Leçon 2: Euclide, Bézout et Gauss I. Diviseurs et nombres premiers

Le¸con 2: Euclide, B´ezout et Gauss
I. Diviseurs et nombres premiers
- Soient a, b Z.On dit que bdivise as’il existe cZ tel que a=bc (i.e. si aest un multiple
entier de b).
-bdivise aest souvent not´e b|a.
Voici deux propri´et´es imm´ediates:
- si b|aet b|a0alors b|a+a0.
- si b|aalors quel que soit cZ, b|ac.
On note Div(a) l’ensemble des diviseurs de l’entier aet Div+(a) l’ensemble de ses diviseurs positifs.
Pour des entiers a1, a2, . . . , anZ on note
Div(a1, . . . , an) = {bZ,quel que soit i[1, n], b |ai}
l’ensemble des diviseurs communs de a1, . . . , an.
Quelques d´efinitions:
(1) Un entier pN est dit premier si p2 et Div(p) = {1,1, p, p}.
(2) Un entier nN\{0,1}est dit compos´e s’il n’est pas premier, i.e. s’il existe des entiers d, d0
N, v´erifiant d2, d02 tels que
n=dd0.
(3) Les entiers a1, . . . , anZ sont dits premiers entre eux (ou ´etrangers) dans leur ensemble si
Div(a1, . . . , an) = {1,1}.
(4) Les entiers a1, . . . , ansont dits premiers 2 `a 2 (ou ´etrangers 2 `a 2) si pour toute paire d’indices
i, j [1, n] avec i6=jon a
Div(ai, aj) = {1,1}.
Par exemple, 2,3,8 sont premiers dans leur ensemble mais ne sont pas premiers 2 `a 2.
Voici deux propositions simples et fondamentales (deux petits classiques de l’apprenti math´emati-
cien). Les preuves sont courtes et illustrent deux formes importantes de raisonnement: la preuve
par r´ecurrence forte et la preuve par l’absurde.
Proposition: tout entier naturel n2 admet un diviseur premier.
D´emo: par r´ecurrence forte sur nN.
- Initialisation: c’est vrai pour n= 2 car 2 est premier.
- Pas de r´ecurrence: supposons vrai pour tout entier a[2, n] et consid´erons n+ 1.Si n+ 1 est
premier, n+ 1 est ce diviseur premier. Si n+ 1 est compos´e on a
n+ 1 = dd0
pour certains entiers naturels d, d0avec d2, d02.Puisque
d=n+ 1
d0n+ 1
2n,
par hypoth`ese de r´ecurrence, dadmet un diviseur premier et d`es lors n+ 1 aussi.
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Proposition: Il y a une infinit´e de nombres premiers.
D´emo: supposons que l’ensemble P N des nombres premiers soit fini
P={p1, . . . , pl}
et cherchons dans Ples diviseurs premiers de l’entier
n=p1p2· · · pl+ 1.
Puisque chaque pidivise p1p2· · · pl, s’il divise n, il divise aussi np1p2· · · pl= 1, ce qui ne se peut
car pi2.Conclusion: l’entier nn’admet aucun diviseur dans P, ce qui contredit la proposition
qui pr´ec`ede.
II. La division euclidienne dans Z
Th´eor`eme: quels que soient aZ et bN\ {0}il existe d’uniques entiers qZ et rN tels que
a=bq +r, 0r < b.
Les entiers qet rsont appel´es respectivement le quotient et le reste de la division euclidienne de
apar b.
La preuve qui suit est elle aussi un classique de notre discipline, elle utilise la propri´et´e: toute
partie non vide et major´ee PZadmet un plus grand ´el´ement.
D´emo: Existence des entiers qet r: on utilise la partie
P={nZ, bn a} ⊂ Z.
La partie Pn’est pas vide: pour a0, 0 P. Pour a < 0, a P.
Pest major´ee: pour a0, quelquesoit nPon a na. Pour a < 0, quelquesoit nPon a
n < a.
Etant non vide et major´ee, Padmet un plus grand ´el´ement q=M ax(P) pour lequel
bq a<b(q+ 1) (?)
On pose
r=abq.
Par (?) on a 0 r < b. D`es lors qet rconviennent.
Unicit´e des entiers qet r: supposons deux ´ecritures
a=bq +r=bq0+r0,0r, r0< b.
On a b(qq0) = r0ret l’encadrement pour ret r0donne
b<b(qq0)< b
d’o`u l’on obtient
1< q q0<1.
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Conclusion: qq0= 0 et r0r= 0.
PGCD et PPCM
Soient a, b Z\{0}.
- pgcd (plus grand commun diviseur):
L’ensemble des diviseurs communs Div(a, b)N est non vide car il contient 1 N et il est major´e
par min(|a|,|b|) [si d|aet d|balors d≤| a|et d≤| b|]. Div(a, b) admet donc un plus grand
´el´ement. Par d´efinition,
pgcd (a, b) = Max(Div(a, b)).
- ppcm (plus petit commun multiple):
L’ensemble des multiples strictement positifs communs Mult+(a, b)N est non vide car il contient
|ab |et il est minor´e par Max(|a|,|b|) [pour M > 0, si a|Met b|Malors |a|≤ Met |b|≤ M].
