I. DÉFINITIONS

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L’ADENOME DE LA PROSTATE OU HYPERPLASIE
BENIGNE DE LA PROSTATE
Professeur Christian SAUSSINE, Service de Chirurgie Urologique, Nouvel Hôpital
Civil
I. DÉFINITIONS
L’adénome de la prostate, terminologie ancienne utilisée pour le grand public, correspond
à la maladie appelée hyperplasie bénigne de la prostate (HBP). L’HBP répond à plusieurs
définitions, histologique, clinique ou compliquée.
A. L’HBP histologique
L’HBP histologique est définie par une hyperplasie stromale (fibromusculaire) et
épithéliale (glandulaire) de la zone de transition et périurétrale de la prostate. La zone de
transition désigne selon l’anatomie zonale de la prostate définie par Mc Neal, la portion
de la prostate située de part et d’autre de l’urètre prostatique.
En l’absence d’HBP cette zone de transition est virtuelle. Classiquement le
développement histologique d’une HBP va se faire sur le plan macroscopique par la
formation de deux lobes latéraux, droit et gauche auxquels se rajoute parfois un
troisième lobe appelé lobe médian dont le développement va se faire en direction du
plancher vésical.
Ainsi une prostate dont le poids normal est d’une vingtaine de grammes pourra atteindre
du fait du développement d’une HBP des poids très variables allant de plus de 20g à plus
de 200 voire 300g dans des situations exceptionnelles. Le lobe médian est souvent
responsable de signes cliniques importants qui réagissent mal au traitement médical.
B. L’HBP clinique
L’HBP clinique est plus difficile à appréhender car plusieurs composantes sont intriquées :
une obstruction sous-vésicale (OSV), une augmentation du volume de la prostate, et des
signes du bas appareil urinaire (SBAU). La relation entre ces trois composantes est
complexe. Des patients peuvent avoir une augmentation du volume de la prostate sans
SBAU ni OSV ; tous les SBAU ne sont pas liés à une HBP. L’OSV liée à l’HBP peut être
asymptomatique. L’OSV peut avoir d’autres causes que l’HBP. Tous les SBAU ne sont pas
gênants pour le patient. Enfin, une des conséquences de l’OSV est la survenue d’une
hyperactivité vésicale.
En pratique, on parle d’HBP clinique pour un homme ayant des SBAU gênants et chez
lequel il existe des arguments cliniques et paracliniques permettant de les relier à une
HBP.
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C. L’HBP compliquée
Il est classique de parler d’HBP compliquée lorsque l’HBP est responsable d’infections
urinaires à répétition, de calculs vésicaux, de diverticules vésicaux, de rétention vésicale
aiguë ou chronique, d’hydronéphrose avec ou sans insuffisance rénale, d’incontinence par
regorgement, ou d’hématurie récidivante.
II. DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL
A. HBP histologique
Pour l’HBP histologique il n’y a pas de diagnostic différentiel, mais il faut savoir que des
lésions histologiques microscopiques d’HBP peuvent exister en l’absence d’ HBP
macroscopique.
B. HBP clinique
Pour l’HBP clinique et en considérant ses 3 composantes il faudra distinguer :
1. Pour l’augmentation de volume de la prostate :
a. le cancer localement avancé de la prostate dont le diagnostic repose sur une
consistance anormale, dure ou pierreuse de la prostate au toucher rectal, une élévation
du PSA et des biopsies prostatiques.
b. La prostatite aiguë dont le tableau clinique est dominé par de la fièvre élevée
(>38°5), des douleurs suspubiennes et au toucher rectal et une élévation souvent
marquée mais transitoire du PSA.
2. Pour les SBAU : tous les mécanismes principaux impliqués dans leur
survenue.
Il peut s’agir d’une OSV, d’une hyperactivité vésicale, d’une hypoactivité vésicale ou
d’une polyurie des 24 heures ou nocturne.
a. En présence d’une OSV avérée et d’une augmentation marquée du volume de
la prostate, il est cohérent de relier les SBAU à une HBP. En dehors de cette
situation, l’OSV peut être d’origine neurologique par hypertonie sphinctérienne lors de la
miction (dyssynergie vésico-sphinctérienne par atteinte médullaire par exemple) mais
aussi prostatique (maladie du col, prostatite aiguë, cancer évolué) ou urétrales
(sténoses, traumatisme). Toute OSV peut entraîner une rétention vésicale aiguë ou
chronique.
b. L’hyperactivité vésicale peut être idiopathique, d’origine neurologique, être
secondaire à une pathologie vésicale ou à une OSV telle que l’HBP. Le vieillissement
vésical est aussi évoqué comme cause possible d’hyperactivité vésicale.
