 65 • La couverture de sécurité doit être utilisée pour assurer la sécurité des bénéficiaires avant celle des intervenants. Des commentaires des intervenants 66 • La couverture de sécurité est appliquée en tenant compte prioritairement des besoins du bénéficiaire. 67 • L’utilisation de la couverture de sécurité ne provoque pas de friction entre les intervenants et les bénéficiaires. 68 • La couverture de sécurité est peu remarquée par les visiteurs et la famille. 69 • La liberté de mouvement n’est pas le seul facteur sur lequel repose le choix en faveur de la couverture de sécurité. Des commentaires des gestionnaires 70 • La couverture de sécurité sécurise les voisins d’un bénéficiaire retenu. 71 • La couverture de sécurité préserve l’intimité des bénéficiaires, celle de leurs compagnons de chambre et des visiteurs. 72 • La couverture de sécurité ne modifie pas les comportements des bénéficiaires Thème 7 : La couverture de sécurité risque de devenir une solution facile à la problématique des chutes de lit en établissements de soins. Plusieurs facteurs justifient ces inquiétudes exprimées par des répondants : le caractère discret et non aliénant du matériel, la carence en personnel et autres aidants, le fait que des intervenants ne perçoivent pas la couverture de sécurité comme une contention et ne voient pas la nécessité d’un consentement préalable, le fait des pratiques et habitudes des milieux de soins de recourir, dans des situations de crise, aux moyens de contention sans consentement préalable. Thème 8 : La couverture de sécurité ne génère pas de relations conflictuelles, bien au contraire, elle contribue à un climat de confiance entre les acteurs de l’univers de soins. L’absence de relations conflictuelles et l’accroissement du climat de confiance observés parmi les participants à l’étude pourraient s’expliquer par le fait que, dans cette étude, il est question d’un matériel moins restrictif utilisé dans un contexte où les familles ont été préparées à l’éventualité de son application chez leur parent. En effet, plusieurs auteurs (KANSKI, JANELLI, JONES et KENNEDY, 1996 ; MORALES et DUPHONE, 1995; QUINN, 1993; 1996) reconnaissent que ce sont l’application des moyens restrictifs impliquant l’usage de la force et le manque d’une information appropriée donnée aux familles qui sont souvent la source de conflits entre les bénéficiaires et leurs familles, d’un côté, et les intervenants, de l’autre côté. Thème 9 : La couverture de sécurité est un matériel confortable psychologiquement et physiquement. Tous les répondants apprécient le matériel du point de vue de sa forme, de sa couleur et de la qualité de son tissu. Du point de vue psychologique, l’utilisation de la couverture de sécurité n’est pas traumatisante pour les bénéficiaires. Le confort psychologique se traduit aussi par le fait qu’il permet aux familles, aux intervenants et aux gestionnaires de résoudre le dilemme éthique de choix entre la sécurité des bénéficiaires et la qualité de leur vie, un dilemme dont font mention de nombreux auteurs (A.H.Q., 1996 ; FRANCOEUR et SOUCY, 1998 ; QUINN, 1993 ; STRUMPF et EVANS, 1991). 90 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 SOINS INFIRMIERS AUX PERSONNES ÂGÉES : RÉACTIONS À L’UTILISATION DE LA COUVERTURE DE SÉCURITÉ DANS LA PRÉVENTION DES CHUTES DE LIT CONCLUSIONS, LIMITES DE L’ÉTUDE ET RECOMMANDATIONS espérer arriver à des résultats plus concluants quant aux chances d’adoption de la couverture de sécurité par les établissements de services de santé. Les résultats obtenus amènent à croire que cette étude a atteint ses objectifs, en ayant généré des données qui ont permis de répondre aux deux questions de l’étude. Les réactions exprimées par les répondants sont, dans l’ensemble, positives. Les résultats obtenus semblent donc indiquer que la couverture de sécurité a de fortes chances d’être adoptée par les établissements de services de santé. Néanmoins, les résultats de la présente étude indiquent clairement que certaines dispositions doivent nécessairement être prises pour que l’introduction de la couverture de sécurité en milieux de services de santé connaisse du succès. Dans cette perspective, il est tenu de prendre en considération les