Ecriture et mise en scène : Benjamin Groetzinger
Comédiens : Elsa Verdon, Antoine Besson
« Des corps » scénographiques : Simon Teissier, Pablo Jupin, Luca Fiorello
Musiciens : Johan Boutin (piano), Marceau Beyer (violoncelle).
Costumes : Eloïse Simonis.
Lumière et régie : Gaspard Charreton.
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9m²
est né d’une réexion sur la solitude, l’isolement, le cloisonnement des
êtres. De cette réexion a surgi l’écriture du texte qui met en scène un homme
seul (« Lui » joué par Antoine Besson) dans un huis-clos de neuf mètres carrés.
C’est entre les murs de son studio que se heurtent et s’entrechoquent ses an-
goisses, ses peurs et ses névroses. Pour s’abstraire du cercle vicieux de l’ennui
et de ses inquiétudes, Lui s’invente un personnage féminin (« Solange » jouée
par Elsa Verdon). Ce fantasme va l’accompagner tout au long de la pièce et
incarner toutes les images féminines qui lui construisent un chemin initiatique
(La femme, la mère, la collègue de travail...)
Ce texte est aussi le lieu de réexion sur le besoin de distraction pour échap-
per à l’angoisse que nous apportent nos « grandes questions ». Pourquoi moi
ici et maintenant ? Qu’est-ce que la mort ? Qu’est ce que le temps ? Et bien
d’autres.
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m²
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Note diNteNtioN
« Il y a une idée du spectacle intégral à faire renaître. Le problème est de faire parler, de nourrir et de meubler
l’espace ; comme des mines introduites dans une muraille de roches planes, et qui feraient naître tout à coup des
geysers et des bouquets ». C’est dans cette idée développée par Antonin Artaud que j’essaie de travailler en utilisant
toute la matière dont nous disposons (musiciens, comédiens, costumes, lumières...) comme outils implantés et coor-
donnés dans l’espace pour qu’il puisse jaillir des artices de notre machine théâtrale.
Lenvie nest pas de mettre en scène un texte mais plutôt de penser, de discuter, remanier une idée première puis un
texte avec l’équipe qui m’accompagne. La démarche du début de travail est de centrer chacun d’entre nous sur une
base, un point de départ commun, puis de voir comment par les réponses relatives aux diérents corps de métier,
nous pourrons voyager, interroger d’autant plus cette base : le texte.
Sachant que je voulais uniquement des matériaux créés par nous-mêmes, nous avons donc remanié, réécrit, cham-
boulé ou coupé le texte d’origine.
Le décor est pris en charge par « des corps » scénographiques, c’est-à-dire des corps qui construisent l’espace, en es-
sayant toujours d’épurer ou de supprimer au maximum l’apport d’objets extérieurs. Ils sont les fantasmes consom-
més de « Lui » et condamnés à errer dans son esprit, relégués au statut de régisseurs ou décors de son imaginaire alors
que Solange en est l’actrice principale.
Le décor musical (morceaux, improvisations ou bruitages) est écrit pendant les répétitions en nous eorçant d’éviter
au maximum les partitions existantes. Il est les sons, les grincements, les illusions sonores du 9m2.
Le travail est l’exhibition d’une solitude, non pas celle due à un certain milieu social ou due à tel ou tel échec mais
de la solitude en ce quelle a d’universel. La volonté nest pas de raconter la petite histoire d’un pauvre monsieur
solitaire, mais plutôt de donner à voir un moment de la machine infernale de son ennui, sans jugement social ou
psychologique.
Nous nous sommes tournés au fur et à mesure vers un théâtre qui donne à observer ces mécanismes et qui laisse
libre le public de prendre ce qui lui parvient plutôt que d’aller vers un théâtre narratif, qui se construit au l d’intrigues
et de situations dénies. Le public est introduit comme observateur.
