Cancer colorectal
métastatique : quelle stratégie
au-delà de la première ligne ?
Metastatic colorectal cancer:
which strategy beyond the first-line?
Aziz Zaanan,
Christophe Tournigand
Hôpital Saint-Antoine
service doncologie médicale
184, rue du Faubourg-Saint-Antoine
75571 Paris cedex 12, France
e-mail : <christophe.tournigand@sat.
aphp.fr>
Résumé
Plusieurs stratégies thérapeutiques existent au-delà de la première ligne de
chimiothérapie. Elles dépendent du type de traitement reçu en première
ligne, de son efficacité, des toxicités et/ou des contre-indications (oxaliplatine
et neuropathie, ictère et irinotécan, antécédents thromboemboliques arté-
riels et bevacizumab), de létat général et des souhaits du patient, ainsi que
des caractéristiques tumorales (statut KRAS). La proposition thérapeutique
doit être prise dans un cadre multidisciplinaire et discutée avec le patient.
Lensemble des données des essais randomisés suggère que les molécules
de chimiothérapie utilisées en seconde ligne de traitement apportent un
bénéfice de survie par rapport aux soins de support seuls. Après échec dun
traitement par 5-fluoro-uracile, plusieurs schémas de chimiothérapie sont
actifs : FOLFIRI, FOLFOX et IROX. Après échec dun traitement à base dirino-
técan, le FOLFOX paraît le meilleur choix. La combinaison du FOLFOX avec le
bevacizumab prolonge la survie des patients. Pour les patients traités par
FOLFOX, en première ligne, suivi dun traitement dentretien par 5-FU seul
en cas de contrôle tumoral, la réintroduction de loxaliplatine peut être pro-
posée après progression tumorale en fonction de la durée de lintervalle de
temps sans oxaliplatine. Après échec du FOLFOX, une chimiothérapie à base
dirinotécan semble être loption la plus appropriée. Le cetuximab ou le pani-
tumumab augmentent lefficacité de lirinotécan chez les patients présen-
tant une tumeur KRAS sauvage et sont également actifs en monothérapie
en troisième ou quatrième ligne de traitement. Enfin, en cas de réponse
favorable à la chimiothérapie, il est important de discuter des possibilités de
traitement chirurgical des métastases devenues résécables. Des études sont
actuellement en cours pour définir la place des différentes thérapies ciblées,
ainsi que le type de chimiothérapie associée dans la stratégie thérapeutique
du cancer colorectal métastatique au-delà de la première ligne.
nMots clés : cancer colorectal métastatique, chimiothérapie, stratégie thérapeutique,
thérapie ciblée
Abstract
Several therapeutic strategies exist beyond the first line of chemotherapy.
They depend on the type of treatment received in first-line, its efficacy,
toxicity and/or contraindications (oxaliplatin and neuropathy, irinotecan
and jaundice, bevacizumab and arterial thromboembolic events), the
patients health status and wishes, and the tumor characteristics (e.g., KRAS
status). Treatment must be decided within a multidisciplinary staff and
discussed with the patient. Data from randomized trials suggest that che-
motherapy drugs used in second-line treatment provide a survival benefit
compared with supportive care alone. Following fluorouracil failure, several
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GASTRO
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mini-revue
doi: 10.1684/hpg.2009.0382
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 04/06/2017.
chemotherapy regimens are active: FOLFIRI, FOLFOX, and IROX. After
failure of irinotecan-based first-line treatment, FOLFOX appears the best
choice. The combination of bevacizumab with FOLFOX prolongs survival.
For patients treated with FOLFOX in first-line followed by maintenance
5-FU monotherapy, reintroduction of oxaliplatin can be proposed after
disease progression, depending on the length of oxaliplatin-free interval.
After FOLFOX failure, irinotecan-based chemotherapy appears to be the
most appropriate option. Cetuximab and panitumumab increase the effec-
tiveness of irinotecan in patients with wild-type KRAS tumor, and are also
active as monotherapy in third- or fourth-line therapy. In case of objective
response to chemotherapy, it is important to discuss the possibilities of
surgical treatment of metastases if rendered resectable. Finally, several
studies are currently underway to determine the role of different targeted
therapies and the type of combined chemotherapy in the treatment
strategy of metastatic colorectal cancer beyond the first-line.
nKey words: metastatic colorectal cancer, chemotherapy, therapeutic strategy,
targeted therapy
La chimiothérapie par 5-fluoro-uracile (5-FU) a été,
pendant longtemps, le seul traitement efficace
des patients atteints de cancer colorectal métastatique.
