Vitamines - consommation pas toujours justifiée

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Vitamines
Consommation pas toujours justifiée
La mode étant à la bonne mine et à la bonne forme, les
rayons des pharmacies et des grandes surfaces regorgent
de vitamines et oligo-éléments de toutes sortes. Grâce à
l’effort des nutritionnistes, nous percevons l’intérêt d’un
apport équilibré. Notre alimentation ne serait-elle plus
adaptée à nos besoins ?
P
lusieurs facteurs entrant en
jeu et chaque personne étant
un cas biologique particulier, les
besoins en vitamines ne sont certes
pas toujours couverts. Mais une
alimentation appropriée et une
hygiène de vie correcte devraient
suffire à éviter les carences. L’apport de vitamines par les aliments
est indubitable. Mais sait-on que
l’abus de vitamines peut produire
l’effet inverse à celui recherché ?
Les vitamines sont habituellement
classées en deux grands groupes :
les vitamines liposolubles, c’est-àdire solubles dans les graisses (A,
D, E, K) et les vitamines hydrosolubles, c’est-à-dire solubles dans
l’eau (B, C). Ces dernières sont
susceptibles d’être éliminées dans
l’eau de cuisson. « Toutes les études
sérieuses ont montré que la prise
quotidienne, par des personnes en
bonne santé, de médicaments contenant toutes les vitamines n’a en fait
aucun bénéfice réel, indique le
Dr P. Dorosz*. Ce n’est que dans
certains groupes de population appelés groupes à risques qu’une augmentation spécifique des besoins peut
justifier un apport supplémentaire de
telle ou telle vitamine, en sachant que
l’administration de vitamines à doses
excessives peut être néfaste. »
Parfois des effets néfastes
Les carences en vitamine A sont
rarissimes dans les pays industrialisés. Une consommation excessive de médicaments contenant de la vitamine A ou d’huiles
de foie de poisson peut entraîner
une intoxication.
L’hypervitaminose D peut être à
l’origine d’une perte de l’appétit,
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provoquer une soif intense, des
nausées, des vomissements, voire
une insuffisance rénale. Il est important de ne pas en dépasser les
doses chez les jeunes enfants. Pour
la vitamine E, il n’existe pas de surdosage, sauf en cas de très fortes
doses qui peuvent augmenter l’action de certains médicaments anticoagulants et être la cause de saignements chez les malades soumis
à ces traitements.
Les vitamines B1 (thiamine ou
aneurine) et B2 (riboflavine) sont
indispensables au métabolisme
normal des sucres ou hydrates de
carbone. Il n’existe pas d’intoxication par ces vitamines qui ne peuvent être stockées dans l’organisme,
tout apport excessif étant éliminé
dans les urines. La vitamine B3 ou
PP (vitamine antipellagreuse ou niacine) existe sous deux formes ayant
une activité identique : l’acide nicotinique et le nicotinamide. Elle ne
donne des troubles que lorsqu’elle
est administrée à très fortes doses,
soit plusieurs grammes par jour,
comme on le fait parfois pour traiter certaines hypercholestérolémies
(effets indésirable : bouffées de chaleur, rougeurs de la face et des extrémités...). Les vitamines B5 et B6
n’ont pas d’effets indésirables, sauf
pour la seconde, qui ne doit pas être
prescrite à forte dose chez les malades parkinsoniens.
La vitamine C n’est pas toxique
(sauf chez les femmes enceintes),
parce que l’organisme a une capacité d’absorption limitée et élimine
spontanément les excédents. Il est
donc illusoire d’en consommer
trop comme par exemple l’hiver,
en cas de rhume.
Rôle des médicaments
L’attention doit être portée sur la
prise de certains médicaments
qui, eux, modifient le métabolisme, entraînant parfois le déficit
en vitamines. L’isoniazide, la rifamycine ou le phénobarbital, la
phénytoïne, la primidone, par
exemple, peuvent entraîner une
déficience en vitamine D. D’autres
molécules peuvent entraîner un
défaut d’absorption de ces mêmes
vitamines. Ainsi, les femmes qui
prennent la pilule contraceptive
ont besoin parfois d’un apport
supplémentaire en vitamine A.
Si un déficit vitaminique peut altérer les fonctions de l’organisme
sans que celui-ci ne présente de
signes visibles, cet effet, qui est peu
constaté, ne justifie pas des prises
quotidiennes, sauf chez certaines
populations. En effet, un ensoleillement insuffisant pour les enfants justifie un apport de vitamine D. Le tabagisme, l’alcoolisme,
les polluants de l’environnement, la
prise prolongée de pilules contraceptives contenant des estroprogestatifs ou de certains médicaments, les régimes déséquilibrés ou
très restrictifs, les grossesses et les
allaitements sont autant de phénomènes qui déséquilibrent les besoins en vitamines.
Dans les pays industrialisés, les carences en vitamines sont cependant rares. Le régime alimentaire y
est plus que suffisant. L’utilisation
abusive de vitamines peut même
entraîner un retard de diagnostic
et interférer avec certains traitements. Elles devraient être prises,
selon le Dr Dorosz, uniquement
après un diagnostic médical précis
et pour des indications spécifiques, et non pas comme des “fortifiants” ou “des stimulants”.
Lucie Galion
* Vitamines, sels minéraux, oligo-éléments,
Dr P. Dorosz, éd. Maloine, Paris, 1996.
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