Rénovation
«l’architecture est le jeu
savant correct et magnifique
des formes et des volumes
sous la lumière.»
Le Corbusier
La
Maison Radieuse
Rezé
Les unités
d’habitation
Les unités d’habitation
«Costaud la Maison Radieuse!
En 40 ans la structure n’a pas bougé d’un
pouce. De l’intérieur, on sent que c’est du
solide. Oui mais voila, les vents d’ouest, la
pollution et l’air salin ont lentement dégradé les façades.
Alors, il a bien fallu rénover ces jolies dames, d’autant
qu’elles sont inscrites à l’inventaire supplémentaire des
Monuments historiques depuis 1965 et appartiennent à un
ensemble classé Monuments historiques depuis 2001.
Deux rénovations ont eu lieu en 1985 et 1989. La
troisième a été entreprise en 1996, après trois années de
diagnostics très poussés, engagés par le syndicat de copro-
priété et Loire-Atlantique Habitations
Le travail ne fut pas simple, chaque loggia a été découpée
pour être reconstruite strictement à l’identique. Une véri-
table opération chirurgicale minutieusement supervisée par
les architectes des Bâtiments de France et ceux de la
Fondation Le Corbusier.
Pas question de lésiner sur la qualité et l’authenticité.
On est allé rechercher les pierres d’origine, les mêmes
agrégats, de même couleur, dans la même carrière. On a
mobilisé plusieurs maçons afin qu’ils reproduisent les
techniques d’autrefois, dans l’esprit Maison Radieuse, mais
avec des matériaux de haute technicité : micro béton, aciers
galvanisés etc. Sur le site, dans un atelier de fabrication,
2500 pièces de maçonnerie ont été réalisées en copies
conformes de celles qui ont été remplacées.
Le travail fut gigantesque, mais la Maison Radieuse en
valait largement la peine. Beaucoup décrié à ses origines,
par ceux qui ne l’habitaient pas, l’immeuble représente
aujourd’hui une référence architecturale emblématique et
unique. En dépit des turbulences de l’histoire il a su à la fois
garder sa vocation première d’habitat social, la singularité
de son caractère et la certitude d’un avenir radieux.
Et vogue le navire !
Charles-Edouard Jeanneret dit Le
Corbusier est sans doute l’un des plus célèbres
architectes du XXesiècle. Il naît le 6 octobre 1887 à la
Chaux-de-Fonds, en Suisse, s’intéresse à l’architecture
dés son adolescence et construit sa première maison en
1905 : la Villa Fallet.Après plusieurs années de voyages,
de travail et d’études, il s’installe à Paris et ouvre un
atelier d’architecture rue de Sèvres en 1922.
«Propagandiste de la modernité», urbaniste visionnaire,
il milite et œuvre pour une architecture nouvelle
«à l’échelle humaine» dans un contexte où l’homme se
retrouve «en harmonie avec les conditions de nature :
Soleil, Espace, Verdure».
Il conçoit plusieurs projets d’urbanisation, (pour Rio,
Sao Paulo, Alger, Anvers, Genève, et Stockholm) et
construit divers immeubles publics ou privés avant
d’entreprendre ce qui constitue la concrétisation de
toutes ses idées sur l’habitat : les unités d’habitations.
En 1952, il réalise la première construction de ce type
à Marseille : la Cité Radieuse. Quatre autres suivront.
Au cours des années cinquante, à la demande des auto-
rités indiennes, Le Corbusier dessine le plan directeur
de la ville de Chandigarh et construit l’essentiel des
bâtiments administratifs de cette nouvelle capitale du
Penjab.
Il meurt en 1965 et laisse derrière lui une œuvre consi-
dérable qui marquera plusieurs générations d’archi-
tectes.
Principales réalisations en France :Villa Savoye à Poissy,
Pavillon Suisse à la Cité Universitaire de Paris, Unités
d’Habitations de Marseille-Michelet, de Rezé, de Briey-
en-Forêt, de Firminy ; Chapelle de Ronchamp, Couvent
de la Tourette.
Porte
Bouguenais
Porte
de Rezé
Rezé
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u
t
e
d
e
P
o
r
n
i
c
RN 137
La Maison
Radieuse
N° 52
N° 49
Le Corbusier
Visites sur rendez-vous :
02 40 84 43 84
Éditeur : Ville de Rezé,
en partenariat avec l’Association
des habitants de la Maison
Radieuse et Loire-Atlantique
Habitations.