Lavènement, depuis plus dune dizaine dannées, de
lirinotécan et de loxaliplatine est venu enrichir nos possi-
bilités thérapeutiques avec le développement de schémas
de chimiothérapie actifs en première et deuxième lignes
de traitement. Lapparition récente des thérapies ciblées
contre la néoangiogenèse ou contre le récepteur de lEGF
est venue renforcer lefficacité de ces chimiothérapies
cytotoxiques, permettant ainsi de prolonger la survie des
patients et parfois de rendre accessibles à une exérèse
chirurgicale des métastases initialement non résécables.
Laugmentation du nombre de molécules disponibles dans
le traitement de ces patients ainsi que lidentification de
facteurs prédictifs de réponse rendent la stratégie thérapeu-
tique plus complexe. Lindication et lévaluation des traite-
ments doivent, par conséquent, être discutées en réunion
de concertation pluridisciplinaire afin de proposer au patient
le traitement le mieux adapté. De nombreuses études de
stratégie thérapeutique, au-delà de la première ligne de
chimiothérapie, sont disponibles et permettent daider le cli-
nicien dans son choix thérapeutique. Nous aborderons dans
un premier temps les différentes possibilités thérapeutiques
après échec dun traitement par 5-FU seul ou une chimio-
thérapie à base dirinotécan ou doxaliplatine, puis dans un
second temps, les possibilités thérapeutiques offertes au-delà
de la première ligne par les thérapies ciblées.
Seconde ligne après échec dune
monothérapie par fluoropyrimidine
Dans les années 1990, deux études randomisées de phase
III ont montré lintérêt de lirinotécan en deuxième ligne de
traitement après échec du 5-FU. La première étude a
comparé, chez 279 patients, un traitement par irinotécan
(300 à 350 mg/m
2
toutes les trois semaines) et des soins
de confort seuls après échec du 5-FU. Les patients traités
par irinotécan avaient un allongement de la survie globale
(SG) [9,2 vs 6,5 mois, p< 0,0001] et du taux de survie à un
an (36 vs 13,8 %) comparativement aux patients traités
par soins de confort seuls. Le traitement par irinotécan
était également associé à une meilleure qualité de vie et
à un meilleur contrôle des douleurs [1]. La seconde étude a
inclus 267 patients traités en deuxième ligne par de lirino-
técan (300 à 350 mg/m
2
toutes les trois semaines) ou 5-FU
en perfusion continue. La survie était significativement
plus longue pour les patients traités par irinotécan compa-
rativement à ceux traités par 5-FU en continu (p= 0,035).
Les résultats montraient un allongement des médianes de
SG (10,8 vs 8,5 mois) et de survie sans progression (SSP)
[4,2 vs 2,9 mois, p= 0,03] en faveur du groupe traité par
irinotécan [2].
Pour loxaliplatine, il nexiste pas détude randomisée de
phase III comparant cette molécule avec des soins de
confort seuls en deuxième ligne après échec du 5-FU.
Des études de phase II ont montré que lutilisation de loxa-
liplatine seule ou en association avec le 5-FU en deuxième
ligne de traitement permettait dobtenir une SSP de 4,7 à
6 mois, une SG de dix mois et un taux de réponse de 10 à
20 % [3, 4]. Enfin, certains travaux suggèrent quune dose-
intensité doxaliplatine supérieure à 85 mg/m
2
, toutes les
deux semaines, permet dobtenir un taux de réponse plus
élevé et un allongement de la SSP par rapport à une dose-
intensité inférieure à 85 mg/m
2
toutes les deux semaines,
sans augmentation significative de la toxicité [5].
Rougier et al. ont réalisé une étude randomisée de phase II,
évaluant trois schémas de chimiothérapie en deuxième
ligne chez 101 patients présentant une progression tumo-
rale après un traitement par 5-FU. Les trois schémas de
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chimiothérapie consistaient en une association de 5-FU
plus irinotécan, de 5-FU plus oxaliplatine ou dirinotécan
plus oxaliplatine. Les taux de réponse étaient de 11, 21 et
15 %, et les médianes de SG étaient de 12, 11,5 et
11 mois, respectivement. Le taux de contrôle tumoral
(réponses objectives plus stabilités tumorales) était dau
moins 60 % pour les trois schémas. Ces résultats mon-
trent donc lintérêt dune combinaison comportant de
loxaliplatine et/ou de lirinotécan après échec dun
traitement par 5-FU [6].