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c. L’hypoactivité vésicale peut être d’origine neurologique, iatrogène, ou secondaire à
une distension vésicale aiguë classiquement appelée « vessie claquée ». Le vieillissement
vésical est aussi considéré comme responsable d’hypoactivité vésicale chez l’homme âgé.
Une hypoactivité vésicale peut entraîner une rétention vésicale aiguë ou chronique.
d. Une nycturie peut être le fait soit d’une polyurie sur 24heures, soit d’une polyurie
nocturne, soit d’une diminution de la capacité vésicale. La nycturie observée dans l’HBP
est le fait d’une diminution de la capacité vésicale nocturne.
C. HBP compliquée
Pour l’HBP compliquée, un épisode isolé de rétention vésicale aiguë peut-être relié à une
HBP en cas de SBAU préalables avec hypertrophie de la glande mais peut aussi être de
nature réflexe en l’absence d’HBP (post-opératoire par exemple). L’hématurie
macroscopique ne sera rattachée à l’HBP qu’après avoir écarté toutes les autres causes
(cancer vésical, cancer du rein, lithiase urinaire etc...)
III. ÉPIDÉMIOLOGIE
L’épidémiologie de l’HBP est compliquée à préciser du fait des diverses définitions
décrites ci-dessus. Certains chiffres peuvent être donnés pour fixer les esprits.
A. HBP histologique
L’HBP histologique n’est pas retrouvée avant l’âge de 30 ans mais a une prévalence qui
augmente avec l’âge et culmine à 88% chez les hommes de 80 à 89 ans.
B. HBP clinique
L’HBP clinique existe chez 40% des hommes de 60 ans, touche environ 2 millions
d’hommes en France dont la moitié sont traités médicalement.
C. HBP compliquée
L’HBP compliquée associée à l’HBP clinique non soulagée par les traitements médicaux
conduit aux interventions chirurgicales pour adénome qui intéressent environ 60000
hommes par an.
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IV. PHYSIOPATHOLOGIE
La ou les causes exactes de l’HBP ne sont pas connues. Cependant deux facteurs sont
clairement identifiés comme jouant un rôle dans le développement de cette maladie
bénigne.
- L’âge
Le rôle joué par l’âge est démontré par l’épidémiologie.
- L’imprégnation androgénique normale de l’homme.
Des études ont montré qu’en l’absence d’imprégnation androgénique normale (et
notamment en l’absence de dihydrotestostérone), l’HBP ne se développait pas.
V. LE BILAN CLINIQUE D’UNE HBP
Le médecin généraliste va appréhender l’HBP au travers de deux situations bien définies
que sont les SBAU ou les complications de l’HBP. Ces situations vont en général
intéresser des hommes à partir de la cinquantaine mais certains patients plus jeunes
peuvent être concernés.
A. Identifier les SBAU
Les SBAU peuvent faire partie des motifs de consultation d’un patient mais pour les
patients de plus de 50 ans il est de bon usage en médecine générale de s’en inquiéter.
Les SBAU seront précisés ou recherchés par l’interrogatoire. On distingue les symptômes
de la phase de remplissage de ceux de la phase de vidange.
1. Les symptômes de la phase de remplissage
a. la pollakiurie elle désigne la survenue de mictions trop fréquentes (> 8 mictions
/24h) et peu abondantes (< 200ml). Elle doit impérativement être distinguée d’une
polyurie qui correspond à une diurèse supérieure à la normale (normale = 1,2 à
1,5l/24h) du fait d’une ingestion de liquide inappropriée. L’outil le plus simple, à la portée
de tous, qui est malheureusement sous-utilisé en médecine générale et qui permet
d’évaluer précisément cette diurèse de 24 heures est le calendrier ou catalogue
mictionnel. Le patient doit retranscrire pendant une durée de 3 jours l’ensemble de ses
mictions en précisant leur volume et leur horaire.
Une fois une polyurie éliminée, la pollakiurie peut être appréhendée la nuit au travers du
nombre de levers nocturnes (normale = 0 à 1 lever) ou le jour au travers de l’intervalle
mictionnel diurne (normale = 2 heures ou plus). La pollakiurie traduit le retentissement
vésical d’une OSV et correspond à une réduction de la capacité vésicale fonctionnelle.
