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Neuroradiologie interventionnelle pour une pathologie vasculaire : Prise en
charge des complications immédiates et retardées.
Pr N. Bruder*, Dr O. Lévrier**
*DAR, CHU Timone, Marseille
** Service de Neuroradiologie
La radiologie interventionnelle est souvent considérée par les patients et par les anesthésistes
comme un acte anodin et sans risque du fait de l’absence d’incision large des tissus. Cette idée
optimiste des conséquences de la radiologie interventionnelle est certainement fausse. Les
complications existent comme au bloc opératoire même si elles sont parfois de nature
différente. Il ne faut donc certainement pas minimiser la prise en charge des patients et
considérer qu’un acte thérapeutique pratique en salle de radiologie est équivalent, en terme de
risques et de prise en charge anesthésique, à une intervention chirurgicale pratiquée au bloc
opératoire.
La morbidité des procédures de neuroradiologie interventionnelle est comprise entre 10 % et
20 % et la mortalité entre 1 et 4 %.(1-7). Le risque de complication dépend du type de
procédure, de la pathologie sous jacente des patients et des comorbidités principalement chez
les patients justifiant un traitement d’urgence. On peut distinguer les complications
immédiates survenant pendant le geste et les complications survenant après le réveil, dans la
grande majorité des cas pendant les 24 premières heures. Les deux principales complications
sont l’hémorragie liée à la perforation ou la rupture vasculaire et la thrombose, immédiate ou
retardée, liée à la présence de matériel endovasculaire et aux lésions de l’endothélium. Pour le
traitement des anévrysmes intracrâniens la fréquence des séquelles définitives et de la
mortalité est de 3,7 %(8). Pour les malformations artério-veineuses, la mortalité est de 1,6 %
et la morbidité de 12,8 % dans une étude(2). Les complications liées à l’anesthésie sont rares
mais certaines techniques comme l’hypotension contrôlée comportent un risque spécifique.
1
Complications immédiates
1.1 Complications hémorragiques
Le risque de rupture anévrysmale pendant le traitement endovasculaire est de 2,5 %(8,9).
Cette rupture est responsable de décès dans 1 % des cas. Le risque de rupture est plus élevé
chez les patients ayant souffert d’une hémorragie méningée préalablement au traitement,
lorsque l’anévrysme est de petite taille et lorsqu’un ballon d’occlusion artérielle temporaire
est utilisé. Cette rupture intervient le plus souvent en cours de procédure lorsque le patient est
fortement anticoagulé par de l’héparine. La gravité de cette complication résulte d’une part de
cette anticoagulation d’autre part du retard diagnostic éventuel lié à l’absence de saignement
extériorisé. En effet, chez un patient sous anesthésie générale, l’hémorragie liée à la rupture
anévrysmale se traduit par un syndrome d’hypertension intracrânienne. Les signes cliniques
initiaux sont une poussée hypertensive sévère et une bradycardie (figure 1).
figure 1 : bradycardie lors d’un resaignement anévrysmal
Cette réaction peut être interprétée à tort comme un réveil per-anesthésique conduisant à une
attitude anesthésique inadaptée. Devant ces signes la priorité est, encore plus qu’au bloc
opératoire, de communiquer avec le neuroradiologue. L’injection de produit de contraste
permet immédiatement d’affirmer la fuite extravasculaire ou au contraire d’éliminer
l’hypothèse d’une rupture. La conduite anesthésique est schématisée dans le tableau 1(10).
Tableau 1 : prise en charge d’une hémorragie intracrânienne en salle de neuroradiologie
Immédiatement
Dans un second temps
Prévenir le radiologue
Occlure l’anévrysme le plus rapidement possible
Appeler de l’aide
Mannitol 0,5 g/kg rapidement
Ventiler avec 100 % d’O2
Thiopental pour le contrôle de la pression
Antagonisation immédiate de l’héparine
(1 mg de protamine pour 100 U
artérielle
d’héparine)
Ne pas injecter d’antihypertenseur
Hyperventilation (PaCO2 26 – 30 mm Hg)
Favoriser une hypothermie modérée (34 °C)
Se préparer à un transfert au bloc opératoire
La protamine doit être prête pour permettre une antagonisation immédiate de l’héparine.