Haller et al. ont comparé, dans une étude randomisée de
phase III incluant 628 patients, un traitement par IROX (iri-
notécan 200 mg/m
2
plus oxaliplatine 85 mg/m
2
toutes les
trois semaines) à lirinotécan seul (350 mg/m
2
toutes les
trois semaines) après échec dune chimiothérapie par
5-FU. Les résultats de létude montraient un bénéfice en
termes de SG (13,4 vs 11,1 mois, p= 0,0072), temps
jusquà progression (5,3 vs 2,8 mois, p< 0,0001), taux de
réponse tumorale (22 vs 7%,p< 0,0001) et amélioration
des symptômes (32 vs 19 %, p= 0,072), en faveur du
groupe de patients traités par IROX [7].
Une autre étude randomisée de phase III a comparé,
dans une population de 491 patients, un traitement
de deuxième ligne par FOLFOX ou irinotécan (300 à
350 mg/m
2
toutes les trois semaines) après échec dune
chimiothérapie par 5-FU. Il sagissait dune étude de non-
infériorité avec cross-over autorisé lors de la progression.
Le critère dévaluation principal était la SG. La médiane de
temps jusquà progression (6,2 vs 4,4 mois, p= 0,0009) et
le taux de réponse tumorale (28 vs 15,5 %, p= 0,0009)
étaient significativement plus élevés dans le groupe de
patients traités par FOLFOX comparativement au groupe
traité par irinotécan. En revanche, la médiane de SG nétait
pas significativement différente (13,8 vs 14,3 mois,
p= 0,38) [8].
Ainsi, après une progression sous chimiothérapie par 5-FU,
les molécules de chimiothérapie utilisées en deuxième ligne
apportent un bénéfice de survie par rapport aux soins de
support seuls. Les résultats des études comparatives mon-
trent que plusieurs schémas de chimiothérapie à base
doxaliplatine ou dirinotécan sont actifs en deuxième
ligne après échec dun traitement par 5-FU seul.
Seconde ligne après échec
dune chimiothérapie à base
dirinotécan ou doxaliplatine
Une étude de phase III incluant 463 patients a comparé
trois schémas de chimiothérapie : oxaliplatine, FOLFOX et
LV5FU2 en deuxième ligne après échec dun traitement
par irinotécan et 5-FU [9]. Lefficacité du traitement par
FOLFOX était meilleure que celle du schéma LV5FU2 en ter-
mes de taux de réponse objective (9,9 vs 0%,p< 0,0001)
et de médiane du temps jusquà progression (4,6 vs
2,7 mois, p< 0,0001). Le traitement par oxaliplatine seule
nétait pas plus efficace que le LV5FU2.
Une étude randomisée de phase III a évalué deux séquences
thérapeutiques chez 220 patients afin de déterminer sil exis-
tait une séquence optimale entre une chimiothérapie à base
doxaliplatine et une chimiothérapie à base dirinocan.
Les séquences thérapeutiques consistaient en une chimiothé-
rapie par FOLFIRI suivie de FOLFOX à progression, dune part
(bras A), et en une chimiothérapie par FOLFOX suivie de FOL-
FIRI à progression dautre part (bras B) [10]. Les résultats
montraient une efficacité similaire des deux séquences théra-
peutiques en termes de SG (21,5 vs 20,6 mois, p= 0,99) et de
SSP (8,5 vs 8mois,p= 0,26). Lanalyse des données de la
deuxième ligne de chimiothérapie montrait des taux de
réponse de 4 % pour le FOLFIRI (bras B) contre 15 % pour
le FOLFOX (bras A) [p= 0,05] et des médianes de SSP de
2,5 mois pour le FOLFIRI (bras B) contre 4,2 mois pour le
FOLFOX (bras A) [p= 0,003].
Une étude randomisée de phase II a également évalué ce
type de stratégie chez 68 patients avec la réalisation dun
cross-over lors de la progression : capécitabine plus oxali-
platine (CAPOX), puis capécitabine plus irinotécan (CAPIRI)
à progression et réciproquement [11]. Les résultats de la
deuxième ligne de chimiothérapie (CAPIRI vs CAPOX) mon-
traient des médianes de SSP de 5,1 et 4,3 mois et de SG de
9,6 et 10,6 mois et des taux de réponse de 20,6 et 12,7 %,
respectivement.