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b. les urgenturies elles désignent la survenue brutale et souvent irrésistible d’un besoin
d’uriner. Elles peuvent s’accompagner de fuites urinaires lorsque le patient ne peut pas
se soulager rapidement. Elles peuvent s’accentuer en ambiance froide, être déclenchée à
la vue ou au bruit de l’eau qui coule ou dans certaines situations conditionnées
(syndrome de la clé dans la porte). Les urgenturies traduisent l’hyperactivité vésicale
secondaire à l’OSV.
2. Les symptômes de la phase de vidange
a. La dysurie
Elle désigne toute difficulté à effectuer une miction normale. Ces difficultés peuvent
intéresser :
- La phase initiale de la miction : dysurie d’attente (le patient ressent un besoin
mictionnel mais ne peut déclencher immédiatement une miction) ou dysurie initiale
(nécessité de pousser pour initier la miction)
- La phase terminale de la miction : dysurie terminale (nécessité de pousser pour
accompagner les dernières gouttes) ou gouttes retardataires ou impression de mauvaise
vidange vésicale après avoir fini d’uriner.
- Toute la miction avec jet faible, poussées successives, mictions longues ou en plusieurs
temps.
b. Les gouttes postmictionnelles.
Elles correspondent à l’émission involontaire de quelques gouttes d’urine alors que la
miction est terminée et que le patient s’est rhabillé. Leur physiopathologie suppose une
mauvaise vidange de l’urètre bulbaire. Il faudra garder à l’esprit que les gouttes postmictionnelles peuvent intéresser des patients jeunes qui n’ont pas d’HBP.
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En plus de l’interrogatoire il est possible de préciser tous ces symptômes en utilisant des
autoquestionnaires dont le plus courant est le questionnaire IPSS (International Prostatic
Symptom Score), malheureusement insuffisamment utilisé en médecine générale. Les
résultats de ces questionnaires informent sur ces symptômes et permettent de mieux
apprécier les changements sous l’effet des traitements.
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B. Rechercher les complications de l’HBP
Face à la dysurie, la décompensation de la vessie pourra prendre plusieurs formes.
Une forme aiguë représentée par la rétention vésicale aiguë.
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Une forme progressive représentée par la rétention vésicale chronique. Celle-ci se
caractérise par le résidu post-mictionnel (RPM). En rétention chronique le patient pourra
conserver des mictions volontaires ou avoir des mictions par regorgement permanente
ou uniquement nocturne.
Ce RPM sera souvent à l’origine d’autres complications qui sont les infections des
urines vésicales à répétition ou la formation de calculs vésicaux.
Dans les formes de rétention vésicale chronique avancée apparaîtra une
urétérohydronéphrose progressive avec dégradation progressive de la fonction rénale ou
insuffisance rénale.
Par ailleurs la décompensation progressive de la vessie face à la dysurie
s’accompagnera également de la formation de diverticules vésicaux.
Enfin une dernière complication de l’HBP est la survenue d’une hématurie
macroscopique souvent à répétition. Elle ne sera rattachée à l’HBP qu’après avoir exclu
les causes habituelles d’hématurie. C’est un diagnostic d’exclusion.
C. Rattacher les SBAU ou les complications à l’HBP
Une fois les SBAU et/ou les complications identifiés par le médecin généraliste, l’étape
suivante et non la plus facile consiste à les rattacher à une HBP.
1. Face aux complications
l’attitude est simple. Toutes les complications décrites ci-dessus imposent d’avoir un avis
chirurgical. Il y a donc lieu d’adresser le patient à l’urologue. Charge à l’urologue de
préciser si la complication en cause est à rattacher à une HBP ou à un des diagnostics
différentiels évoqués ci-dessus.
2. Face à des SBAU
la situation est différente car une étape médicale est le plus souvent possible. Certes les
diagnostics différentiels devront aussi être écartés mais chez un homme de plus de 50
ans, la survenue de SBAU est le plus souvent en lien avec une HBP. En plus de
l’interrogatoire déjà réalisé, un examen clinique est requis.
a. L’examen clinique.. Cet examen clinique permettra d’écarter un globe vésical ou une
anomalie anatomique comme une sténose du méat urétral ou un phimosis serré et de
faire un toucher rectal pour confirmer la présence d’une HBP.
b. Les examens complémentaires. Quels autres examens doivent être prescrits par le
médecin généraliste avant de prendre une décision thérapeutique ?
b.1. Un ECBU est utile pour écarter une infection urinaire, possible complication de
l’HBP mais qui par elle-même peut expliquer tout ou partie des SBAU. Une telle infection
sera donc traitée puis le patient sera réévalué cliniquement.