Financement : Ville de Rezé,
Loire-Atlantique Habitations.
Texte : Dominique Viennet
Maquette :
Le Square Deshoulières
Impression : Piriou Imprimeur
Photo de couverture :
Philippe Ruault
Photo dernière page :
Stephan Ménoret
Réédition juin 2003
Un des bâtiments administratifs de la ville de Chandigarh
Photo : Martin Van den Oever
Photo : Philippe Ruault
Photo : Mireille Janvier
La troisième
rénovation a été
réalisée de 1996 à
1997. Les loggias
ont été réalisées
à l’identique
de l’original.
Rénovation Le Corbusier
«En connaissez vous des immeubles avec
près de 300 appartements en duplex de types
différents, répartis sur 17 niveaux ? »
Il en existe seulement cinq au monde : Marseille, Rezé,
Briey-en-Forêt, Berlin et Firminy. Ce sont les unités
d’habitation de Le Corbusier. Ses fameux villages à la
verticale. «L’unité d’habitation, ça c’est un navire»
disait-il «chacun y aura la liberté complète de ses
gestes, l’isolement de son foyer, chacun sera libre
«Je crois qu’il a réussi son entreprise. Au fond, sa
préoccupation dominante, c’était la quête constante
de l’harmonie au service de l’homme : organisation
complémentaire de la vie individuelle et collective
(le principe du binôme), continuité entre la ville et la
campagne (toutes ses unités d’habitation baignent
dans un environnement naturel), composition entre
l’espace, la lumière et les couleurs, relation des formes
et des proportions
Le Corbusier considérait que l’architecture influence
le comportement des êtres humains.
«La construction, – disait-il – c’est fait pour tenir,
l’architecture pour émouvoir».
Conformément à cet état d’esprit, Le Corbusier a mis
au point une gamme de mesures harmoniques
«à l’échelle humaine» : le Modulor.
La plupart de ses réalisations sont ainsi basées sur les
proportions d’un homme d’une hauteur de 1, 83 m
dont la main s’élève à 2,26 m du sol (niveau du
plafond). Son assise est fixée à 0,70 m et il s’accoude
debout à 1,13 m ou 1,40 m.
Photo : Y. Caillaud
Rénovation
«l’architecture est le jeu
savant correct et magnifique
des formes et des volumes
sous la lumière.»
Le Corbusier
La
Maison Radieuse
Rezé
Les unités
d’habitation
Les unités d’habitation
«Costaud la Maison Radieuse!
En 40 ans la structure n’a pas bougé d’un
pouce. De l’intérieur, on sent que c’est du
solide. Oui mais voila, les vents d’ouest, la
pollution et l’air salin ont lentement dégradé les façades.
Alors, il a bien fallu rénover ces jolies dames, d’autant
qu’elles sont inscrites à l’inventaire supplémentaire des
Monuments historiques depuis 1965 et appartiennent à un
ensemble classé Monuments historiques depuis 2001.
Deux rénovations ont eu lieu en 1985 et 1989. La
troisième a été entreprise en 1996, après trois années de
diagnostics très poussés, engagés par le syndicat de copro-
priété et Loire-Atlantique Habitations
Le travail ne fut pas simple, chaque loggia a été découpée
pour être reconstruite strictement à l’identique. Une véri-
table opération chirurgicale minutieusement supervisée par
les architectes des Bâtiments de France et ceux de la
Fondation Le Corbusier.
Pas question de lésiner sur la qualité et l’authenticité.
On est allé rechercher les pierres d’origine, les mêmes
agrégats, de même couleur, dans la même carrière. On a
mobilisé plusieurs maçons afin qu’ils reproduisent les
techniques d’autrefois, dans l’esprit Maison Radieuse, mais
avec des matériaux de haute technicité : micro béton, aciers
galvanisés etc. Sur le site, dans un atelier de fabrication,
2500 pièces de maçonnerie ont été réalisées en copies
conformes de celles qui ont été remplacées.
Le travail fut gigantesque, mais la Maison Radieuse en
valait largement la peine. Beaucoup décrié à ses origines,
par ceux qui ne l’habitaient pas, l’immeuble représente
aujourd’hui une référence architecturale emblématique et
unique. En dépit des turbulences de l’histoire il a su à la fois
garder sa vocation première d’habitat social, la singularité
de son caractère et la certitude d’un avenir radieux.
Et vogue le navire !