Concernant lutilisation du schéma FOLFIRI en deuxième
ligne, après échec dun traitement à base doxaliplatine,
ladministration de lirinotécan avant et après la perfusion
du 5-FU (FOLFIRI 3) pourrait renforcer son activité [12, 13].
Enfin, lanalyse des données issues de sept études de phase
III a montré que la médiane de survie était davantage corré-
lée au fait que les patients avaient reçu les trois principaux
anticancéreux cytotoxiques pendant leur traitement (5-FU,
irinotécan et oxaliplatine) [p= 0,0008] quau pourcentage
de patients recevant une deuxième ligne de chimiothérapie
(p= 0,19) [14].
Réintroduction de loxaliplatine
Lassociation de loxaliplatine avec une fluoropyrimidine est
considérée comme un standard thérapeutique en première
ligne de traitement, mais la toxicité neurologique de loxali-
platine limite son utilisation. Cette toxicité, habituellement
réversible, peut être prévenue par de courtes périodes de
traitement (trois mois) suivies dun traitement dentretien
par 5-FU seul jusquà progression, loxaliplatine étant réin-
troduit lors de la reprise évolutive tumorale sous réserve de
la toxicité neurologique. Ainsi, dans une étude, le taux de
contrôle tumoral était de 73 % (réponses objectives :
21 % ; stabilités tumorales : 52 %) et la SSP de 18 semaines
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après réintroduction de loxaliplatine [15]. Lanalyse des
données de trois études prospectives a montré que 23 %
des patients ayant eu une réintroduction de loxaliplatine
avaient une réponse tumorale objective, et que les SSP et
SG lors de la réintroduction de loxaliplatine étaient liées à
la durée de lintervalle sans oxaliplatine et à la réponse
tumorale lors de la première ligne de traitement [16]. La SSP
était de 3, 5 et 7 mois pour un intervalle sans oxaliplatine
inférieur à 6 mois, entre 6 et 12 mois, ou supérieur à 6 mois,
respectivement (p< 0,0001). La SSP était de 8,7 mois en
cas de réponse complète, 4,6 mois en cas de réponse par-
tielle et 3,2 mois en cas de stabilité tumorale. La SG était de
9, 16 et 22 mois pour un intervalle sans oxaliplatine infé-
rieur à six mois, entre 6 et 12 mois, ou supérieur à six mois,
respectivement (p< 0,0001). La SG était de 19,5 mois en
cas de réponse complète, de 15,2 mois en cas de réponse
partielle et de 9,7 mois en cas de stabilité tumorale [16].
Ainsi, après une première progression tumorale, la réintro-
duction de loxaliplatine peut être proposée chez les
patients ayant un intervalle de temps sans oxaliplatine
prolongé.
Bevacizumab
Létude des mécanismes impliqués dans langiogenèse
tumorale a permis le développement danticorps dirigés
contre le vascular endothelial growth factor (VEGF), per-
mettant de bloquer la croissance des nouveaux vaisseaux.
Le bevacizumab est un anticorps humanisé dirigé contre le
VEGF, qui a montré son efficacité en association avec les
chimiothérapies dans le traitement de première ligne des
cancers colorectaux avancés [17-19].
Bevacizumab au-delà de la deuxième ligne
Au-delà de la deuxième ligne, un traitement comportant
du bevacizumab est peu efficace, comme le suggère une
étude de phase II évaluant lefficacité dune chimiothérapie
à base de 5-FU et bevacizumab chez des patients résistant à
lirinotécan et à loxaliplatine. Le bevacizumab était admi-
nistré toutes les deux semaines à la dose de 5 mg/kg, et le
critère dévaluation principal était le taux de réponse tumo-
rale. Les résultats montraient un taux de réponse faible
(4 %), avec des médianes de SSP et SG de 3,5 et 9 mois,
respectivement [20].
Bevacizumab en deuxième ligne
Une étude de phase III, incluant 829 patients, a com-
paré trois traitements de deuxième ligne après échec
dune chimiothérapie par 5-FU et irinotécan : FOLFOX
plus bevacizumab, FOLFOX seul et bevacizumab seul
[21]. Le bevacizumab était administré à une dose
double de celle utilisée dans les études de première
ligne (10 mg/kg tous les 15 jours). La médiane de SG
était de 12,9 mois dans le groupe FOLFOX plus bevaci-
zumab, contre 10,8 mois dans le groupe FOLFOX seul
(p= 0,001) et 10,2 mois dans le groupe bevacizumab
seul. La médiane de SSP était de 7,3 mois dans le groupe
FOLFOX plus bevacizumab contre 4,7 mois dans le
groupe FOLFOX seul (p< 0,001) et de 2,7 mois dans le
groupe bevacizumab seul. Les résultats de cette étude
montrent donc que ladjonction du bevacizumab au
FOLFOX permet daugmenter de façon significative la
SSPetlaSG.