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b.2. Une échographie abdomino-pelvienne. Cet examen évaluera avec plus de
précision le volume prostatique, recherchera des complications passées inaperçues
(calculs vésicaux, diverticules vésicaux, rétention urinaire chronique, urétérohydronéphrose), ou éliminera certains diagnostics différentiels (tumeur vésicale, corps
étranger intravésical). Ces deux dernières situations conduiront à adresser le patient à
l’urologue.
b.3 D’autres examens peuvent être prescrits en fonction de situations particulières
découlant de données recueillies par les examens déjà réalisés :
En présence d’une induration au toucher rectal, un dosage du PSA est indispensable
chez un homme de moins de 75 ans dont l’espérance de vie est supérieure à 10 ans. Une
valeur de PSA supérieure à la normale conduira à prescrire des ponctions biopsies
prostatiques. En cas de mise en évidence d’un cancer localisé de la prostate,
fréquemment associé à une HBP, la prise en charge du cancer dominera le tableau et
évitera très souvent celle de l’HBP devenue inutile notamment en cas de choix d’une
prostatectomie totale. Dans une telle situation le patient sera référé à l’urologue.
En présence d’un globe vésical à l’examen clinique ou d’un RPM important et surtout
d’une urétérohydronéphrose à l’échographie, une évaluation de la fonction rénale est
indispensable (dosage de la créatinine et de sa clairance). Le patient sera référé à
l’urologue.
D. Évaluer la gêne induite par les SBAU
La façon la plus simple et la plus rapide d’évaluer la gêne induite par les SBAU est
d’utiliser la question n°8 du questionnaire IPSS. Ce questionnaire étant peu utilisé en
pratique de médecine générale d’après les enquêtes faites sur le sujet, l’évaluation de la
gêne sera faite par le médecin d’après son interrogatoire ou celle de l’épouse du patient.
VI. LA CONDUITE À TENIR
Différentes situations vont se présenter en fonction de la mise en évidence de
complications, des résultats de l’interrogatoire et des examens réalisés.
A. Le patient a des SBAU mais se dit non gêné
Les conseils hygiéno-diététiques seront prodigués avec régulation des apports hydriques,
suppression des éléments irritants de l’alimentation (épices etc…), conseil de pratiquer
un exercice physique quotidien (marche à pied). Le médecin sera cependant conscient
que bien qu’elles soient efficaces de manière transitoire, les règles hygiéno-diététiques
ne sont pas suffisantes pour modifier l’histoire naturelle de la maladie.
Une simple surveillance est recommandée car le risque de complication d’une HBP
correctement suivie est faible. Celle-ci portera sur l’évolution des SBAU et de leur gêne
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ainsi que sur l’apparition de complications. Sauf aggravation symptomatique, le patiente
sera réévalué annuellement par un interrogatoire, un examen clinique, un ECBU et une
échographie abdomino-pelvienne avec mesure du résidu post-mictionnel.
B. Le patient a des SBAU et se dit gêné
Les conseils hygiéno-diététiques seront prodigués et un traitement médical sera proposé.
1. Les classes thérapeutiques au choix sont nombreuses
( pour les doses thérapeutiques se référer au dictionnaire Vidal)
a. Les alpha-bloquants
Les alpha-bloquants ont fait l’objet de nombreuses études randomisées qui ont permis
d’établir leur efficacité mais également leur profil de tolérance (niveau de preuve 1). Les
alpha-bloquants sont efficaces sur les SBAU de la phase mictionnelle et de la phase de
remplissage et leur action est rapide et stable dans le temps (niveau de preuve 2). En
cas de rétention urinaire, la prescription d’alpha-bloquants 48heures avant la tentative de
retrait de la sonde vésicale améliore les chances de succès de reprise d’une miction de
bonne qualité.
Cinq molécules sont disponibles : alfuzosine, doxazosine, térazosine, tamsulosine,
et silodosine . Aucune étude de niveau de preuve suffisant ne permet de recommander
un alpha-bloquant plutôt qu’un autre.
