Introduction à l’algèbre linéaire
Thomas Richez
Table des matières
1. Généralités sur les matrices 1
2. Matrices et opérations élémentaires 5
3. Systèmes linéaires 8
4. Déterminant 13
Dans tout ce qui suit, K=Q,Rou C.
1. Généralités sur les matrices
1.1. Définitions.
Définition 1(Matrice) :Soient n, p N. Une matrice de taille n×pà coefficients dans Kest un tableau
ànlignes et pcolonnes constitué d’éléments mij de K. On note
M=
m11 m12 · · · m1p
m21
.
.
.
mn1mn2· · · mnp
ou plus simplement M= (mij )1in
1jn
avec chaque mij K(ou encore plus simplement M= (mij )).
Notation 1 : L’ensemble des matrices n×pà coefficients dans Kest noté Mn,p(K).
Fait 1 : Deux matrices A= (aij )et B= (bij )sont égales si et seulement si pour tous i, j,aij =bij .
Exemple 1 : (1)
1 2
6π
1
20
∈ M3,2(R)ou 1 2 i1
6π3i∈ M2,3(C).
(2) Matrice nulle de taille n×p:0n,p = (mij )1in
1jp
mij = 0 pour tous i, j.
(3) Matrice identité de taille n:In= (mij )1i,jnmij =(1si i=j
0sinon :
In=
1 0 · · · 0
0 1 ....
.
.
.
.
.......0
0· · · 0 1
∈ Mn,n(K).
1
2 THOMAS RICHEZ
(4) Matrices élémentaires Eij : on note Eij la matrice élémentaire de taille n×pdont tous les termes
sont nuls sauf le coefficient (i, j)qui vaut 1. Par exemple pour n= 2 et p= 4,
E2,3=0000
0010∈ M2,4(K).
Définition 2(Matrice carrée) :Soit nN. Une matrice de taille n×nest appelée matrice carrée de
taille n. L’ensemble Mn,n(K)est noté Mn(K).
Définition 3(Matrice diagonale et triangulaire) :Soit A= (aij )∈ Mn(K)une matrice carrée. Les
coefficients aii s’appellent les coefficients diagonaux de A. On dit que la matrice Aest
diagonale si l’on a aij = 0 dès que i6=j,
triangulaire supérieure si l’on a aij = 0 dès que i>j,
triangulaire inférieure si l’on a aij = 0 dès que i < j.
Exemple 2 : La matrice 1/2 0
0 3est diagonale tout comme la matrice identité Inet la matrice
2 0 0
130
0 2 0
est triangulaire inférieure.
Définition 4(Matrice ligne et colonne) :Une matrice de Mn,1(K)(resp. M1,p(K)) est appelée une
matrice-colonne (resp. matrice-ligne).
1.2. Opérations sur les matrices.
Définition 5(Addition de deux matrices) :Soient M, N ∈ Mn,p(K). La somme M+Nest la matrice
de taille n×pà coefficients dans Kdéfinie par
M+N= (mij +nij )1in
1jp
∈ Mn,p(K).
On additionne donc que des matrices de même taille.
Définition 6(Multiplication par un scalaire) :Soient M∈ Mn,p(K)et λK. Le produit par un scalaire
λM est la matrice de taille n×pà coefficients dans Kdéfinie par
λM = (λmij )1in
1jp
∈ Mn,p(K).
Exemple 3 : Si M=0 4 1
11 2 et N=101
3 0 5, alors
M+N=140
21 7et 3M=0 12 3
33 6 .
Définition 7(Produit de deux matrices) :Soient M∈ Mn,p(K)et N∈ Mp,r (K). Le produit MN est la
matrice de taille n×rà coefficients dans Kdéfinie par
MN = p
X
k=1
miknkj !1in
1jr
∈ Mn,r(K).
Attention : le produit matriciel MN n’est défini que lorsque le nombre de colonnes de Mest égal au
nombre de lignes de N. Il se peut donc que le produit MN soit défini tandis que NM ne l’est pas. Le produit
de deux matrices carrées de même taille est toujours défini.
Exemple 4 : Si M=2 0 3et N=
1
3
2
, comme 2×1+0×(3)+(3)×2 = 4, on a MN =4.
INTRODUCTION À L’ALGÈBRE LINÉAIRE 3
Exemple 5 : Si M=1 2 3
127et N=
3 0 2 1
1 0 1 1
2 5 2 1
. Alors le produit matriciel MN est bien défini
car Ma autant de colonnes que Na de lignes et on a : MN =11 15 2 6
13 35 14 8. Par contre le produit
NM n’est pas défini.
