SOiNS - n°698 - septembre 200552
sécurité des professionnels de santé
❚Un milieu de travail sûr et sans danger est un droit
indéniable pour chaque soignant et constitue un élé-
ment essentiel d’une prestation de soins de qualité. La
violence à l’encontre des soignants ou des patients ne
devrait pas être tolérée. Pourtant, fréquemment, de
nombreux cas de violence ne sont pas signalés en rai-
son d’un entêtement des équipes de santé à penser que
les agressions font partie du travail. Les infirmier(e)s doi-
vent refuser énergiquement de tolérer la violence et le
harcèlement, et soutenir les personnes ayant été vic-
times d’abus en prenant des mesures individuelles et
collectives en milieu de travail ou par l’intermédiaire des
associations. Sans négliger l’action des pouvoirs publics,
dans la pratique, les infirmier(e)s, les employeurs et les
associations d’infirmier(e)s ont donc une responsabilité
partagée dans l’assurance de la pérennité d’un cadre de
travail sécurisé.
❚La formation des soignants est indispensable. Pour
Aline Mauranges, la prévention de la violence au sein des
services passe par l’organisation
régulière de réunions de syn-
thèse, un soutien psychologique
actif du personnel et surtout par
la formation continue et spéci-
fique des acteurs de santé car
réfléchir, remettre en cause les
pratiques, faire évoluer les idées
et pratiquer l’autocritique sont
des moyens sûrs pour évacuer
les tensions, être solidaires, repé-
rer ses propres sensibilités face
aux pathologies, et respecter le
désir du malade.
❚L’importance du mode de
conduite des soignants est également à souligner.
Pratiquer la politique de la main tendue et s’ouvrir spon-
tanément au dialogue sont les premiers pas vers le désa-
morçage de la violence, ce qui exige un savoir-faire dans
son comportement. Le soignant doit apprendre à rester
calme, à adopter une expression franche sans montrer
sa peur. Le nombre de soignants au sein d’une équipe
est aussi un facteur de prévention non négligeable. Le
renforcement permanent des équipes est d’ailleurs une
problématique actuelle.
❚Le comportement du soignant doit s’adapter au
type de patient car l’expression de la violence varie
d’un service à l’autre. D’après Aline Mauranges, par
exemple, le soin en psychiatrie, dominé par les expres-
sions de souffrance psychique des patients, plonge
d’emblée le soignant dans un monde à part. L’agitation
du patient et/ou ses conduites agressives l’obligent à
régler son comportement : d’abord en évaluant la dan-
gerosité du sujet pour se protéger d’un risque réel de
violence, ensuite en évaluant les risques suicidaires du
patient pour le protéger lui. Dans la continuité des soins,
le comportement du soignant doit ainsi conjuguer
écoute, dédramatisation des situations, attitude sécuri-
sante sans toutefois oublier la vigilance.
❚Le processus d’accompagnement des malades
passe également par la mise en place de groupe de
paroles et de moyens d’aide à la réinsertion sociale.
❚Violence et santé : une réalité reconnue par les
pouvoirs publics. Dans le cadre du “Plan d’action pour
le développement de la psychiatrie et la promotion de la
santé mentale” le rapport du 15 septembre 2003, intitulé
“Violence et Santé ”3, rédigé par la mission Cléry-Melin,
précise que « dans un contexte de tension sur les effectifs
et d’émergence de nouvelles organisations, les difficultés
pour les soignants de fournir un
travail de qualité vont à l’encontre
de leurs valeurs éthiques et peu-
vent les conduire à un non-sens
dans le travail et une perte d’es-
time de soi. La négation de leur
engagement, l’absence de recon-
naissance des efforts réalisés sont
très coûteux sur le plan de la
santé et peuvent amener de véri-
tables décompensations psy-
chiques (épuisement profession-
nel…). Il importe, afin d’expliquer,
d’analyser, puis d’agir sur les situa-
tions de violence, de mieux recen-
ser les actes de violence physique et psychique dont sont
victimes les personnels et les patients ».
N’oublions pas enfin que les soignants sont protégés par
la loi n°96-1093 du 16 décembre 1996 relative à l'emploi
dans la fonction publique et à diverses mesures d'ordre
statutaire, qui stipule que « les fonctionnaires bénéficient
à l’occasion de leur fonctions, d’une protection organi-
sée par la collectivité publique dont ils dépendent,
conformément aux règles fixées par le code pénal et les
lois spéciales (…). La collectivité territoriale est tenue de
protéger les fonctionnaires contre les menaces, vio-
lences, voies de fait et injures, diffamations ou outrages
dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs
fonctions et réparer le cas échéant, le préjudice qui en
est résulté ».
QUELLE PRÉVENTION POUR LA VIOLENCE ?
EN SAVOIR PLUS
• Beaumont L. Violence et
cadre de santé, Mémoire
École des cadres de santé,
1998 ; à consulter sur
l.beaumont.free.fr/memoire.html
• Belmin J. L’infirmière et
les soins aux personnes
âgées. Spécificités des
soins, situations
fréquentes. Masson, 2004.
• Bergeret J. La violence
fondamentale.
L’inépuisable Œdipe.
Dunod, 1984.
• Collectif. Violence et
Soins (dossier). Soins 624,
avril 1998.
• Danancier J. Évaluer et
prévenir la violence dans
les établissements sociaux.
Dunod, 2005.
• Lawler J. La face cachée
des soins, soins au corps,
intimité et pratique
soignante.
Seli Arslan, 2002.
• Morasz L. Comprendre la
violence en psychiatrie.
Approche clinique et
thérapeutique.
Dunod, 2002.
• Michaux Y. La violence.
Collection que sais-je ?
PUF, 1986.
• Moser G. L'agression.
Collection Que sais-je ?
PUF, 1987.
Fiche réalisée en
partenariat avec
la Mutuelle nationale
des hospitaliers
et des professionnels
de la santé et du social
© Denis Dugas