Les patients doivent être informés des effets indésirables attendus en fonction de la
molécule choisie et des interactions médicamenteuses possibles. Ces effets secondaires
sont dominés par la sensation de malaise par l’hypotension artérielle et l’éjaculation
rétrograde.
b. Les inhibiteurs de la 5 alpha réductase
Les inhibiteurs de la 5-alpha-réductase sont la seule classe thérapeutique permettant
d’obtenir une réduction du volume de la prostate et une diminution du risque de
progression du volume de la prostate et de rétention aiguë d’urine (niveau de preuve 1).
Ils entraînent une diminution de 50 % de la valeur du PSA total sérique (qui doit être
prise en compte lors de l’analyse des dosages de PSA ultérieurs). Leur efficacité est plus
importante lorsque le volume prostatique est supérieur à 40mL (niveau de preuve 1).
Deux molécules sont disponibles : finastéride et dutastéride . Aucune donnée ne
permet de recommander un médicament plutôt qu’un autre à ce jour.
Les patients doivent être informés des effets secondaires en particuliers sexuels avant le
début du traitement. Il peut s’agir principalement d’une baisse de la libido, d’une baisse
de la qualité des érections ou d’une baisse du volume de l’éjaculat.
c. Association alpha-bloquant et inhibiteur de la 5 alpha réductase
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L’association thérapeutique entre un alpha-bloquant et un inhibiteur de la 5-alpharéductase est plus efficace à long terme sur la symptomatologie urinaire que chacune des
monothérapies, mais les effets secondaires se cumulent (niveau de preuve 1). Le
traitement doit être prolongé et les patients doivent avoir une prostate de plus de 40 mL.
d. Les extraits de plantes
Les effets des extraits de plante sur les SBAU sont modestes mais significatifs et ils ont
un excellent profil de tolérance qui les rend faciles d’utilisation (niveau de preuve 2). Il
existe des études contradictoires et des écueils méthodologiques dans la littérature
disponible (niveau de preuve 1). L’association de la phytothérapie avec un autre
traitement n’a jamais été étudiée.
Deux molécules sont disponibles : le Serenoae Repens et le Pygeum Africanum .
Aucune étude n’a comparé ces molécules entre elles.
e. Les anticholinergiques
Plusieurs études randomisées ont confirmé que l’association d’un alpha-bloquant et d’un
anticholinergique permettait d’améliorer les SBAU en rapport avec une HBP, sans
augmentation du risque de rétention urinaire(niveau de preuve 1). Ils n’ont pas
d’indication en monothérapie dans le cadre de l’HBP.
Quatre molécules sont disponibles : l’ oxybutinine, le chlorure de trospium, la
solifénacine et la toltérodine (la seule à ne pas être remboursée par la sécurité
sociale).
Le risque de rétention urinaire induite par les anticholinergiques est faible mais il reste
déconseillé de les prescrire en cas de dysurie franche (débit maximum inférieur à
10mL/s) ou de résidu post-mictionnel significatif (>200mL). La réalisation d’une
débitmétrie sera donc indispensable avant sa prescription et de ce fait un avis urologique
est préférable.
f. Inhibiteurs de la phosphodiéstérase de type 5
Les différents inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 ont tous fait l’objet d’études
randomisées pour le traitement des SBAU a priori en rapport avec une HBP. Leur
efficacité sur les SBAU est supérieure au placebo mais leur effet urodynamique n’est pas
certain (niveau de preuve 1). L’association avec un alpha-bloquant est plus efficace que
la monothérapie par inhibiteur de phosphodiestérase de type 5.
Trois molécules sont disponibles : le sildénafil, le tadalafil et le vardenafil . Aucune
n’est remboursée par la sécurité sociale et seul le tadalafil 5mg a l’AMM pour l’indication
d’HBP.
Les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 peuvent être proposés aux patients
présentant une dysfonction érectile associée à des SBAU.
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2. Les indications thérapeutiques
Aucune étude ne permet de recommander une classe thérapeutique plutôt qu’une autre.
Le choix d’une molécule plutôt qu’une autre dépendra en pratique de l’évaluation
bénéfice-risque et de l’information du patient.
3. Le suivi sous traitement
La prescription d’un traitement médical devra être réévaluée après un délai de 3 mois
pour juger de l’efficacité et de la tolérance des effets secondaires. Cette réévaluation
portera sur les mêmes éléments que ceux du bilan initial. En cas d’inefficacité ou de
mauvaise tolérance une autre molécule pourra être proposée et sera elle aussi réévaluée
de la même façon. En cas d’inefficacité persistante ou de mauvaise tolérance réitérée, il
faudra proposer au patient un traitement chirurgical et l’adresser à l’urologue.