Charles-Edouard Jeanneret dit Le
Corbusier est sans doute l’un des plus célèbres
architectes du XXesiècle. Il naît le 6 octobre 1887 à la
Chaux-de-Fonds, en Suisse, s’intéresse à l’architecture
dés son adolescence et construit sa première maison en
1905 : la Villa Fallet.Après plusieurs années de voyages,
de travail et d’études, il s’installe à Paris et ouvre un
atelier d’architecture rue de Sèvres en 1922.
«Propagandiste de la modernité», urbaniste visionnaire,
il milite et œuvre pour une architecture nouvelle
«à l’échelle humaine» dans un contexte où l’homme se
retrouve «en harmonie avec les conditions de nature :
Soleil, Espace, Verdure».
Il conçoit plusieurs projets d’urbanisation, (pour Rio,
Sao Paulo, Alger, Anvers, Genève, et Stockholm) et
construit divers immeubles publics ou privés avant
d’entreprendre ce qui constitue la concrétisation de
toutes ses idées sur l’habitat : les unités d’habitations.
En 1952, il réalise la première construction de ce type
à Marseille : la Cité Radieuse. Quatre autres suivront.
Au cours des années cinquante, à la demande des auto-
rités indiennes, Le Corbusier dessine le plan directeur
de la ville de Chandigarh et construit l’essentiel des
bâtiments administratifs de cette nouvelle capitale du
Penjab.
Il meurt en 1965 et laisse derrière lui une œuvre consi-
dérable qui marquera plusieurs générations d’archi-
tectes.
Principales réalisations en France :Villa Savoye à Poissy,
Pavillon Suisse à la Cité Universitaire de Paris, Unités
d’Habitations de Marseille-Michelet, de Rezé, de Briey-
en-Forêt, de Firminy ; Chapelle de Ronchamp, Couvent
de la Tourette.
Porte
Bouguenais
Porte
de Rezé
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RN 137
La Maison
Radieuse
N° 52
N° 49
Le Corbusier
Visites sur rendez-vous :
02 40 84 43 84
Éditeur : Ville de Rezé,
en partenariat avec l’Association
des habitants de la Maison
Radieuse et Loire-Atlantique
Habitations.
Financement : Ville de Rezé,
Loire-Atlantique Habitations.
Texte : Dominique Viennet
Maquette :
Le Square Deshoulières
Impression : Piriou Imprimeur
Photo de couverture :
Philippe Ruault
Photo dernière page :
Stephan Ménoret
Réédition juin 2003
Un des bâtiments administratifs de la ville de Chandigarh
Photo : Martin Van den Oever
Photo : Philippe Ruault
Photo : Mireille Janvier
La troisième
rénovation a été
réalisée de 1996 à
1997. Les loggias
ont été réalisées
à l’identique
de l’original.
Rénovation Le Corbusier
«En connaissez vous des immeubles avec
près de 300 appartements en duplex de types
différents, répartis sur 17 niveaux ? »
Il en existe seulement cinq au monde : Marseille, Rezé,
Briey-en-Forêt, Berlin et Firminy. Ce sont les unités
d’habitation de Le Corbusier. Ses fameux villages à la
verticale. «L’unité d’habitation, ça c’est un navire»
disait-il «chacun y aura la liberté complète de ses
gestes, l’isolement de son foyer, chacun sera libre
«Je crois qu’il a réussi son entreprise. Au fond, sa
préoccupation dominante, c’était la quête constante
de l’harmonie au service de l’homme : organisation
complémentaire de la vie individuelle et collective
(le principe du binôme), continuité entre la ville et la
campagne (toutes ses unités d’habitation baignent
dans un environnement naturel), composition entre
l’espace, la lumière et les couleurs, relation des formes
et des proportions
Le Corbusier considérait que l’architecture influence
le comportement des êtres humains.
«La construction, – disait-il – c’est fait pour tenir,
l’architecture pour émouvoir».
Conformément à cet état d’esprit, Le Corbusier a mis
au point une gamme de mesures harmoniques
«à l’échelle humaine» : le Modulor.
La plupart de ses réalisations sont ainsi basées sur les
proportions d’un homme d’une hauteur de 1, 83 m
dont la main s’élève à 2,26 m du sol (niveau du
plafond). Son assise est fixée à 0,70 m et il s’accoude
debout à 1,13 m ou 1,40 m.