recommandations suivantes : 1) accorder une attention particulière à la promotion du matériel auprès de tous les acteurs de l’univers de soins : bénéficiaires, familles, intervenants et gestionnaires, tous doivent être ciblés ; 2) clarifier avec les intervenants le mode d’une utilisation sécuritaire du matériel, par des sessions d’information et de formation ; 3) insister sur l’aspect prévention plutôt que celui du contrôle des chutes de lit et des comportements à risque ; 4) préciser les limites de l’utilisation du matériel en termes de situations et de clientèles visées ; 5) rendre le système de déploiement du matériel encore plus aisément exécutable par une seule personne. Cependant, il est important de signaler que les résultats de cette recherche doivent être replacés dans le cadre d’une étude réalisée en contexte d’un centre hospitalier à vocation de soins généraux et spécialisés et sur un échantillon de petite taille. Il s’agit là de limites importantes qui appellent à relativiser les résultats obtenus et à recommander, pour des recherches futures, une diversification des milieux de collecte des données et des enquêtes portant sur des échantillons de grande taille. C’est à ces conditions que l’on peut Tableau 6 : Principaux thèmes retenus, dimensions théoriques de référence et catégories des répondants les ayant mentionnés Thèmes 01 • La couverture de sécurité n’est pas perçue comme un moyen de contention, elle est davantage associée à un matériel de prévention. 02 • La couverture de sécurité est un matériel de premier recours davantage indiqué dans des cas de confusion et/ou d’agitation modérées. Dimensions Catégories des théoriques répondants B F I G utilité x x x x utilité x x x x sécurité x x x x x x 03 • La couverture de sécurité respecte les droits fondamentaux des bénéficiaires en ce qui a trait à leur digité, à leur intimité et à leur sécurité vis-à-vis d’eux-mêmes et vis-à-vis de leur entourage. 04 • La couverture de sécurité soulève un questionnement d’ordre ergonomique relativement à la manoeuvre nécessaire à son déploiement. 05 • La couverture de sécurité soulève un questionnement d’ordre financier utilité utilité relativement à son coût d’acquisition et de renouvellement. 06 • La couverture de sécurité bénéficie d’une grande latitude pour être déployée sans consentement préalable. 07 • La couverture de sécurité risque de devenir une solution facile à la problématique des chutes de lit en établissements de soins. x consentement x x x consentement x x x x respect x x x x respect x x x 08 • La couverture de sécurité ne génère pas de relations conflictuelles, bien au contraire, elle contribue à un climat de confiance entre les acteurs de l’univers de soins. 09 • La couverture de sécurité est un matériel confortable psychologiquement et physiquement. Légende : B = bénéficiaires F = familles I = intervenants G = gestionnaires 91 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 ANNEXE 1 - GUIDE D’ENTREVUES POUR BÉNÉFICIAIRES ET FAMILLES Dimension 1 : Utilité de l’application du matériel 01 • Quand avez-vous remarqué ce matériel pour la toute première fois et dans quelles circonstances ? 02 • La première fois que vous l’avez remarqué, le matériel était-il plié ou entièrement déployé ? 03 • Quelle a été votre première réaction quand vous avez vu ce matériel déployé ? 04 • Pensiez-vous que ce matériel faisait partie de l’équipement de lit ? 05 • Voyez-vous une différence entre ce matériel et les autres moyens de contrôle de comportements ? 06 • Quel est l’aspect que vous préférez dans ce matériel ? 07 • Diriez-vous que ce matériel est un moyen de contrôle minimum, moyen ou maximum ? 08 • Ce matériel est-il utilisable chez tous les patients ? 09 • Hésiteriez-vous à déployer ce matériel et dans quels cas ? Dimension 2 : Recherche d’un moyen plus sécuritaire 10 • Voyez-vous ce matériel comme quelque chose de fragile ? 11 • Pensez-vous qu’un patient est confortable avec ce matériel ? 12 • Pensez-vous qu’un patient est protégé avec ce matériel ? 13 • Auriez-vous remarqué des problèmes qu’un patient pourrait avoir avec ce matériel ? 14 • Pensez-vous que les autres patients sont protégés avec ce matériel ? 