C. Le patient présente des complications
Cette situation sous-tend le plus souvent une prise en charge chirurgicale soit du fait de
l’HBP soit de celui des diagnostics différentiels évoqués ci-dessus et le patient devra être
référé à un urologue.
L’objet de ce cours ne portera pas sur le traitement spécifique des diagnostics
différentiels évoqué en début de chapitre mais uniquement sur les traitements de l’HBP.
1. Rappelons les indications du traitement chirurgical
La chirurgie peut être proposée en seconde intention aux patients ayant des SBAU liés à
une HBP gênants et pour lesquels le traitement médical bien conduit est soit
insuffisamment efficace, soit mal toléré.
La chirurgie est recommandée d’emblée en cas d’HBP responsable d’une insuffisance
rénale obstructive, d’une rétention aiguë récidivante malgré un traitement alphabloquant, d’une rétention aiguë d’urine avec échec de sevrage de drainage vésicale,
d’une hématurie macroscopique récidivante, d’infections urinaires récidivantes, d’une
lithiase vésicale, ou d’une incontinence urinaire par regorgement.
Un premier épisode de rétention aiguë d’urine avec sevrage de sonde, d’hématurie ou
d’infection urinaire ne constitue pas une indication chirurgicale formelle.
La simple présence de diverticules vésicaux ne constitue pas une indication chirurgicale,
sauf si leur présence entraîne des infections urinaires à répétition. De même, les signes
morphologiques de vessie de lutte ou la présence d’un résidu post-mictionnel non
compliqué ne constituent pas à eux seuls des indications chirurgicales.
2. Les traitements chirurgicaux de référence
a. La résection transurétrale électrique de la prostate (RTUP)
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Le principe de cette intervention consiste à découper en copeaux par voie transurétrale
l’HBP grâce au courant électrique. Plusieurs techniques sont disponibles.
- La RTUP monopolaire.
La RTUP est la technique endoscopique dont le suivi clinique est le plus important. Elle
entraîne une amélioration moyenne de 71 % des SBAU et de 120 % du débit urinaire
maximum (niveau de preuve Ia). Les résultats fonctionnels à court et moyen termes sont
similaires à ceux des autres techniques chirurgicales endoscopiques (niveau de preuve
Ia). Les taux rapportés de retraitement après une première RTUP sont de 12 à 15 % à
huit ans (niveau de preuve IIb).La RTUP monopolaire est une technique validée en cas de
volume prostatique inférieur à 80mL voire plus pour des opérateurs expérimentés.
Les complications habituelles sont l’hémorragie per ou post-opératoire, le syndrome de
réabsorption du liquide d’irrigation (glycocolle), la sténose de l’urètre ou la sclérose de
loge prostatique.
- La RTUP bipolaire.
La RTUP bipolaire est réalisée dans du sérum physiologique et n’entraîne donc pas de
syndrome de résection trans-urétrale. Les études disponibles n’ont pas permis pour
l’instant de démontrer une diminution du risque hémorragique par rapport à la RTUP
monopolaire (niveau de preuve Ia). Les résultats fonctionnels à court terme sont
similaires à ceux de la RTUP monopolaire (niveau de preuve Ia).
b. L’incision cervico-prostatique (ICP)
L’ICP consiste à faire une incision par simple section ou résection allant d’un méat
urétéral jusqu’au veru montanum. Le flux urinaire est ainsi amélioré lors de la miction,
l’opération est moins longue et provoque moins de saignement et l’éjaculationrétrograde
est évitée le plus souvent. Les études randomisées ayant comparé la RTUP monopolaire à
l’incision cervico-prostatique (ICP) n’ont pas montré de différence significative en termes
de résultat fonctionnel chez les patients ayant une prostate de petit volume (<30mL) et
sans lobe médian (niveau de preuve Ia). Le risque de réintervention est néanmoins plus
élevé après ICP (17 % versus 9 %) (niveau de preuve Ia). L’ICP est la technique de
choix chez les patients jeunes et/ou souhaitant conserver une éjaculation. Elle est
possible en cas de volume prostatique inférieur à 30mL et en l’absence de lobe médian.
c. L’adénomectomie par voie haute (AVH)
Par rapport aux techniques chirurgicales réalisées par voie trans-urétrale, l’AVH permet
l’extraction la plus anatomique du tissu adénomateux grâce à une énucléation faite au
doigt passant dans le plan exact entre l’HBP et la prostate périphérique. Les résultats
fonctionnels sont durables, avec un risque de réintervention quasi-nul à cinq ans (niveau
de preuve Ib). Néanmoins, cette intervention est associée à une morbidité significative
notamment hémorragique (niveau de preuve IIb). L’AVH est une technique adaptée en
cas de volume prostatique supérieur à 60mL.