Photo : Y. Caillaud
La Maison radieuse
contexte historique
La vie
«J’ai vu construire l’immeuble, pierre par pierre,
la tour centrale, les ailes, la terrasse… Du costaud. Du
nouveau. Co-lo-ssal, époustouflant ! Pensez, en 1953, au
cœur d’une terrible crise du logement, voilà qu’un archi-
tecte, une petite commune et une société d’HLM prenaient
le risque de bâtir une maison révolutionnaire de 105 m de
long, 19 m de large et 52 m de haut. 294 appartements
dans un immense paquebot immobile et silencieux.
Honnêtement, vu de loin, la réalisation nous laissait plutôt
perplexes. Normal, on n’avait jamais vu ça. Et puis ça
faisait sacrément contraste avec la campagne environnante.
Notez, quand on nous a proposé d’emménager dans ces
lieux confortables, on n’a pas eu de mal à quitter notre
logement humide et mal éclairé de Trentemoult.
Pour nous la décision a été d’autant plus facile à prendre
que la Maison Familiale proposait une séduisante formule
de « location-coopérative ».
Et ça a formidablement marché, jusqu’à ce que la loi
Chalandon ne vienne tout changer (en interdisant ce type
de location). En 1972, il a fallu choisir entre devenir immé-
diatement propriétaire, rester pour toujours locataire ou
quitter le navire. Beaucoup sont partis, déçus, en laissant
derrière eux un immeuble où l’esprit familial, coopératif,
sinon communautaire, prévalait sur toute autre considéra-
tion. Aujourd’hui, 2/3 des habitants sont locataires, les
autres propriétaires
L’époque a changé, mais la Maison Le Corbusier génère
encore une atmosphère radieuse. L’immeuble a gardé
l’âme que les premiers habitants ont su lui donner et dans
les duplex du village vertical le magnétisme architectural
de Charles-Edouard Jeanneret opère toujours.
«Vous vous rendez compte les enfants ?
Il y a de l’eau chaude et même une douche ! ». Je n’oublierai
jamais le bonheur de mon épouse lorsqu’elle a réalisé de quel
confort nous allions bénéficier. Elle en pleurait. Il faisait chaud,
l’appartement sentait bon le bois, on était bien tout simplement.
Au début, on passait des heures à écouter le silence. Autant de
logements dans le même immeuble et pas un bruit chez nous.
L’isolation acoustique à ce point on ne savait pas que ça pouvait
exister !
Marie-Madeleine a tout de suite aimé la vie dans notre nouvel-
le maison habitée uniquement par des jeunes. Chaque matin,
110 gamins montaient à l’école maternelle, en ascenseur, sur le
toit de l’immeuble. Forcément ça favorisait les contacts entre
parents.
A vrai dire, c’est l’association des habitants, créée en 1955, qui a
imprimé la vie communautaire dans les étages. Elle a acheté une
machine à laver et une cireuse. On se les passait d’appartement
en appartement. Pour la télévision: tout le monde dans la même
salle ! Chacun arrivait par les ascenseurs avec sa propre chaise.
Épique ! Surtout le jeudi avec 120 gosses assis par terre, heu-
reux. Et puis il y a eu la création de la bibliothèque et des clubs
photo, langues étrangères, nature, etc. sans parler des fêtes, des
pique-niques en commun et des concours de pêche dans l’étang
au pied de l’immeuble.
Côté ambiance on ne pouvait pas trouver mieux.Tous les jeunes
se connaissaient, les habitants se côtoyaient aisément, toutes
professions confondues. Chacun y trouvait son compte : les
«cols blancs» pour l’originalité des lieux, les ouvriers pour un
confort financièrement accessible. En somme c’était le bonheur,
ni plus ni moins.
D’ailleurs ce sont les
habitants eux-mêmes qui
ont proposé le nom de
«Maison Radieuse» pour
l’immeuble. Le Corbusier a
tout de suite accepté.
«L’objet de l’architecture»
disait-il, «concerne les
hommes, leurs besoins
pratiques et leurs aspira-
tions morales, psycholo-
giques et esthétiques».
La vie
historique
Caractéristiques
La Maison
Radieuse
L’école sur le toit
Appartement témoin : cuisine, escalier menant
aux chambres à coucher
L’immeuble mesure 105m de long, 19 m de large, 52m de haut et com-
prend 294 appartements (de une à six pièces) répartis sur 17 niveaux. Ce
sont en majorité des duplex avec ouvertures sur les deux façades Est et
Ouest. Trois ascenseurs desservent 6 rues intérieures.
Les planchers en béton armé, la technique des dalles flottantes et l’utilisa-
tion du béton cellulaire assurent une bonne insonorisation phonique. Une
ventilation mécanique installée depuis l’origine assainit le logis.