Faut-il maintenir le bevacizumab
après progression sous chimiothérapie
plus bevacizumab ?
Une large étude de cohorte (étude BRITE) a été initiée
pour tester lefficacité dune chimiothérapie de première
ligne (au choix de linvestigateur) associée au bevacizu-
mab. Grâce aux informations recueillies sur le traitement
reçu après progression tumorale, les patients ont été
classés en trois groupes : pas de traitement (n= 253),
chimiothérapie sans bevacizumab (n= 531) et chimiothé-
rapie avec bevacizumab (n= 642) [22]. Les médianes de
SG étaient de 13, 20 et 32 mois, respectivement. En ana-
lyse multivariée, le traitement par chimiothérapie avec
bevacizumab, comparativement à la chimiothérapie sans
bevacizumab, était associé de façon significative et indé-
pendante à une survie supérieure (ratio de risque [HR] :
0,48 ; p< 0,001). Ces résultats suggèrent que leffet anti-
angiogénique pourrait perdurer au-delà de la première ligne
de traitement, et quil y aurait un intérêt à poursuivre le beva-
cizumab après la progression tumorale. Cependant, il sagit
dune étude observationnelle dont les résultats doivent être
interprétés avec précaution. Il faut donc attendre les résultats
des études prospectives en cours pour définir la stratégie
dutilisation du bevacizumab en seconde ligne après échec
dune chimiothérapie associée à cet agent en première
ligne. Létude internationale TML, actuellement en cours,
permettra de répondre à cette question, puisquil sagit
dune randomisation en deuxième ligne entre pour-
suite ou non du bevacizumab en association avec une
chimiothérapie.
Inhibiteurs
de lepidermal growth factor receptor
Cetuximab
Le cetuximab est un anticorps monoclonal chimérique de
type IgG1 qui se lie spécifiquement au récepteur de lEGF,
bloquant ainsi sa phosphorylation et les voies de signa-
lisation responsables de la prolifération et de la survie
cellulaires. Avant dêtre étudié en première ligne de
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traitement [23, 24], le cetuximab a dabord été évalué chez
des malades en échec dune ou de plusieurs lignes de
chimiothérapie.
Létude randomisée, BOND, a évalué en deuxième ligne de
traitement ou au-delà, lefficacité dun traitement par cetu-
ximab seul ou en association avec lirinotécan chez 329
patients ayant déjà reçu de lirinotécan et surexprimant
EGFR. Les résultats montraient un taux de réponse tumo-
rale supérieur lorsque le cetuximab était associé à lirinoté-
can (22,9 vs 10,8 %, p= 0,007), ainsi quun allongement
du temps jusquà progression (4,1 vs 1,5 mois, p< 0,001).
La médiane de SG nétait pas significativement différente
(8,6 vs 6,9 mois, p= 0,48) en raison probablement des
cross-over effectués dans le bras cetuximab seul [25].
Ces résultats ont permis daboutir à lautorisation de mise
sur le marché du cetuximab. Par la suite, de nombreux tra-
vaux ont montré que le statut tumoral KRAS jouait un rôle
prédictif déterminant dans la réponse et la survie des
patients traités par cetuximab [23, 26-28].
Une étude a comparé chez des patients en impasse théra-
peutique (ayant déjà reçu du 5-FU, de loxaliplatine et de
lirinotécan) soit du cetuximab en monothérapie, soit des
soins de support exclusifs [29]. Parmi les patients présen-
tant un statut tumoral KRAS sauvage, le traitement par
cetuximab, comparé aux soins de support exclusifs, était
significativement associé à une meilleure SG (9,5 vs
4,8 mois, p< 0,001) et SSP (3,7 vs 1,9 mois, p< 0,001).
En revanche, parmi les patients présentant un statut tumo-
ral KRAS muté, les médianes de SG et de SSP nétaient pas
significativement différentes entre les deux groupes de
patients. La mutation du gène KRAS ninfluençait pas la
survie des patients traités par des soins de support seuls.
Le cetuximab peut donc être utilisé en monothérapie ou
en association avec de lirinotécan après échec dun traite-
ment à base doxaliplatine ou dirinotécan chez les patients
dont la tumeur présente un statut KRAS sauvage.