Définition 8(Combinaison linéaire) :Soit kun entier 2. Une combinaison linéaire des matrices
A1, A2, . . . , Ak∈ Mn,p(K)est une matrice de Mn,p(K)de la forme λ1A1+λ2A2+. . . +λkAkoù les λiK.
Proposition 1(Règles de calcul) :Si A, B, C sont des matrices appartenant à Mn,p(K)et si λ, µ K,
alors on a
(1) (Associativité de l’addition) A+ (B+C)=(A+B) + Cet cette matrice est noté A+B+C,
(2) (Elément neutre pour +)A+ 0n,p = 0n,p +A=A,
(3) (Existence d’un opposé) AA= 0n,p,
(4) (Commutativité) A+B=B+A.
On dit alors que (Mn,p,+) est un groupe commutatif (ou groupe abélien). On a aussi
(1) (λ+µ)A=λA +µA et λ(A+B) = λA +λB.
(2) (λµ)A=λ(µA)et on notera donc simplement λµA cette matrice,
De plus, si M∈ Mn,p(K),N, N0∈ Mp,q (K)et P∈ Mq,r (K), on a aussi
(1) InM=MIp=M,
(2) (Associativité du produit matriciel) (MN)P=M(N P ), on notera donc simplement MNP cette
matrice,
(3) (Bilinéarité du produit matriciel)
(λA +µB)N=λAN +µBN et A(λN +µN0) = λAN +µAN0.
(4) λ(MN)=(λM)N=M(λN)
Démonstration. Démontrons simplement l’associativité du produit matriciel. Puisque MN = (Pp
k=1 miknkl)1in
1lq
,
alors
(MN)P=
q
X
l=1 "p
X
k=1
miknkl#
|{z }
=mnil
plj
1in
1jr
∈ Mn,r(K).
De même, puisque NP = (Pq
l=1 nklplj )1kp
1jr
, alors
M(NP ) =
p
X
k=1
mik "q
X
l=1
nklplj #
|{z }
npkj
1in
1jr
∈ Mn,r(K).
On obtient le résultat en permutant les symboles de sommation dans (M N)Pet M(N P ).
Remarque 1 : Attention, le produit matriciel N’est PAS commutatif : en général MN 6=NM . Par exemple
1 1
0 10 0
1 0=1 0
1 06=0 0
1 1=0 0
1 01 1
0 1.
Définition 9(Transposée, matrice symétrique et antisymétrique) :Soit M∈ Mn,p(K). La transposée de
M, notée tMest la matrice de taille p×ndéfinie par tM= (mji)avec 1inet 1jp. Si tM=M,
alors Mest dite symétrique. Si tM=M, alors Mest dite antisymétrique.
4 THOMAS RICHEZ
Exemple 6 : (1) Si A=1234
5678, alors tA=
1 5
2 6
3 7
4 8
(2) Si B=1 7
7 0, alors tB=1 7
7 0=B: la matrice Best symétrique.
Proposition 2(Propriétés de la transposée) :Soient A, B ∈ Mn,p(K),C∈ Mp,q (K)et λK. Alors,
(1) t(tA) = A,t(λA) = λtAet t(A+B) = tA+tB,
(2) t(AC) = tCtA.
Démonstration. Exercice
1.3. Matrice carrée inversible.
Définition 10 (Matrice carrée inversible) :Une matrice carrée M∈ Mn(K)est dite inversible s’il existe
une matrice N∈ Mn(K)telle que MN =NM =In.
Notation 2 : L’ensemble des matrices carrées de taille nà coefficients dans Kinversibles est noté GLn(K).
Lemme 1:Soit Aune matrice inversible de Mn(K). Il existe une unique matrice B∈ Mn(K)telle que
AB =BA =In. Dans ce cas, on dit que Best l’inverse de Aet on note B=A1.
Démonstration. Supposons que l’on dispose de deux inverses Bet B0de Aet montrons que B=B0.
Alors on a par associativité du produit matriciel les égalités suivantes :
B=InB= (B0A)B=B0(AB) = B0In=B0;
ce qu’il fallait démontrer.
Fait 2 : On peut montrer que (MN =In)(NM =In). Ainsi il suffit de vérifier une seule de ces deux
relations pour affirmer qu’une matrice est l’inverse de l’autre.
Exemple 7 : (1) La matrice A=2 1
5 3est inversible d’inverse A1=31
5 2 (faire le calcul).
(2) Si Aest inversible, alors A1l’est aussi et (A1)1=A.