L’objectif est d’occlure le plus rapidement possible l’anévrysme pour arrêter le saignement,
tout en préservant la circulation cérébrale. Un bon moyen de limiter l’hypertension tout en
maintenant la pression de perfusion cérébrale est l’injection d’un bolus de thiopental (5
mg/kg). Le mannitol, l’hypothermie voire parfois le drainage ventriculaire externe en urgence
peuvent être indiqué pour le contrôle de l’hypertension intracrânienne. Après la procédure, la
TDM cérébrale permet d’évaluer l’importance de l’hémorragie et de la fuite de produit de
contraste dans les espaces méningés (figure 2)
.Figure 2 : Importante extravasation de produit de contraste dans les espaces méningés
Lors du traitement des MAV cérébrales, le risque hémorragique prédomine dans les suites de
la procédure et est rare pendant l’embolisation. Globalement, le risque hémorragique est
estimé autour de 3 %(11). Les causes d’hémorragie sont multiples. Il peut s’agir de la rupture
d’un anévrysme de flux qui se développe sur le pédicule afférent à la MAV. Dans ce cas les
signes cliniques et l’attitude est la même que pour le traitement des anévrysmes intracrâniens.
Il peut s’agir d’une lésion traumatique par le guide ou le microcathéter. Ceci provoque en
général une hémorragie minime qui s’arrête spontanément. La rupture de la MAV pendant la
procédure peut avoir plusieurs causes. Massoud et coll.(11) individualisent 5 causes de
rupture :
-
la redistribution du flux sanguin à l’intérieur du nidus de la MAV lors d’une
embolisation partielle, provoquant une augmentation de la pression à l’intérieur de
vaisseaux fragiles
-
la redistribution extranidale du flux sanguin provoquant une augmentation de la
pression des vaisseaux afférents qui se transmet à la partie non occluse de la MAV
-
l’extension de la diffusion de la colle utilisée pour l’embolisation aux veines de
drainage
-
la stase veineuse et une thrombose veineuse retardée
-
l’augmentation de la pression intravasculaire lors de l’injection du matériel
d’embolisation
L’hypotension artérielle systémique pourrait diminuer le risque hémorragique pendant la
procédure en limitant l’augmentation de la pression à l’intérieur de la MAV.
Enfin, l’hémorragie peut être liée à la rupture artérielle lors de l’angioplastie intracrânienne
réalisée pour traiter un vasospasme ou une sténose athéromateuse. Cette complication est
heureusement exceptionnelle car il n’y a aucun moyen d’arrêter l’hémorragie.
1.2 Complications thrombo-emboliques
1.2.1 Risque thrombo-embolique
Les complications thromboemboliques sont probablement les plus fréquentes des
complications graves en neuroradiologie interventionnelle. Le risque de thrombose est lié à
l’agression de l’endothélium vasculaire lors des manœuvres de cathétérisme, au produit de
contraste et au matériel d’embolisation utilisé et aux cathéters(12). Dans une revue générale
récente, le risque thrombo-embolique immédiat et retardé chez les patients bénéficiant d’une
embolisation d’un anévrysme par coils était de 8,2 %(13). Le risque est important dans les 48
premières heures puis décroît pour devenir très faible après la quatrième semaine et
probablement quasi nul après 2 mois(14). Chez les patients bénéficiant d’une angioplastie
carotidienne avec stenting, le risque de thrombose symptomatique était de 8,8 % comprenant
environ un tiers d’accidents ischémiques transitoires et deux tiers d’accidents vasculaires
définitifs. L’embolisation des MAV cérébrales était associée à un risque de thrombose de 9,4
% par procédure endovasculaire. En raison d’un nombre souvent important de procédure pour
chaque patient, le risque par patient était de 21 %. Sur les 1011 patients ayant été traités, il
apparaissait 58 accidents ischémiques transitoires et 155 accidents vasculaires cérébraux dont
62 avec une mauvaise récupération neurologique. Le risque associé à l’occlusion vasculaire
de l’artère afférente à l’anévrysme par ballon est de 19 %. Cependant, les études sur
l’occlusion endovasculaire pour le traitement des anévrysmes sont pour la plupart anciennes
et le risque actuel des procédures est probablement moins élevé.
