1. Introduction
Les années 90 ont été marquées en Afrique subsaharienne par une amélioration de la croissance
économique qui était proche de zéro en 1991-1992. Ce mouvement a été à l'origine, entre 1995 et
1998, d'un espoir de voir l'Afrique faire des progrès sur la voie du développement, alors que la
décennie 80 avait été marquée par une régression significative du PIB par habitant. Comme le montre
le tableau 11, la principale caractéristique de l'évolution du taux de croissance moyen est l'extrême
diversité des performances économiques dans la région. Chaque année, des pays sombrent dans une
crise et d'autres connaissent un rebond spectaculaire. Cette grande variabilité tient en partie au fait que
la conjoncture des pays africains est particulièrement heurtée, et que nombre d'entre eux connaissent
des cycles très marqués. Elle est aussi la traduction des réels progrès que connaissent certains pays sur
de longues périodes, tandis que d'autres subissent une crise prolongée.
D'une manière générale, partant des études initiales (Barro 1991, Barro et Lee 1996, Barro et
Sala-I-Martin 1995) ou des études plus récentes (Temple 1999, Ahn et Hemmings 2000) il est montré
les influences que peuvent avoir sur la croissance, le capital humain, les activités de recherche-
développement, le cadre macroéconomique et le cadre structure de l'action des pouvoirs publics, la
politique du commerce extérieur, et même la situation des marchés financiers.
Toutefois, il ne semble pas avoir de consensus quant au rôle exact du capital humain dans la
croissance économique des pays en développement. Ainsi, des études2 réalisées sur la base des
estimations d'un modèle de Solow tel que suggéré par Mankiw, Romer et Weil (1992) montrent que le
capital humain exerce un effet négatif sur la croissance.
S'il est admis que les pays en développement bénéficient des efforts de recherche-
développement des pays industrialisés3 dans la mesure où ceux-ci diffusent le savoir à travers les biens
exportés vers les pays en développement, ces derniers peuvent alors combler leur retard de
développement en tirant profit de la technologie existante. Ainsi, comme le soulignent de nombreux
auteurs (Romer 1993, Grossman et Helpman 1994), les pays en développement peuvent bénéficier des
transferts de technologie en grande partie par l'ouverture au commerce international. De même,
l'investissement en capital humain est rentable du point de vue de la croissance si des technologies
sont développées et intégrées dans les investissements en capital humain dans la mesure où les
individus investissent en capital humain. C'est ainsi que certains auteurs4 soutiennent les politiques
d'ouverture au commerce en insistant sur les gains issus des transferts technologiques. En effet,
l'ouverture au commerce permet de profiter davantage des effets de la diffusion du progrès technique,
mais pour en bénéficier, il est nécessaire de détenir le capital humain capable de l'utiliser.
Compte tenu de l’impact du capital humain sur la croissance des pays en développement et de
l'objet des différentes approches sus évoquées, on peut dégager le principal fait stylisé suivant :
l'impact du capital humain sur la croissance des pays en développement est généralement difficile à
mettre en évidence, à moins que ne soient explicitement intégrés des éléments technologiques liés à
l'ouverture extérieure des économies. Ce qui semble justifier un approfondissement du rôle du capital
humain dans la croissance des pays d'Afrique subsaharienne en mettant en exergue la nature de la
relation - directe ou conditionnée - entre les deux.
En confrontant les données de 23 pays5 de la région entre 1980 et 1997 à un certain nombre
d'hypothèses relatives à la contribution du capital humain à la croissance, cette étude recherche de
nouveaux éléments quant au rôle du capital dans la croissance.
1 Voir annexe.
2 Voir les études de Knight, Loaysa et Villanueva [1993] ou celle de Islam [1995].
3 Ce type d'analyse rejoint celle de Krugman [1979] où seul le pays développé innove, le pays en développement imitant la
technologie.
4 Keller [1996].
5 Nous n'avons retenu que les pays pour lesquels les données sont régulières sur l'ensemble de la période.