Mult+(a, b) admet donc un plus petit ´el´ement. Par d´efinition,
ppcm (a, b) = min(Mult+(a, b)).
L’algorithme d’Euclide.
Cet algorithme nous permet de calculer le pgcd de deux entiers abN\ {0}en effectuant une
suite de divisions euclidiennes dont le nombre n’exc`ede pas le reste de la division euclidienne de a
par b. Voici comment proeder:
Commencer par effectuer la division euclidienne:
a=bq1+r1,0r1< b.
Si r1= 0, pgcd (a, b) = b.
Si r16= 0 observer que Div(a, b) = Div(b, r1) [en effet, si d|aet d|balors d|abq1=r1;
r´eciproquement, si d|bet d|r1alors d|bq1+r1=a]. En particulier, pgcd (a, b) = pgcd (b, r1).
Effectuer la division euclidienne de bpar r1:
b=q2r1+r2,0r2< r1.
Si r2= 0, pgcd (b, r1) = r1. Si r26= 0, pgcd (b, r1) = pgcd (r1, r2).
Effectuer la division euclidienne de r1par r2,...
La suite des restes de ces divisions euclidiennes successives ´etant strictement d´ecroissante, on
obtient un reste nul en un nombre fini de pas. pgcd (a, b) est alors le dernier reste non nul de
la suite.
Exemples:
pgcd (96,33):
96 = 2 ×33 + 30
33 = 1 ×30 + 3
30 = 10 ×3+0
Conclusion: pgcd (96,33) = 3
3
pgcd (137,24):
137 = 5 ×24 + 17
24 = 1 ×17 + 7
17 = 2 ×7+3
7 = 2 ×3+1
3 = 3 ×1+0
Conclusion: pgcd (137,24) = 1
III.L’ identit´e de B´ezout
Proposition: quels que soient a, b N\ {0}il existe u, v Z tels que
ua +vb = pgcd (a, b).
La preuve qui suit utilise les restes successifs de l’algorithme d’Euclide. (Plus loin dans le cours,
nous en ferons une preuve plus directe et plus g´en´erale.)
D´emo: si b|a, pgcd (a, b) = b= 0 ·a+ 1 ·b.
Si bne divise pas a, le premier reste de l’algorithme d’Euclide s’´ecrit
r1= 1 ·aq1·b.
Si r1= pgcd (a, b) c’est l’´enonc´e en prenant u= 1, v =q1.
Si r16= pgcd (a, b), le deuxi`eme reste d’Euclide s’´ecrit
r2=br1q2=b(aq1b)q2=q2a+ (1 + q1q2)b.
Si r2= pgcd (a, b) c’est l’´enonc´e pour u=q2, v = 1 + q1q2.
Lorsque bne divise pas a, une r´ecurrence sur n1 montre qu’ il existe un, vnZ tels que le
ni`eme reste rnde l’algorithme d’Euclide s’´ecrive
rn=una+vnb.
En effet: c’est vrai pour n= 1,2. Si pour n > 2 il existe des entiers un1, vn1, un2, vn2Z
tels que
rn2=un2a+vn2b, rn1=un1a+vn1b,
alors
rn=rn2rn1qn= (un2un1qn)a+ (vn2vn1qn)b.
et il suffit de prendre les entiers un=un2un1qn, vn=vn2vn1qn.
En particulier, c’est vrai pour le dernier reste non nul de l’algorithme d’Euclide, i.e. pour pgcd
(a, b).
L’´enonc´e est bien sˆur vrai pour a, b Z\ {0}. [Appliquer l’´enonc´e aux valeurs absolues |a|,|b|
et le cas ´ech´eant changer le signe de uet/ou v.]
La preuve qui pr´ec`ede nous permet de trouver une paire d’entiers u, v Z qui conviennent: il suffit
de lire l’algorithme d’Euclide de bas en haut.
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Exemples:
pgcd (96,33) = 3 = 33 30
= 33 (96 2·33)
= (1) ·96 + 3 ·33
pgcd (137,24) = 1 = 7 2·3
= 7 2·(17 2·7)
= 5 ·72·17
= 5 ·(24 17) 2·17
= 5 ·24 7·17
= 5 ·24 7·(137 5·24)
= (7) ·137 + 40 ·24
Voici deux corollaires imm´ediats (dont la preuve est laiss´ee au lecteur):
(1) Quels que soient a, b Z\ {0}, pgcd (a, b) = 1 si et seulement si il existe u, v Z tels que
ua +vb = 1
(2) Quels que soient a, b Z\ {0}, d Div(a, b) si et seulement si ddivise pgcd (a, b).
Le lemme de Gauss
L’´enonc´e qui suit est une cons´equence imm´ediate de l’identit´e de B´ezout. Il est `a la fois simple et
tr`es utile en arithm´etique.
Lemme: quels que soient a, b, c Z\ {0}, si a|bc et pgcd (a, b) = 1 alors a|c.
D´emo: aet b´etant ´etrangers, l’identit´e de B´ezout assure l’existence d’entiers u, v Z tels que
ua +vb = 1.En multipliant par cil vient
uac +vbc =c.
Clairement a|uac et par hypoth`ese a|bc donc a|vbc, d’o`u a|uac +vbc =c.
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