Ces études rapportent le taux de complications symptomatiques ou de thrombose évidente
pendant la procédure. Cependant, le risque embolique lors de la procédure est certainement
plus élevé. Dans une étude utilisant l’IRM de diffusion dans les 48 heures qui suivaient le
traitement endovasculaire d’un anévrysme chez 14 patients, le taux de lésions emboliques
asymptomatiques était de 61 %. L’origine de ces accidents embolique est multiple :
dislocation d’une plaque athéromateuse pendant le cathétérisme, dissection iatrogène d’un
vaisseaux source d’embolies ultérieures, thrombus anévrysmal préexistant à la procédure,
thrombose au contact des cathéters ou des coils, injection de micro bulles d’air pendant la
procédure.
1.2.2 Prévention de la thrombose pendant la procédure
La principale méthode de prévention du risque est le maintien d’une anticoagulation efficace
pendant toute la procédure par l’héparine. Le monitorage de l’anticoagulation repose sur la
mesure du temps de coagulation activé (TC) réalisé en salle d’angiographie, 10 minutes après
l’injection d’héparine puis toutes les heures. Pour les procédures associées à une lésion
endothéliale artérielle profonde et extensive (angioplastie) ou à une stase vasculaire prolongée
(occlusion par ballon), le TC doit être compris entre 300 et 350 s car le risque thrombogène
est élevé et le risque hémorragique faible. Pour les autres procédures (embolisation d’un
anévrysme ou d’une MAV) un TC compris entre 250 et 300 s est suffisant.
L’adjonction d’un traitement antiplaquettaire au traitement par héparine diminue clairement le
risque thrombo-embolique comme cela a été démontré pour les procédure intracoronaires.
L’avantage d’associer un traitement antiplaquettaire pour diminuer le risque thrombotique est
à mettre en balance avec le risque hémorragique. L’association d’héparine, d’aspirine, et de
clopidogrel voire d’abciximab comporte un risque d’hémorragie grave(15). Ce risque est à
rapprocher des complications hémorragiques très fréquentes rencontrées au début des années
1990 avec l’association d’aspirine, de dipyridamole, de dextrans, d’héparine et
d’antivitamines K pour la mise en place de stents corononaires. Le protocole antithrombotique
doit donc être adapté à la procédure.
1.2.2.1
Embolisation d’un anévrysme par coils type GDC
Pour un traitement réalisé en urgence après hémorragie méningée, l’héparine devrait être
administrée lors du déploiement du premier coil à l’intérieur du sac anévrysmal. La dose
initiale d’héparine est de 100 U/kg initialement éventuellement augmentée pour obtenir un TC
entre 250 et 300 s. Un contrôle horaire est obligatoire pour maintenir une anticoagulation
efficace. La protamine doit être prête en cas de saignement anévrysmal. En l’absence de
complication, l’anticoagulation n’est pas antagonisée à la fin de la procédure
Pour le traitement d’un anévrysme n’ayant pas saigné, le risque hémorragique est nettement
moindre. Ceci justifie l’administration de l’héparine dès que la ponction fémorale a été
effectuée. Un traitement antiagrégeant par aspirine ou clopidogrel peut être institué avant la
procédure. Le plus souvent le traitement antiagrégeant est débuté après l’embolisation.
Lorsque le traitement consiste en l’occlusion du vaisseau porteur, le TC doit être maintenu
entre 300 et 350 s et un traitement antiagrégeant est utile.
1.2.2.2
Embolisation des MAV
Les complications thrombotiques sont en général moins graves dans les MAV que pour les
anévrysmes. L’anticoagulation initiale est moins importante et un bolus de 70 U/kg est
suffisant. En l’absence de complication, une antagonisation par la protamine est souhaitable à
la fin de la procédure compte tenu du risque hémorragique secondaire.