Proposition 3:Soient A, B, C ∈ Mn(K)des matrices telles que AB =Inet CA =In. Alors B=C.
Démonstration. Puisque AB =In, alors C(AB) = CIn=C. On en déduit par associativité du
produit matriciel que C= (CA)B=InB=B. D’où le résultat.
Autrement dit, si une matrice Aadmet un inverse à gauche et un inverse à droite, alors ces inverses sont
les mêmes : la matrice est inversible.
Proposition 4:Soient AGLn(K)et B, C ∈ Mn,p(K)telles que AB =AC. Alors B=C.
Démonstration. L’égalité AB =AC implique A1(AB) = A1(AC); ce qui équivaut à (A1A)B=
(A1A)Cpar associativité du produit matriciel. Puis, par définition d’inverse d’une matrice InB=InC,
c’est-à-dire B=C.
Proposition 5(Inverse d’un produit) :Soient M, N GLn(K). Alors MN GLn(K)et (MN)1=
N1M1.
Démonstration. Il s’agit de montrer que l’une des deux relations
(MN)(N1M1) = Inou (N1M1)(M N ) = In
est vérifiée. Cela résulte immédiatement de l’associativité du produit matriciel. Par exemple,
(MN)(N1M1) = M(N N 1)M1=MInM1=MM 1=In.
INTRODUCTION À L’ALGÈBRE LINÉAIRE 5
Corollaire 1:Si AGLn(K), alors
(1) pour tout kN,AkGLn(K)et (Ak)1= (A1)k,
(2) tAGLn(K)et (tA)1=t(A1).
2. Matrices et opérations élémentaires
2.1. Opérations élémentaires sur les lignes et les colonnes.
Définition 11 (Matrices de dilatation et de transvection) :Soient M∈ Mn(K),aK,λKet
1i6=jn.
On appelle matrice de dilatation de rapport a, notée Di(a)∈ Mn(K), la matrice Inoù le aremplace
le 1de la ieligne :
Di(a) = In+ (a1)Eii.
On appelle matrice de transvection de rapport λ, notée Tij (λ)∈ Mn,p(K), la matrice Inoù le λ
remplace le 0à la ieligne et jecolonne :
Tij (λ) = In+λEij .
Exemple 8 : (n= 2)D2(4) = 1 0
04et T12(3) = 1 3
0 1.
(n= 3)D2(4) =
100
04 0
001
et T31(5) =
100
010
501
.
Proposition 6(Opérations élémentaires sur les colonnes d’une matrice) :Soient M∈ Mn,p(K),aK,
λKet 1i6=jn. On note Cjla jecolonne de M. alors
la matrice obtenue à partir de Men remplaçant Cjpar aCjest MDj(a),
la matrice obtenue à partir de Men remplaçant Cjpar Cj+λCiest MTij (λ).
Démonstration. Notons Ekla matrice de Mp,1(K)dont le coefficient de la ligne kvaut 1et dont tous
les autres sont nuls. En particulier, on a la relation
MEk=Ck.
De même, la kecolonne de la matrice MDj(a)est égale à MDj(a)Eket la k-ème colonne de la matrice
MTij (λ)est égale à MTij (λ)Ek.
si k6=j, on a par définition des matrices élémentaires, Dj(a)Ek=Eket Tij (λ)Ek=Ek. Donc la ke
colonne de MDj(a)est juste (MDj(a))Ek=M(Dj(a)Ek) = M Ek, la kecolonne de M. De même
MTij (λ)Ek=MEk=Cket on a le même résultat.
Pour k=j, on a cette fois Dj(a)Ej=aEjet Tij (λ)Ej=Ej+λEi. Ainsi
MDj(a)Ej=M(aEj) = aMEj=aCj
et
MTij (λ)Ej=M(Ej+λjEi) = Cj+λCi.
On dit qu’on effectue des opérations élémentaires sur les colonnes de M(abrégé OEC).
Si on multiplie non plus à droite mais à gauche par les matrices de dilatation et transvection, on effectue
cette fois-ci des opérations élémentaires sur les lignes (OEL).
Proposition 7(Opérations élémentaires sur les lignes d’une matrice) :Soient M∈ Mn,p(K),aK,
λKet 1i6=jn. On note Lila ieligne de M. alors
la matrice obtenue à partir de Men remplaçant Lipar aLiest Di(a)M,
la matrice obtenue à partir de Men remplaçant Lipar Li+λLjest Tij (λ)M.
Démonstration. Exercice : il suffit d’adapter la preuve précécente en multipliant à gauche par les
tEk= (0 · · · 010 · · · 0).
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