Létude EPIC, réalisée chez 1 298 patients en échec du 5-FU
et de loxaliplatine, a montré quune chimiothérapie de
deuxième ligne par cetuximab associé à lirinotécan donnait
de meilleurs résultats que lirinotécan seul : augmentation
du taux de réponse (16,4 vs 4,2 %, p< 0,0001), allonge-
ment de la SSP (4 vs 2,6 mois, p< 0,0001), meilleure qualité
de vie (p= 0,047), cependant, sans amélioration significa-
tive de la SG (10,7 vs 10 mois, p= 0,71) [30].
En cas de réponse favorable à la chimiothérapie, la possibilité
dun traitement chirurgical des métastases initialement non
résécables doit être systématiquement discutée. Une étude a
évalué le taux de résécabilité chirurgicale ainsi que les média-
nes de SG et de SSP après un traitement par cetuximab seul
ou en association avec une chimiothérapie chez 151 patients
présentant des métastases hépatiques initialement non résé-
cables et résistant à loxaliplatine et/ou à lirinotécan [31].
Parmi ces patients, 25 ont pu avoir une résection chirurgicale
des métastases hépatiques après une médiane de six cycles
de chimiothérapie avec le cetuximab (dix résections R0 et 12
résections R1 ; un décès postopératoire). Après un suivi
médian de 16 mois, 23 patients (92 %) étaient en vie, et
dix (40 %) navaient pas présenté de récidive tumorale.
Les médianes de SSP et de SG, depuis lintroduction du cetu-
ximab, étaient de 13 et 20 mois, respectivement.
Panitumumab
Le panitumumab est un anticorps humain anti-EGFR de
type IgG2. Lévaluation de cet anticorps a été initialement
réalisée chez des patients en échec des traitements habi-
tuels. La première étude a comparé le panitumumab aux
soins de confort seuls chez des patients en échec de traite-
ment par 5-FU, oxaliplatine et irinotécan [32]. Les patients
avaient reçu au moins deux lignes de chimiothérapie et
devaient avoir une tumeur exprimant lEGFR en immuno-
histochimie. Le panitumumab était administré à la dose de
6 mg/kg toutes les deux semaines. La différence en SSP
entre les deux groupes de patients était faible, mais signifi-
cative en faveur du groupe traité par le panitumumab (8,0
vs 7,3 semaines, p< 0,0001). Il nexistait pas de différence
significative en termes de SG en raison, probablement, des
cross-over effectués dans le bras soins de conforts seuls.
Comme pour le cetuximab, lefficacité du panitumumab
dépend du statut KRAS. Chez les patients présentant une
tumeur KRAS sauvage, la médiane de SSP passait de 7,3 à
12,3 semaines (p< 0,0001), alors que chez ceux avec statut
tumoral KRAS muté, les SSP étaient similaires (7,4 vs
7,3 semaines) [33]. Plus récemment, une étude de phase
III a évalué lefficacité du panitumumab en deuxième ligne
de traitement après échec dune chimiothérapie à base de
fluoropyrimidine [34]. Les 1 186 patients inclus dans cette
étude étaient randomisés pour recevoir une chimiothérapie
par panitumumab et FOLFIRI ou FOLFIRI seulement. Le sta-
tut KRAS a été analysé de façon prospective pour plus de
90 % des patients. Les résultats defficacité ont montré,
chez les patients avec tumeur KRAS sauvage, une amélio-
ration significative de la médiane de SSP (5,9 vs 3,9 mois,
p= 0,004) avec le panitumumab en combinaison avec
FOLFIRI comparativement au FOLFIRI seul. La médiane de
SG était également améliorée, mais de façon non significa-
tive (14,5 vs 12,5 mois, p= 0,11). Chez les patients avec
tumeur KRAS mutée, le panitumumab naugmentait pas
les médianes de SSP (5,0 vs 4,9 mois, p= 0,14) ou de SG
(11,8 vs 11,1 mois, p= 0,55). Il nexiste pas, à ce jour, détu-
des randomisées de phase III ayant évalué la combinaison
des deux thérapies ciblées au-delà de la première ligne de
traitement. Deux études randomisées de phase III ont mon-
tré que ladjonction dun anti-EGFR à une chimiothérapie
comportant du bevacizumab en première ligne de traite-
ment entraînait une majoration de la toxicité sans améliorer
la survie des patients [35, 36].
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