1.2.2.3
Angioplastie carotidienne et cérébrale
Le risque thrombo-embolique est majeur. L’association de fortes doses d’héparine et
d’antiagrégeant est indiquée. Le clopidogrel (Plavix) seul ou associé à l’aspirine est débuté
au moins 72 heures avant la procédure. Pendant la procédure, le TC doit être maintenu au-delà
de 300 s. Certains auteurs utilisent l’abciximab à titre préventif (0,25 mg/kg) pendant la
procédure sur la base de la littérature sur l’angioplastie coronaire. Dans ce cas la posologie
d’héparine doit être réduite à 70 U/kg et le TC maintenu entre 200 et 250 s. Cette attitude ne
repose que sur des convictions personnelles dans certaines équipes.
1.2.3 Traitement de la thrombose artérielle pendant la procédure
C’est une urgence extrême car le traitement est d’autant plus efficace qu’il est débuté
précocement. Il repose sur la thrombolyse intra-artérielle et la fragmentation mécanique du
caillot. La thrombolyse peut être réalisée par l’urokinase ( jusqu’à 1 Million d’Unités) ou le
rt-PA (jusqu’à 40 mg) injectés in situ. L’injection doit être lente (environ 20 000 U/min pour
l’urokinase). La fragmentation mécanique du caillot à l’aide du guide endovasculaire est utile.
Le contrôle du TC et la réinjection éventuelle d’héparine est indiquée. Lorsque la thrombolyse
par l’urokinase est inefficace, nous choisissons d’injecter rapidement l’abciximab (Reopro) à
la posologie de 0,25 mg/kg in situ par comparaison avec ce qui est validé pour l’angioplastie
coronaire. Dans notre expérience sur 15 patients, les résultats sont excellents et nous n’avons
déploré aucune complication liée à l’utilisation de l’abciximab comme cela est rapporté par
d’autres équipes(16,17). Il est clair cependant que l’utilisation de thrombolytiques ou
d’abciximab comporte un risque hémorragique grave(18).
En dehors du traitement thrombolytiques, des mesure de protection cérébrale pendant la
période d’ischémie doivent être entreprises. Ceci comporte l’augmentation de la fraction
inspirée d’oxygène à 100 %, l’augmentation de la pression artérielle pour favoriser la
circulation collatérale cérébrale à partir des anastomoses piales, un remplissage vasculaire
favorisant l’augmentation du débit cardiaque et l’hémodilution, une normocapnie (figure 3).
Figure 3 : Proposition de schéma thérapeutique devant une thrombose artérielle pendant une
procédure de neuroradiologie interventionnelle (TC temps de coagulation activé)
THROMBOSE
FiO2 = 100 %
Augmenter la pression artérielle (éphédrine)
Vérifier le TC, les gaz du sang
Débuter la thrombolyse in situ
(urokinase jusqu’à 1M d’unités)
+
Fragmentation mécanique du caillot
SUCCES
Poursuivre la procédure
Augmenter l’anticoagulation
Maintenir une pression artérielle élevée
Poursuivre l’héparine après la procédure
ECHEC
Réfléchir à l’injection d’abciximab
Angioplastie artérielle (ballon)
ECHEC
SUCCES
Poursuite de l’abciximab Mesures de protection cérébrale
ou héparine
Surveillance en réanimation
Surveillance en réanimation
Maintien de l’introducteur fémoral
Contrôle angiographique en cas d’aggravation neurologique
1.3 Autres complications
1.3.1 Complication liées à l’utilisation de produit de contraste et aux radiations
ionisantes
L’utilisation de produits ayant une osmolarité basse, proche de celle du plasma, a rendu ces
complications exceptionnelles. Il faut être vigilant sur les quantités de produit utilisées surtout
lorsque le patient bénéficie de plusieurs examens successifs nécessitant l’injection de produits
iodés. Ceci peut être le cas lorsqu’une TDM cérébrale avec injection, réalisée pour le
diagnostic d’anévrysme intracrânien, est suivie d’un geste endovasculaire. Dans ce cas, il faut
maintenir une diurèse élevée par le remplissage vasculaire pour éviter l’apparition d’une
insuffisance rénale.