15 • Pensez-vous que le personnel est protégé avec ce matériel ? Dimension 3 : Libre consentement 16 • A-t-on expliqué au patient et à sa famille la raison de l’utilisation de ce matériel ? 17 • Ce matériel respecte-t-il les droits fondamentaux du patient ? 18 • Ce matériel permet-t-il au patient de conserver sa dignité ? 19 • Pensez-vous qu’il soit nécessaire de restreindre l’usage de ce matériel ? 20 • Quelle différence y a-t-il entre les patients chez qui ce matériel est déployé et les autres patients ? 21 • Voyez-vous une raison de contester l’utilisation de ce matériel ? 22 • Selon vous le patient et/ou sa famille doivent-ils approuver au préalable l’utilisation de ce matériel ? Dimension 4 : Respect des autres 23 • Quel effet l’utilisation de ce matériel a sur les visiteurs d’un patient ? 24 • Le comportement du patient a-t-il changé depuis que ce matériel est utilisé ? RÉFÉRENCES A.H.Q. — L’utilisation de la contention physique chez les personnes âgées : une pratique à réviser. Montréal : document de référence No 2, AHQ, 1996. 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Dimension 2 : Recherche d’un moyen plus sécuritaire 18 • En quoi ce matériel est-il plus sécuritaire en comparaison aux autres moyens de contrôle présentement utilisés dans les hôpitaux ? 19 • Faudrait-il augmenter la surveillance exercée sur le patient lorsque le matériel est entièrement déployé ? 20 • Ce matériel est-il vraiment sécuritaire lorsqu’il y’a d’autres patients dans la chambre ? 21 • Voyez-vous ce matériel comme quelque chose de fragile ? 22 • Avez-vous remarqué des problèmes que les patients pourraient avoir avec ce matériel ? 23 • Ce matériel vous cause-t-il des problèmes lors de l’installation ? Dimension 3 : Libre consentement 24 • Pensez-vous qu’un patient se sentira plus libre et plus digne avec un tel matériel ? 25 • Seriez-vous prêt à utiliser ce moyen de contrôle chez un patient qui n’en veut pas mais dont l’état en justifie l’utilisation ? 26 • Utiliseriez-vous ce matériel chez un patient confus ? 27 • Avant l’installation de ce matériel, jugeriez-vous nécessaire de demander le consentement du patient ou de sa famille si ce dernier ne peut répondre ? 28 • L’utilisation de ce matériel est-elle recommandée dans le cas d’un patient confus, comateux qui ne peut donner son consentement ? 29 • Croyez-vous que ce matériel pourrait aider certains patients à garder leur dignité ? 30 • Pensez-vous que ce matériel respecte les droits fondamentaux du patient ? 31 • Pensez-vous qu’il faille limiter l’utilisation de ce matériel ? Dimension 4 : Respect des autres 32 • Croyez-vous que l’utilisation de ce matériel permet réellement de protéger les autres patients et le personnel soignant des actes des bénéficiaires potentiellement agressifs ? 33 • Seriez-vous sans inquiétude après avoir appliqué cette couverture chez un patient ? 34 • La vulgarisation de ce matériel serait-elle une bonne façon de sensibiliser l’entourage et ainsi de diminuer la réticence à son utilisation ? 35 • Croyez-vous que l’utilisation de ce matériel peut être perçue par l’entourage comme une forme de répression exercée sur le patient ? 36 • Ce matériel est-il davantage utilisé pour satisfaire les soignants et les autres bénéficiaires ou plutôt dans le but d’avoir un contrôle plus sûr sur le patient ? 37 • Le fait d’être limité dans ses déplacements pourrait-il provoquer des réactions de frustration et d’agitation tels que les cris, le bruit (frapper sur les côtés de lit) qui influenceraient le respect des autres ? 38 • Avez-vous remarqué une différence dans l’attitude du patient après qu’on ait installé ce matériel ? 39 • Avez-vous remarqué une différence dans l’attitude des proches, après qu’on ait installé ce matériel ? * Le mot réaction est utilisé ici dans son sens usuel et désigne une attitude ou un comportement manifesté en réponse à une action extérieure pouvant prendre la forme d’une réponse, d’un réflexe, d’un sursaut, d’une conséquence, d’un contrecoup ou d’un effet (LE GRAND ROBERT, 1985). 93 Recherche en soins infirmiers N° 64 - mars 2001 CHAREST (S.) et MALTAIS (D.). — La prévention des chutes chez les personnes âgées : Portrait de la situation au Québec. 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