Chaque foyer dispose de services communs : école maternelle sur le toit-
terrasse, bibliothèque, parc de 6 hectares, jeux pour enfants, terrain de
sport, étang au pied de l’immeuble construit sur pilotis.
Photo : D.R.
Photo : D.R.
Photos : Lucien Hervé
Photo : Philippe Ruault
Caractéristiques de la Maison Radieuse
Construction de la Maison radieuse, 1953-1954
Le contexte
Tranches de vie
dans
les années 50
«Ici, si je veux, depuis chez moi, je ne vois que le ciel,
la Loire et l’horizon, à l’Est comme à l’Ouest. Mon apparte-
ment, en duplex, donne ouverture sur les deux façades de
l’immeuble, avec en prime une loggia à chaque extrémité et
des baies vitrées dans toutes les pièces. Autant vous dire que
la clarté ne manque pas. Elle pénètre le logement sur toute
sa longueur : 16 m ! D’une saison à l’autre c’est le confort.
Le Corbusier a tout prévu. Les brise-soleil installés en façades
laissent passer la lumière en hiver et la retiennent en été.
Côté tranquillité, pas de problème, le béton cellulaire assure
une insonorisation parfaite. Chacun chez soi a la certitude
de n’être ni vu ni entendu.
Le respect de la vie individuelle n’empêche pas pour autant
la vie en collectivité.
L’école sur le toit, la bibliothèque, les clubs de l’association des
habitants et les rues de l’immeuble sont nos points quotidiens
de rencontres.
Pour les enfants ? Une aire de jeux nichée dans un parc de
6 hectares situé au pied de l’immeuble, lui-même construit sur
pilotis.
Du coup, mes voisins d’en face, ce sont les arbres et les
oiseaux. Il savait bien, Le Corbusier, que l’être humain a besoin
de contact avec la nature, où qu’il soit. «Les matériaux de
l’urbanisme», disait l’architecte, «ce sont le soleil, le ciel,
les arbres, l’acier, le ciment, dans cet ordre et dans cette
hiérarchie».
Appartement descendant
Appartement montant
La Maison radieuse
contexte historique
La vie
«J’ai vu construire l’immeuble, pierre par pierre,
la tour centrale, les ailes, la terrasse… Du costaud. Du
nouveau. Co-lo-ssal, époustouflant ! Pensez, en 1953, au
cœur d’une terrible crise du logement, voilà qu’un archi-
tecte, une petite commune et une société d’HLM prenaient
le risque de bâtir une maison révolutionnaire de 105 m de
long, 19 m de large et 52 m de haut. 294 appartements
dans un immense paquebot immobile et silencieux.
Honnêtement, vu de loin, la réalisation nous laissait plutôt
perplexes. Normal, on n’avait jamais vu ça. Et puis ça
faisait sacrément contraste avec la campagne environnante.
Notez, quand on nous a proposé d’emménager dans ces
lieux confortables, on n’a pas eu de mal à quitter notre
logement humide et mal éclairé de Trentemoult.
Pour nous la décision a été d’autant plus facile à prendre
que la Maison Familiale proposait une séduisante formule
de « location-coopérative ».
Et ça a formidablement marché, jusqu’à ce que la loi
Chalandon ne vienne tout changer (en interdisant ce type
de location). En 1972, il a fallu choisir entre devenir immé-
diatement propriétaire, rester pour toujours locataire ou
quitter le navire. Beaucoup sont partis, déçus, en laissant
derrière eux un immeuble où l’esprit familial, coopératif,
sinon communautaire, prévalait sur toute autre considéra-
tion. Aujourd’hui, 2/3 des habitants sont locataires, les
autres propriétaires
L’époque a changé, mais la Maison Le Corbusier génère
encore une atmosphère radieuse. L’immeuble a gardé
l’âme que les premiers habitants ont su lui donner et dans
les duplex du village vertical le magnétisme architectural
de Charles-Edouard Jeanneret opère toujours.
«Vous vous rendez compte les enfants ?
Il y a de l’eau chaude et même une douche ! ». Je n’oublierai
jamais le bonheur de mon épouse lorsqu’elle a réalisé de quel
confort nous allions bénéficier. Elle en pleurait. Il faisait chaud,
l’appartement sentait bon le bois, on était bien tout simplement.
Au début, on passait des heures à écouter le silence. Autant de
logements dans le même immeuble et pas un bruit chez nous.