La dose de rayonnement nécessaire lors d’une procédure interventionnelle est élevée. Le
personnel doit se protéger et il est utile pour l’équipe anesthésique de disposer d’un renvoi du
monitoring dans la zone de protection des radiations. Pour le patient, une alopécie transitoire
apparaît parfois secondairement et témoigne de la quantité importante de rayonnement reçu.
1.3.2 Complications liées à l’anesthésie et à certaines procédures spécifiques
De manière générale les complications liées à l’anesthésie sont rares. Cependant, l’utilisation
de techniques particulières et la méconnaissance de certains impératifs de la neuroradiologie
peut aboutir à des catastrophes. Un des objectifs essentiels est l’absence de mouvement du
patient. Un mouvement de la tête pendant la procédure peut avoir plusieurs conséquences
graves. Un mouvement minime, passant inaperçu peut modifier les repères anatomiques par
rapport au « traçage artériel » qui est la superposition d’une image artérielle injectée sur la
fluoroscopie. Le neuroradiologue peut croire que le cathéter est dans la malformation
vasculaire alors qu’il est en réalité en dehors des limites, ce qui crée une rupture artérielle. Un
deuxième problème est l’apparition d’une toux violente avec mouvement de la tête lié à une
anesthésie insuffisante. Si un cathéter est placé dans une artère cervicale ou intracrânienne, il
existe un risque élevé de dissection artérielle et de thrombose lié au mouvement du cathéter
contre la paroi artérielle. La difficulté de prédire l’apparition d’un mouvement peranesthésique est connue lorsque, lors d’une procédure non douloureuse, une acte nociceptif
est réalisé. C’est la raison pour laquelle nous réalisons toutes nos procédures sous curarisation
profonde. L’hypothermie peut également être à l’origine de complications du fait des
modifications de la coagulation. La normothermie doit être un objectif essentiel comme pour
toute anesthésie.
L’embolisation des MAV cérébrales peut justifier dans certains cas une hypotension profonde
pour contrôler l’injection intranidale de la colle. Bien que cette hypotension contrôlée soit de
courte durée, le niveau de la pression artérielle moyenne nécessaire est souvent inférieur à 50
mm Hg. Parfois, un arrêt circulatoire temporaire obtenu par l’injection d’adénosine est
pratiqué pour le traitement des MAV à très haut débit(19). Ces procédures ont leurs
complications propres. A l’inverse, l’hypotension « habituelle » de l’induction anesthésique
peut provoquer une ischémie cérébrale chez les patients ayant une sténose vasculaire
carotidienne ou intracrânienne serrée.
Dans le cadre du vasospasme après hémorragie méningée, l’angioplastie cérébrale ou le
traitement par papavérine peuvent provoquer une hypertension intracrânienne grave pouvant
nécessiter l’arrêt du traitement. Des convulsions induites par la papavérine ont également été
décrites(20-25).
1.3.3 Complications liées au patient
Les complications non neurologiques sont fréquentes dans les atteintes cérébrales aiguës.
Environ 40 % des patients souffrant d’une hémorragie méningée et 60 % des patients
traumatisés crâniens ont au moins une anomalie non neurologique pendant les 14 premiers
jours de l’hospitalisation. Il a été estimé que 23 % à 41 % des décès après hémorragie
méningée étaient de cause médicale non neurologique. La sévérité des dysfonctions d’organe
est corrélée à la gravité de l’atteinte neurologique. Les modifications de l’ECG sont très
fréquentes après hémorragie méningée. Ces troubles sont attribués à la stimulation
sympathique intense qui accompagne la rupture anévrysmale et l’hypertension intracrânienne.
