TONUS ET TOUCHER PSYCHOTONIQUE CORINNE ARNI Wavre W 2010/2 – Mars 2010 1. Introduction Comment le toucher en fasciathérapie met-il en jeu le corps et le psychisme au sein d’un même geste thérapeutique ? Le tonus en tant qu’activité physiologique : gestion et coordination des mouvements Le tonus en tant qu’activité psychologique : mode de communication non-verbale avec soi et autrui Le tonus en fasciathérapie : toucher psychotonique au centre de la relation thérapeutique 1 2. Aspects neurophysiologiques du tonus 2.1 Neurophysiologie du tonus Définition du tonus : « Etat permanent d’activité fondamentale des muscles lisses et striés et de certains centres nerveux. » Dictionnaire des termes techniques de médecine, 1986, GarnierDelamare, Maloine Boucle réflexe myotatique La boucle réflexe myotatique permet d’entretenir un état de tension musculaire. Elle consiste en la contraction réflexe d’un muscle en réponse à son allongement (via le fuseau neuromusculaire). Ce réflexe est à l’origine du tonus musculaire. 2 Fuseau neuromusculaire Innervation du fuseau neuromusculaire 3 Innervation motrice du fuseau neuromusculaire : α (boucle myotatique) : réglage de la tension du muscle Motoneurone γ : contraction/relâchement des parties distales des fibres musculaires intrafusales afin de conserver un étirement des fibres intrafusales pour maintenir sa sensibilité Motoneurone Organisation du tonus musculaire Le tonus musculaire s’organise de deux manières : une voie afférente, sensorielle : intéroception, proprioception et extéroception une voie efférente, motrice supra-spinale : réflexes labyrinthiques, tractus réticulo-spinal, voies pyramidales, cervelet, noyaux gris centraux… 4 2.2 Différents types de tonus Tonus de base Tonus qui permet aux muscles d’être prêts à répondre à une stimulation Tonus postural Fonction antigravitaire de la posture Contrôle de l’équilibre Deux systèmes interviennent dans la stabilité posturale : Tonus d’anticipation ou proactif Tonus qui s’adapte au mouvement à venir, avant l’effectuation du geste Tonus d’accommodation ou rétroactif Tonus qui s’adapte au mouvement en cours et qui corrige les « erreurs » 5 2.3 Evénements qui influencent le tonus Intention de bouger : modulation tonique s’organise dès l’intention pour préparer le corps à s’adapter à la gravité Émotions et pensées : tout événement psychique modifie le tonus Stress : non réversibilité du tonus est pathologique Douleur : hypertonie, qui a une fonction antalgique, s’installe face à la douleur Perception sensorielle : les sens influencent le tonus Toucher le tonus, c’est toucher aux tensions musculaires et au comportement 3. Aspects psychologiques du tonus Le tonus comme lieu d’expression psychoaffective (Henri Wallon) Le bébé s’exprime dès l’âge de 3 mois par des émotions qui mettent en jeu des contractions musculaires toniques Le tonus témoigne de l’état interne de la personne 6 Le tonus comme fonction de communication non verbale : le dialogue tonique Le tonus est un mode d’expression de son état intérieur : le bébé exerce une action sur autrui Le tonus est un moyen d’éprouver dans son corps les états internes d’autres personnes : le bébé assimile soi et autrui La fonction tonique est la fonction primitive essentielle de communication (J. de Ajuriaguerra). Le dialogue tonique est le jeu de tonus musculaire qui accompagne les affects Le tonus participe à l’élaboration de l’identité de soi et d’autrui C’est à travers le tonus que le bébé se ressent comme individu Chez l’adulte, le tonus participe au développement de la personnalité 7 En résumé, le tonus est : Substrat physiologique des émotions Facteur de relation à autrui Support de construction du schéma corporel et de l’identité Un lien entre corps et psychisme 5. Le psychotonus en fasciathérapie Trilogie corps / tonus / psychisme Le tonus est à l’interface entre corps et psychisme La fasciathérapie privilégie le toucher pour restaurer une adaptation tonique 8 Le toucher psychotonique Toucher qui met simultanément en jeu le corps et le psychisme de la personne Entretien tissulaire via le tonus La modulation psychotonique modifie les attitudes et les comportements de la personne 4.1 Le toucher psychotonique : conditions d’accès à la modulation tonique Silence tonique : mettre les différents tonus au repos pour que le psychotonus se révèle Le contre-pied tonique : le corps doit gérer une situation de mobilité alors qu’il ne bouge pas Phase dynamique d’étirement Étirement tissulaire au sein d’un mouvement linéaire Lenteur : le mouvement lent bénéficie d’une assistance proprioceptive continue tout au long de son exécution Patient est passif, sans intention de bouger Sans déplacement des segments 9 Phase statique du point d’appui Immobilité créée par le thérapeute dans l’objectif de solliciter le potentiel de vitalité du patient Trois temps au sein du point d’appui : Un temps d’apparition du psychotonus Un temps de contagion tonique Un temps d’effondrement tonique • En conclusion : le psychotonus Le psychotonus prend en compte la dimension physiologique et psychologique de l’activité tonique Le psychotonus est un mode de communication non verbale et est le support de l’identité Le psychotonus est présent dans tout le corps : le psychotonus ne se limite pas aux différentes formes de tonus musculaire Le psychotonus est un système d’adaptation du corps face aux événements Le psychotonus est le support organique de la force de résilience 10 Bibliographie Austry, D. & Berger, E. (2000). Le mouvement : action et sensation. Paris : Editions Point d’Appui. Collet, C. (2002). Mouvements & cerveau : Neurophysiologie des activités physiques et sportives. Paris : De Boeck Université. Courraud, C. (2007). Toucher psychotonique et relation d’aide. Mestrado en psychopédagogie pereptive. Université Moderne de Lisbonne. Courraud, C. (2009). Le point d’appui à l’Etre. In D. Bois & M. Humpich (sous la direction de), Vers l’accomplissement de l’être humain. Ivry-sur-Seine : Editions Point d’Appui, p. 201-209 Courraud-Bourhis, H. (2002). Le sens de l’équilibre : éléments de neurophysiologie appliqués à la rééducation sensorielle. Paris : Editions Point d’Appui. De Ajuriaguerra, J. (1962). Le corps comme relation. Revue Suisse de Psychologie, volume XXI. Bern & Stuttgart : Hans Huber, p. 137-157. Massion, J. (1997). Cerveau et motricité : Fonctions sensorimotrices. Paris : PUF. Richard, D. & Orsal, D. (1994). Neurophysiologie : Motricité et grandes fonctions du système nerveux central, tome 2. Paris : Nathan. 11 Wallon, H. (2002). L’évolution psychologique de l’enfant. 11e édition. Paris : Armand Colin. Zazzo, R. (1975). Psychologie et marxisme : la vie et l’œuvre de Henri Wallon. Editions Denoël / Gonthier. 12