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3. Les traitements chirurgicaux alternatifs
a. La chirurgie endoscopique utilisant le laser
Trois techniques ont été validées par des études comparatives, prospectives et
randomisées : il s’agit de l’énucléation par laser Holmium YAG (HoLEP), de la
photovaporisation en longueur d’onde 532nm (PVP), et plus récemment de la résection
au laser Thulium.
a.1. La photovaporisation de la prostate (PVP)
Le laser utilisable est un laser KTP ou LBO. La PVP a un avantage sur la RTUP et l’AVH en
termes de taux de transfusion et de durée d’hospitalisation (niveau de preuve Ia). Le
taux de réintervention pourrait être supérieur à celui de la RTUP. La PVP pourrait être
utilisée préférentiellement chez les patients à risque hémorragique (niveau de preuve 4).
La PVP est une alternative à la RTUP monopolaire et à l’AVH notamment en cas de risque
hémorragique élevé.
a.2. L’énucléation par laser Holmium (HoLEP)
Les résultats fonctionnels de l’HoLEP sont équivalents à ceux de la RTUP monopolaire à
quatre ans (niveau de preuve Ia), à ceux de l’AVH à cinq ans (niveau de preuve Ib). Pour
des volumes supérieurs à 60mL, la désobstruction semble plus complète après Holep que
PVP, (niveau de preuve 2). L’Holep comporte un avantage sur la RTUP et l’AVH en termes
de durées de sondage et d’hospitalisation (niveau de preuve Ia) et de risque de
transfusion (niveau de preuve Ia). L’HoLEP est une alternative endoscopique à la RTUP
monopolaire et à l’AVH.
a.3. La résection au laser Thulium
Les résultats fonctionnels précoces de la résection laser au Thulium ont été jugés
similaires à ceux de la RTUP monopolaire, avec un avantage potentiel en termes de durée
de sondage vésical, de risque de saignement, et de durée d’hospitalisation (niveau de
preuve Ib).
b. La vaporisation transurétrale électrique de la prostate (VTUP)
La VTUP consiste à vaporiser le tissu prostatique à l’aide d’un courant électrique de forte
intensité. Elle est une alternative possible à la RTUP monopolaire.
c. Les techniques miniinvasives
Elles regroupent la thermothérapie par micro-onde, (TUMT), la radiofréquence (TUNA) et
les prothèses urétrales.
• La TUMT n’est pas développée en France. C’est une alternative à la RTUP monopolaire
mais avec une efficacité moindre (GradeA). Cette technique peut aussi être utilisée
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comme alternative au traitement alpha-bloquant au long cours chez les patients n’ayant
pas d’antécédent de rétention d’urine.
• Le TUNA peut être une alternative au traitement médical par alpha-bloquants au long
cours.
• Les prothèses urétrales permanentes n’ont plus d’indication en raison de leur
morbidité (grade de recommandation C). Les prothèses urétrales temporaires peuvent
être proposées comme alternative au sondage vésical à demeure en cas de contreindication chirurgicale.
d. Les techniques émergentes sont des techniques encore en cours d’évaluation et
sont représentées par l’injection intraprostatique de toxine botulique et l’injection
intraprostatique d’ethanol.
4. Le choix de la technique chirurgicale
Ce choix dépendra de nombreux facteurs dont l’équipement de l’établissement de santé,
l’expérience du chirurgien et certains facteurs liés au patient (risque hémorragique). Les
techniques de référence décrites ci-dessus restent d’actualité mais certaines techniques
alternatives comme la vaporisation ou l’énucléation laser prennent de plus en plus de
place.
VII. CONCLUSION
L’HBP est une maladie bénigne fréquente qui se manifeste par des SBAU et occasionne
parfois des complications. Un bilan clinique et paraclinique rigoureux est nécessaire pour
orienter au mieux les indications thérapeutiques qui seront médicales ou chirurgicales.
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