la division leclerc a l`assaut de carrefour

publicité
LA DIVISION
LECLERC A L'ASSAUT
DE CARREFOUR
Avant même le nouveau droit sur la concurrence
Carrefour se lance dans la bataille des prix comparés et
les Lederc contre-attaquent
poêle «Bonjour la pub magouille. «A la guerre
comme à la guerre. 149, rue Saint-Honoré, une
enfilade de cellules monacales où l'on confesse
les produits, me mène au bureau aussi dépouillé
de Michel-Edouard Leclerc; 34 ans, sciences éco
et philo, il a eu sa période écolo. Son père
Edouard l'a fait rentrer à l'essai, 4 000 francs
par mois pendant trois ans, jure-t-il Maintenant
il copréside les centres Leclerc. «Notre rôle, me
dit cet anticolbertiste proche d'Alain Madelin et
de François Léotard et militant du Parti Prix
depuis 1982, c'est d'être les Robin des Bois de la
a liberté des pri. ça se maîtrise. » Sous
11.1 cette
proclamation hautement civique,
les colonnes Carrefour ont foncé le jour
des Défunts, 2 novembre, dans une nouvelle
bataille des «prix comparés ». Le dada de
renseigne qui a lancé en 1976 les «produits
libres », en 1979 «l'indice des économies» avec
la caution de l'IFOP et de son directeur
Jean-Marc Lech, et en novembre-décembre 1983
une première campagne vraiment comparative
où les concurrents étaient nommément cartonnés. Cette fois-ci encore, des commandos ont fait
razzia dans les gondoles, entassé les preuves
dans les caddies, un huissier constatant les prix
à la sortie de la caisse. Pas de mouron à se faire;
un pêcheur averti en vaut deux, les chasseurs de
prix ne reviendront pas bredouilles : les
Carrefour ont, bien sûr, pris là précaution de
baisser leurs prix avant l'opération.
Çà n'a pas loupé : tous les médias ont ressorti
le marronnier de la «publicité comparative »,
version discounter. Sans le parfum de scandale
des années passées. Suite à l'affaire opposant
Carrefour au groupe Arnaud (enseigne Record)
qui avait porté plainte contre la campagne 1983,
la chambre commerciale de la Cour de Cassation
a rendu le 22 juillet 1986 un arrêt historique :
concurrence; Landerneau est notre forêt de
Sherwood. On nous classe vite comme des ultras
‘
du libéralisme alors que nous oeuvrons dans
l'économie sociale."
Etrange symbiose qu'une communication qui,
poursuit des convictions idéologiques par le
commerce. Cette semaine, Leclerc monte au:
front, une campagne de 16 millions de francs
mitonnée par l'agence CLM-BBDO. Trois'
affiches en noir et blanc: « C'est prouvé, tous les'
monopoles sont faits pour être brisés », « Tout;
ce que Leclerc n'a pas le droit de vendre vous ese
vendu trop cher» « Leclerc ou les monopoles,,
faites vos jeux» (on a enlevé «les » Leclerc de
,
l'affiche originale). Simultanément, des « actions» anti-secteurs protégés mettent le feu à la
prairie. Soutenues par des affiches couleur
culottés qui ont fait frémir les afficheurs et le
Bureau de Vérification de la Publicité (mise en
cause de Hechter, de Léotard...). Le 13 novembre : lancement de produits parapharmaceutiques comme le SurondeL Depuis six mois les
centres vendaient déjà des vitamines a Le 17:
la diététique avec les gamines de plantes Rika
Zaraï dont les pharmaciens voulaient l'exclusivité. Le 19 à Nantes : la bijouterie, l'or à moins
20 %. Tant mieux si les corporations attaquées
ripostent. « On part de févénement que l'on
crée, s'amuse Michel-Edouard, et cela finit par
des tribunes dans /as médias. Avec 60 milliards
de chiffre d'affaires, on a de quoi dialoguer. »
Malin, il a pris un plaisir fou à « torpiller» la
campagne Carrefour. Au parfum dix jours
avant son déclenchement, Leclerc a ouvert le feu
le premier, trois jours plus tôt, sur les ,« prix
comparés» des carburants. Coût
400 000 francs. Des clopinettes qui ont ravi la
vedette à Carrefour. Des huissiers ont aussi
relevé les prix de Carrefour huit jours avant le
jour J. Et le lundi 3 novembre, boum-boum,
contre-offensive sur le thème «Les changements de prix, ça se maîtrise », révélations à
l'appui des baisses anticipées du rival. Qui ne
peut pas nier. Partie de ping-pong : Patrick
d'Elma en tire argument : « Cette campagne
oblige nos magasins à baisser leurs prix.» En
revanche, il nie farouchement que les prix sont
relevés après : «Pas avant l'année prochaine,
juré. » PHILIPPE GAVI
«N'est pas illégale une publicité qui se borne à
la comparaison des prix auxquels des produits
identiques sent vendus, dans les mêmes
conditions, par des commerçants différents,
contribuant ainsi à assurer la transparence d'un
marché soumis à la concurrence. » Une brèche
edee '
s assei
où s'est engouffré Carrefour avec la bénédiction
des autorités. Retour à août 1986, quand les
services de Balladur ont convoqué industriels et
commerçants : « On va libérer les prix en 1987,
c,
o
soyez sympas, les copoinR, faites des efforts.»
René Brillet, à 42 ans, directeur exécutif de
Carrefour depuis un an, se dit : «Anticipons en
1987 en attaquant avant les autres. » Patrick
d'Elme, le responsable de la communication,
pond un projet de campagne pédago. On
expliquera aux consommateurs comment on
fabrique un prix chez Carrefour. Idée abandonnée : après examen, il s'avère qu'un prix, c'est
tout relatif, en fonction de la concurrence.
Décision est alors prise à la fin de septembre de
revenir aux « prix comparés ».
Sur le terrain, ça saigne sec, surtout les
centres Leclerc. Dans la Marne, un tract sort où
l'on voit un cuisinier dégueu frire des prix sur sa
•
•
LES CARREFOUR ONT
PRIS LA PRECAUTION DE
BAISSER LEURS PRIX
AVANT L'OPERATION
fa.
A FAIRE FREMIR LE BVP
Téléchargement