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Introduction à un droit de la bioéthique
Auteur : Ingrid Callies
Date : Octobre 2005
Le vocable de bioéthique semble être très couramment utilisé depuis quelques années où tout
devient sujet de bioéthique dès lors que l'on entre dans la sphère biologique ou dans la sphère
médicale.
Il s'agit en fait d'un terme utilisé pour la première fois dans un ouvrage de 1971 dont le titre
est Bioethics: Bridge to the Future (Van R. Potter, Prentice-Hall, Englewood-Cliffs (NJ)). Il a
depuis été repris dans le titre de nombreux ouvrages, monographies et articles (e.g., T. –L.
Beauchamp, J. Childress, Principles of Biomedical Ethics, Oxford University Press, New
York, 1983 ; J. Bernard, La bioéthique, Flammarion 1994 ; C. Byk, Juridical Policies and
Bioethics : The Three Pillars of Biomedical Legislative Wisdom, Eubios Journal of Asian and
Intern. Bioethics, May 1995, vol. 5, p. 59 et Le droit international de la bioéthique,
"jurgentium" ou "lex mercatoria", JDI 1997, p. 913 ; H. Doucet, Au pays de la bioéthique :
l'éthique médical aux Etats-Unis, Labor et Fides 1996 ; H.-T. Engelhardt, The Foundations of
Bioethics, Oxford, University Press, Oxford, 1986), est devenu un qualificatif de l'homme (A.
Fagot-Largeault, L'homme bioéthique, Maloine, 1985), a même été qualifié de paradigme (G.
Hottois, Le paradigme bioéthique, De Boeck Université, Bruxelles, 1990), et a fait l'objet
d'une encyclopédie (G. Hottois, J.-N. Missa, Nouvelle encyclopédie de bioéthique, De Boeck,
Bruxelles, 2001).
Toutefois, au niveau de son utilisation dans le cadre législatif français, elle s'est faite, dans un
premier temps, à tâtons.
En effet, on a parlé des lois de "bioéthique" de 1994, mais aucune des deux lois en question
ne comportait dans son titre le terme de bioéthique, qui a été, jusqu'en 2004, utilisé avec la
précaution des guillemets. On peut ajouter à cette constatation que d'autres lois, en particulier
la loi Veil relative à l'IVG du 17 janvier 1975, la loi Huriet-Sérusclat du 20 décembre 1988
ainsi qu'une loi du 1er juillet 1994 relative au traitement des données nominatives, auraient
également pu entrer dans la catégorie "lois de bioéthique".
Toutefois c'est la loi n°2004-800 du 6 août 2004, dont le titre est "loi relative à la bioéthique",
qui consacre réellement le vocable sur un plan législatif en France.
Ceci nous amène à nous poser la question de l'existence d'un droit de la bioéthique.
Nous allons étudier, dans un chapitre liminaire ce qu'on peut entendre par bioéthique, avant
d'étudier l'arsenal législatif français relatif à la bioéthique.
I. Qu'entend-on par bioéthique ?
Un ouvrage dirigé par Christian Hervé est intitulé "Ethique médicale ou bioéthique ?"
(Christian Hervé (Ed.) Cahiers L'éthique en mouvement, L'Harmattan, 1999). En effet, on
peut s'interroger sur la différence entre ces termes, entre l'éthique médicale et biologique,
l'éthique biomédicale et la bioéthique.
Le père du vocable, Van Rensselaer Potter, définit la bioéthique comme "la combinaison
des connaissances biologiques et des valeurs humaines" et comme la science de la