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ChristianBachelier,«LaSNCFsousl’Occupationallemande1940‐1944»,Rapportdocumentaire,1996
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Major à Polytechnique en 1923, Bichelonne avait obtenu une moyenne de 19,75 sur 20 aux
examens d'entrée, dépassant le record de 19 sur 20 détenu depuis 1803 par François Arago. Il
sort d'X premier en 1925 et entre à l'École des Mines de Paris en 1926. Ingénieur ordinaire du
corps des Mines, il est affecté en juillet 1927 à l'arrondissement minéralogique de Nancy.
Le chemin de fer a constitué une étape dans sa carrière : il a été, un temps, affecté à la
direction du contrôle de l'exploitation technique des chemins de fer au ministère des Travaux
publics, puis nommé secrétaire de la commission centrale des machines à vapeur et, au 1er
janvier 1937, adjoint du directeur général des Chemins de fer. Il occupe les fonctions de
directeur des services techniques dans le cabinet d’Henri Queuille, ministre des Travaux
public, et, à ce titre, participe aux négociations aboutissant à la création de la SNCF.
En décembre 1938, il participe, avec, entre autres, Raoul Dautry, Albert Caquot, Auguste
Detœuf, Paul Langevin, Ernest Mercier, Frédéric Joliot-Curie, au Haut Comité de
Coordination des Recherches scientifiques, dirigé par Jean Perrin. À la déclaration de guerre,
il reçoit, le 13 septembre 1939, une affectation spéciale comme directeur du cabinet technique
de Dautry, ministre de l'Armement. En mai 1940, il est chargé de superviser le repli des
usines de l'Est. Selon son biographe, Rémi Baudouï, fin mai, "Bichelonne semble supplier
Dautry de proposer au gouvernement de changer de camp, de passer dans celui de
l'Allemagne et satisfaire celle-ci avec des parties de l'Empire britannique. (4)" Dans les
derniers jours de son cabinet, Dautry donne l'ordre aux savants atomiciens, Halban et
Kowarski, de s'embarquer pour "poursuivre en Angleterre les recherches entreprises au
Collège de France". Le 17 juin, Bichelonne aurait alors demandé s'il était obligé de les suivre,
ce à quoi Dautry l'en aurait remis à sa propre conscience. (5)
Contrairement à Jean Berthelot, un autre brillant polytechnicien, qui a fait toute sa carrière
"dans les services publics", le "major des majors", Bichelonne, a connu la haute
administration et l'industrie privée, et plus particulièrement la métallurgie. Selon Jules
Antonini, du secrétariat général de la SNCF et proche de Dautry, la nomination de Bichelonne
au cabinet du ministre de l'Armement aurait été motivée par ses liens familiaux avec les
milieux industriels (6). Bichelonne avait, en effet, épousé en 1934 Raymonde Dondelinger,
fille de l'administrateur-délégué de la Société métallurgique de Senelle-Maubeuge, société où
le superpolytechnicien occupa les responsabilités de directeur. Ces relations avec les
métallurgistes sont activées lorsqu'il occupe de hautes fonctions à Vichy, ainsi est-il
notamment en liaison avec Eugène Roy, directeur général des Établissements sidérurgiques de
Longwy, vice-président délégué général du Comité d'Organisation de la Sidérurgie
(CORSID), successeur du Comité des Forges, et dirigeant du Comité d'Organisation de
l'industrie de construction du matériel ferroviaire (MATFER), qui, par ailleurs, est lié à la
Résistance et, en 1946, présidera la Commission de la sidérurgie du plan Monnet (7). Ainsi
Bichelonne, alors secrétaire général à la Production industrielle, participe, avec Roy, aux
entretiens du 2 décembre 1941 avec Berthelot sur l'organisation des industries de construction
de matériel de Chemin de fer qui aboutit à un protocole établissant une collaboration entre la
SNCF et le Comité MATFER pour la passation des commandes de matériel de chemin de fer.
Résumant cet entretien, Berthelot constate :
"Nous plaçant dans certaines hypothèses, nous arrivons à cette conclusion qu'il est
possible que, à la paix, la France soit obligée, dans un délai très réduit de construire un
nombre très considérable de wagons et de locomotives : par exemple, je cite les chiffres de
200.000 wagons et 3.000 locomotives en 5 ans. (8)"