L’isolation acoustique à ce point on ne savait pas que ça pouvait
exister !
Marie-Madeleine a tout de suite aimé la vie dans notre nouvel-
le maison habitée uniquement par des jeunes. Chaque matin,
110 gamins montaient à l’école maternelle, en ascenseur, sur le
toit de l’immeuble. Forcément ça favorisait les contacts entre
parents.
A vrai dire, c’est l’association des habitants, créée en 1955, qui a
imprimé la vie communautaire dans les étages. Elle a acheté une
machine à laver et une cireuse. On se les passait d’appartement
en appartement. Pour la télévision: tout le monde dans la même
salle ! Chacun arrivait par les ascenseurs avec sa propre chaise.
Épique ! Surtout le jeudi avec 120 gosses assis par terre, heu-
reux. Et puis il y a eu la création de la bibliothèque et des clubs
photo, langues étrangères, nature, etc. sans parler des fêtes, des
pique-niques en commun et des concours de pêche dans l’étang
au pied de l’immeuble.
Côté ambiance on ne pouvait pas trouver mieux.Tous les jeunes
se connaissaient, les habitants se côtoyaient aisément, toutes
professions confondues. Chacun y trouvait son compte : les
«cols blancs» pour l’originalité des lieux, les ouvriers pour un
confort financièrement accessible. En somme c’était le bonheur,
ni plus ni moins.
D’ailleurs ce sont les
habitants eux-mêmes qui
ont proposé le nom de
«Maison Radieuse» pour
l’immeuble. Le Corbusier a
tout de suite accepté.
«L’objet de l’architecture»
disait-il, «concerne les
hommes, leurs besoins
pratiques et leurs aspira-
tions morales, psycholo-
giques et esthétiques».
La vie
historique
Caractéristiques
La Maison
Radieuse
L’école sur le toit
Appartement témoin : cuisine, escalier menant
aux chambres à coucher
L’immeuble mesure 105m de long, 19 m de large, 52m de haut et com-
prend 294 appartements (de une à six pièces) répartis sur 17 niveaux. Ce
sont en majorité des duplex avec ouvertures sur les deux façades Est et
Ouest. Trois ascenseurs desservent 6 rues intérieures.
Les planchers en béton armé, la technique des dalles flottantes et l’utilisa-
tion du béton cellulaire assurent une bonne insonorisation phonique. Une
ventilation mécanique installée depuis l’origine assainit le logis.
Chaque foyer dispose de services communs : école maternelle sur le toit-
terrasse, bibliothèque, parc de 6 hectares, jeux pour enfants, terrain de
sport, étang au pied de l’immeuble construit sur pilotis.
Photo : D.R.
Photo : D.R.
Photos : Lucien Hervé
Photo : Philippe Ruault
Caractéristiques de la Maison Radieuse
Construction de la Maison radieuse, 1953-1954
Le contexte
Tranches de vie
dans
les années 50
«Ici, si je veux, depuis chez moi, je ne vois que le ciel,
la Loire et l’horizon, à l’Est comme à l’Ouest. Mon apparte-
ment, en duplex, donne ouverture sur les deux façades de
l’immeuble, avec en prime une loggia à chaque extrémité et
des baies vitrées dans toutes les pièces. Autant vous dire que
la clarté ne manque pas. Elle pénètre le logement sur toute
sa longueur : 16 m ! D’une saison à l’autre c’est le confort.
Le Corbusier a tout prévu. Les brise-soleil installés en façades
laissent passer la lumière en hiver et la retiennent en été.
Côté tranquillité, pas de problème, le béton cellulaire assure
une insonorisation parfaite. Chacun chez soi a la certitude
de n’être ni vu ni entendu.
Le respect de la vie individuelle n’empêche pas pour autant
la vie en collectivité.
L’école sur le toit, la bibliothèque, les clubs de l’association des
habitants et les rues de l’immeuble sont nos points quotidiens
de rencontres.
Pour les enfants ? Une aire de jeux nichée dans un parc de
6 hectares situé au pied de l’immeuble, lui-même construit sur
pilotis.
Du coup, mes voisins d’en face, ce sont les arbres et les
oiseaux. Il savait bien, Le Corbusier, que l’être humain a besoin
de contact avec la nature, où qu’il soit. «Les matériaux de
l’urbanisme», disait l’architecte, «ce sont le soleil, le ciel,
les arbres, l’acier, le ciment, dans cet ordre et dans cette
hiérarchie».
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