Fiche pratique Coopération commerciale Carrefour Jugement du tribunal de commerce d’Evry, 14 octobre 2009 À la suite d’un contrôle de la DGCCRF auprès de seize fournisseurs de Carrefour, le ministre de l’Économie a saisi le tribunal de commerce d’Evry, le 28 mai 2008, pour que celui-ci prononce la nullité des clauses relatives à la rémunération de prestations de coopération commerciale, et condamne Carrefour à la restitution de l’indu, estimé à plus de 16 millions d’euros, ainsi qu’à l’amende civile de 2 millions d’euros. Sur le fond, le tribunal s’est prononcé en considérant qu’il existe une disproportion manifeste entre la rémunération versée par les fournisseurs et la valeur du service rendu par Carrefour. Trois prestations étaient visées par la DGCCRF : – Le plan d’action par familles de produits : il présente un intérêt très limité, s’agissant de tableaux de données générales, dépourvus de tout commentaire. – Le plan de développement des performances des fournisseurs : il est « difficilement exploitable » et ne donne pas « une vision globale du marché ». – Le plan d’implantation par types de magasins, outil interne de Carrefour : il n’a aucune valeur pour le fournisseur, puisqu’il se borne à relater la stratégie du distributeur en matière d’implantation. Le tribunal a constaté que les prix de ces prestations représentent de dix à vingt fois ceux pratiqués par des panélistes, pour des prestations « comparables ». Ils sont manifestement disproportionnés, et varient d’un fournisseur à l’autre. Il est même arrivé que des fournisseurs aient signé deux ou plusieurs contrats pour des prestations identiques, assortis de rémunérations différentes à caractère cumulatif. Le tribunal en a conclu qu’il se trouvait en présence d’un simple habillage ne recouvrant « aucune réalité économique ». Il a souligné que, au regard des dispositions contractuelles, la signature du contrat de prestation de coopération conditionne, en l’espèce à tort, la pérennité du contrat commercial, l’un des articles stipulant que « la résiliation du présent contrat [de coopération commerciale] entraînera automatiquement et simultanément la résiliation de l’accord commercial ». Le juge n’a pas suivi pour autant la DGCCRF sur le terrain de la répétition de l’indu. Il a estimé que le contrat commercial et les contrats de prestation forment un tout indivisible. Ainsi, les prix de vente des produits ont été établis et consentis par les fournisseurs en fonction des rémunérations versées au titre des prestations, lesquelles tiennent lieu, dans l’économie du contrat, de réductions de prix qui auraient dû faire l’objet de remises ou de ristournes. L’exercice est donc neutre pour les fournisseurs, raison pour laquelle il n’y a pas, en l’absence de préjudice, à restituer un indu inexistant.