Celle-ci favorise l’apparition de troubles du rythme, surtout à craindre lorsqu’il existe un
allongement important de l’espace QT. Ces modifications concernent principalement la
repolarisation (sus- ou sous décalage du segment ST, augmentation de l’espace QT, inversion
de l’onde T). Elles sont d’autant plus fréquentes que l’hémorragie est abondante. Il existe un
problème clinique lorsque ces anomalies sont associées à des troubles de la fonction
myocardique avec parfois augmentation des enzymes cardiaques pouvant aboutir au choc
cardiogénique. Une hypovolémie associée est fréquente, touchant 50 % des patients après une
hémorragie méningée. Elle peut être due à une hémorragie, à l’utilisation de mannitol ou à des
facteurs hormonaux (diabète insipide, sécrétion de facteur atrial natriurétique). Une
complication pulmonaire survient chez 22 % des patients après une hémorragie méningée. Il
s’agit le plus souvent d’une infection respiratoire souvent consécutive à un syndrome
d’inhalation bronchique. L’hypoxémie peut être liée à de nombreuses autres causes telles
qu’une contusion pulmonaire ou un pneumothorax après un traumatisme, une atélectasie
favorisée par des troubles de la ventilation. Plus rarement, chez 2 % des patients environ, il
existe un œdème pulmonaire neurogénique, souvent chez les patients les plus graves. Il est
donc parfois nécessaire de prendre en charge en salle de neuroradiologie interventionnelle des
patients en état de choc cardiogénique, souffrant d’une hypoxémie par œdème pulmonaire. Il
est bien évident que la prise en charge est particulièrement difficile.
2
Complications retardées
Les deux principales complications sont là encore l’hémorragie et la thrombose. Ces
complications justifient une surveillance prolongée en salle de surveillance postinterventionnelle voire un transfert en soin intensif pour les 24 premières heures.
2.1 Hémorragie cérébrale
L’hémorragie cérébrale dans les suites du traitement endovasculaire d’un anévrysme est rare
et traduit une oblitération incomplète. Dans ce cas, il est indiqué de ne pas poursuivre
l’anticoagulation après la procédure pour favoriser la thrombose du sac anévrysmal.
L’hémorragie après traitement d’une MAV cérébrale est une complication classique lorsque le
traitement est partiel. La situation la plus dangereuse est liée à l’occlusion des veines
cérébrales. L’augmentation de la pression veineuse en amont se traduit alors presque toujours
par une hémorragie parenchymateuse. Il faut donc éviter de laisser persister un état
d’hypocoagulation après la procédure. Le maintien d’une hypotension en post interventionnel
pourrait limiter le risque hémorragique mais les indications et la durée de cette technique ne
sont pas définis. Lorsque l’hémorragie est importante et s’accompagne de signes
d’engagement, une intervention neurochirurgicale peut être indiquée.
Une hémorragie parenchymateuse peut être liée à une hyperhémie cérébrale réactionnelle,
après traitement d’une sténose vasculaire ou d’une MAV. Après angioplastie carotidienne,
une hyperhémie réactionnelle survient dans environ 5 % des cas et peut provoquer un œdème
ou une hémorragie cérébrale(26,27). Le même syndrome a été décrit après angioplastie
intracrânienne(28). Le Doppler transcrânien permet de détecter cette complication et de
mettre en œuvre un traitement visant à diminuer la pression artérielle et la perfusion
cérébrale(29).
2.2 Complications thrombo-emboliques
La thrombose artérielle extensive dans les suites d’un traitement endovasculaire est une
complication redoutable. La reconnaissance précoce de cette complication est essentielle car
un traitement thrombolytique peut être indiqué. Le risque est relié au diamètre de
l’anévrysme, à la protrusion des coils en dehors du sac anévrysmal, à une sténose vasculaire
résiduelle(14). La majorité des accidents survient dans les 24 premières heures. La poursuite
de l’héparine après le traitement endovasculaire d’un anévrysme diminue le risque thromboembolique(13). L’objectif est le maintien d’un TCA autour de 2 fois le témoin. Lorsque le
risque thrombo-embolique paraît élevé, un traitement antiagrégeant est poursuivi.
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