Le rapport que je cherche à certains moments est celui qu’instaure Bruno Meyssat dans plusieurs de ses specta-
cles et notamment dans Observer. Il donne de nombreux éléments de décor plus ou moins parlants, plus ou moins
explicites des situations de jeu sans jamais donner de réponse claire à la présence de ces objets. C’est au spectateur
« d’observer » et de se construire son spectacle. Lenjeu est de donner le moins de clés possibles pour ouvrir au
maximum les possibilités du contenu sans pour autant perdre totalement le spectateur dans une simple accumula-
tion d’images.
Par ce spectacle, nous souhaitons orir un temps pour se questionner sur deux thématiques principales :
l’enfermement et la notion de fantasme.
L’ambition d’utiliser essentiellement notre propre matière suivant nos
différentes aptitudes et d’en dégager la théâtralité.
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Lui, de par son cloisonnement constant, apparaît comme un jeune homme
en « retard » pour son âge sur quelques notions communes à chacun, notam-
ment la sexualité. Le questionnement de la sexualité ou plutôt de labsence
de sexualité est donc très présent dans la formation du fantasme. Comme une
sorte d’obnubilation adolescente.
Cependant, Lui bien que parfois très vulgaire voir obsédé, pratique la poésie
de l’enfermement, sa poésie naïve, unique et confrontée à aucune autre. Elle
est libérée de tous jugements et de toutes prétentions. Il la laisse exploser et
jaillir sans avoir de compte à rendre à personne sans avoir peur du regard des
autres mis à part d’un public « imaginaire ».
Nous voulions un regard assez simple sur l’enfermement et souhaitions,
avant toutes tentatives d’explications sociale ou psychologique (exclusion,
mutisme, autisme...) imaginer un « monsieur tout le monde » dans une soli-
tude que chacun pourrait éprouver.
En enfermant le comédien principal dans un 9m², nous l’introduisons incon-
sciemment dans une cellule de prison (les cellules de prisons ayant exacte-
ment la même confoguration). Lemprisonnement, au sens propre ou guré a
donc été une piste de recherche dans le travail. En limitant l’espace de jeu à ces
dimensions nous ne cherchons pas à trouver l’état de confort du cocon, du ref-
uge douillet et agréable, mais plutôt celui du trop petit, de la torture physique
et psychologique. Souvent Lui se retrouve confronté voir acculé à ses propres
murs (cloisonnement de l’être et de l’esprit).
Lenfermement :
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Le f a n t a s m e :
En essayant de résumer, quand on parle de fantasme, on peut parler de trois
formes diérentes : le fantasme sexuel (analysé par Freud comme un « scé-
nario érotique imaginaire ou non ») ainsi que le fantasme psychologique.
Pour cela nous nous sommes intéressés à la dénition du psychologue amé-
ricain Gregory Bateson qui dénit le fantasme comme : « une activité ludique
imaginaire d’un jeu théâtral où chacun est à la fois l’auteur, l’acteur et le metteur
en scène. »
Et le fantasme comme objet. Celui-ci, est utilisé dans de nombreux médias
textes, lms, photos... On peut prendre l’exemple des Sirènes d’Ulysse. On voit
dans cet aspect une forme idéalisée de l’image que l’on se fait de l’être ou de
l’objet. Dans cette troisième idée du fantasme nous retrouvons à chaque fois
les notions suivantes :
un être imaginé
un être sublimé
un être articiel (orné dartices).
Par ce spectacle nous mettons en scène successivement ces trois notions,
les entremêlant, les croisant, les opposant. Parfois il nest que désir sexuel,
parfois pur délire de limaginaire, et d’autres fois, contemplation béate d’un
objet inédit et rêvé.
Pour rester proche de notre contemporanéité, nous avons parcouru les dié-
rentes images de la femme que nous avons dans notre imaginaire commun. La
peinture (les femmes de Klimt), le cinéma (Marylin Monroe), la mode (Twiggy)
ou encore la publicité (Kate Moss) et internet. Ainsi, il nous a semblé juste de
travailler le fantasme comme une image sophistiquée, traquée, irréelle.
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